4 octobre 2008

Le long déclin des USA

KRUGMAN Paul, Au bord du gouffre, ContreInfo
Il devient de plus en plus évident que cet effondrement de la finance se propage sur Main Street. Les petites entreprises ont du mal à lever des fonds et se voient couper leurs lignes de crédit. Les chiffres de l’emploi et de la production industrielle se sont fortement aggravés, ce qui suggère qu’avant même la chute de Lehman l’économie, déjà en ralentissement depuis l’an dernier, était en chute libre.

La Chambre va probablement voter vendredi sur la dernière version du plan de sauvetage. A l’origine, c’était le plan Paulson, puis c’est devenu le plan Paulson Dodd-Frank. Désormais il faudrait sans doute écrire le plan Paulson-Dodd-Frank-Clientèlisme (la dernière version contient encore plus de cadeaux fiscaux que la précédente).

Le plan Paulson a clairement été rédigé dans la précipitation et la confusion. Et les fonctionnaires du Trésor n’ont toujours pas fourni d’explication claire sur la façon dont ce plan est censé fonctionner. Sans doute parce qu’ils n’ont eux-mêmes aucune idée de ce qu’ils font.

La solution à nos difficultés économiques devra d’abord passer par un sauvetage du système financier bien mieux conçu. [...] Il est pourtant difficile d’imaginer que l’administration Bush franchisse ce pas.

Nous avons également désespérément besoin d’un plan de relance économique pour lutter contre la baisse de la consommation et de l’emploi. [...] Il est difficile d’imaginer que l’administration Bush sur le départ crée une agence chargée de grands travaux à l’image de ce qu’avait fait Roosevelt.

Si l’élection n’est plus éloignée que de 32 jours, il faudra cependant près de quatre mois jusqu’à ce que la prochaine administration entre en fonction. Bien des choses peuvent - et vont sans doute - mal se passer durant ces quatre mois.

Publication originale New York Times - International Herald Tribune.
Article commenté par Dedefensa.

Commentaires : Ce professeur d’économie défend le plan Paulson, mais regrette seulement la lenteur de réaction de l'administration pour sauver Wall Street avec l'argent des travailleurs américains et des autres pays (grâce à l'exportation de la dette).
C'est un des rares analystes des médias dominants qui soulignent que la crise financière s'accompagne d'une crise politique, mais il se garde bien de remettre en cause la politique militaire des États-Unis en Irak et en Afghanistan qui amplifie les crises.


GOLUB Philip S., Le long déclin, Alternatives International
Les Etats-Unis ont en général agi depuis 1945 de façon non prédatrice en Europe. Ils y ont assumé un rôle hégémonique, suivant la définition gramscienne, plutôt qu’impérialiste, c’est-à-dire le rôle d’un acteur central dans un ordre interétatique hierachisé mais caractérisé pour l’essentiel par la coopération et le consentement. Hautement institutionnalisé avec les Etats-Unis à son sommet, l’ordre translatlantique post-1945 se distinguait en ligne générale par la mutualisation des intérêts de ses différentes composantes, les élites des Etats subordonnés étant plutôt consentantes face à une autorité jugée légitime et leur fournissant des biens publics internationaux : paix, sécurité et stabilité économique.

Le premier cycle : imbrications impériales et pulsions impérialistes L’expansionnisme américain s’inscrit dans le mouvement général d’expansion occidentale et dans les rythmes de la transformation capitaliste glocale du XIXe et du XXe siècles.

L’expansionnisme territorial et commercial des Etats-Unis a débouché à la fin du XIXe siècle à une forte pulsion impérialiste. [...] Brooks Adams, personnage influent partisan d’un empire américain mondial, estimait que « l’impérialisme était la passion la plus noble qui ait jamais enflammé l’esprit humain » et prévoyait, avec raison, que les Etats-Unis allaient bientôt obtenir la « suprématie » économique et commerciale mondiale. Selon la formule d’un journaliste de premier plan : « Nous sommes une grande république impériale destinée à exercer une influence déterminante sur l’humanité et à façonner l’avenir du monde comme aucune autre nation, y compris l’empire romain, ne l’a jamais fait ».

Le deuxième cycle : supplanter la Grande-Bretagne et l’Europe Là où les élites étatsuniennes ont divergé n’était pas sur la question de savoir si l’empire international était souhaitable ou non (car pour la majorité écrasante il l’était), mais sur la question de savoir s’il fallait l’établir en partenariat avec l’empire britannique ou tout seuls. [...] Le centre de gravité économique du monde se déplaçait vers les Etats-Unis qui assuraient en 1900 environ 23,5% de la production manufacturière du monde (pour la Grande-Bretagne : 18,5%) et qui pouvaient se vanter d’un PNB équivalent à celui de la Grande-Bretagne, la France et l’Allemagne réunies.

La première guerre mondiale, la dépression mondiale du début des années 1930, la formation de blocs protectionnistes et l’effondrement du commerce international ont ouvert la voie à la deuxième guerre et à l’émergence, selon l’expression de Karl Polanyi, de « nouveaux empires dans une mer de sang ». Les contours du nouvel empire américain – empire mondial de capital soutenu par une structure militaire planétaire – étaient devenus apparents avant même l’entrée des Etats-Unis en guerre en 1941.

Les Etats-Unis ont ainsi soutenu pendant un temps certains Etats impériaux européens en les intégrant dans des sphères régionales de gestion du nouveau système mondial. [...] Dans le même temps, les Etats-Unis fixaient des limites strictes à l’action souveraine des Etats impériaux européens. Lors de la crise de Suez de 1956, ils ont signifié à la Grande-Bretagne et à la France les limites précises de leur autonomie d’après-guerre.

Les Etats-Unis ont, tout au long de la guerre froide, cautionné de façon consistante l’autoritarisme ou même le despotisme chez leurs Etats-clients et leurs protectorats extra-européens. Si la Pax Americana a encouragé et soutenu le pluralisme politique en Europe (la Grèce, l’Espagne et le Portugal étant des exceptions notables), dans les tiers-mondes elle a préféré s’appuyer sur des dictatures et des régimes autoritaires.

Depuis la deuxième guerre mondiale le Golfe arabo-persique a joué un rôle de plus en plus important dans la Pax Americana. [...] Aujourd’hui, le Golfe arabo-persique est devenu une des clés de voûte de l’édifice impérial, comparable à l’Inde pour l’empire britannique. Cela ne veut pas dire que le pétrole constitue la seule variable explicative de l’aventure coloniale désastreuse de l’administration Bush en Irak : l’invasion et l’occupation de ce pays faisait partie d’un effort beaucoup plus ambitieux pour établir un ordre mondial sous le contrôle disciplinaire exclusif des Etats-Unis.

Le braquage du siècle !

Evolution Dow Jones sur 1 an

Evolution Dow Jones sur 5 ans

Source : Yahoo! Finance


USA : le plan de sauvetage bancaire promulgué par le président Bush, Yahoo! Actualités
Le président américain Bush a immédiatement jugé ce plan vital "pour aider l'économie américaine à survivre à la tempête financière" mais a averti que "cela prendrait du temps" avant que les effets du plan ne se fassent sentir.


Un vote de résignation acheté par une corruption massive, Dedefensa
Le vote a été obtenu par les procédés habituels, c’est-à-dire qu’ils ont été achetés littéralement par des promesses de subventions locales, sectorielles, etc., selon l’habitude du système, c’est-à-dire une opération de corruption massive.


Revue de presse française, NouvelObs
LIBERATION
La tourmente de ces derniers jours sonne le glas d'une hégémonie idéologique, celle des maîtres à penser du laisser-faire économique. Hayek et ses épigones ont une nouvelle fois échoué. Le vieux Keynes prend une revanche amère et éclatante. Il est temps de reconnaître officiellement que la dépense publique n'est pas toujours un gaspillage (elle sert en tout cas à sauver le système bancaire en perdition). Il est temps d'admettre que la réglementation n'est pas toujours diabolique, surtout lorsqu'elle a pour but de prévenir les "crises systémiques".

LA NOUVELLE REPUBLIQUE DU CENTRE-OUEST
Alors, heureuses ? Flux financiers coupés, capacités financières haletantes, la France retenait son souffle. Rongée par ses angoisses bancaires, l'Europe déboussolée allait s'abandonner, dès ce matin à Paris, à un G4 vraisemblablement impuissant. Finalement, devant le dieu des banques -- qu'il soit loué, s'il respire encore ! -- Henry Paulson et Oncle Sam se sont dit " oui " hier soir ! Après le coup de tonnerre du "non", lundi dernier, spectaculaire et ravageur "coïtus interruptus", renvoyant à la Maison Blanche son matelas de 700 milliards de dollars et aux enfers les économies du monde entier, le coup de foudre du "oui", hier soir, était un retournement indispensable pour tous.


Crise à Wall Street ? Warren Buffet fait ses courses, Rue89
Dans un entretien à la chaîne CNBC, le célèbre investisseur explique qu'il investirait bien à hauteur de 1% dans le plan Paulson de sauvetage des banques de 700 milliards de dollars. Investir ? C’est bien le mot qu’il a employé. Car il ne faut pas selon lui voir ses 700 milliards de dollars comme des dépenses fédérales mais comme un investissement dont les retours se matérialiseront dans cinq à dix ans.


Crise financière ? Le braquage du siècle !, Bakchich
Tous les gouvernements contributeurs ont un flingue sur la tempe : «Vous casquez ou on s’arrange pour que tout s’écroule, avec les dizaines de millions de chômeurs, les suicides en masse et l’extension radicale de la misère que ça va entraîner !» La bourse ou la guerre mondiale ?

La lutte des classes reprend ses droits en Amérique latine, où l’Oncle Sam a de plus en plus de mal à tenir ces peuples bouillonnants, elle s’invite à Wall Street avec le refus du plan Paulson par tous les syndicats américains qui font pression sur le Congrès, elle couve dans cette Europe qui voit son industrie partir en vrille et son porte-monnaie en déliquescence, en Inde et en Chine qui connaissent chaque jour des émeutes ouvrières et paysannes d’une violence à faire passer la CGT pour le pire des syndicats jaunes…


Libéralisme et Etat-Providence, Attac Wallonie-Bruxelles
Libéralisme pour les pauvres et Etat-Providence pour les riches : la faillite des analystes financiers.

Le plan de sauvetage du gouvernement américain inaugure une nouvelle forme de capitalisme, où les profits seront toujours privatisés et les pertes toujours mutualisées, un système dans lequel le capital est toujours gagnant, et la collectivité toujours perdante. Au lieu de se féliciter de ce plan de sauvetage, ne peut-on pas se demander si celui-ci est juste et approprié ? Ne va-t-il pas dédouanner les responsables de leurs actes ? Ne donne-t-on pas au marché un message d’impunité ? ... Beaucoup d’analystes, une fois de plus, restent muets face à ces interrogations. Le plan américain est la seule solution de relance possible, croient-ils aujourd’hui. Demain, ils se rendront compte que ce plan n’aura contribué qu’à appauvrir l’Etat sans relancer l’économie. Et si pour une fois, l’Etat remboursait les dettes des gens, plutôt que celles des banques. A côté de la déroute du secteur bancaire, cette crise marque aussi la débâcle des analyses des spécialistes.


La gabegie capitaliste, La Bataille socialiste
La crise , c’est ainsi que le capitalisme désigne ses périodes d’indigestion du profit accumulé d’un argent volé aux producteurs et aux consommateurs ; qui par ailleurs sont les mêmes. Des sommes faramineuses sont sorties des circuits habituels et provoquent la crise. Ce qui manque provoque l’insolvabilité de quelques banques et un effet « domino » sur d’autres . C’est un « phénomène en chaîne » qui n’en est pas un, puisque cela ne tient pas du miracle ni du surnaturel. Ou est donc passé l’argent disparu ? Dans des coffres de quelques uns qui ne sont pas recherchés, ni inculpés pour le détournement et le vol de plusieurs centaines de milliards de dollars. Les PDG de quelques unes de ces banques complices d’opérations maffieuses seront grassement remerciés avec des « parachutes dorés » alors qu’il conviendrait, comme pour tout délinquant d’être en garde à vue et pour le moins d’être saisis de leurs biens. Au lieu de rechercher les vrais coupables et leurs complices politiques, les biens pensants stigmatisent les pauvres qui s’endettent sans pouvoir rembourser et qui seraient les responsables de la crise. Qui va payer ? Les victimes du systèmes, directes et indirectes, les salariés, les contribuables sans « bouclier » les consommateurs et dernièrement annoncé l’épargne populaire au travers du livret A, au détriment de l’habitat toujours populaire des HLM. Des détournements de sommes colossales sont également organisées pour renflouer les sommes volées par ce qu’il convient d’appeler « la racaille financière » car n’est pas racaille qui l’on croit.

La crise entraîne la cohorte des pleureuses avec leurs incantations à la régulation et leurs prières à la déesse déontologie et tous les vœux pieux à la moralisation du capitalisme dont on sait depuis sa naissance qui ne date pas d’hier qu’il est antinomique avec toutes ces prétentions. Nous n’en sommes pas à la première crise, elles se répètent au rythme des profits et des opérations spéculatives, de structurations en restructurations et la mondialisation libérale est une phase prévisible de crise de grande envergure. Il n’y a que les imbéciles et les coquins pour le nier et ces derniers mobilisent toujours les premiers et en toutes circonstances. A qui vont-ils déclarer la guerre pour dégager des ressources nouvelles et de nouveaux profits tout en durcissant la guerre de l’exploitation sociale et humaine.

Vouloir réguler le capitalisme, c’est prétendre réguler la gabegie, c’est maintenir le système qui la produit tout en limitant ses excès mais gabegie tout de même. Encore faut-il préciser avec quels moyens internationaux dans une « économie libérée de toute contrainte » comme le précise le TCE au niveau européen. Tous ceux là n’ont cessé de vanter les mérites du marché. Se sont-ils trompés ou ont-ils menti, dans les deux cas ils sont disqualifiés pour proposer des solutions de régulation et de moralisation dans la même veine de leurs affirmations antérieures. Les gabegies du capitalisme, on sait toujours qui en dernier comme en premier ressort paye.

3 octobre 2008

"Je me suis trompé pendant 35 ans"

Olmert : "Je me suis trompé pendant 35 ans", Continental New
Sur les compromis territoriaux avec les Palestiniens

« Nous nous trouvons à un moment où il faut décider, mais nous ne sommes pas prêts à nous l’avouer à nous-mêmes. Mais c’est ce que nous devons faire. Nous devons arriver à un accord avec les Palestiniens, ce qui veut dire que nous devons concrètement nous retirer de presque tous les territoires si ce n’est de tous. Nous garderons un petit pourcentage de ces territoires, mais il faudra donner aux Palestiniens une équivalence territoriale, car sans cela il n’y aura pas la paix. Cela comprend aussi Jérusalem. Avec des solutions particulières que j’imagine bien pour le Mont du Temple et les Lieux Saints et historiques. Toute personne qui parle sérieusement de la sécurité à Jérusalem et veut que les bulldozers et les pelleteuses ne viennent pas couper les jambes de ses meilleurs amis, comme cela s’est passé avec un de mes amis proches (l’avocat Shouki Karmer) qui a perdu une jambe parce qu’un bulldozer l’a renversé, doit renoncer à des parties de Jérusalem. »

« Celui qui veut garder toute la ville de Jérusalem doit intégrer 270 000 habitants arabes à l’intérieur des frontières d’Israël. C’est impossible. Alors il faut décider. Et cette décision est difficile, terrible. Elle est à l’opposé de notre instinct naturel, de nos émotions, à l’opposé de notre mémoire collective et à l’opposé de la prière du peuple d’Israël pendant 2000 ans. Je suis le premier à avoir voulu imposer la souveraineté israélienne à toute la ville. Je le confesse. Je ne viens pas pour justifier rétroactivement ce que j’ai fait pendant 35 ans. Pendant de nombreuses années, je n’étais pas prêt à regarder la réalité dans sa profondeur. »

Sur le processus de paix avec la Syrie

« Comme avec les Palestiniens, avec la Syrie il nous faut nous décider. Je veux voir un homme sérieux en Israël pouvant croire qu’il est possible de faire la paix avec les Syriens sans renoncer en fin de parcours au plateau du Golan. »
« Je pose la question : Supposons que dans un an ou deux éclate une guerre régionale et que nous soyons obligés de nous affronter militairement avec la Syrie. Nous sommes plus forts qu’eux. Israël est le pays le plus fort du Proche-Orient. Nous avons la capacité de nous confronter avec chacun de nos ennemis ensemble et de gagner. Mais je m’interroge : Que se passera-t-il lorsque nous aurons vaincu ? Tout d’abord, nous aurons payé cher et cela aura fait mal. Après avoir payé ce prix, que leur dirons-nous ? Venez ! Parlons. Et que nous dirons les Syriens ? ‘Discutons du plateau du Golan’. Alors je pose la question : Pourquoi entrer en guerre avec les Syriens, causer des pertes, des destructions, des dommages pour arriver au même résultat sans payer un prix aussi lourd ? »

« Quand il n’y a pas de paix, les risques d’une guerre sont toujours plus importants. Quand un homme est assis sur le fauteuil de Premier ministre, il doit s’interroger sur les efforts à fournir : Faire des efforts en vue de la paix ou faire en sorte d’être toujours le plus fort en vue de gagner la guerre ? »

« C’est vrai qu’un accord avec la Syrie est un risque. Celui qui veut agir sans prendre de risques qu’il aille habiter en Suisse ou en Islande. Celui qui veut faire la paix au Proche-Orient doit savoir prendre des risques. Je ne propose pas de prendre des risques inconsidérés, je propose de prendre des risques qui peuvent apporter des changements fondamentaux. »

A propos de l’Iran : « Adopter un profil bas »

« L’Iran est une très grande puissance qui constitue une menace pour la communauté internationale. Celle qui est chargée du dossier iranien est d’abord et avant tout la communauté internationale. Parfois la folie des grandeurs et la perte des proportions se révèlent dans certaines de nos prises de paroles. Nous sommes un pays qui a perdu le sens de qui il est réellement. Si nous disons que les Etats-Unis, la Russie, la Chine, la Grande Bretagne et l’Allemagne ne savent pas comment agir, mais que nous, nous agirons, c’est que nous avons perdu le sens des proportions. Je le dis, soyons plus sobres. Faisons ce que nous sommes capables de faire avec nos capacités réelles, c’est-à-dire d’agir avec la communauté internationale. »

Etat trop providence pour Wall Street

Obama s’envole dans les sondages, RFI
« Il est difficile de trouver une course présidentielle moderne où l’on constate un écart aussi considérable, rapide et net, en fin de campagne », estime Peter Brown, le vice-directeur de l’institut de sondage de l’université de Quinnipiac. « Au cours des 20 derniers jours, le sénateur Obama est passé de sept points de retard à huit points d’avance en Floride, il a accentué son avance dans l’Ohio et mène de 15 points en Pennsylvanie.

Pour John McCain, la situation se complique sérieusement. Il semble désormais presqu’impossible pour le candidat républicain de retourner la situation en sa faveur. C’est en tout cas ce que pensent certains analystes. « Pour John McCain, ça sera maintenant effectivement difficile de revenir, parce qu’on ne voit pas ce qui pourrait lui permettre un tel retour, à part une nouvelle crise internationale qui ferait que la présence de John McCain à la Maison Blanche paraîtrait indispensable pour beaucoup d’Américains », explique Charlotte Lepri de l’IRIS. Un avis partagé par Peter Brown : « Il n’y a pas d’exemple d’un tel retour au cours des 50 dernières années ».


LEPRI Charlotte, Palin/Biden : un débat sans conséquence ?, IRIS
  • La presse ironise beaucoup sur les nombreuses gaffes des deux candidats à la vice-présidence. Quel est leur impact sur la campagne américaine ?
  • Dans ce contexte, que doit-on retenir du débat ayant opposé Joe Biden à Sarah Palin ?
  • Barack Obama semble aujourd’hui être le grand favori pour devenir le prochain président américain. Pensez-vous que John McCain puisse encore gagner cette élection ?


  • L'échec du plan Paulson à la Chambre des représentants : douloureux révélateur des tensions futures, IRIS
    Le plan de sauvetage du secteur financier n’est que le premier volet d’un vaste plan d’interventionnisme de l’Etat dans l’économie américaine. Parallèlement, les observateurs le reconnaissent de façon unanime, le chômage va augmenter, la consommation reculer, et la confiance continuer de sombrer. Bref, plus personne ne nie aujourd’hui que les Etats-Unis sont en crise, que cette crise sera longue et difficile, et que les mesures adoptées par la future administration devront être importantes. Certains parlent d’un nécessaire New Deal, en référence à la politique économique et sociale de Franklin Roosevelt pour répondre à la crise économique des années 30.


    Les autorités politiques américaines approuvent le plan de sauvetage, Chronique Agora
    Selon la théorie -- et là, nous employons un terme trop flatteur, car il n'y a pas de théorie... rien que des gens qui prennent leurs désirs pour des réalités -- les autorités gardent la tête froide tandis que tout le monde panique. Les huiles de Wall Street déclarent désormais que les prix de leurs actifs "n'ont aucun sens". Selon eux, M. le Marché a perdu son sang-froid. Voilà pourquoi de vaillants fonctionnaires américains sont censés pouvoir racheter les produits de Wall Street à si bon prix qu'ils sont quasiment assurés d'en tirer profit.

    Crise ou crises ?

    Revue de presse française, NouvelObs
    LE PROGRES DE LYON
    Ca y est, le gros mot est lâché: récession. Du bout des lèvres, certes, et seulement par l'Insee. Il n'empêche, on y est. L'Insee annonce le même jour une hausse du chômage. Et pour ceux qui douteraient encore, qui auraient l'illusion d'observer de loin la dépression des autres, Jean-Claude Trichet enfonce le clou: la crise est d'une ampleur jamais vue depuis la Seconde Guerre mondiale. Récession, chômage, guerre... Les mots s'empilent et s'entrechoquent, les mots font peur.


    Récesssion, un mot tabou, Le Monde - Dailymotion
    Récesssion, C dans l'air - France 5
    «Récession» ? Où ça ?, Libération
    Le gouvernement et la majorité UMP ont tenté hier soir de minimiser les chiffres de l’Insee prévoyant une baisse de 0,1 point au troisième trimestre, après 0,3 point de baisse au deuxième trimestre, synonyme de récession – la récession est le plus souvent définie par au moins deux trimestres consécutifs de recul du PIB.


    REBOUR Thierry, Crise ou crises ?, Cafés Géographiques
    Depuis quelques mois, l’économie mondiale est entrée dans une phase de crise. Tout a commencé aux Etats-Unis par la crise immobilière dite des subprimes, laquelle s’est propagée vers l’Europe assez rapidement. Une forte inflation, en particulier des matières premières, coexiste avec une déprime paradoxale des prix industriels apparemment d’origine structurelle. En outre, des crises financières récurrentes qui vont de bulles spéculatives en krach secouent les indicateurs économiques mondiaux depuis plusieurs dizaines d’années.
    En réalité, il s’agit de l’interaction de plusieurs crises au tempo différent :
    une dépression longue qui touche essentiellement les pays développés depuis plus de 40 ans, où prix et volumes divergent à long terme ;
    une crise de surproduction (ou/et de sous-consommation), conséquence de la précédente, liée à un ajustement par le bas des revenus du travail dans le monde à cause de la concurrence internationale entre pays de niveau de développement très différent ; enfin une crise financière, de court terme mais dont les racines sont pluridécennales et dont la conséquence se manifeste par un surinvestissement sur les marchés des matières premières, en particulier les marchés à terme.

    La crise courte inflationniste qui résulte en partie de la crise des subprimes est, en fin de compte, une conséquence à long terme de la Crise des pays développés. C’est la logique inverse de la dynamique économique dans une partie du monde et dans l’autre qui en est la cause. Dans les pays développés, où le capital tente de contrecarrer les rendements décroissants par une baisse des volumes, la conséquence ultime en est pénurie et inflation. Dans les pays en voie de développement, les rendements croissants mêlés aux inégalités provoquent surproduction et déflation. La stratégie de fuite du capital des pays développés vers les pays sous-développés - en réponse à la crise longue des premiers - fait ainsi s’affronter deux logiques économiques strictement inverses. Aucune politique économique néo-classique n’est plus alors capable d’inverser ce processus.


    RAMONET Ignacio, La crise du siècle, Mémoire des luttes
    Le croulement de Wall Street est comparable, dans la sphère financière, à ce qu’a représenté, dans le champ géopolitique, la chute du mur de Berlin. Un changement de monde et un tournant copernicien. Selon Paul Samuelson, Prix Nobel d’économie : « Cette débâcle représente pour le capitalisme ce que la chute de l’URSS a été pour le communisme. » Une phase s’achève qui avait commencé, en 1981, par la formule de Ronald Reagan : « L’Etat n’est pas la solution, c’est le problème. »

    L’administration néolibérale du président Bush a été contrainte de renier ce dogme. Et de faire appel, massivement, à l’intervention de l’Etat. Les principales entités de crédit immobilier, Fannie Mae et Freddie Mac, ont été nationalisées.

    On fait payer aux pauvres les excentricités irrationnelles des banquiers, en les menaçant, au cas où ils rechigneraient à payer, de les appauvrir davantage.
    Malgré les réticences du Congrès, l’Administration américaine ne regarde pas à la dépense à l’heure de venir à la rescousse des « banksters » (banquiers gangsters). Il y a quelques mois, le président Bush a refusé de signer une loi qui offrait, pour un montant de 4 milliards d’euros, une couverture médicale à neuf millions d’enfants pauvres. « Une dépense inutile. », selon lui. Aujourd’hui, pour aider les ruffians de Wall Street, rien ne lui semble suffisant. C’est le monde à l’envers : le socialisme pour les riches, et le capitalisme sauvage pour les autres.

    Une telle débâcle se produit à un moment de vide théorique total des gauches européennes. Qui se retrouvent dépourvues de « plan B » pour tirer parti de la déconfiture. En particulier la social-démocratie, elle-même largement contaminée par les thèses néolibérales, et qui semble en état de choc, prise au dépourvue par la crise.


    Eclairage : la France, l'économie et la financiarisation depuis 1970, La Forge - Think Tank
    Celia FIRMIN, économiste, revient dans cet article sur la financiarisation du capitalisme en France et en Europe à l’oeuvre depuis les années 70. Un éclairage indispensable dans le contexte de la crise actuelle de ce capitalisme financier.


    Bienvenue à bord du Titanic financier !, Là-bas si j'y suis
    Entretien avec Frédéric Lordon autour de la crise venue d’Amérique qui s’approche à grands pas de l’Europe. Mais, comme le nuage de Tchernobyle, elle contournera bien sûr l’Hexagone !

    "Personne en Afghanistan n'imagine un avenir sans les talibans"

    Parler avec les talibans ?, Le Monde
    La démarche du président afghan, Hamid Karzaï, qui a demandé à l'Arabie saoudite de servir d'intermédiaire avec le mollah Omar, le chef des talibans, contraint à fuir l'Afghanistan à l'automne 2001, est un aveu d'impuissance. Sous la protection des forces de la coalition internationale, les autorités afghanes n'ont pas réussi à établir leur pouvoir bien au-delà de la région de Kaboul. La construction d'un véritable Etat, au sens moderne du terme, se heurte aux divisions claniques ancestrales. Les chefs de guerre font la loi dans les provinces. Après avoir subi des échecs militaires, les talibans harcèlent les troupes de l'OTAN et les soldats afghans. L'"afghanisation" de la guerre, qui est l'objectif officiel affiché par la communauté internationale, marque le pas.

    Commentaires : Cet éditorial est un aveu de l'échec de la guerre que poursuit la France en Afghanistan derrière les États-Unis.


    Quand Bernard Kouchner défend les « barbares afghans », Les blogs du Diplo
    Comme l’explique un responsable britannique au numéro 2 de l’ambassade de France à Kaboul, « la présence, notamment militaire, de la coalition est partie du problème, non sa solution. Les forces étrangères assurent la survie d’un régime qui, sans elles, s’effondrerait rapidement » (cité dans Claude Angeli, « La réalité afghane que Sarko décide d’ignorer », Le Canard enchaîné, 1er octobre 2008). Tout le monde le reconnaît : la présence occidentale fait affluer là-bas des volontaires du monde musulman en nombre...

    La domination économique américaine est révolue

    Pour Medvedev, la domination économique américaine est révolue, AFP - Yahoo! Actualités
    "L'ère de la domination d'une économie et d'une devise a été reléguée au passé une bonne fois pour toutes", a déclaré M. Medvedev lors d'un forum bilatéral animé par des représentants de la société civile, avant le sommet proprement dit entre M. Medvedev et Mme Merkel, à Saint-Pétersbourg (nord-ouest).

    "Nous devons travailler ensemble à la création d'un nouveau système économico-financier plus juste, basé sur les principes de la multipolarité, la suprématie de la loi, et la prise en compte des intérêts mutuels", a-t-il ajouté.


    La Chine critique la politique financière des Etats-Unis, Investig’action
    Le quotidien du Parti communiste chinois estime qu’il faut un nouvel ordre financier mondial qui ne soit plus dépendant des États-Unis et du dollar. La politique financière américaine est responsable de la crise, écrit l’éditorialiste. La question sous-jacente est celle-ci : Pourquoi le monde devrait-il payer l’addition ?

    Les deux bourses pétrolières dominantes dans le monde sont celles de Londres et de New York. Les deux sont aux mains d’entreprises américaines. Le pétrole, cela va de soi, est traité en dollars. Mais, à la mi-février de cette année, une bourse iranienne du pétrole s’est ouverte. L’or noir n’y est plus traité en dollars, mais en rial, la monnaie iranienne.

    D’autres pays producteurs de pétrole ne faisant pas partie de l’OPEP, telles la Norvège et la Russie, sont également prêts à laisser tomber le dollar. La décision de deux ou trois autres pays supplémentaires de passer à l’euro, au yen ou à une corbeille de monnaies est sans doute suffisante pour envoyer par le fond le navire amiral de l’hégémonie du dollar dans le monde, c’est-à-dire le pétrodollar.


    Combien de guerres, combien de défaites ?, Dedefensa
    Avec un sarcasme désenchanté, William S. Lind envisage une hypothèse stratégique concernant la situation US dans “l’arc de crise”, avec les engagements US effectifs en Irak et en Afghanistan, et les engagements possibles au Pakistan et en Iran.

    La première appréciation fondamentale que Lind fait réaliser à son exacte signification est la situation catastrophique des forces armées US et la crise profonde de la puissance militaire US.

    La puissance militaire US est enfermée dans une situation qu’on doit qualifier de statique. La puissance US est aujourd’hui définie comme une statique. La seule dynamique de la structure US dans cette situation opérationnelle, comme l’illustre Lind avec son analogie des deux fronts, est aujourd’hui celle de l’impuissance: seule l’impuissance progresse…

    Le "testament politique" d'Ehud Olmert

    MOURTAZINE Andreï, Le "testament politique" d'Ehud Olmert, RIA Novosti
    Dans une interview accordée au journal israélien Yedioth Ahronoth à l'occasion de Roch Hachana, le Nouvel an juif, le chef du gouvernement israélien s'est exprimé en ces termes: "Je dis ce qu'aucun dirigeant israélien n'avait dit auparavant: nous devrions nous retirer de presque tous les territoires, y compris de Jérusalem-Est et des hauteurs du Golan."

    Pour la société israélienne, la question de Jérusalem-Est est bien plus sensible que la bande de Gaza, qu'Ariel Sharon remit en totalité aux Palestiniens il y a trois ans, ou que la Cisjordanie, aujourd'hui placée sous l'autorité de Mahmoud Abbas et, partiellement, d'Israël.

    Aucun Premier ministre israélien ne peut résoudre les problèmes de la guerre et de la paix de façon autonome, sans l'accord de la Knesset. Or, obtenir ne serait-ce qu'une majorité simple au parlement israélien est quasiment impossible pour l'actuel chef de file du parti Kadima, Tzipi Livni, qui tente de rassembler une coalition parlementaire et qui n'est même pas encore Premier ministre. Seuls des hommes très charismatiques comme Ariel Sharon ou Yitzhak Rabin ont été en mesure de convaincre la Knesset qu'ils avaient raison. Une telle personnalité fait pour l'instant défaut sur l'Olympe politique israélien.

    Les "mais" sont bien trop nombreux. Si bien que le "testament politique" du Premier ministre sortant Ehud Olmert devrait manifestement rester encore longtemps un chiffon de papier.


    COOK Jonathan, Israël est-il devenu le ferment du terrorisme colonial juif ?, Info-Palestine
    La violence dirigée contre la gauche juive culmine dans les périodes où l’extrême droite religieuse croit qu’un accord avec les Palestiniens n’est pas loin d’être conclu. Rabin a payé de sa vie le prix de la signature des Accords d’Oslo. De même, Mr Sternhell semble être la victime des mécontentements des colons devant les discussions qui se poursuivent entre le gouvernement et les Palestiniens pour un retrait partiel israélien de Cisjordanie.

    Le mépris général des lois chez les colons de Cisjordanie a atteint de nouveaux sommets et fut marqué ce mois-ci quand les colons de Yitzhar ont commis ce qui fut largement qualifié de « pogrom » contre les Palestiniens du village voisin d’Asira al Qabaliya. Les colons ont été filmés tirant à balle réelle sur les villageois, mais la police n’a jusqu’ici mis personne en accusation.

    Avec cette carence à faire appliquer la loi, l’extrême droite peut se livrer régulièrement et ouvertement à des activités en marge de la loi, souvent sans risquer sérieusement le châtiment. Beaucoup de ses dirigeants, tel Noam Federman, Itamar Ben GVir et Baruch Marzel, tous de Hébron, sont soupçonnés d’avoir des liens étroits avec le mouvement hors-la-loi Kach qui exige le nettoyage ethnique des Palestiniens de la région.

    2 octobre 2008

    La gauche m'a poussé sur l'échafaud...



    La gauche m'a poussé sur l'échafaud, la droite va me guillotiner, La Sociale
    Le gouvernement vient de décider d’ouvrir le capital de La Poste. Quoiqu’en dise l’exécutif c’est bien un projet de privatisation qui s’organise. Le gouvernement argue d’une nécessaire adaptation de « l’entreprise » pour faire face à l’abandon du monopole prévu par l’Union Européenne, à l’horizon 2011. La gauche (P.S./P.C.) pousse des cris d’orfraie expliquant qu’on casse un service public. Pour cela elle s’associe à des syndicats pour revendiquer la mise en place d’un référendum d’initiative citoyenne. S’il ne s’agissait pas d’un sujet aussi grave, nous pourrions en rire.

    L’initiative de la gauche oblige à s’interroger sur ses réelles motivations, défense d’un service public, qui d’ailleurs n’en est plus un depuis longtemps, ou simple action anti-Sarkozy ? Cette gauche fait comme si elle n’avait pas de responsabilité historique sur ce dossier.


    Gérard Grunberg : «Il n’y a plus de pensée socialiste de l’Europe», EurActiv
    Aujourd’hui le PS ne sait plus où il en est avec la question européenne. Il n’a plus de projet européen à proprement parler.

    Le socialisme européen n’a plus de pensée européenne. Dans les grands partis européens, il y a vraiment un retour en arrière sur la question européenne: il n’y a plus ni projet politique, ni projet institutionnel.

    Le cycle social-démocrate est aujourd’hui en grande difficulté en Europe: les Anglais vont perdre, les Allemands aussi, les Français n’ont pas encore gagné, les Italiens sont dans une situation très difficile et les Espagnols sont également mis en grande difficuté par la crise. Pourtant, il n’y a guère que les socialistes espagnols qui demeurent encore résolument pro-européens.

    Avec la crise financière, la situation ne risque pas de s’arranger. La crise renforce l’idée des partis socialistes européens qu’il faut être à la fois nationaux et étatistes, ce qui ne va pas renforcer l’idée d’un projet européen.

    Crise financière : manipulation gouvernementale ?

    Evolution Euro/Dollar sur 5 ans

    Source : Yahoo! Finance


    WEBER Henri , Tsunami financier : la réplique idéologique, Le Monde
    La cause première, quoique lointaine, de la crise financière et économique que nous vivons est idéologique : à la fin des années 1970, l'idéologie libérale, longtemps discréditée et marginalisée après la Grande Dépression des années 1930, a fait un retour en force. Milton Friedman, Friedrich Hayek ont évincé Keynes et sa descendance dans la pensée économique dominante. La critique de la faillite de l'Etat et de sa bureaucratie l'a emporté sur la critique des carences du marché. Dans sa forme moderne, le néolibéralisme repose sur deux postulats : le premier affirme que le libre jeu des marchés permet la meilleure allocation des ressources et la croissance optimale de l'économie. Le second, que les marchés sont doués de capacités autorégulatrices qui rendent l'intervention de la puissance publique dans la vie économique, non seulement inutile, mais encore nuisible.

    C'est au nom de ces croyances que les néolibéraux ont prêché depuis trente ans le retrait de l'Etat de la vie économique et sociale, son repli sur ses fonctions régaliennes de maintien de la sécurité intérieure et extérieure. C'est en son nom qu'ils ont prôné la privatisation des services publics et l'extension des rapports marchands au maximum de secteurs d'activité.

    Trente années de déréglementations, libéralisations, dérégulations, sous la houlette des Etats-Unis et des grandes multinationales, débouchent aujourd'hui sur la crise économique la plus grave que le capitalisme ait connue depuis 1929.

    Aujourd'hui, pour éviter l'effondrement, les gouvernements occidentaux nationalisent massivement les pertes et font payer aux contribuables les centaines de milliards de dollars dilapidés par les petits génies de la finance. Le mythe libéral des capacités autorégulatrices des marchés en a pris un coup. Son corollaire de l'indispensable désengagement de l'Etat, aussi.

    Les libéraux apparaissent pour ce qu'ils sont : des idéologues qui stigmatisent l'intervention de l'Etat en période de vaches grasses, mais qui exigent au contraire son secours massif dès que se lèvent les tempêtes que leurs politiques ont contribué à déclencher.

    Commentaires : Weber écrit aussi «Les socialistes français n'ont jamais partagé ce credo. Ils n'ont jamais cru que les marchés étaient toujours mieux avisés que les politiques, les chefs d'entreprise toujours plus intelligents que les fonctionnaires. [...] Ceux qui leur reprochaient, contre toute évidence, de rejeter l'économie de marché, leur reprochaient en réalité de rejeter les postulats du néolibéralisme et les politiques qui en découlent.»
    Le «contre toute évidence» signifie que les socialistes ne rejettent pas l'économie de marché. S'ils en dénoncent aujourd'hui les excès, ils oublient de dire qu'ils sont responsables de la victoire du néolibéralisme grâce à leur alignement politique sur la loi du marché à partir de mars 1983.


    Crise financière : manipulation gouvernementale ?

    Source : Agoravox TV - Dailymotion


    SAPIR Jacques, Une décade prodigieuse - La crise financière entre temps court et temps long, Revue de la régulation
    La crise financière, rampante depuis l’été 2007, a connu un tournant majeur entre le dimanche 14 septembre et le vendredi 26 septembre 2008. L’accélération brutale des événements en a changé qualitativement la nature. On est ainsi passé du stade d’un nouveau choc dans le système bancaire et financier américain (la faillite de Lehman Brothers) au constat public de la fin de l’hégémonie financière américaine qui datait depuis 1945, en passant par l’évocation du spectre d’un effondrement total du système bancaire comme en 1929. Ces journées dramatiques constituent un de ces « moments » historiques où sont testées tout autant les stratégies que les doctrines et les théories qui les sous-tendent.

    La décision des autorités américaines de créer une gigantesque caisse de défaisance est survenue bien plus tard qu’il n’eut fallu. Elle n’a pas mis fin à la crise car elle a révélé une crise de direction majeure au sein du gouvernement et des élites américaines. On voit alors apparaître des pathologies décisionnelles et informationnelles similaires à celles de l’Art de la Guerre.

    Les journées de septembre doivent donc être aussi envisagées du point de vue d’une théorie de la décision. La désorganisation du système décisionnelle américain apparaît comme un élément objectif aussi important les institutions du marché financier ou les transformations des institutions concernant le commerce international et la gestion du salariat aux Etats-Unis, qui ont permis à une situation d’insolvabilité majeure des ménages de se développer.

    Cette crise n’est pas un accident financier de plus, et de trop. Elle traduit une crise profonde du régime de croissance américain tel qu’il s’était développé depuis les années 1980 et 1990 tout en produisant en Europe des clones tels l’Espagne, la Grande-Bretagne ou l’Irlande. Mais, cette crise montre aussi que les dynamiques du temps court, celles de l’événement, sont tout aussi importantes que les dynamiques du temps long, celui des structures des appareils productifs et de l’évolution des institutions, que les économistes régulationnistes affectionnent. Les économistes hétérodoxes doivent affronter le défi de formuler une théorie de la décision individuelle qui fonde en microéconomie leurs analyses macroéconomiques. Il faut pouvoir analyser le temps court ou se taire.


    La crise financière : entretien avec Michel Aglietta réalisé par Louis Weber, Fondation Copernic
    La crise actuelle révèle des changements structurels du capitalisme. Les banques d’affaires et les agences de notation ont réduit leur « aversion au risque » dans un contexte marqué par une abondante épargne mondiale. La titrisation des créances, dont Michel Aglietta décrit ici les mécanismes, traduit une accélération de ce processus, générateur de profits bancaires démesurés. Mais le retournement sur le marché immobilier a provoqué une crise qui menace le système d’effondrement. Michel Aglietta plaide pour que toutes les institutions de crédit, et pas seulement les banques, soient soumises au contrôle des banques centrales. Mais cela ne sera pas possible sans une impulsion politique en ce sens.

    Commentaires : Rien d'étonnant qu'un partisan de la régulation du capitalisme soit interrogé par un membre d'ATTAC, qui prône comme le PS et le PC... un aménagement moral du système.


    WIEVIORKA Michel, L’Etat guerrier, l’Etat financier... à quand l’Etat social ?, Eco89
    Puis sont venus les signes avant-coureurs de la crise financière actuelle, et cette crise elle-même. Avec une première conséquence, spectaculaire : le retour de l’Etat, là aussi, mais cette fois, dans ses dimensions économiques. Tout le monde le constate, l’Etat se présente comme le sauveur suprême, le seul recours capable, peut-être, d’enrayer les logiques de la catastrophe qui se profile. Le discours néo-libéral, de fait déjà bien affaibli depuis l’éclatement des premières « bulles » ou les scandales comme celui d’Enron, n’est plus seulement critiqué par l’altermondialisme, le gauchisme ou des pans entiers de la pensée de gauche (sauf quand elle se dit « libérale ») : il est rejeté de toutes parts.

    Commentaires : Ce plaidoyer pour le retour d'un Etat social (Etat protecteur) n'analyse pas les responsabilités de la gauche (PS et PCF) face à «l’inquiétude, l’angoisse, et le sentiment d’impuissance» qui domine aujourd'hui après avoir fait le lit du néo-libéralisme dans les années 80.


    EICHENGREEN Barry, Retour en 1929 ?, Telos
    Qelle que soit sa forme définitive, le Plan Paulson n’éteindra pas à lui seul l’incendie.. Les conséquences de la crise sont clairement passées de Wall Street à Main Street, de la bourse à l’économie réelle. Les performances récentes des actions non financières montrent que les investisseurs en sont bien conscients.

    Les comparaisons avec la Grande Crise, qui avaient jusqu’ici quelque intérêt académique mais peu de pertinence pratique, reviennent donc en force. Certaines ont du sens, les autres ne servent qu’à faire les gros titres des journaux.

    Il est plus difficile aujourd’hui d’absorber le choc, parce qu’il s’est produit à l’intérieur même du système financier. Des effets de levier excessifs, une grande opacité, et une prise de risque au sein même du secteur financier sont parmi les causes principales du problème actuel. On a certes assisté à un effondrement du marché immobilier, mais contrairement aux années 30, il n'y a pas eu d'effondrement général des prix et de l'activité économique. Les faillites d'entreprises sont restées relativement stables, ce qui a grandement contribué dans un premier temps à maintenir en vie le système financier. Mais cela rend aussi le problème plus difficile à résoudre : puisqu’il n'y a pas eu d'effondrement des prix et de l'activité économique, nous ne pourrons pas cette fois-ci sortir de la crise par la croissance ou l’inflation, comme cela fut le cas après 1933.


    DESMEDT Ludovic, En 1721, Londres victime de la première bulle boursière, Le Monde
    Lorsque Swift débute la rédaction des Voyages de Gulliver, la Grande-Bretagne vit le gonflement puis l'éclatement de la "bulle" des mers du Sud : les changements d'échelle du personnage principal rappellent l'accroissement démesuré puis la miniaturisation des richesses dans un monde peu habitué à ce genre de fantaisie. Cet épisode a marqué l'esprit des contemporains et, si la crise actuelle doit être distinguée de celle de 1929, on peut rappeler comment celle qui toucha la Bourse de Londres, il y a trois siècles, a imprégné l'imaginaire occidental.

    Créée en 1711, la South Sea Company est impliquée dans le commerce colonial (esclaves, principalement) et gérée de manière assez sage jusqu'en 1719. L'année suivante, les Communes et les Lords acceptent la conversion de la dette publique en actions. La compagnie fait dès lors l'objet d'une spéculation massive : on évoque une "bulle" (le terme bubble désignant toute tromperie et, par extension, les entreprises malsaines ou spéculatives).

    Au moment du gonflement de la bulle, on demanda à Isaac Newton, qui occupait le poste de maître de la monnaie de Londres, ce qu'il pensait de l'avenir du titre de la SSC, le grand savant répondit qu' il "pouvait calculer les mouvements des corps célestes, mais pas la folie des gens"...


    La crise financière, C dans l'air - France 5

    GUILLON Claude, Le leurre et l'argent du leurre, Site de l'auteur
    Troisième chapitre du livre De la révolution - 1989 : l’inventaire des rêves et des armes, Éditions Alain Moreau, 1988 (épuisé).

    1 octobre 2008

    Revue de presse USA

    Daily Show

    Source : Dailymotion


    Les Américains indignés, Libération
    L’importante mobilisation populaire a pesé dans le refus du plan de sauvegarde, lundi.

    Jeudi à Wall Street, quatre banquiers refusant de donner le nom de leur employeur secouaient la tête devant la foule de manifestants qui s’était déplacée devant le New York Stock Exchange sur Wall Street. «Ils ne comprennent pas vraiment ce qui est en train de se passer, qu’est-ce qu’ils veulent ? L’anarchie ?» A quoi un manifestant, outré, brandissant un panneau «Imposez les millionnaires», lance en hurlant : «La guillotine pour Wall Street.»


    MOORE Michael, Le holdp-up du siècle, Contre Info
    Après avoir dérobé 500 000 milliards de dollars qui ont été empochés depuis 5 ans par leurs soutiens les profiteurs de guerre, après avoir garni de plus d’une centaine de milliards de dollars les poches de leurs amis les pétroliers depuis deux ans, Bush et ses potes - qui doivent bientôt quitter la Maison Blanche - sont en train de piller le Trésor américain de chaque dollar qu’ils peuvent récupérer. Ils prennent dans le coffre autant qu’ils pourront en emporter en se dirigeant vers la sortie.

    Ce renflouement a pour mission de protéger la masse obscène de richesses qui ont été accumulées au cours des huit dernières années. C’est pour protéger l’élite des actionnaires qui possèdent et contrôlent l’entreprise Amérique. C’est pour s’assurer que leurs demeures, leurs yachts et leur « style de vie » ne soient pas remis en causes tandis que le reste de l’Amérique souffre et se bat pour payer ses factures. Laissez les riches souffrir, pour une fois. Laissez-les payer pour ce sauvetage. Nous dépensons 400 millions de dollars par jour pour la guerre en Irak. Qu’ils mettre fin à la guerre immédiatement et nous fassent économiser 500 milliards de dollars supplémentaires !


    Plan de sauvetage des banques : le Sénat reprend la main, RFI
    C'est donc le Sénat qui devrait relancer le processus. Grâce à une astuce de procédure, il se saisira de la loi et la mettra au vote dès ce mercredi soir, après le coucher du soleil pour respecter la traditionnelle interruption du Nouvel an juif.

    En principe, le processus est inverse : c’est la Chambre des représentants qui vote d’abord et passe le texte au Sénat. C’est même obligatoire lorsqu’il s’agit d’une loi fiscale, ce qui est le cas. Mais l’on peut compter sur le Congrès pour être astucieux. Le plan de sauvetage sera attaché à une loi déjà existante, et déjà examinée à la Chambre.

    Commentaires : Le plan Paulson sera donc adopté contre la volonté de la majorité des américains grâce à un artifice de procédure.

    Revue de presse Afghanistan

    Des soldats néerlandais se rebellent, Libération
    Un bataillon de 24 soldats néerlandais a été placé en «service non actif» en Afghanistan pour refus d’obéir aux ordres. Une mesure disciplinaire «exceptionnelle», selon l’un des syndicats de l’armée, la Fédération générale des personnels militaires (AFMP). Les soldats ont refusé de faire une patrouille de reconnaissance la semaine dernière, vraisemblablement à cause du manque de véhicules blindés.

    Le moral des troupes est tombé à zéro le 24 septembre, lorsque Eimert van Middelkoop a avoué au magazine Vrij Nederland ne pas avoir fait son service militaire et s’en être « réjoui ». Le ministre de la Défense a par ailleurs admis ne pas connaître tous les grades de l’armée et laissé entendre qu’il ne souhaitait pas non plus les apprendre.


    Afghanistan : 2008, l'année la plus meurtrière pour les soldats étrangers, Yahoo! Actualités
    Au moins 221 soldats étrangers - en majorité Américains - ont péri en Afghanistan depuis le début de l'année 2008, selon un décompte de l'AFP basé sur les communiqués militaires.

    En neuf mois, davantage de soldats ont été tués en 2008 que lors de toute l'année 2007 (219 morts). Les mois de juin (49 morts, le bilan mensuel le plus élevé depuis 2001) et d'août (45 morts) ont été particulièrement meurtriers.


    "Personne en Afghanistan n'imagine un avenir sans les talibans", Le Monde
    Mardi 30 septembre, le président afghan, Hamid Karzaï, a lancé un appel au mollah Omar. Il a demandé au roi Abdallah d'Arabie saoudite de servir de médiateur dans des négociations de paix avec le chef des talibans. L'éclairage de Jacques Follorou, journaliste au "Monde".


    Kouchner pour négocier avec les talibans, Le Figaro
    Commentaires : Ainsi l'armée française fait la guerre en Afghanistan pour que les talibans reviennent au pouvoir.


    Afghanistan, Pakistan, l’irruption des « néotalibans », Le Monde diplomatique
    Le président Bush a autorisé les opérations terrestres contre des bases talibanes au Pakistan et ce pays devient le terrain principal de la « guerre contre le terrorisme ». Pourtant, cette extension du conflit, qui n’est pas sans rappeler la décision américaine des années 1970 d’étendre la guerre du Vietnam au Cambodge, a peu de chances de déboucher sur une victoire. Non seulement elle soulève l’opposition de la grande majorité des Pakistanais, mais elle se heurte à une stratégie régionale particulièrement audacieuse des « néotalibans ».


    Michèle Alliot-Marie et la menace terroriste, Les blogs du Diplo
    « La deuxième réalité est l’extension géographique du terrorisme islamiste. L’arc du terrorisme intégriste couvre l’Afghanistan, le Pakistan, la Malaisie, l’Indonésie, la Somalie, la péninsule Arabique, le Moyen-Orient, la zone subsaharienne et le Maghreb. De ces bases, il projette ses actions vers l’Europe. »

    On pourrait inverser le raisonnement, et dire que ce qui est nouveau, c’est la présence massive de troupes occidentales en Irak, en Afghanistan, au Liban, sans parler des bases et des conseillers militaires ou de sécurité. C’est cet interventionnisme, sans précédent depuis la fin de l’époque coloniale, qui a contribué à créer cet arc de crise et cette internationale de la résistance.

    « L’Europe ne saurait ignorer qu’elle partage les mêmes risques que l’Amérique. Il est temps de donner un contenu nouveau au dialogue transatlantique avec un cadre qui favorise les échanges d’informations pertinents et garantisse un niveau élevé de protection des droits individuels et des libertés. L’action policière nécessite une législation adaptée, mais qui ne renonce pas à nos valeurs de respect de la démocratie et des droits de l’homme. »

    Mais si la politique américaine est l’une des causes essentielles du développement du terrorisme, de quoi allons-nous parler avec Washington ? De la création d’un Etat palestinien promis depuis des années ? Des bombardements de civils en Afghanistan ou en Irak ? Des droits de l’homme tels qu’ils sont interprétés à Guantanamo ou dans les prisons afghanes contrôlées par les Etats-Unis ?


    Afghanistan | Dossier d'actualité, Yahoo! Actualités.
    Pakistan | Dossier d'actualité, Yahoo! Actualités.

    Revue de presse Crise économique

    Evolution Euro/Dollar sur 1 an

    Source : Yahoo! Finance


    Revue de presse française, NouvelObs
    LIBÉRATION
    La vérité est que l'irresponsabilité des financiers a ruiné leur principal actif, la confiance. Alors, comme aux Etats-Unis, c'est l'argent public qui éteindra l'incendie. Pour sauver la banque, le contribuable paiera. Il en est déjà de sa poche pour un milliard dans le sauvetage de Dexia.
    C'est la nationalisation qui est la moins injuste. Ainsi, les banques seront contrôlées par des autorités légitimes et l'Etat gardera la possibilité de rentrer dans ses fonds si la situation se rétablit. Toute autre solution s'apparenterait à une simple spoliation de la population au profit d'une minorité défaillante, qui resterait en place.

    LA TRIBUNE
    Qu'est-ce que la confiance? Une croyance ou un sentiment? Est-il raisonnable de faire confiance à ceux qui nous affirment que le système financier français est "solide, diversifié et bénéficie du soutien des autorités publiques"? Que la contagion de la crise financière ne va pas affecter nos dépôts bancaires, nos livrets, nos Sicav monétaires ou nos assurances-vie? Sur tout cela reposent la stabilité et la prospérité de notre économie. Or, depuis un an, la confiance dans le système est très gravement atteinte. Quand on voit qu'une banque refuse aujourd'hui de faire confiance à une autre banque, pourtant comparable en réputation, comment faire confiance à sa propre banque ? C'est la question, légitime, que se posent aujourd'hui les clients, particuliers ou entreprises.

    LE PROGRÈS DE LYON
    Qui connaît Axel Miller ? L'homme gagne à être connu. Il était le patron de la banque Dexia. Il a démissionné hier matin, estimant devoir "prendre ses responsabilités" au moment où l'Etat français et l'Etat belge injectaient plus de 6 milliards d'euros pour sauver la banque et ses clients. "Notre monde a besoin de sens, il faut retrouver quelques valeurs", a expliqué Axel Miller. Et il a quitté le siège de Dexia, à Bruxelles, sous les applaudissements du personnel... Chapeau, Monsieur Miller. Le geste est beau, on veut le croire spontané. On veut croire aussi que vous renoncerez au parachute doré de plus de 3 millions d'euros prévu par votre contrat - le contraire nous décevrait trop. Et l'on gardera de vous cette déclaration d'août dernier: "La banque est une affaire trop sérieuse pour être laissée aux banquiers". On aurait aimé vous connaître plus tôt, Monsieur Miller.

    L'ALSACE
    Banquiers et dirigeants politiques le martelaient depuis des semaines : les mésaventures des établissements financiers américains, allemands et anglais ne passeraient pas la frontière française! A écouter nos stratèges, on avait vraiment l'impression qu'une invisible ligne Maginot protégeait le pays. Comme dans les communiqués de la drôle de guerre en 1939-40, les épargnants pouvaient dormir tranquilles. Las, la ligne Maginot a été contournée - une fois de plus -au tout petit matin, du côté de la Belgique. Il a fallu que le gouvernement injecte, en catastrophe, de l'argent dans Dexia, la banque des collectivités locales, basée à Paris et à Bruxelles. La première nationalisation bancaire depuis François Mitterrand est à mettre à l'actif du pouvoir le plus ouvertement "libéral" des dernières décennies. (...) Le gouvernement s'est porté au secours de Dexia. En fera-t-il autant pour les 30 000 ménages qui n'arrivent pas à vendre leur maison et qui risquent, comme le craint l'association française des usagers des banques, d'être pris à la gorge par leur prêt relais ? Les victimes de la crise ne sont pas forcément banquiers. Elles ne méritent pas moins de sollicitude.

    LA CHARENTE LIBRE
    Cette façon d'afficher haut et fort sa confiance dans notre système franco-français mais de mener dans le même temps dans le plus grand secret les opérations de sauvetage sont, si on peut dire, de bonne guerre en ces temps de panique, de volatilité extrême à la fois des cours et des opinions publiques. Reste que cet exercice de grand écart, cette mise en scène un peu forcée de la confiance, à laquelle on demande au bon peuple d'adhérer sinon d'applaudir, peut s'avérer non seulement périlleux mais contre-productif. Surtout qu'il existe un décalage entre la volonté proclamée de l'action et les moyens réels que le gouvernement a à sa disposition pour agir. La France peut certes jouer les pompiers de service. Mais si elle devait le faire, ce serait avec l'argent des contribuables, en pénalisant donc encore plus le pouvoir d'achat et la croissance et en creusant encore plus les déficits.


    Revue de presse européenne, euro|topics
    El País - Espagne
    L'économiste américain Joseph E. Stiglitz pense qu'un nouveau système de régulation est nécessaire : "Il existe un consensus toujours plus large parmi les économistes selon lequel ce plan de sauvetage qui est basé sur le plan de Paulson, ne fonctionnera pas. Dans ce cas, l'énorme augmentation de la dette publique et la conviction que 700 milliards de dollars ne suffiront pas à sauver l'économie américaine, continueront d'affaiblir la confiance et d'accentuer l'instabilité. Mais d'un autre côté, les politiques ... ne peuvent pas se contenter de ne rien faire. Il nous reste peut-être à prier pour qu'un accord, issu du mélange toxique des intérêts propres, d'économie fausse et de bonnes idéologies produites par la crise, conduise d'une manière ou d'une autre à un plan de sauvetage qui fonctionne...


    Risque politique de la crise ?, Loubnan ya Loubnan
    Christian Chavagneux soutient le «plan Paulson» avec un enthousiasme qui laisse coi.

    Pour se donner une idée du «pouvoir» que représentent 700 milliards de dollars, signalons que c'est une somme supérieure au montant total du budget militaire des États-Unis (651 milliards). C'est également une somme supérieure à l'ensemble des budgets militaires cumulés de tous les autres pays de la planète. Et ce serait directement géré par trois hommes nommés par Georges W. Bush (qui terminera son mandat que le 20 janvier 2009).

    Bref, y a-t-il des risques politiques liés à ce plan ? Les élus américains qui rechignent à signer cet énorme transfert de pouvoir n'ont-ils que des motifs idéologiques et démagogiques, ou ont-ils quelques raisons de s'inquiéter? Y a-t-il un contre-pouvoir efficace prévu (ou même possible) face à ce pouvoir confié à trois hommes ?


    Crise : quel risque en France ?, C dans l'air - France 5

    Quelle sera demain la politique internationale des USA ?

    Après Bush, chacun espère un changement ou craint le pire. McCain ou Obama ? Qu’est-ce que cela changera pour l’Irak, l’Afghanistan, la Palestine, l’Afrique, le Caucase, Cuba ou le Venezuela ? Et dans les relations avec les grandes puissances : Europe, Japon, Russie, Chine ?

    Nous ne pensons pas que la politique internationale des Etats-Unis se décide à la Maison-Blanche. En fait, l’élite US est actuellement hésitante sur la stratégie à suivre dans les prochaines années. Ce texte analyse les deux options qui s’offrent à elle. La crise économique rend la question encore plus brûlante : comment les Etats-Unis s’y prendront-ils pour rester la superpuissance qui domine le monde ?

    Ce texte est extrait de notre livre Les 7 péchés d’Hugo Chavez (chapitre 11 : Les Etats-Unis, l’or noir et les guerres de demain) à paraître prochainement. Dans les pages qui précèdent, ont été expliquées les raisons de l’ascension, puis du déclin des Etats-Unis. Investig’Action a jugé urgent de publier déjà cet extrait pour éclairer les débats en cours sur les élections aux USA...


    L’échec de Bush

    Quel bilan peut-on tirer de cette guerre globale menée par l’administration Bush à partir du 11 septembre ? Négatif. Pratiquement partout...

    En Afghanistan et en Irak, les Etats-Unis ont déclenché deux guerres qu’ils ont été incapables de gagner et qu’ils ne gagneront jamais. Bush aurait bien voulu en déclencher une troisième contre l’Iran, mais trop affaibli, il a dû y renoncer. Le but de cette guerre était d’assurer à Washington le contrôle du pétrole. En cinq ans, il a grimpé de 25 dollars à plus de 100 dollars, avec des conséquences très négatives pour l’économie US et mondiale.

    En Amérique du Sud, les Etats-Unis ont perdu, entièrement ou partiellement, le contrôle de presque toutes leurs colonies : Venezuela, Bolivie, Equateur, Uruguay, Paraguay, Argentine et Brésil. Ne leur restent, à l’heure où nous écrivons ces lignes, que le Pérou, le Chili et la Colombie.

    En Afrique aussi, la résistance a marqué des points. Le Congo de Kabila a refusé de se mettre à genoux. Et quand Washington a cherché un endroit pour installer le centre de son nouveau commandement militaire Africom, tous les pays ont poliment refusé. Il a finalement fallu se rabattre sur le Maroc, au prix de certaines concessions financières.

    De même, en Asie du Sud, un groupe de stratèges US s’inquiétait récemment de la montée des résistances dans toute la région et proposait de renforcer la ’capacité de projection’ des Etats-Unis en Asie du Sud. Dans leur jargon, ça veut dire les moyens d’organiser des débarquements militaires, des bombardements ou des coups d’Etat soutenus. Mais il s’empressait de signaler qu’en raison de l’impopularité des Etats-Unis dans cette région, il serait impossible de trouver un pays pouvant accueillir le siège de cette force US. [1]

    Même chez les alliés européens, la politique de Bush a provoqué des résistances. Ainsi, au sommet de l’Otan à Bucarest, en avril, George Bush a réclamé une nouvelle expansion pour intégrer cette fois l’Ukraine et la Géorgie, deux pistolets braqués sur la Russie. Mais il a essuyé un refus, ferme et public, de l’Allemagne, de la France, de l’Espagne, de l’Italie, de la Belgique, de la Hollande et du Luxembourg, peu désireux de se fâcher avec Moscou qui fournit leur gaz. Steve Erlanger et Steven Lee Myers, deux analystes proches du Pentagone, y ont vu « un échec notable de la politique des Etats-Unis dans une alliance normalement dominée par Washington » [2].

    En Russie justement, le ton monte. Moscou refuse l’installation sur le continent européen des armes que les Etats-Unis appellent un bouclier antimissile : « Si une partie du potentiel nucléaire des Etats-Unis est en Europe (...), nous devrons avoir des cibles en Europe » [3]. D’ailleurs, en mai 2008, la Russie a testé un nouveau missile intercontinental à têtes multiples, « en réponse aux actes unilatéraux et infondés de nos partenaires », a déclaré Poutine. Washington certifie pourtant que le bouclier antimissile n’est pas dirigé contre la Russie, mais seulement contre des Etats comme l’Iran. Mais Poutine rétorque : « Aucun missile iranien n’a de portée suffisante. Il devient alors évident que cette nouveauté nous concerne aussi nous, Russes. » [4].

    Tout comme la Russie, la Chine n’a pas reculé non plus devant les multiples campagnes et pressions organisées par Washington.

    L’élite US se divise

    Il y a dix ans, Zbigniew Brzezinski, ancien conseiller du président Carter et stratège le plus important des Etats-Unis, publiait Le Grand Echiquier, sorte de mode d’emploi du « Comment rester la seule superpuissance dominant le monde » [5]. Il y expliquait, avec la brutalité de quelqu’un qui n’est plus aux affaires, que Washington devait absolument affaiblir ses rivaux : Russie, Chine, mais aussi Europe et Japon, et les empêcher de s’allier entre eux. Diviser pour régner.

    Aujourd’hui, quel est le bulletin de George Bush, sur base des critères définis par Brzezinski ? A-t-il réussi à affaiblir les grandes puissances rivales ? Disons : mention assez bien en ce qui concerne le Japon, assez bien (pour l’instant) en ce qui concerne l’U.E., mais mauvais en ce qui concerne la Russie, et très mauvais en ce qui concerne la Chine.

    Globalement, Bush a provoqué tant de résistances que la domination des Etats-Unis s’est affaiblie. Les secteurs qui l’avaient porté au pouvoir - armement, pétrole, automobile, défense, compagnies pharmaceutiques - constatent que les guerres de Bush n’ont apporté ni de grands profits, ni de nouvelles zones d’exploitation. En fait, elles ont coûté davantage qu’elles n’ont rapporté. Et l’administration Bush s’est révélée être un petit cercle restreint, pensant beaucoup à s’en mettre personnellement plein les poches, mais incapables de finesse tactique et de réelle vision à long terme.

    Une fois l’échec devenu évident, les divisions se sont exacerbées au sein de l’élite US, et même de l’administration Bush. A partir de 2006, les néocons ont dû céder du terrain. Ils ont dû accepter le remplacement du ministre de la Guerre, Donald Rumsfeld, par Robert Gates, un homme de la Trilatérale et de la tendance Brzezinski. Le nouveau ministre a en quelque sorte admis la faiblesse du militarisme US dans un discours prononcé devant les élèves de l’Académie militaire de West Point : « Ne combattez pas à moins d’y être obligés. Ne combattez jamais seuls. Et ne combattez jamais longtemps. » [6]. Puis, la commission bipartisane Baker - Hamilton a condamné la tentative de Bush de remodeler le ’Grand Moyen-Orient’ comme étant irréaliste et elle a prôné au contraire une approche plus tactique envers la Syrie et l’Iran.

    Même au sein des services secrets et de l’Armée, plusieurs frondes se sont déclenchées. En décembre 2007, lorsque Bush a voulu préparer une attaque contre l’Iran sous le classique prétexte des armes de destruction massive, seize services de renseignement US ont surpris tout le monde en publiant un rapport qui constatait que l’Iran avait suspendu son programme nucléaire militaire depuis au moins 2003.

    « Le déclin des Etats-Unis est inévitable » (Zbigniew Brzezinski)

    Dans son livre, Brzezinski proposait une stratégie agressive et machiavélique pour sauver l’Empire US. Mais lui-même, croit-il que ça marchera ? Aussi surprenant que ça paraisse, la réponse est : Non.

    « A long terme, la politique globale est vouée à devenir de moins en moins propice à la concentration d’un pouvoir hégémonique dans les mains d’un seul Etat. L’Amérique n’est donc pas seulement la première superpuissance globale, ce sera très probablement la dernière. » (p. 267)

    La raison tient dans l’évolution de l’économie : « Le pouvoir économique risque aussi de se disperser. Dans les prochaines années, aucun pays ne sera susceptible d’atteindre 30% environ du PIB mondial, chiffre que les Etats-Unis ont maintenu pendant la plus grande partie du 20ème siècle, sans parler de la barre des 50% qu’ils ont atteinte en 1945. Selon certaines estimations, l’Amérique pourrait encore détenir 20% du PIB mondial à la fin de cette décennie pour retomber à 10-15% d’ici l’an 2020, tandis que les chiffres d’autres puissances - l’Europe, la Chine, le Japon - augmenteraient pour égaler approximativement le niveau des Etats-Unis. (...) Une fois que le déclin du leadership américain sera amorcé, la suprématie dont jouit aujourd’hui l’Amérique ne pourra être assurée par aucun Etat isolé. » (p. 267-8)

    « Une fois que le déclin du leadership américain sera amorcé ». Brzezinski ne parle donc pas d’une possibilité, mais d’une certitude. Il écrit cela en 1997. Aujourd’hui, il est devenu clair que le déclin est bel et bien amorcé. Le monde devient multipolaire.

    Mais peut-être Brzezinski est-il un pessimiste isolé ? Peut-être que les néocons qui ont inspiré Bush sont plus ’optimistes’, si l’on ose employer ce mot ? Eh bien, en fait, pas beaucoup plus. Dans le texte fondateur de toute la politique de l’administration, le Project for a New American Century (PNAC), rédigé en 1992 par Paul Wolfowitz et ses amis, on trouve évidemment toute l’idéologie de la nouvelle croisade militariste, mais aussi une remarque qui attire l’attention : « Actuellement, les Etats-Unis ne rencontrent aucun rival mondial. La grande stratégie de l’Amérique doit viser à préserver et étendre cette position avantageuse aussi longtemps que possible (...) Préserver cette situation stratégique désirable dans laquelle les Etats-Unis se trouvent maintenant exige des capacités militaires prédominantes au niveau mondial. » [7].

    « Aussi longtemps que possible ». Ici aussi, donc, on ne croit pas qu’il sera possible pour les Etats-Unis de rester éternellement les maîtres du monde. Voilà bien un grand paradoxe. Le moment entier craint les Etats-Unis. Mais les dirigeants US, eux, savent qu’ils sont aux commandes du Titanic. Et pour sauver l’Empire autant que possible, ils sont partagés entre deux options...

    Deux options pour sauver l’Empire

    Quelle sera la politique internationale des Etats-Unis dans les années qui viennent ? Le choix de tel ou tel président est certes une indication. Mais pas décisive. Rappelons que, durant la campagne présidentielle de 2000, George Bush avait promis une politique internationale beaucoup plus humble et moins interventionniste que son prédécesseur ! Tandis que l’autre candidat, Al Gore, avait proposé un budget militaire plus élevé que celui de Bush. Nous pensons que les grandes orientations de politique internationale ne sont pas décidées par les présidents, mais par les multinationales. En fonction de leurs besoins du moment et de leur évaluation du rapport de forces mondial.

    Et justement, après le bilan d’échec des années Bush que nous venons de décrire, l’élite US apparaît assez divisée sur la marche à suivre. Comment se sortir de cette situation délicate ?

    La première option possible, c’est l’option militariste. Les néocons de Bush l’ont incarné ces dernières années avec la stratégie Wolfowitz. L’agression et l’intimidation comme stratégie générale. Multiplier les guerres, gonfler au maximum les commandes au complexe militaro-industriel pour tirer la croissance et la domination des multinationales US, pour intimider aussi les alliés et les rivaux.

    L’autre option, c’est celle défendue par Brzezinski et qu’il aime à appeler ’soft power’ (le pouvoir en douceur). D’autres parlent d’un ’impérialisme intelligent’. En fait, il s’agit de réaliser les mêmes objectifs des Etats-Unis, mais par des formes de violence moins directes, moins visibles. En comptant moins sur les interventions militaires US, très coûteuses, et davantage sur les services secrets, les manoeuvres de déstabilisation, les guerres par pays interposés, et sur la corruption aussi...

    Cinq généraux de l’Otan préparent un gouvernement mondial..

    La première option consiste à militariser encore davantage la vie politique et à multiplier les guerres. Bush au carré.

    En janvier 2008, cinq ex-généraux de l’Otan ont présenté un document préparatoire à une rencontre au sommet de l’OTAN à Bucarest [8]. Leurs propositions révèlent une tendance absolument effrayante. Et ce qui donne beaucoup de poids à leur document, c’est que tous exerçaient, jusqu’il y a peu, des fonctions au plus haut niveau. Le général John Shalikashvili était chef de l’état-major US et commandant en chef de l’Otan en Europe, le général Klaus Naumann dirigeait l’armée allemande et présidait le comité militaire de l’Otan en Europe, le général Henk van den Breemen était chef de l’état-major hollandais, les mêmes fonctions étant occupées en France par l’amiral Jacques Lanxade tandis que Lord Inge dirigeait l’état-major et le service de la Défense en Grande-Bretagne. Rien que des grosses pointures. Et très agressives, comme nous allons le voir...

    Page 6 : « [Les auteurs] proposent des pistes sur la façon de surmonter une rivalité possible avec l’UE et de permettre à l’OTAN d’accéder à des instruments non militaires. » Deux remarques. 1. En fait, cette rivalité n’est pas seulement possible, elle est tout à fait réelle. Dans quel sens voudront-ils la surmonter ? 2. Que signifie pour l’Otan « accéder à des instruments non militaires » ? S’agit-il d’obtenir une emprise plus forte sur la vie civile des sociétés occidentales ?

    Page 7 : « Afin d’initier le processus, ils proposent d’établir un directorat réunissant les Etats Unis, l’UE et l’OTAN. Il aurait pour mission de coordonner toutes les opérations dans la sphère atlantique. » Un super - gouvernement mondial, donc. Pour réaliser quels objectifs ?

    Les Cinq nous l’expliquent page 42 : « Ce qui attend les alliés occidentaux, c’est la défense proactive, soutenue sur le long terme de leurs sociétés et de leur mode de vie. » ’Défendre notre mode de vie’ fut déjà un argument employé par le père Bush pour déclencher la première guerre contre l’Irak. En fait, ’mode de vie’ est une façon hypocrite de désigner la domination des multinationales sur la vie économique. Domination qui a pour effet de maintenir la moitié de l’humanité dans la pauvreté. Le but des Cinq, est bien d’employer les moyens militaires pour maintenir le fossé riches - pauvres. Pour qui en douterait, on précise page 92 : « Les objectifs de notre stratégie sont de préserver la paix, nos valeurs, le libéralisme économique et la stabilité. »

    Préserver la stabilité des multinationales, donc. Et contre quel ennemi ? Les auteurs fournissent quelques exemples de ce qu’il ne faut pas tolérer dans le tiers monde. Page 52 : « Nous avons des exemples moins importants d’aide non souhaitable : du Venezuela au régime cubain ». Le gendarme mondial s’arroge le droit d’intervenir partout contre tout pays posant des actes qui déplaisent aux multinationales.

    Mais parmi tous les indésirables, quel est l’ennemi principal ? La réponse vient page 44 : « La Chine est en mesure de faire grand tort aux économies US et mondiale en s’appuyant sur ses énormes réserves en dollars. » Et page 52 : « La Chine est en mesure d’utiliser l’arme de la finance pour s’imposer en Afrique et acquiert la capacité de l’utiliser à beaucoup plus grande échelle - si tel est son choix. »

    Voici donc les bons et les méchants bien définis. Le libéralisme a besoin de l’Otan pour s’imposer au monde entier. Et pour mener cette guerre économique, de quels moyens l’Otan devrait-elle disposer ?

    Le droit international et l’ONU jetés par-dessus bord
    En fait, les cinq généraux se sentent frustrés. Page 76 : « L’un des principaux problèmes dans la conception stratégique actuelle de l’alliance atlantique est que ses actions restent essentiellement réactives plutôt que préventives, et sont limitées à des moyens militaires. » Page 91 : « Or une stratégie ambitieuse doit comprendre l’utilisation bien intégrée de tous les leviers disponibles, qu’ils soient politiques, économiques, militaires, culturels, sociaux, moraux, spirituels ou psychologiques. »

    Nous y voilà ! La Bande des Cinq entend déborder de ses tâches militaires et exercer une emprise sur le fonctionnement de la société civile. Au moins, le droit sera-t-il respecté par ce nouveau gouvernement mondial ? On en doute fortement... Pages 94-95 : « Un autre principe à respecter est la légalité. Toute action doit être légitime, autorisée et respecter le droit international. Voilà qui peut représenter un handicap considérable lorsque l’adversaire n’a aucun respect pour quelque loi que ce soit, mais agir différemment signifierait en fin de compte appliquer la loi de la jungle et miner notre propre crédibilité. Pourtant ce principe n’empêche pas qu’il faille adapter le droit international existant à un contexte international en constante évolution... »

    Dans cette citation, les premières phrases servent de pommade, le véritable contenu vient à la fin : ’adapter’ le droit signifie en réalité le violer, nier les principes proclamés jusqu’à présent. Après Abou Ghraib, Guantanamo, la torture, les assassinats de chefs d’Etat, les vols clandestins et les prisons secrètes de la CIA, nous propose-t-on de combattre ces violations du droit ? Non, on propose de les légaliser en ’adaptant’ le droit.

    Il faut rappeler que déjà les deux guerres contre l’Irak et celle contre la Yougoslavie ont violé le droit international, la charte de l’ONU et même la propre Charte de l’Otan. Mais, précisément, c’est de la légalité internationale que les Cinq veulent se débarrasser. Page 104-105 : « L’approbation des Nations - Unies peut ne pas être nécessaire selon l’article 51 de la Charte des Nations - Unies (légitime défense) et il est peut-être possible d’y renoncer au terme de la Convention sur le génocide. »

    « Vive la guerre préventive » ! Même nucléaire

    On sera d’autant plus inquiet en lisant page 96 : « Ce qu’il nous faut, c’est une forme de dissuasion par refus proactif, où la préemption est une forme de réaction en cas de menace imminente et la prévention une tentative pour reprendre l’initiative et mettre fin au conflit. »

    ’Défense proactive’, dans le jargon des militaires, désigne la guerre préventive bien que celle-ci soit interdite par le droit international. Ce terme revient sans cesse dans le document des Cinq. George W. Bush avait déjà invoqué une ’guerre préventive’ contre le terrorisme. Comme Hitler en son temps. Car les agresseurs se réfugient souvent le prétexte de prévenir un danger. En réalité, le droit international a toujours interdit explicitement les guerres prétendument préventives. Mais les craintes ne s’arrêtent pas là...

    Page 94 : « A première vue, l’arme nucléaire peut sembler disproportionnée ; mais si l’on tient compte des dommages qu’elle prévient, il est possible qu’elle soit raisonnable. » Ici, éclate toute l’immoralité des cinq bandits. La guerre nucléaire est une atrocité et l’humanité n’a cessé de réclamer le démantèlement de ces armes de destruction massive. Voici qu’on prétend les justifier. Avec une hypocrisie qui ne peut tromper personne : ’prévenir des dommages’. Totalement flou et sans doute raciste : la vie des peuples adversaires ne vaut rien.

    La vérité est que ces généraux criminels, constatant que les bombardements classiques ne suffisent pas à briser les résistances, et que les guerres terrestres sont coûteuses et périlleuses pour les envahisseurs, ces généraux criminels avancent l’arme nucléaire comme solution au problème d’hégémonie mondiale des multinationales.

    « Préparer les esprits »

    On le voit, la marchandise que la Bande des Cinq prétend nous vendre est totalement pourrie et avariée. C’est pourquoi, prévoyants, ils comptent travailler l’opinion par des campagnes de propagande à long terme. Page 104 : « Ces mesures doivent s’accompagner d’efforts proactifs et coordonnés de communication dans les médias (...) Par ailleurs, cette campagne médiatique pourrait préparer les esprits à une intervention armée. »

    ’Préparer les esprits’ ! Bien sûr, ce n’est pas nouveau... Tirant le bilan de la guerre contre la Yougoslavie (en 1999), qui fut le festival le plus réussi de la désinformation organisée, un général de l’Otan avouait, après la guerre, que de fausses informations avaient été systématiquement balancées, tandis que les informations gênantes étaient écartées ou marginalisées pour « anesthésier les opinions ». Il résumait ainsi la philosophie de l’Otan : « L’opinion, ça se travaille, comme le reste. » [9]. A chaque guerre, d’ailleurs, les généraux occidentaux engagent des spin doctors, c’est-à-dire des agents publicitaires pour vendre leur guerre et manipuler l’opinion. Mais cette fois, on va beaucoup plus loin, il s’agit de toute une campagne à long terme pour conditionner l’opinion...

    Page 129 : « Il faut par conséquent que l’OTAN développe une stratégie d’information qui doit servir trois objectifs simultanément. Elle doit persuader le monde que l’OTAN est une force du bien. Elle doit se déployer avant que les adversaires commencent à répandre leurs informations, c’est-à-dire que l’OTAN doit imposer sa domination en matière de relations publiques. Elle doit gagner le coeur et l’esprit des habitants des pays de l’OTAN (à la justesse de l’attitude de l’alliance atlantique) mais aussi des populations dans les pays où se passe l’intervention armée. »

    « Imposer sa domination en matière de relations publiques ». L’information est conçue comme une guerre qui se gagne en éliminant les forces de l’adversaire. Il ne s’agit pas ici d’accusations gratuites : l’armée US a bombardé et emprisonné des journalistes d’Al-Jazeera, l’Otan a bombardé la télévision de Belgrade (17 tués), le Pentagone a préparé des plans pour éliminer les informations gênantes sur Internet dont le caractère démocratique dérange considérablement.

    Un plan de dictature mondiale

    Au début de leur document, les cinq généraux annonçaient « des pistes pour surmonter une rivalité avec l’U.E. » Comment vont-ils s’y prendre ? En fait, ils utilisent le cadre de l’Otan pour organiser la soumission de l’U.E. aux volontés de Washington...

    Page 137 : « Nous considérons que les forces multinationales sont la clé d’une modernisation rapide et peu onéreuse des forces de l’OTAN, mais nous soulignons que cette option n’est possible que si les Etats membres acceptent sans restriction que ces forces seront à la disposition de l’OTAN pour toute opération autorisée par le Conseil de l’OTAN. » Traduction : on obligera les armées européennes à obéir aux décisions de l’Otan (actuellement, l’unanimité est requise).

    Le plan des Cinq procure trois avantages aux Etats-Unis : 1. Intégrer des forces européennes dans leurs guerres. 2. Reporter les coûts sur les alliés. 3. Partager aussi l’impopularité.

    Le caractère antidémocratique des Cinq se manifeste clairement page 139 : « Nous choisissons de ne pas formuler nos propositions pour la réforme de l’UE de façon aussi détaillée que pour l’OTAN, et ceci pour deux raisons : tout d’abord un nouveau traité qui vient remplacer la ’constitution’ désormais condamnée est actuellement adopté en douce, de façon à éviter de consulter les populations. »

    Leur plan vise bien à rendre impossible toute opposition. Page 144 : « Afin d’éliminer toute source d’irritation, il pourrait être décidé que c’est toujours d’abord au sein de l’OTAN qu’un point sera traité et que les membres de l’OTAN qui sont aussi membres de l’UE s’engagent à ne pas s’écarter du vote posé à l’OTAN quand le point est abordé dans des instances européennes. » Donc, une fois que l’Otan aura décidé, un pays européen n’aura plus le droit de s’opposer.

    En conclusion, ce plan de la Bande des Cinq, préparé par des gens qui ont été au sommet du pouvoir militaire mondial, indique une tendance significative dans cette élite. Leur plan de super - gouvernement mondial à trois (dominé en réalité par les Etats-Unis) jetterait à la poubelle tout vestige du droit international, légitimerait la guerre préventive et les armes nucléaires, organiserait la manipulation systématique des opinions. C’est un plan de nature fasciste.

    Voilà une des deux options auxquelles l’élite des Etats-Unis pense actuellement pour résoudre ses problèmes. L’autre est incarnée notamment par Zbigniew Brzezinski dont nous avons parlé plus haut...

    « L’impérialisme intelligent » ?

    Les stratèges militaires US distinguent trois types de guerres qu’ils peuvent déclencher : 1. Les guerres de haute intensité. Il s’agit des affrontements entre grandes puissances du type des deux guerres mondiales. 2. Les guerres de moyenne intensité. Elles comportent aussi un engagement militaire US direct mais contre des puissances beaucoup plus faibles. Comme l’Irak ou la Yougoslavie. 3. Les guerres de basse intensité. Elles ne comportent pas d’engagement militaire direct des Etats-Unis. Ceux-ci s’arrangent pour se faire battre les autres. Ils provoquent des conflits entre pays voisins, ou à travers des mouvements paramilitaires ou terroristes.

    Trompeur, le terme ’basse intensité’ peut donner l’impression que les dégâts sont moindres. En réalité, ils ne sont moindres que pour les Etats-Unis. Ainsi, la guerre dite de ’basse intensité’ que Washington a déclenchée contre le Congo (à travers les armées du Rwanda et de l’Ouganda voisins, et diverses milices) a fait cinq millions de morts et elle a paralysé le développement du Congo.

    La stratégie Brzezinski, à la différence de Bush, privilégie ces guerres de basse intensité. Elle n’est donc nullement plus morale, mais se veut juste plus intelligente.

    Mais Brzezinski propose aussi de recourir à d’autres formes d’intervention. Souvent, on ne pense qu’à la forme la le plus visible de l’agression : l’intervention militaire des Etats-Unis. En réalité, ils disposent de toute une panoplie. Si on veut établir une typologie complète, dans l’ordre d’intensité, on doit compter les formes suivantes : 1. Corruptions des dirigeants locaux. 2. Chantages sur ces dirigeants locaux. 3. Campagnes médiatiques de diabolisation. 4. Déstabilisations diverses. 5. Embargos et blocus commerciaux. 6. Coups d’Etat. 7. Provocations de séparatismes. 8. Guerres par intermédiaires. 9. Bombardements. 10. Occupations terrestres. Toute une gamme de méthodes, on le voit, et qui peuvent évidemment se combiner, mais qui constituent toutes des agressions. Bien sûr, tous les gouvernements US recourent à l’ensemble de ces méthodes, et pas seulement à certaines. Mais le dosage et les financements diffèrent.

    Après les crimes commis par Bush, on pourrait être tenté de se réjouir de voir un changement de méthodes. En réalité, si Washington décide de changer ses tactiques, il ne s’agira pas de pacifisme, mais seulement de rendre la brutalité moins visible. Il faut rappeler que Brzezinski, c’est l’homme qui a financé ben Laden en Afghanistan pour piéger l’Union soviétique dans une guerre de longue durée, coûteuse et briser son alliance avec le monde musulman. Brzezinski est très fier de son succès et ne manque pas une occasion de le rappeler.

    Si les Etats-Unis décident d’appliquer la stratégie Brzezinski, il y aura sans doute moins de guerres directes. Et elles se feront le plus possible en concertation avec les alliés. Ce qui permettra également de mieux soigner l’image médiatique et la manipulation de l’opinion.

    Et surtout, en faisant travailler davantage la CIA, on s’efforcera de remplacer les guerres menées directement par les Etats-Unis par des guerres ’indirectes’. Faire se battre des pays voisins en soutenant ’le bon’ sous toutes sortes de bons prétextes. Ce fut la méthode employée avec succès par Clinton contre la Yougoslavie.

    La méthode Brzezinski présente deux avantages pour les Etats-Unis : 1. Elle leur redonne un aspect plus présentable, pour rétablir leur autorité morale. 2. En versant moins d’argent au complexe militaro-industriel, elle permet d’aider davantage l’économie US pour renforcer sa position concurrentielle face à l’Europe, la Chine, l’Inde, etc...

    Pour économiser sur les guerres, la stratégie Brzezinski recourt davantage aux chantages et aussi à l’action clandestine. Les chantages peuvent passer, notamment, par l’utilisation des instruments du contrôle économique global comme la Banque Mondiale, le FMI et l’OMC. Institutions multilatérales mais dominées par les Etats-Unis et permettant de dicter leurs volontés au tiers monde d’une manière apparemment plus objective. Mais ce ne sera pas facile car la Banque Mondiale et le FMI ont accumulé tant de haines là où ils sont passés que les pays ont cherché des alternatives. L’idée d’une Banque du Sud, lancée par Chavez, fait son chemin...

    L’action clandestine, c’est-à-dire la CIA, devrait aussi être utilisée davantage. Elle permet de se débarrasser des gouvernements gênants avec des investissements bien moindres.

    Voilà pourquoi les tenants de la stratégie de Brzezinski se définissent comme partisans d’un ’soft power’ ou ’impérialisme intelligent’. Le danger, avec ce soft power, serait que la gauche se réjouisse d’être débarrassé de Bush et diminue sa vigilance parce qu’il y aurait - pendant un certain temps - moins de guerres directes. De sorte que le mouvement anti-guerre international, qui connaît une crise évidente, riposterait encore moins face aux stratégies plus discrètes de l’Empire.

    De toute façon, cet Empire ne deviendra pas pacifique. Tôt ou tard, il relancera des guerres à la Bush. Parce qu’en fait, l’élite US pratique un cycle d’alternance entre les deux options...

    Les présidents passent, les multinationales restent

    Elles ne sont pas nouvelles, ces deux options, militariste ou ’intelligente’. Et il ne s’agit pas d’une opposition entre républicains et démocrates. Parce que ces deux partis ne représentent pas ’la guerre’ et ’la paix’, mais seulement des électorats différents, et des tactiques différentes, et toujours au services des multinationales. Ainsi, ce n’est pas un républicain, mais bien un démocrate, Harry Truman, qui a déclenché la guerre en 1950 contre la Corée et la Chine. Ce n’est pas un républicain, mais bien un démocrate, John Kennedy, qui a commencé la guerre contre le Vietnam en 1961.

    Et ce n’est pas non plus un vote populaire contre un vote bourgeois. Les multinationales US financent toujours les deux candidats, plaçant leurs oeufs dans les deux paniers. Mais on peut juger leurs préférences aux montants versés. Au début des années 90, les multinationales investissent des deux côtés, mais privilégient Clinton et les démocrates à 58 %. A partir de 1996, au contraire, elles misent sur les républicains à 67 %. Aux présidentielles de 2000, c’est Bush qui est financé massivement. Et déclaré élu bien que le scrutin ait désigné son rival Gore. Par contre, à la présidentielle de 2008, les multinationales changent à nouveau de côté et financent davantage Obama que son rival McCain.

    De toute façon, le même président peut changer de politique. Après la chute de l’URSS et la fin de la guerre froide, Bill Clinton a d’abord baissé les budgets militaires et les commandes au complexe militaro-industriel dans l’espoir de relancer la machine économique US en général. Mais, bien que la décision soit passée quasiment inaperçue, le même Clinton, en fin de mandat, a effectué un virage : « Le budget militaire des Etats-Unis doit augmenter de 70 % » [10] Ce qui confirme ce qui a été dit plus haut : les grandes décisions politiques ne dépendent pas du caractère de tel ou tel président, mais bien de stratégies décidées plus haut. Les présidents passent, les multinationales restent.

    La politique US alterne les méthodes

    Donc, on parlera plutôt d’une alternance dans la politique des Etats-Unis. Après chaque grand revers, on constate un retour, temporaire, au ’soft power’.

    Après la défaite du Vietnam et la réprobation morale envers les dictatures installées par Washington en Amérique latine, les multinationales US ont porté à la présidence le gentil pasteur Jimmy Carter avec de merveilleux discours sur les droits de l’homme. Après la guerre froide et la première guerre contre l’Irak, le président Clinton s’est efforcé d’embarquer les Européens dans ses guerres et il a soigné la présentation médiatique. En fait, pour essayer de résoudre ses problèmes, la bourgeoisie US a constamment hésité entre les deux options. Ou plutôt, elle les a alternées : un peu plus de bâton, un peu plus de carotte. Mais ses choix deviennent de plus en plus difficiles. Car aucune méthode ne résout vraiment les problèmes.

    A présent, après le désastreux bilan de Bush, cette bourgeoisie US hésite entre les deux options. Ou bien la fuite en avant, c’est-à-dire la guerre tous azimuts. Ou bien un repli tactique, reculer pour mieux sauter et réorganiser les méthodes d’action. La question n’est pas tant de savoir quel président elle choisit, mais bien quelle stratégie.

    De toute façon, on n’est pas certain que la stratégie Brzezinski soit, au final, moins brutale que celle de Bush. Il est vrai qu’en 2008, il a critiqué publiquement le président en disant qu’il était stupide de vouloir attaquer l’Iran, parce qu’il ne pouvait pas gagner et qu’une guerre serait nuisible à la situation d’Israël, au prix du pétrole, et donc à l’économie US. Mais certains analystes pensent que Brzezinski veut ménager l’Iran parce qu’il espère retourner ce pays et le faire participer un jour à un encerclement de la Russie. Voilà la puissance qui reste la bête noire, l’obsession de l’auteur du Grand Echiquier. Certains pensent que Brzezinski vise toujours à encercler et affaiblir complètement la Russie, quitte à en découdre avec elle. Sans oublier la Chine, devenue manifestement une cible majeure. Dans cette hypothèse, le soft power se transformerait en une apocalypse now.

    Leurs solutions aggravent le problème

    Que la bourgeoisie US soit divisée sur la ligne à suivre, découle du fait que les Etats-Unis ne sont finalement pas si puissants qu’on le croit. Ni sur le plan économique, ni sur le plan militaire. A chaque fois que les dirigeants des Etats-Unis ont cru avoir trouvé une solution, il s’est avéré après un certain temps que cette solution aggravait le mal.

    Par exemple, dans les années 80, pour échapper à la récession, les multinationales US ont foncé sur l’Amérique latine et d’autres régions du tiers monde, faisant main basse sur leurs matières premières, leurs entreprises, leurs marchés. Mais comme cette offensive néolibérale a tellement appauvri ces pays, elle a provoqué des catastrophes économiques, donc des résistances de plus en plus fortes et l’Amérique latine a viré à gauche. A partir de 1989, Washington a déclenché une guerre globale pour s’assurer le contrôle absolu du pétrole. Mais le pétrole lui a échappé de plus en plus. A partir de 2001, Bush a déclenché sa guerre contre le prétendu Axe du Mal, mais il n’a réussi qu’à renforcer les résistances dans toutes les régions.

    Les Etats-Unis paraissent très forts, mais le sont-ils vraiment ? Avec tous leurs dollars, toutes leurs technologies et tous leurs crimes, ils ont perdu la guerre de Corée (1950) et celle du Vietnam (1961-1975), ils ont dû se replier du Liban (1982) et de la Somalie (1993), ils n’auraient sans doute pas gagné en Yougoslavie (1999) si le président Milosevic avait accepté les combats terrestres, et ils ont d’ores et déjà perdu en Irak et en Afghanistan, même s’ils ne le reconnaissent pas encore. Ne sont-ils pas, effectivement, comme on dit, un ’tigre en papier’ ? Sur le long terme, les peuples qui défendent leurs richesses et leur avenir, ne sont-ils pas plus forts que les dollars et les missiles ?

    Les Etats-Unis ont beau dépenser à eux seuls plus que toutes les autres nations du monde ensemble pour les budgets militaires, cela ne réussit plus à leur assurer la suprématie mondiale. Ils sont eux-mêmes victimes, si l’on peut dire, de leur contradiction fondamentale : tout ce qu’ils font s’oppose aux intérêts de l’immense majorité des habitants de cette planète, ils créent donc eux-mêmes la force qui les abattra.

    Une armée ne peut pas être plus forte que l’économie qui la finance. Et la faiblesse fondamentale qui empêchera les dirigeants US d’atteindre leur but, c’est que l’économie US scie la branche sur laquelle est assise. En sous-payant ses travailleurs, en délocalisant une partie de sa production, en ruinant les pays du tiers monde qui devraient être ses partenaires, elle ne cesse d’appauvrir ceux à qui elle est censée vendre.

    Ce problème, aucune des deux options, ni la militariste, ni l’ ’intelligente’ ne pourra le résoudre. Les militaristes augmentent les dépenses et les résistances. Les ’intelligents’, s’ils diminuent la terreur diffusée par la guerre directe, encouragent aussi la résistance.

    Quelle que soit la tactique choisie, les Etats-Unis continueront à porter la guerre partout dans le monde. Pour imposer leur système économique et leurs intérêts. Il est urgent de recréer un puissant mouvement pour la paix et la souveraineté des peuples.

    Michel COLLON
    1er septembre 2008

    Publié le 19 septembre 2008 par Le Grand Soir.


    [1] John E. Peters, etc, War and escalation in South Asia, PDF
    [2] New York Times, 3 avril 2008.
    [3] Le Monde, AFP, Reuters, Le Figaro, 21 avril 2008.
    [4] Corriere della sera, 21 avril 2008.
    [5] Michel Collon, Monopoly, EPO, Bruxelles, 2000. Epuisé, voir copie gratuite à : Brzezinski.
    [6] Le Soir (Belgique), 23 avril 2008.
    [7] Project for a New American Century (PNAC), Rebuilding America’s Defenses, septembre 2000.
    [8] Towards a grand strategy for an uncertain world, German Marshall Fund of the United States, GMFUS
    [9] Nouvel Observateur (France), 1er juillet 1999.
    [10] Clinton Remarks on US Foreign Policy, 26 février 1999.

    Les liens entre l’économie et la guerre sont analysés dans le livre "Bush le cyclone". Ce livre répond notamment à la question "Qui commande à Bush ?" Et donc au prochain président.

    Ces questions seront aussi abordées dans le prochain séminaire organisé par Investig’Action les 8 et 9 novembre.
    Infos : Investig’Action

    D’autres articles sur la politique internationale des Etats-Unis, la Russie, la Chine, l’UE, l’Irak, l’Afghanistan, Brzezinski, Obama... : Investig’Action

    Voir aussi :
  • Etats-Unis, Le Grand Soir.
  • Impérialisme, Le Grand Soir.