1 août 2009

Le pouvoir, l'argent et la vertu


Charles DICKENS, La Petite Dorrit, Edition de La Fontaine au Roy, 1989.

"Le dieu Merdle venait de mettre fin à ses jours. Un vent de panique commença à souffler. Quantité de professionnels, de vieilles gens, des légions de femmes et d'enfants allaient voir, par sa faute, leur avenir dévasté. Lui, l'objet de tant d'adulation, la vedette de tant de banquets, le patron des patrons, l'étoile qui brillait au ciel des affaires, était tout simplement le plus grand faussaire, le plus grand voleur ayant jamais échappé au gibet."

A la différence de Bernard Madoff, le génial arnaqueur de Wall Street qui a été condamné, le 29 juin, à cent cinquante ans de prison, Mr Merdle n'eut pas la force d'affronter l'opprobre et la prison de l'Angleterre victorienne. Il se suicida. Mais, comme lui, il avait trompé d'innombrables clients avant d'être démasqué.

"Manieur de fonds" sans scrupule, jaloux des secrets de son commerce, très riche à force d'escroqueries occultes, Mr Merdle incarne le parfait antihéros du roman de Dickens, La Petite Dorrit, publié en 1856 sous forme de feuilleton mensuel, puis l'année suivante en deux tomes, mais dont l'action se déroule trente ans plus tôt. L'infâme banquier a pour impeccable antithèse la jeune Amy Dorrit, qui donne son nom au livre, infiniment douce, honnête, aimante et généreuse.

Par une coïncidence que Dickens met en évidence dans sa préface à l'édition de 1857, l'ouvrage paraît au moment où un esclandre défraie la chronique financière. Les huit directeurs de la Royal British Bank, l'un de ces établissements par actions qui fleurissent à l'époque, sont accusés d'avoir conspiré pour berner leurs clients. Le royaume en est tout secoué, au point que le prince de Galles, héritier du trône, siège en personne au premier jour du procès, à côté du Lord Chief Justice. Les banquiers tricheurs seront condamnés à de courtes peines de prison.

La prison ? Elle offre son décor à plusieurs chapitres du livre. Il s'agit en l'occurrence de la vieille Maréchaussée (Marshalsea) qui, à l'ombre de l'église Saint-George, accueillera pendant cinq siècles les condamnés pour dettes.

Londres a construit davantage de prisons que toute autre ville."Je sais qu'à Londres, chantait-on, et à un mile à la ronde, geôles et prisons, dix-huit en tout, abondent." Six d'entre elles, dont la Maréchaussée, se trouvent au sud de la Tamise, à Southwark, appendice malfamé de la capitale du monde, qui, note un contemporain, "respire le meurtre, la tristesse et la misère".

Pour son malheur, Dickens connaît parfaitement les lieux. Il vient d'avoir 12 ans en février 1824 lorsque son père, John, un petit employé de bureau qui vit au-dessus de ses moyens, est incarcéré pour dettes à Marshalsea. John doit 40 livres et 10 shillings à un boulanger de son quartier. Il restera quatorze semaines en prison, où sa femme et ses trois plus jeunes enfants viendront vivre avec lui.

Charles est traumatisé. Contraint de quitter l'école, il travaille pendant six mois dans une fabrique de cirage, sur le Strand, où il colle, dix heures d'affilée, des étiquettes sur des flacons. Son maigre pécule aide à régler les dépenses familiales dans une prison dont les locataires doivent se nourrir et se vêtir à leurs frais. Il rend visite à sa famille chaque dimanche puis, ayant trouvé un logis plus proche, petit-déjeune et dîne avec elle chaque jour. Cette humiliante épreuve le marquera à jamais. Devenu financièrement à l'aise assez tôt, Dickens restera hanté par la crainte de la déchéance matérielle. Ce souvenir douloureux contribuera à pétrir le réformisme social de l'écrivain, défenseur compatissant des pauvres, contempteur des exploiteurs, procureur de l'indifférence ou de l'hypocrisie des nantis.

Les lecteurs de La Petite Dorrit ignorent les tourments d'enfance de Dickens. Ils ne les apprendront qu'après sa mort (1870). Les prisons de Londres et leurs hôtes endettés figurent dans deux autres célèbres romans antérieurs, Les Aventures de Mr Pickwick et David Copperfield.

Amy Dorrit - taille minuscule et coeur immense - naît à Marshalsea, où son père William est détenu pour des affaires si embrouillées que ni lui ni personne n'est en mesure de les élucider. Son créancier, intraitable, lui refusera longtemps la liberté. Les débiteurs en prison étaient si nombreux à Londres qu'ils représentèrent jusqu'à la moitié des nouveaux mariés enregistrés dans la ville.

Le vieil insolvable deviendra le doyen, "le père" de la Maréchaussée. "La petite", transformée en une belle jeune femme, quitte la prison chaque matin et traverse le London Bridge pour travailler de l'autre côté du fleuve. Elle rencontrera l'affectueux Arthur Clennam, qui sera son ami, son bienfaiteur, et l'épousera à la dernière page du livre.

La Petite Dorrit est aussi une charge sarcastique contre la bureaucratie gouvernementale que symbolise le bien nommé ministère des circonvolutions, refuge des médiocres et des paresseux, à l'image d'un certain Tenace Mollusque, le plus puissant des créanciers de William. Ancien sténographe à la Chambre des communes, puis journaliste parlementaire, Dickens dénonce avec ironie la cruauté des institutions.

Mais ce roman, composé de deux "livres", intitulés "La Pauvreté" et "Les Riches", est d'abord une réflexion sur le pouvoir, l'argent et la vertu. Héritier inattendu d'une fortune colossale, William retrouve enfin la liberté, et mène grande vie, étourdi de plaisirs. Il devient fat, égoïste, snob, et toute sa famille avec lui, ce qui attriste Amy, restée fidèle à elle-même.

L'argent, nous dit l'auteur, ne suffit jamais à rendre heureux. Morale édifiante, et d'autant plus méritoire de la part d'un homme qui aura été obsédé, toute sa vie, par le souci d'être à l'abri du besoin.

Le Monde

Lire aussi :
• La Petite Dorrit, Wikisource tome I en ligne
• Dossier Dickens, Romantisme n°34, 1981
• La Petite Dorrit, INA 1ère partie - 2ème partie
• La Petite Dorrit, AlloCiné
• L'économie en crise, Le Monde
- 1838 : quand la banque est au coeur du système social..., Le Monde
- 1851 : sous le personnage de théâtre, un aigrefin de la Bourse, façon Madoff, Le Monde
- 1857 : une réflexion sur le pouvoir, l'argent et la vertu, Le Monde
- 1887 : l'intérêt financier au-delà des sentiments, Le Monde
- 1891 : fièvres spéculatives sous le Second Empire, Le Monde

31 juillet 2009

Monsieur Sac de riz et Chanoine de Latran

Quatre jours avant que Le Monde ne publie deux notes des services de renseignement de la police disant que «367 femmes en France - soit, en moyenne, une sur près de 90 000 - porteraient la burqa ou le niqab» [1], le même quotidien annonçait la création en juin dernier d'un "pôle religions" au Quai d'Orsay, dirigé par Joseph Maïla (CV), ancien recteur de l'Institut Catholique de Paris [2]. Les deux informations n'ont pas suscité beaucoup de commentaires.

On nous avait seriné que le port du voile était une atteinte à la République laïque et puis on nous avoue, subrepticement pendant les vacances, que le port du voile intégral ne concerne en fait que «367 femmes en France» et qu'il est urgent d'accorder à la religion la place qu'elle mérite : «Du Xinjiang au Tibet, de Téhéran à Jakarta, la religion est au coeur de nombre de conflits du XXIe siècle.». Bernard Kouchner nous récite le catéchisme du choc des civilisations et de la laïcité positive de son maître le chanoine de Latran - concept qui en novlangue signifie l'abandon de la laïcité au profit des religions et spécialement de la religion catholique [3].


Ainsi, le 18 décembre 2008, la République française et le Saint-Siège ont discrètement passé un accord afin d'établir une reconnaissance des grades et diplômes de l'enseignement supérieur entre les deux États. Cet accord est entré en vigueur le 1er mars 2009. La publication du texte de l'accord a fait l'objet d'un décret signé le 16 avril 2009 par le Président de la République, Nicolas Sarkozy, le Premier ministre, François Fillon, le ministre des affaires étrangères et européennes, Bernard Kouchner. Jean Baubérot avait dénoncé le fait que «c’est un des fondements de la laïcité de l’enseignement qui est mis en cause, car celle-ci repose sur la collation des grades par les universités publiques» (Le Monde du 12 mai 2009).

Les affaires du voile puis de la burqa d'une part et celle de la laïcité positive d'autre part illustrent la croisade contre les musulmans et le nouvel ordre moral qu'imposent le pouvoir à la société avec la complicité plus ou moins active de tous les partis. Des organisations, comme Lutte Ouvrière à l'extrême gauche, le PCF et la CGT à gauche, sont à l'avant-garde du soutien à Nicolas Sarkozy. Les principes républicains, la laïcité et la cause des femmes servent à voiler le racisme colonial qui, de l’extrême droite à l’extrême gauche, gangrène la société française depuis presque deux siècles [4].


Il faut lire la Réplique au discours du chanoine de Latran de Jean-Luc Mélenchon (disponible aussi sur Voltaire). Il analyse dans le détail la vaste entreprise de confessionalisation des institutions françaises qui, en rupture avec l’histoire du pays et son pacte social, vise à faire entrer la France dans le projet néoconservateur du choc des civilisations.

Serge LEFORT
31/07/2009

Lire aussi :
• Dossier documentaire & Bibliographie Laïcité, Monde en Question.
• Dossier documentaire & Bibliographie Voile, Monde en Question.

[1] L'amalgame de l'article du Monde entre burqa et niqab n'est pas anodin car il impose le mot burqa, connoté terrorisme afghan, alors qu'il y a une différence entre les types de voile musulman, que l'agence Reuters parle de «voile intégral» et que l'agence AFP précise que la «"burqa", qui désigne le voile des Afghanes, n'est quasiment pas portée en France».
• La loi et la burqa, Le Monde, 29/07/2009.
• La police estime marginal le port de la burqa, Le Monde, 29/07/2009.
• "En France, la liberté pour tous, sauf pour les musulmans !", Le Monde, 22/06/2009.
[2] Revue de presse :
• Bernard Kouchner vient de créer un pôle religions au Quai d'Orsay, une première en France, Le Monde, 25/07/2009.
• Réactions, Le Monde, 25/07/2009.
• Création d'un "pôle religions" au Quai d'Orsay, France Diplomatie, 27/07/2009.
• Bernard Kouchner a créé un "pôle religions" au Quai d'Orsay, RSR, 28/07/2009.
[3] Revue de presse :
• Sarkozy fait «chanoine d'honneur de Saint-Jean-de-Latran, 20minutes, 13/12/2007.
• Nicolas Sarkozy installé chanoine, Église Catholique en France, 19/12/2007.
• Allocution de M. le Président de la République dans la salle de la signature du Palais de Latran, Présidence de la République, 20/12/2007.
• Jean-Luc MÉLENCHON, Réplique au discours de Latran, Voltaire, 22/01/2008.
• Jean-Luc MÉLENCHON, À propos de la Laïcité, Blog, 13/02/2008.
• Jean-Luc MÉLENCHON, Ânerie morbide, Blog, 15/02/2008.
• Jean BAUBEROT, Du Président de la République française, Chanoine de Latran, Le Grand Soir, 07/04/2008.
• Jean-Luc MÉLENCHON, Le pape arrive : jour de deuil, Blog, 04/09/2008.
[4] Voir les précédents articles :
• Serge LEFORT, Chacun est libre de porter tel vêtement que bon lui semble, Monde en Question, 29/06/2009.
• Serge LEFORT, De la burqa au string, Monde en Question, 30/06/2009.

30 juillet 2009

Le corps du roi

Depuis plus de mille ans que la monarchie existe en France, la question de la santé du roi et même plus généralement du corps du roi est au cœur de la vie publique. La République n'’y a pas changé grand-chose. Malgré deux tentatives de dépersonnalisation du pouvoir (1879-1940 ; 1946-1958), le peuple a toujours préféré, sous l'Ancien Régime comme sous la République, une domination de type charismatique, fondée sur la présence physique du souverain, à une domination de type bureaucratique, fondée sur l'anonymat de la machine gouvernementale. En dépit de Max Weber, qui voit dans la seconde la forme moderne et démocratique de la domination, le deuxième avènement du général de Gaulle (1958) a consacré ce retour à la forme traditionnelle du pouvoir. L'’insatiable curiosité du public pour la vie privée des Grands accentue encore cette tendance.


C'’est pourquoi un simple «pépin de santé» de Jacques Chirac est nécessairement un événement politique important. Paradoxalement, son séjour d'une semaine au Val-de-Grâce a confirmé que c’était bien lui le chef de l'État, et non Villepin, encore moins Sarkozy. Les Français ne s'y sont pas trompés : loin de l’'affaiblir, sa maladie lui a valu huit points de popularité supplémentaires. Mitterrand moribond avait connu la même embellie : ce n’est pas seulement affaire de compassion, c'est affaire de légitimité. Nous sommes donc condamnés à vivre au gré de la santé des chefs de l’'État, d’'autant plus que nous les choisissons de plus en plus vieux. Successivement, l'’âge et la santé de Charles de Gaulle, Georges Pompidou, François Mitterrand et maintenant Jacques Chirac ont fait l’'objet de préoccupations et de spéculations. Seul Valéry Giscard d'Estaing a échappé à la règle, et cela parce que le peuple lui a signifié son congé plus tôt.

Deux principes entrent ici en contradiction : celui de la transparence nécessaire quand il s'’agit de la santé du chef de l’'État ; celui de la protection de la vie privée, principe nouveau qui n’'existait pas jadis. Les reines de France accouchaient en public pour que la légitimité de leurs enfants soit hors de question ; les maladies des rois étaient elles aussi des événements publics. Celle de Louis XV, par exemple, est restée célèbre ; le Bien-Aimé devenu le mal aimé a littéralement pourri sous le regard de la cour et de la ville. Quant aux capacités sexuelles des Grands, elles faisaient l’'objet de spéculations permanentes.

Pour satisfaire au principe de transparence tout en protégeant la vie privée, il suffirait, comme on l’'a proposé pour en finir avec cette irritante question, qu'un collège indépendant de trois médecins de grande réputation soit désigné par le Conseil constitutionnel. Il devrait procéder à un examen périodique du chef de l'’État et publierait un bulletin de santé chaque fois qu'il le jugerait nécessaire. C'’est à lui, en outre, qu'il incomberait de prononcer un avis technique sur une éventuelle incapacité du président à exercer ses fonctions.

Au-delà des questions proprement médicales, il est souhaitable que la vie privée des hommes publics soit respectée. La couverture récente de «Paris Match» montrant Cécilia Sarkozy en compagnie de son amoureux était inopportune et choquante. Cela dit, l’'implication croissante de la famille des hommes politiques dans leur activité publique encourage la confusion. Après tout, il ne serait venu à l’'idée de personne de dire que les relations de Louis XIV avec Mme de Maintenon ou de Louis XV avec la Pompadour relevaient de leur vie privée.

Le léger accident de Jacques Chirac n'’a fait que renforcer une évidence apparue lors du référendum raté du 29 mai dernier : il ne pourra pas être de nouveau candidat en 2007. Pour continuer à filer la métaphore monarchique, deux candidats au trône sont dès lors apparus ipso facto : le premier, issu de la branche aînée, a le profil aristocratique qui convient ; le second, issu de la branche cadette, est un bourgeois orléaniste pur. Comme tous les Orléans, il voue une haine sans faille aux représentants de la branche aînée : en 1793, Nicolas-Egalité eût voté la mort du roi. Une analyse marxiste sommaire conduirait à penser qu'au-delà de ces apparences, l’'un et l’'autre défendent les mêmes intérêts de classe. Ce n’est pas tout à fait le cas. L'un en appelle à l'’acclamation publique, l’'autre à l’'élection ; l’'un défend la vision gaulliste de l'’État au-dessus des intérêts particuliers ; l’'autre le caractère bénéfique pour tous de la promotion de la classe dominante. À la lumière de l’'Histoire de France, quel beau match en perspective !

Jacques Julliard
15 Septembre 2005
Le Nouvel Observateur

Lire aussi :
Jean-Jacques Delfour, Les deux corps du président de la République, Philosophie du visible, 22 janvier 2009.
Comme on le sait depuis Kantorowicz, ce corps est toujours double : d’un côté, le corps du roi, ou du chef de l’État, est un corps spirituel, rattaché à un fondement de légitimité, théologique dans la philosophie politique médiévale, fondé sur une idée du peuple souverain dans le républicanisme moderne ; de l’autre, un corps physique, effectif, visible, palpable, posé comme symbole du précédent. D’où l’invention du protocole, des vêtements royaux, de postures corporelles particulières, de mythes (le sang bleu, etc.), c’est-à-dire un ensemble de signes qui recouvrent le corps physique jusqu’à l’investir de qualités politiques. Le corps et la conscience du chef de l’État sont traversés par des chaînes de signifiants qui assurent la crédibilité sensible et sociale du système symbolique de légitimité et qui reçoivent de ce dernier les significations utiles au bon fonctionnement de l’État (c’est-à-dire l’obéissance aux lois et aux décisions du pouvoir).

Ernst Hartwig Kantorowicz, Les Deux Corps du Roi, Gallimard, 1989.
Ernst Kantorowicz a toujours été passionné par le problème de l'État qui s'incarnait dans le Frédéric II de sa jeunesse, surhomme nietzschéen insufflant au Reich médiéval la majesté et les prétentions universelles de la Rome impériale qu'il opposait aux prétentions également universelles du pape. Mais l'universitaire déraciné, victime tout à tour du nazisme et du maccarthysme, ne pouvait plus, au soir de sa vie, se satisfaire d'une image ambivalente dont il savait trop bien à quel point elle avait fasciné les nazis

Dans ce livre étrange et profondément original, il scrute donc le "mystère de l'État", concentré dans la métaphore des deux corps du roi : le mystère de l'émergence, dans le cadre des monarchies de l'Occident chrétien, entre Xe et XVIIe siècle, au travers et au-delà de la personne physique du Prince, de cette personne politique indépendante de lui bien qu'incarnée en lui, et destinée à vivre un jour de sa vie propre sous le nom d'État. C'est l'alchimie théologico-politique qui a présidé à cette opération capitale que reconstitue l'ouvrage. La transmutation de la figure royale a pour point de départ le modèle des deux natures du Christ. Elle a pour moteur la rivalité mimétique à la faveur de laquelle le pouvoir séculier s'affirme en face de l'Église en s'emparant de ses attributs de corps mystique. Son accomplissement passe enfin par l'installation dans une perspective de perpétuité temporelle qui achève de conférer au corps politique invisible constitué par le Roi et la communauté de ses sujets passés, présents et à venir une réalité légitime supérieure au corps de chair du même monarque. La savoir le plus spécialisé est au service ici de l'exhumation d'un des pans les plus secrets et les plus décisifs du "miracle européen".

Journal de santé de Louis XIV, édition établie et précédée de La Lancette et le sceptre, par Stanis Perez, Jérôme Millon, 2004 [BooksGoogle].
Lorsque l'héritière de M. Fagon, le fils du dernier médecin de Louis XIV, remet en 1744 à la Bibliothèque royale les notes prises au jour le jour sur les maladies et accidents de santé du souverain, le héros du Journal est mort depuis près de trente ans. Le texte est soigneusement rangé dans les collections royales, témoignage discret, sinon secret, sur les désordres physiques du grand prince. Le manuscrit ne sera publié que sous le second Empire, en 1862, dans une édition demeurée, elle-même, unique jusqu'à aujourd'hui. C'est ce texte que publient les éditions Jérôme Millon, avec un commentaire et une introduction remarquables de Stanis Perez. Le document, connu des seuls historiens, se révèle d'un intérêt primordial, non seulement par les détails des maux de l'époque, mais par l'accumulation d'indices qu'il suggère sur le fonctionnement de la royauté, comme sur le savoir de la médecine classique.

Une certitude, tout d'abord: les médecins notent patiemment les épisodes de la vie physique du roi dans un but exclusivement «savant». Ils recensent les maux pour mieux les comprendre, consignent les médications pour mieux les fixer, ou, comme le dit le premier rédacteur, en 1647, «servir d'instruction à mes successeurs aux occasions qui se présenteront à l'avenir durant l'heureux cours de sa vie». Le roi doit être d'autant mieux surveillé qu'il est devenu plus «grand», doté d'un corps plus précieux que jamais: corps étrange à vrai dire, dont la seule présence, dans la monarchie absolue, manifeste d'emblée l'État, sa continuité physique, son «immémoriale» existence, ses impérieuses décisions, alors que l'autre versant de ce corps n'est que l'enveloppe fragile d'une réalité toute mortelle. Incarnation centrale d'un côté, image charnelle et ramassée du territoire et de son unité, incarnation précaire de l'autre, organes offerts aux aléas du mal: tels sont les «deux corps du roi», selon la belle image de l'historien allemand Ernst Kantorowicz.

Le souci de grandeur court sous tous les exemples du texte. La royauté de Versailles et de la cour existe d'abord par ce qu'elle montre. L'architecture, en particulier, prolongeant le corps du souverain, cultivant le monumental, voire la symétrie, au détriment de toute chaleur intime, favorise courants d'air et «vents coulis». Les médecins composent avec les rhumes royaux, le froid des saisons, la rigueur des lieux. Ils composent aussi avec les nécessités de la représentation royale, l'art unique de gouverner en «fusionnant» l'État et le corps du «soleil», cette visibilité constante et obligée du roi, indispensable malgré les maladies, les accidents, les convalescences, les soins.

D'où ces remarques répétées sur des guérisons retardées par les chevauchées, les cérémonies, le «devoir de se faire voir à la cour». D'où le sentiment répété d'une grandeur royale commandant aux courtisans comme aux médecins. D'où, plus encore, les efforts pour masquer des faiblesses dont la seule vue déclencherait l'inquiétude. Les médecins, pénétrés de la majesté de leur patient, en tirent le sentiment d'une grandeur personnelle: celle d'avoir entre leurs mains la «chair» même de l'État.

Les maladies ne manquent pas dans l'existence d'un monarque dont la mort, à 78 ans, témoigne de l'exceptionnelle longévité: la petite vérole (la variole) dans l'enfance, avec ses traces éruptives marquant le visage de l'homme adulte, la blennorragie, les caries, les pertes de dents, la goutte, la gravelle, la fistule anale, la gangrène à la jambe à la fin de la vie, ultime épisode dont le Journal, interrompu sans doute dans l'agitation des quatre dernières années, ne garde pas trace. «Le mythe de la santé inaltérable, distillé par les panégyristes, est rendu caduc par le Journal et ce une fois pour toutes», conclut Stanis Perez.

Les médecins opposent à ce délabrement une suractivité. Le texte témoigne d'une médecine résolument «moderne», prétendant tourner le dos aux croyances et aux superstitions: un art passionné de causes et d'effets. Le résultat n'en est pas moins totalement décalé, voire dérisoire, au regard des repères d'aujourd'hui. La médecine du XVIIe siècle connaît l'anatomie, mais ignore la physiologie, à l'exclusion de la circulation sanguine. Son univers est celui des humeurs, ces «eaux du corps» censées faire seules la qualité des organes, dont la présence est visible à la couleur du visage ou de la peau et repérable selon la forme ou la variété des écoulements survenant au moindre incident.

Ces liquides font aussi les maladies : ils s'échauffent, pourrissent, se dégradent, se déplacent ou stagnent, entraînant autant de dysfonctionnements possibles. D'où cette surveillance constante des évacuations du corps royal pour mieux quêter le moindre danger. Le Journal devient ainsi une foisonnante énumération des selles royales, qui sont, selon les jours, «bouillonnantes», «bilieuses», «écumeuses», «noirâtres», «grisâtres», «rougeâtres» ou encore «bien conditionnées». Il devient aussi une foisonnante énumération des saignées et des purgations prises en toutes circonstances, non seulement pour atténuer les fièvres, les furoncles, les sérosités, mais aussi pour parer à l'agitation des voyages, des veilles, des travaux, comme à celle des deuils ou des soucis. Médecine «moliéresque» sans doute, mais dont on voit bien ici la logique toute mécanique, la volonté d'éclaircissements, d'explications physiques, voire de constats; médecine dont on voit bien aussi la certitude de réussite et d'efficacité.

C'est ce qui oriente encore le regard du médecin sur le corps du malade, conduisant son attention, l'inclinant à sélectionner des symptômes sinon à les fabriquer, inventant des maladies dont le sens ne subsiste guère aujourd'hui. Les humeurs ne se transforment-elles pas, comme peuvent le faire les liquides les plus communs? Elles s'allègent, s'épaississent, s'évaporent, se densifient. Elles transforment poches et vaisseaux, dégageant ou obstruant poitrine ou cerveau. Elles créent des «étourdissements», des «vapeurs», des «âcretés de bouche», des «mouvements», des «chocs». Elles voyagent, «montant» avec les chaleurs, se déplaçant avec les positions, les mouvements, le sommeil, les climats. Symptomatologie baroque dont le corps du roi devient l'inépuisable théâtre.

Reste l'accumulation des maux, ces symptômes d'affaiblissements visibles patiemment énumérés par les médecins et qui peuvent menacer la mythologie royale: l'Apollon des peintures de Versailles peut n'être plus que pantin délabré perclus de douleur, Alexandre le Grand terrassé par les fièvres. Le tourment de la maladie ancienne vient plus fortement encore contredire l'élaboration mythique de la monarchie absolue. La goutte par exemple, qui fait vaciller le roi, l'empêche de mettre pied à terre et abat son énergie; ou ces «flux du ventre» conduisant quelquefois à d'insurmontables épuisements. Le roi le sait, qui conclut dans ses Mémoires: «Ceux qui voient le prince de près, connaissant les premiers sa faiblesse, sont aussi les premiers à en abuser.»
Les médecins ont alors pour tâche de soigner, mais aussi de masquer. C'est dans leur impuissance, notamment, que s'inscrivent les limites de la mythologie du roi.

Georges Vigarello
21/06/2004
L'Express

Thomas W. Gaehtgens et Nicole Hochner (sous la direction de), L'image du roi de François 1er à Louis XIV, Editions MSH, 2006 [BooksGoogle].
L'image du roi n'est pas une simple illustration ou mise en scène, car elle incarne le pouvoir, le corps de l'État. On y trouve une dimension à la fois esthétique, culturelle et politique. On y participe à un rituel d'échange. Le roi nous contemple alors que son image nous surveille. Mais cette image n'est pas uniquement la trace visible de l'autorité, elle est aussi un lieu de séduction où se tisse un rapport affectif et cultuel entre le peuple et le souverain, entre la peinture et son modèle. Qu'elle soit fastueuse dans son éloge ou impitoyable dans sa caricature, l'image du roi ne cesse jamais d'être à la recherche d'un modèle de perfection esthétique, éthique et politique.

Les études rassemblées ici conduisent à des analyses croisées, tour à tour historiques, artistiques et économiques. Elles couvrent les 15e, 16e et 17e siècles, époques où se construit l'État moderne. Dans une perspective européenne, elles nous mènent de Versailles à Lérida, de Milan à Amsterdam et de Madrid à Vienne, et éclairent les figures de nombreux souverains de Louis XII à Louis XIV, de Charles Quint à Philippe IV sans oublier François 1er ou Catherine de Médicis.

Pour aller plus loin : Dossier documentaire & Bibliographie Propagande, Monde en Question

29 juillet 2009

Du récit au récit médiatique


Marc LITS, Du récit au récit médiatique, De Boeck, 2008 [Nonfiction]
Cet ouvrage propose une réflexion sur le rôle du récit dans toute société, et jette un regard critique sur les différentes méthodologies d'analyse de ces récits, ainsi que sur leur place dans un système médiatique omniprésent.

Pour lire correctement un récit, et pour en produire, il est utile de connaître et de maîtriser ses règles d'organisation, depuis ses structures de base jusqu'aux différents éléments qui le constituent - personnages, temporalité, style et rhétorique. Mais un récit ne prend toute sa dimension que lors de sa découverte par le récepteur. Entrent alors en jeu des questions d'ordre sémiotique, esthétique, psychologique ou sociologique. Apprendre à maîtriser les différents codes qui sous-tendent la production et la réception de tout récit, voilà l'objectif de ce volume, qui se veut donc au fondement de toute pratique de lecture, de vision, mais aussi de production.

Ces considérations théoriques n'ont de sens que si elles s'inscrivent dans le cadre plus général d'une réflexion sur les rapports entre le récit et la société. Que nous dit un récit de presse de la société dont il est le reflet ? En quoi le récit médiatique, source d'information privilégiée, façonne-t-il aujourd'hui notre vision du monde ?

C'est à une découverte critique des principaux outils narratologiques qu'invite cet ouvrage, en l'appliquant principalement aux médias de masse : presse écrite, télévision et Internet.

Le storytelling est un concept, créé par les petits maîtres-à-penser des médias dominants, qui postule que le récepteur (lecteur ou téléspectateur) est totalement dépendant de la forme narrative et qui surestime l'efficacité des intentions de l'émetteur (politique ou publicitaire) en faisant totalement abstraction de la réception.

L'intérêt du travail de synthèse de Marc LITS (au sein de l'ORM) est de prendre en compte l'analyse du récit non seulement du point de vue de l'émetteur mais aussi du récepteur. L'expérience commune montre l'écart, plus ou moins important (parfois abyssal), entre ce qu'on exprime et l'interprétation faite par les uns et par les autres.

La culture médiatique, bien que nivelante, n'a pas réussi à tuer la diversité. Tout récit, qu'il soit oral, écrit, filmique ou audiovisuel, a autant de lectures possibles que d'auditeurs, de lecteurs ou de spectateurs. Nous vivons dans un monde ouvert et complexe où chacun construit, chemin faisant, la réalité.

Serge LEFORT
29/07/2009

Lire aussi :
• Narratologie, Wikipédia
• Schéma narratif, Wikipédia
• Lexique, Fralica
• Analyser un récit, Fralica
• Récit médiatique, UCL
• Dossier documentaire & Bibliographie Médias, Monde en Question
• Dossier documentaire & Bibliographie Propagande, Monde en Question

28 juillet 2009

Storytelling


Christian SALMON, Storytelling, la machine à fabriquer des histoires et à formater les esprits, La Découverte, 2007 [Dossiers du Net - Extraits - Fabula - France Culture (mp3) - Rue89 (vidéos) - Télérama]
Christian Salmon signe un ouvrage de propagande contre la propagande, aussi hasardeux que faux, qui a aveuglé nombre de journalistes français. Ou le succès inattendu d’une storytelling à la française.
[...]
Le premier problème du livre, c’est qu’il méconnaît assez largement l’histoire qu’il prétend écrire et, déjà, passe sous silence la longue tradition de cet "art de raconter des histoires". Un tel concentré d’inculture sur les États-Unis est d’autant plus frappant que cette histoire que Salmon découvre avec au moins un siècle de retard, est bien connue.
[...]
Tout au long de son essai bâclé, Salmon dénonce un journalisme qui "favorise une version anecdotique des évènements, une représentation en noir et blanc de l’actualité, et contribue comme jamais à brouiller la frontière entre la réalité et la fiction" - et on croirait qu’il parle de son propre livre !
[...]
Enfin, l’ouvrage produit ce qu’il dénonce. Ce n’est pas le moindre de ses paradoxes. Salmon est tellement peu sûr de lui et de son hypothèse "story-tellisée" qu’il la rappelle à chaque page comme par mauvaise conscience alors qu’il se sait dans le mensonge ; à chaque page comme pour se rassurer, Salmon vend sa marque "storytelling" - il l’utilise à tout bout de champ, sans aucune rigueur scientifique. Mais il y a plus grave encore, c’est qu’en chemin, Salmon s’est mis à croire à sa propre histoire.
Frédéric MARTEL, Une storytelling à la française, Nonfiction

L'auteur n’emporte pas la conviction quand il décrit l’avènement "d’un nouvel ordre narratif" qui "va au-delà de la création d’une novlangue médiatique engluant la pensée : le sujet qu’il veut formater est un individu envoûté, immergé dans un univers fictif qui filtre les perceptions, stimule les affects, encadre les comportements et les idées…".
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À y regarder de plus prés, aucune de ces techniques de communication n’est nouvelle. Ronald Reagan, en son temps, fit un usage extensif des "stories" édifiantes dans ses discours officiels : des "success stories" destinées à illustrer le "rêve américain". "Deux siècles d’histoire de l’Amérique devraient nous avoir appris que rien n’est impossible.
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Est-il légitime pour autant de regrouper sous la notion unifiante de "storytelling" des techniques de communication et des procédés rhétoriques qui opèrent sur des registres de nature très différentes : évocation du "grand récit" américain à travers des "success stories" édifiantes, "dramatisation" des enjeux à travers leur déplacement sur une scène morale (le bien et le mal), "scénarisation" de la figure présidentielle en "saga", optimisation de l’impact visuel par la mise en scène soignée des appararitions télévisées… ?
Maurice RONAI, Quand on a un marteau, tout ressemble à un clou, Nonfiction

Christian Salmon enfonce des portes ouvertes et redécouvre une roue qui tourne depuis des siècles... Le storytelling est une très ancienne technique d'auto-célébration du pouvoir. Il y a plus de 3700 ans, Hammurabi faisait graver dans la pierre le récit de son très long règne. Les journalistes ont succédé aux hagiographes royaux, mais ils utilisent les mêmes procédés narratifs.

L'auteur de Storytelling fait partie de ces intellectuels qui, faute de critiquer le tournant idéologique de la gauche en 1982 en faveur du néo-libéralisme et d'analyser ses échecs depuis, utilisent la rhétorique médiatique du pouvoir pour inscrire leurs noms dans la marge d'une histoire qui se fait sans eux.

Dans un article, publié par Le Monde, il joue les analystes de la "médiasphère" en participant à la "feuilletonnisation" de la vie politique qu'il prétend dénoncer [1].

Serge LEFORT
28/07/2009

Lire aussi :
• Christian SALMON, Une machine à fabriquer des histoires, Le Monde diplomatique, Novembre 2006.
• Christian SALMON, Le magicien de la Maison Blanche, Le Monde diplomatique, Décembre 2007.
• Christian SALMON, Nicolas Sarkozy et les sarkologues, Le Monde, 15/02/2008.
• Christian SALMON, Malaise de Nicolas Sarkozy : "La médiasphère s'est emballée", Le Monde, 27/07/2009.

• Mona CHOLLET, Rêver contre soi-même, Périphéries, 28 mai 2007.
• Mona CHOLLET, Rêves de droite - Défaire l’imaginaire sarkozyste, La Découverte, 2008 [Périphéries - Zones].
• Mona CHOLLET déconstruit le "Storytelling" à la sauce Sarkozy, Rue89, 08/03/2008.

• Jean-François HUYGHE, Storytelling, Huyghe, 2 décembre 2007.
• Nathalie BORDEAU, Storytelling et communication politique en France, Libéralisme ou démocratie, 14 mars 2008.
• Patrick LEVIEUX, "Sarkozy je te vois" : le protagoniste de l'affaire raconte son happening citoyen, Le Monde, 04/07/2009.
• Patrick LEVIEUX, L'affaire "Sarkozy je te vois" : le récit, l'Humanité, 07/07/2009.
• Patrick LEVIEUX, L'affaire « Sarkozy, je te vois ! » : un storytelling citoyen, l'Humanité, 07/07/2009.
• FAVILLA, Storytelling, Les Echos, 23/07/2009.

• Storytelling, Wikipédia
• Dossier Storytelling, Manager GO
• Dossier documentaire & Bibliographie Médias, Monde en Question
• Dossier documentaire & Bibliographie Propagande, Monde en Question

[1] Il pratique le storytelling de ses chroniques publiées dans Le Monde : Christian SALMON, Storytelling saison 1. Chroniques du monde contemporain, Les Prairies ordinaires, 2009 [Fabula].
• Christian SALMON, Autodafé, la revue du Parlement international des écrivains, remue.net.
• Christian SALMON, Tombeau de la fiction, Denoël [Périphéries].

27 juillet 2009

La fabrique de l'opinion

Le Monde diplomatique a publié une brève sur le financement de sondages :
Un rapport de la Cour des comptes a révélé l’existence d’une convention, signée le 1er juin 2007, entre la présidence de la République et un cabinet d’études chargé de commander des sondages à l’institut Opinion Way « pour un coût avoisinant 1,5 million d’euros ». Sur les trente-cinq études facturées en 2008, au moins quinze, payées 400 000 euros par l’Elysée, ont aussi été publiées par Le Figaro — dirigé par M. Etienne Mougeotte, ancien PDG de TF1 — et LCI. Connu pour produire des sondages particulièrement complaisants à l’égard du chef de l’Etat, Opinion Way réalise ses « enquêtes » en ligne, ce qui fait encore chuter le crédit déjà très limité qu’on pouvait leur accorder.

Le cabinet en cause, Publifact, est dirigé par M. Patrick Buisson, proche conseiller de M. Nicolas Sarkozy. En 2008, Publifact a encaissé pour cette activité de conseil 10 000 euros d’honoraires mensuels. Directeur de la chaîne Histoire, M. Buisson est aussi l’ancien rédacteur en chef de l’hebdomadaire d’extrême droite Minute.

Cette brève est tournée de manière à dire beaucoup de choses, mais pas l'essentiel. Les liens du président de la République avec l'extrême droite comme le financement d'études bidons ne sont pas un scoop. La gauche avait les mêmes pratiques quand elle était au pouvoir.

Sous couvert de dénoncer des pratiques scandaleuses, Le Monde diplomatique fait preuve d'une naïveté suspecte sur les sondages. En écrivant "Opinion Way réalise ses « enquêtes » en ligne, ce qui fait encore chuter le crédit déjà très limité qu’on pouvait leur accorder", il accrédite la croyance que les sondages seraient autre chose que la construction d'une opinion et donc la manipulation de l'opinion.

Serge LEFORT
27/07/2009

Lire aussi :
• Serge LEFORT, Pour en finir avec les sondages (1), Monde en Question
• Serge LEFORT, Pour en finir avec les sondages (2), Monde en Question
• Revue de presse Sondages, Politique-stream
• Dossier documentaire & Bibliographie, Statistiques & Sondages

26 juillet 2009

Mort le 21 avril 2002

Il a échappé à beaucoup de commentateurs que le PS était mort le 21 avril 2002, même si son cadavre bouge encore comme hier celui du PCF.

Beaucoup s'interrogent. C'est le cas, par exemple, de Jean Vinatier, de Gérard Grunberg et du Monde diplomatique.

Question récurrente pour Gérard Grunberg comme pour tous ceux qui n'ont pas encore tirer les leçons du 21 avril 2002.

Au Mexique aussi, les commentateurs n'ont pas encore pris la mesure, en 2009, de la déroute de la gauche en 2006.

En France, tout ce bruit autour de la chronique d'une mort annoncée fait le jeu de Marie-Ségolène Royal, la démagogue nationale...

Serge LEFORT
26/07/2009

Lire aussi :
• Tous les articles sur Marie-Ségolène Royal
• La génération 21 avril veut une grande lessive
Nous assistons depuis le 21 avril 2002, date de notre premier vote, à l’enlisement de la gauche. Le dernier scrutin des européennes l’a confirmé : nombre d’entre nous ne se retrouvent pas dans le programme du Parti socialiste et ne se sentent plus liés par l’impérieuse nécessité de «voter utile». Nous savons que sans changement majeur, il en sera de même en 2012. Et que la gauche perdra l’élection présidentielle si elle persiste à présenter autant de candidats que de chapelles, dans le seul espoir de se compter.
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