26 décembre 2009

Retour du roman national


OFFENSTADT Nicolas, L'histoire bling-bling - Le retour du roman national, Stock, 2009 [Comité de vigilance face aux usages publics de l'histoire - l'Humanité - La vie des idées - Le blog de l'histoire - Radio Orient].
L'histoire n'est jamais restée la propriété des seuls historiens. Mais de nos jours, elle est devenue un enjeu politique majeur. D'un côté, de multiples groupes cherchent à saisir leurs passés, souvent marqués par la souffrance (persécutions, esclavage...), de l'autre, le président de la République, appuyé sur un courant de fond, y compris dans la sphère intellectuelle, tente de faire renaître le roman national, ce grand récit patriotique bâtissant une France toute de cohérence et de progrès.

Dossier documentaire & Bibliographie Nationalisme créé le 28/03/2009 et mis à jour le 08/12/2009, Monde en Question.

25 décembre 2009

La question sociale


Un film de Thomas Lacoste avec Robert Castel
La Bande Passante

8 films-entretiens sur le travail et les luttes sociales réalisés par Thomas Lacoste avec Etienne Balibar, Robert Castel, Patrice de Charette, Christophe Dejours, Charles Piaget et Renaud Van Ruymbeke.

La valeur travail : on se souvient que lors de la dernière campagne présidentielle, Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy n'avaient de cesse de s'y référer. Elu président, Sarkozy ne parle désormais plus du travail, dans un contexte pourtant marqué par la crise financière et ses effets délétères sur l'emploi : licenciements massifs, mobilité forcée, etc.

Les entretiens réunis par La Bande Passante reviennent sur ce qui est bien « la » question sociale, aujourd'hui comme hier : le travail. Cette série d'entretiens croise les regards du philosophe, du sociologue, du psychologue, du juriste, du syndicaliste sur la centralité du travail, la souffrance qu'elle génère aussi (Christophe Dejours), l'installation d'une partie croissante des travailleurs dans le précariat (Robert Castel), les mobilisations passées autour du travail (Etienne Balibar sur 68, Charles Piaget sur LIP) qui permettent aussi de penser les révoltes présentes, les tentatives du pouvoir pour corseter l'action des juges en matière de droit du travail (Patrice de Charette) ou de lutte contre la corruption financière (Renaud Van Ruymbeke).

Lire aussi :
L'Autre campagne.
• Dossier documentaire & Bibliographie Économie sociale, Monde en Question.

Crise sociale et médias


PADILLA VILLARREAL Beatriz, Médiatisation et identification comme facteurs intervenant dans l'irruption de la crise sociale - Une analyse biculturelle de contenu de la presse écrite et modélisation, Thèse soutenue publiquement le 17 juin 2005 à l'Université Jean Moulin Lyon 3 [Télécharger].
L'objet central de cette thèse est l'étude de la crise sociale et des principaux facteurs qui contribuent à son déclenchement. A travers le modèle théorique proposé, nous essayons d'expliquer le passage du réel - l'événement - à celui de la représentation symbolique - la crise. Médiatisation et identification sont ainsi les constantes répertoriées dans ce processus, secondées par certaines variables qu'influencent, également, l'irruption de la crise sociale. Concernant la médiatisation, les variables de la quantité d'information et de la mise en scène énonciative et visuelle de celle-ci contribuent à la visibilité et à la construction du sens de l'événement. Quant à l'identification, elle peut être définie comme la proximité réelle ou symbolique entre l'événement et le public. Elle dépend de l'interprétation de l'événement, soumise toujours aux spécificités de l'identité personnelle et de l'appartenance des individus, notamment les critères socioculturels. La crise sociale se manifeste par un état d'inquiétude généralisée, par une malaise sociale partagée entre les individus, face à des événements qui portent atteinte réelle ou symbolique à leur intégrité physique, à leur mode de vie ou aux conditions sociales de leur existence. Le public, se sentant concerné, se mobilise, mettant en question les pouvoirs politique ou organisationnel. La crise est sociale par excellence, car loin de la nature de l'événement à son origine, elle implique toujours les acteurs sociaux, en plus de déstabiliser le pouvoir politique et de générer des pertes économiques. Le modèle de la crise sociale présenté dans cette thèse a été validé par une analyse de contenu des quotidiens El Pais (Espagne) et Le Monde (France), portant sur le thème du naufrage du pétrolier Prestige. Cette analyse a permis de constater des différences dans l'intensité et dans le traitement de l'information dans ces journaux et l'évolution médiatique d'un accident en catastrophe écologique et puis en crise sociale et politique dans l'un des pays étudiés.

Dossier documentaire & Bibliographie Médias créé le 19/06/2004 et mis à jour le 08/12/2009, Monde en Question.

24 décembre 2009

République mise à nu


GUÉNIF-SOUILAMAS Nacira (sous la direction de), La république mise à nu par son immigration, La Fabrique, 2006 [Le Monde diplomatique].
Violence, machisme, sécurité, laïcité, intégration ; antisémitisme : les mots partout répandus sur le sujet de l'immigration sont piégés, et ce piège est monté autour de la défense de la République. Dans ce livre collectif, les mécanismes et les discours stigmatisant les immigrants postcoloniaux sont montrés pour ce qu'ils sont : les instruments du maintien de l'ordre (républicain), de la tradition à conserver contre les intrusions barbares, du sauvetage de la belle langue française mise à mal par le parler des banlieues... Le paradoxe de cette lutte d'arrière-garde est qu'elle conduit à abandonner les principes qui ont fondé la cité politique en France - au nom, justement, des "valeurs républicaines".


Dossier documentaire & Bibliographie Immigration créé le 15/12/2005 et mis à jour le 08/12/2009, Monde en Question.

Écouter aussi : Pourquoi est–il plus difficile de réussir pour les enfants d'immigrés ?, Du grain à moudre - France Culture.
Aux Etats-Unis, 25% des sociétés créées au cours des 15 dernières années et cotées en bourse ont pour fondateur(s) un immigré. Un quart. C'est particulièrement vrai dans les secteurs de pointe, où ce taux s'élève à 40%. Les Américains peuvent se féliciter d'avoir donné leur chance à ces immigrés – qui viennent souvent d'Europe, comme Pierre Omidyar, le fondateur d'eBay. Sur les 400 000 emplois générés en 2005 par ces sociétés créées, aux Etats-Unis, par des immigrés, 245 000 ont pour fondateur un Européen.
Généralement, lorsqu'on prend la décision, lourde et douloureuse, de quitter son pays et d'aller installer sa famille dans un nouvelle contrée, c'est qu'on estime impossible de se dessiner un avenir parmi les siens ; c'est qu'on estime donner de meilleures chances de réussite à ses enfants en rangeant sa vie dans des valises et en s'en allant.
Qu'en est-il de la France à cet égard ? Ceux et celles qui nous ont choisi pour destination peuvent-ils raisonnablement estimer avoir pris la bonne décision ?
Les chiffres les plus récents publiés par l'INSEE pourraient en faire douter. Seuls, 57% des immigrés en âge de travailler et arrivés en France après l'âge de 18 ans ont un emploi – contre 69% chez les non-immigrants. Ils sont deux fois plus nombreux que les non-immigrés à pointer au chômage (12,7% contre 6,2%). Et surtout, ceux qui sont dans l'emploi sont massivement cantonnés dans activités non qualifiées et donc mal payées.
Qu'en est-il lorsqu'on observe la génération suivante, celle des enfants d'immigrés ? Le désir de mobilité sociale, de réussite des parents est-il exaucé et dans quelle mesure ? Le livre de Claudine Attias-Donfut et François-Charles Wolff donne des réponses bien plus optimistes que celles qui sont généralement véhiculées. Est-ce à dire que la France est capable de donner toute leur chance aux talents ? Dans un système de sélection sociale qui passe pour méritocratique et où le diplôme constitue le sésame obligé de toute ambition, comment fait-on pour intégrer Polytechnique ou l'ENA, quand on est né d'un père sénégalais ouvrier et sans qualification ?

23 décembre 2009

Citoyens ou indigènes ?


CASTEL Robert, La discrimination négative - Citoyens ou indigènes ?, Seuil, 2007 [Annales - Liens socio - Mouvement des Indigènes de la République - Nonfiction - Territoire et Lien Social].
La discrimination négative n'est pas le fait de sociétés qui instituent en droit des différences de traitement entre les individus en raison de leur origine, de leur rang ou de leur religion. Elle est au contraire le fait de sociétés qui proscrivent formellement ce type de différenciations, mais les pratiquent massivement. Telle est la contradiction que donne à comprendre la situation des "jeunes de banlieue" aujourd'hui en France, singulièrement lorsqu'ils sont "issus de l'immigration". Revenant sur les émeutes de l'automne 2005, Robert Castel analyse ici les mécanismes de stigmatisation et de relégation qui tiennent ces populations en marge d'une citoyenneté pleine et entière, au mépris des principes fondamentaux de la République. Si l'on veut appeler les choses par leur nom, c'est bien à un retour de la race sur la scène politique et sociale que l'on assiste aujourd'hui.

Dossier documentaire & Bibliographie Crise sociale des banlieues créé le 15/12/2005 et mis à jour le 08/12/2009, Monde en Question.

22 décembre 2009

Politique et racisme d'Etat


LE COUR GRANDMAISON Olivier, La République impériale - Politique et racisme d'Etat, Fayard, 2009 [Cercle Gramsci - Chroniques Rebelles - La vie des idées - LDH-Toulon - Terra].
Au tournant du XIXe siècle, les républicains favorables aux conquêtes coloniales ont réussi là où leurs prédécesseurs avaient échoué. Entre 1871 et 1913, les possessions françaises en outre-mer sont passées de moins d'un million de kilomètres carrés à treize millions. Quant aux «indigènes», leur nombre a progressé de sept à soixante-dix millions en 1938. Extraordinaire expansion. Elle est sans précédent dans l'histoire du pays qui, devenu la seconde puissance impériale du monde après la Grande-Bretagne, est confronté à des tâches multiples et complexes. Comment diriger un empire aussi vaste ? De quels instruments politiques, administratifs, juridiques – le droit colonial par exemple – et scientifiques la métropole a-t-elle besoin pour remplir les missions nouvelles qui sont les siennes désormais ? Quelles orientations – assimilation ou association – mettre en œuvre dans les territoires de la «Plus Grande France» ?

Dossier documentaire & Bibliographie Colonialisme créé le 15/12/2005 et mis à jour le 08/12/2009, Monde en Question.

Écouter aussi : Main basse sur les terres agricoles : le cas de l'Afrique, Place des peuples - France Culture.

21 décembre 2009

Histoire du monde au XVe siècle


BOUCHERON Patrick (sous la direction de), Histoire du monde au XVe siècle, Fayard, 2009 [La Fabrique de l'Histoire - France Culture - Le Monde - Marianne-Tout sur la Chine].
Le XVe siècle est le temps de l'invention du monde. De Tamerlan à Magellan, depuis l'Asie centrale jusqu'à la capture de l'Amérique en 1492, s'accomplit une première mondialisation. Mais la geste de Christophe Colomb est tout sauf un événement fortuit : elle est précédée, et surtout rendue possible et pensable, par une dynamique globale et séculaire d'interconnexion des espaces, des temps et des savoirs du monde. Elle ne se laisse en rien circonscrire par ce que l'on appellera plus tard l'occidentalisation du monde : les marchands de l'océan Indien, les marins chinois de l'amiral Zheng He, mais aussi les conquérants turcs ont toute leur part dans cette histoire des devenirs possibles du monde, où rien n'est encore écrit.

Ni dictionnaire critique ni somme érudite, Histoire du monde au XV siècle se veut un essai collectif davantage qu'une encyclopédie. Faisant alterner les chapitres de synthèse et les textes au ton plus libre éclairant un événement, un personnage ou une oeuvre, le livre se prête à la lecture au long cours comme au hasard du cabotage. Mais dans tous les cas, il s'agit bien de susciter des étonnements par rapprochement et d'éveiller des curiosités par le déplacement du regard. Si l'accent est naturellement mis sur ce qui circule plutôt que sur ce qui cloisonne, s'inscrivant en cela dans les perspectives nouvelles d'une histoire globale attentive aux connexions des lieux et des temps, cette histoire du monde ne se réduit pas à une chronique de la mondialisation : il s'agit aussi de rendre compte des spécificités et des originalités des territoires du monde, des temps du monde, des écritures du monde, des devenirs du monde - ces quatre dimensions inspirant l'architecture d'ensemble du livre.

Lire aussi :
• GRUZINSKI Serge, Les quatre parties du monde - Histoire d'une mondialisation, La Martinière, 2004 [Académie de Lille - Arts Livres - Canal Académie - Clionautes - Critique internationale-Sciences Po - Revues plurielles - SIELEC].

Dominer "les quatre parties du monde" : telle est l'ambition de la Monarchie catholique (1580-1640). Pour imposer leur présence, Espagnoles et Portugais apprennent à maîtriser des milieux inconnus, tandis que du Mexique au Japon, du Brésil aux côtes africaines, de Goa aux Philippines, des peuples sont confrontés à des formes de pensée et de pouvoir qui leur sont totalement étrangers. Brassage des êtres ou résistance des traditions locales à la domination ibérique : la terre se mondialise.

À l'aube des temps modernes, ce ne sont pas seulement les modes de vie, les techniques et l'économie que bouleversent les nouveaux maîtres de la planète, mais aussi les croyances et es imaginaires. Serge Gruzinski montre que le passé est une merveilleuse boîte à outils pour comprendre ce qui se joue depuis des siècles entre occidentalisation, métissages et mondialisation. Il nous invite à un vaste tour du monde en compagnie de personnages dont le destin incarne le face-à-face des grandes civilisations et d'un empire universel.

• Dossier documentaire & Bibliographie Géo-Histoire globale, Monde en Question.

Écouter aussi :
• Histoire du monde 2/4 Cartographier le monde dans l'antiquité, La Fabrique de l'Histoire - France Culture.
• Histoire du monde 3/4 L'histoire universelle, La Fabrique de l'Histoire - France Culture.
• Histoire du monde 4/4 La world history ou histoire globale, La Fabrique de l'Histoire - France Culture.

20 décembre 2009

Quelle place au lycée pour l'histoire ?

À propos de la suppression de l'histoire-géographie en classe de terminale scientifique : quelle place donner à l'histoire et à la philosophie des sciences au lycée ?
Macadam philo - France Culture

Lire aussi :
• LÉVY-LEBLOND Jean-Marc, A quoi sert la science ?, Bayard, 2008 [Amazon].
• LÉVY-LEBLOND Jean-Marc, La science est-elle universelle ?, Le Monde diplomatique.
Observer, nommer, décrire, théoriser : autant d'activités qu'on retrouve dans l'histoire de toute civilisation. Pour autant, chacune ayant tracé son propre chemin vers la connaissance, et les interactions étant plus rares qu'on ne le croit, qui saurait dire si «la» science est universelle ?
• LÉVY-LEBLOND Jean-Marc, Wikipédia.

Une année ordinaire à la fin de l'Empire


Giusto TRAINA, 428 - Une année ordinaire à la fin de l'Empire romain, Les Belles Lettres, 2009 [CNL - Le Monde].
428 est une année sans autre événement mémorable que la chute du royaume d'Arménie, perdu aux confins d'un Empire romain déclinant. Pourtant, cette année ordinaire est loin d'être une année sans histoire : rien n'est fait, rien n'est joué, tout est en train de se faire. Le paganisme s'étiole avec panache, les nouveaux gouvernants ont des noms qui quelques années auparavant auraient semblé barbares. Les temps changent, imperceptiblement : le crépuscule de l'Antiquité devient l'aube du Moyen Âge. Renouant avec deux traditions bien antiques, à la fois celle des chroniqueurs et celle des itinéraires circulaires qu'affectionnaient les compilateurs, Giusto Traîna propose un tour du monde romain en 365 jours, où le lecteur découvre villes, palais, déserts, monastères et surtout, à côté des grands noms comme Saint Augustin, les figures peu banales et hautes en couleur du chef barbare Genséric, du Sarrasin al-Mundhir, du Copte Chenouté ou encore de l'extraordinaire impératrice Galla Placidia.

Lire aussi : SHELDON Rose Mary, Renseignement et espionnage dans la Rome antique, Les Belles Lettres, 2009.