16 décembre 2010

La fin du Monde - sans commentaire


Eric Fottorino révoqué de la présidence du directoire du groupe Le Monde

Lors d'un conseil de surveillance du groupe Le Monde, qui s'est tenu mercredi 15 décembre à Paris, Eric Fottorino a été révoqué de ses fonctions de président du directoire du groupe Le Monde. Voici le communiqué du groupe Le Monde :
"Le conseil de surveillance du Monde SA et de la SEM [Société éditrice du Monde] se sont réunis ce jour et ont élu à l'unanimité Pierre Bergé à sa présidence et Gilles Van Kote (président de la Société des rédacteurs du Monde [SRM]) en tant que vice-président.

A cette occasion, le conseil de surveillance a tenu à remercier Louis Schweitzer, démissionnaire, pour l'action déterminante qu'il a menée au cours des dernières années.

Prenant acte de divergences de vues entre le directoire et les actionnaires, et compte tenu de la démission du directeur général David Guiraud, le conseil a nommé Louis Dreyfus président du directoire du groupe. Eric Fottorino reste provisoirement membre du directoire et directeur du quotidien. Conformément aux engagements pris, les fonctions managériales et éditoriales sont désormais dissociées.

Une nouvelle direction du quotidien sera proposée dans les premières semaines de 2011 à l'issue d'un processus mis en place en concertation avec la SRM.

Le conseil de surveillance a également examiné le budget 2011 qui doit marquer une étape cruciale pour le groupe et le retour à son équilibre d'exploitation dès l'année prochaine. Il a enfin discuté des priorités stratégiques et des axes de développement qui seront présentés pour approbation lors des prochains conseils de surveillance."

Dans un autre communiqué, le conseil de gérance de la SRM a déclaré "prendre acte des décisions entérinées par le conseil de surveillance et de la révocation d'Eric Fottorino". La SRM note que "ces derniers points ne figuraient pas à l'ordre du jour du conseil de surveillance" et souligne qu'elle n'a donc pu, "comme les autres sociétés de personnels actionnaires", prendre part à ces votes.

"La SRM demande que de telles procédures ne soient plus appliquées à l'avenir et dans ces conditions. La SRM entend jouer tout son rôle d'actionnaire dans la vie du groupe et en particulier dans l'exercice de ses droits spécifiques sur la nomination du directeur du journal", poursuit le communiqué.

"Par ailleurs, alors que les personnels ont été choqués, ces dernières semaines, par certaines pratiques et certaines déclarations des actionnaires majoritaires ou de leurs représentants, la SRM sera vigilante quant à la promesse faite ce jour par Pierre Bergé, en son nom et en celui de ses associés Xavier Niel et Matthieu Pigasse, et par Louis Dreyfus de respecter les engagements pris et d'agir dans le dialogue et la concertation."

Le Monde

Eric Fottorino démis de ses fonctions de président du Directoire du Monde

Pierre Bergé a été élu à la présidence du Conseil de surveillance du groupe Le Monde, tandis que Louis Dreyfus assurera la présidence du directoire après la révocation d'Eric Fottorino de ce poste, a annoncé mercredi 15 décembre la direction du groupe.

Pierre Bergé [entrepreneur en confection de luxe], Xavier Niel (président-fondateur de Free) et le banquier d'affaires Matthieu Pigasse sont devenus les actionnaires majoritaires du groupe en novembre dernier.

NouvelObs

15 décembre 2010

Cantona joue Robin des bois

Que les médias dominants fassent la publicité de l'appel de Cantonna à retirer son argent des banques c'est normal car ils ont compris, eux, tout l'intérêt qu'ils pouvaient tirer des idées de Cantona. Ainsi, L'im-Monde prêche la lutte des classes en Chine et juge intolérable les grèves en France [1] et tout le monde de s'esbaudir devant ce double courage du quotidien qui se prétend de référence.

Que les blogs relaient benoîtement ce qu'on appelle un buzz, c'est-à-dire en clair faire parler de soi en colportant les conneries des autres, c'est normal à l'ère des réseaux dit sociaux par abus de langage - ce dont tout le monde se moque. Il serait fastidieux de citer tous les blogs, voici un florilège de quelques auteurs qui se disent à gauche (par ordre alphabétique pour ne pas faire de jaloux) :
• E. Cantona et les banques, Jef hébergé par Le Monde, 08/12/2010.
• CE SOIR (OU JAMAIS !), Paul Jorion, 03/12/2010.
• Ne pas détruire les banques : les saisir !, Frédéric Lordon hébergé par Le Monde diplomatique, 02/12/2010.
• Cantona : tester la trouille des banquiers, Jean Vinatier, 03/12/2010.

Que des organisations qui se disent à gauche de la gauche et qu'on aurait pu croire moins sensibles au battage médiatique, mais qui, comme pour le buzz orchestré autour de Wikileaks par cinq médias mondiaux, véhiculent les mêmes platitudes démagogiques ça pose question sur le consensus dominant qui s'apparente à la soumission librement consentie [2].

Pour Arlette Laguiller, employée de banque à la retraite, les choses sont comme d'habitude très simples :
La proposition d'Éric Cantona, invitant tous ceux qui disposent d'un compte en banque à retirer le même jour les fonds qui y sont déposés, a provoqué des réactions diverses, venant tout d'abord de ceux qui soutiennent le système bancaire - et pas seulement en paroles.
Ainsi, avec la morgue qu'on lui connaît, Christine Lagarde a tancé le footballeur, l'invitant à ne pas se mêler de ce qu'il ne connaît pas.
Sauf que, justement, l'activité des banques en général, et tout particulièrement dans la période récente, concerne toute la population, et au premier chef la population laborieuse. C'est pourquoi l'initiative de Cantona a été d'emblée populaire, sauf bien évidemment auprès de ceux qui étaient ainsi montrés du doigt.
[...]
Pour que le système bancaire et financier fonctionne au service de la collectivité, il serait indispensable d'enlever les banques des mains de ces profiteurs avides qui saignent le monde et de les unifier en une seule banque, dans chaque pays, sous le contrôle et l'autorité de la population.
Lutte Ouvrière, 06/12/2010
Olivier Besancenot quant à lui
juge "séduisant" l'appel d'Eric Cantona à vider ses comptes bancaires pour que "le système s'écroule mais pour le porte-parole du NPA qui s'exprime dans Libération mercredi "s'attaquer aux banques n'est qu'une partie du problème".
NPA, 01/12/2010
Six jours plus tard l'organisation fait un communiqué qui s'aligne sur les positions de LO :
Les moqueries de quelques ministres du gouvernement Fillon, comme Ch. Lagarde ou F. Baroin en charge de l 'économie et du budget, ne sauraient cacher l'agacement et la peur du monde de la finance et de ses serviteurs politiques à l'encontre de ceux et celles qui ont relayé l'appel d'E. Cantona à vider son compte de dépôt.
Au niveau européen, la Commission européenne et J.C. Juncker, chef de file des ministres des Finances sont partis en guerre contre cet appel.
Le succès rencontré témoigne du profond malaise, du mécontentement, du rejet à l'égard du système bancaire qui spécule à tout va en sachant très bien qu'en dernier ressort les finances publiques seront à leur disposition pour les renflouer, avec à la clef un plan d'austérité pour la population, comme le montre le cas de la Grèce et de l'Irlande.
[...]
Mais, cet appel focalise l'attention sur un des piliers de l'exploitation capitaliste. Aussi, pour construire une autre société débarassée de l'exploitation, il est essentiel d'exproprier les banques privées et de mettre en place un service public bancaire ayant le monopole des dépôts et du crédit sous le contrôle des salariés et des usagers.
NPA, 07/12/2010
La vidéo qui aurait "fait le tour du monde" date du 8 octobre 2010 ! Ce qui montre qu'il a fallu presque deux mois pour que la mayonnaise prenne en temps réel dans les quelques kilomètres carrés de l'hexagone...


Or, que dit Cantona dans l'entretien accordé à Presse Océan ? Voici le récit du quotidien du quotidien de Nantes Saint-Nazaire Loire-Atlantique :
Etienne Mvé lui pose une question sur son engagement pour la Fondation Abbé Pierre, sur la précarité et sur les Roms. Éric Cantona lui répond et laisse vagabonder sa pensée sur le système actuel.
Et son discours est aussi rouge que son pull. Selon l'ex-footballeur, il faut changer de politique. Mais les manifs, « ce n'est plus comme ça qu'il faut faire les choses ». Éric Cantona rêve de révolution. « Elle est très simple à faire », détaille-t-il. « Le système c'est quoi ? Le pouvoir des banques. Au lieu qu'il y ait trois millions de gens qui aillent dans les rues, ces trois millions ils vont à la banque et ils retirent leur argent et les banques s'écroulent ». Et « Canto » d'ajouter : « C'est pas compliqué. Les syndicats, il faut leur donner des idées des fois ».
Presse Océan
Vous avez bien entendu et bien lu. Alors où est l'arnaque ?

L'arnaque visible est que Cantona ne s'est pas exprimé en tant que le footballeur qu'il fut, mais en tant que l'acteur (dans les deux sens du terme) "incontournable des médias" qu'il est. C'est comme disent les journalistes un "bon client". Ce petit détail du lieu d'où parle "l'acteur" a échappé à tous les commentateurs, qui se répètent les uns les autres selon la trajectoire d'un anneau de Möbius.

L'arnaque visible est aussi de dire que retirer son argent de la banque serait un acte révolutionnaire. Que les médias dominants applaudissent à ce genre de propos, c'est de bonne guerre, mais que les médias de gauche et à gauche de la gauche s'en réjouissent parce que l'initiative du footballeur-acteur aurait été populaire, cela montre qu'ils ont renoncé par démagogie à défendre toute idée contraire au consensus dominant.

L'arnaque invisible est de faire croire qu'on puisse retirer tout son argent du jour au lendemain de la banque. Vous pouvez quitter votre banque pour une autre en transférant tous vos avoirs d'une banque à l'autre. Ce qui ne change rien ! Mais vous ne pouvez pas retirer au distributeur ou au guichet plus d'une certaine somme, variable selon votre plafond autorisé, par semaine glissante. C'est-à-dire que, si votre plafond est par exemple de 2000€, vous pouvez retirer cette somme aujourd'hui le 15 décembre et que vous devrez attendre le 23 décembre pour retirer la même somme. Qu'on se le dise !

Ceci est valable pour la France car au Mexique, par exemple, on peut retirer à tout instant la presque totalité de son compte - en laissant seulement 50€ - sans le clôturer. Au Mexique, on peut acheter aussi une voiture, une maison et bien d'autres choses en liquide. Pour en savoir plus, allez donc voir El infierno le très drôlatique film de Luis Estrada... avec Elizabeth Cervantes ¡Ja! ¡Ja! ¡Ja!

En 1976, le slogan d'une campagne publicitaire gouvernementale disait "En France, on n’a pas de pétrole, mais on a des idées" [3]. Ainsi, le Président Giscard d'Estaing donna son agrément pour financer la construction d'avions renifleurs destinés à chercher le fameux pétrole... La géniale idée de Cantona est du même acabit.

12/12/2010
Serge LEFORT
Citoyen du Monde

Note du 16/12/2010 :
L’arnaque fut quand l’État obligea les entreprises à verser sur un compte bancaire les salaires supérieurs à... une somme fixée par décret et donc à obliger les salariés à posséder un compte bancaire.
Au-delà d’un montant mensuel fixé par décret, le salaire est payé par chèque barré ou par virement à un compte bancaire ou postal.
Mode de paiement du salaire, Loi nº 73-4 du 2 janvier 1973 Journal Officiel du 3 janvier 1973.
• La révolution aura-t-elle lieu le 7 décembre ?, France Culture, 07/12/2010.
• Quel regard sur les banques : les incertitudes d’une réputation, Concordance des temps, 11/12/2010.
Lire aussi : Serge LEFORT, Robin des bois, Monde en Question.

[1] Références :
• Editorial, Le Monde, 10/08/2010.
• À nos lecteurs, Le Monde, 21/10/2010.
[2] Serge LEFORT, Wikileaks ou le triomphe de la médiacratie, Monde en Question.
[3] Trente ans de communication publique, Acteurs Publics.

14 décembre 2010

Robin des bois


Selon la légende, Robin des bois était un gentilhomme qui volait les riches pour donner aux pauvres. La légende devint un mythe populaire, très vivace jusqu'à nos jours, qui engendra d'autres héros - archétypes de justiciers - comme Zorro ou Batman.

La légende fut construite à partir du XVe siècle d'abord par transposition de récits oraux puis par remaniements successifs des récits précédents. Ainsi, le vulgaire bandit, qui détrousse les riches pour son propre compte, se transforma au fil du temps en en noble dépossédé volant les riches pour donner aux pauvres.

La légende atteignit son apogée au XIXe siècle avec Ivanhoé, le roman de Walter Scott dans lequel le bandit de grands chemins en vient à incarner la résistance du peuple d’Angleterre contre l’oppression de la noblesse normande. Au XXe siècle, la figure du justicier s'incarna dans d'autres personnages qui, selon une logique classique, dénatura le mythe en le prolongeant.

Curieusement la version des studios Disney de 1973 met en scène un Robin des bois à l'image du renard, personnage filou et retors, très proche du Roman de Renart médiéval, qui fut une critique sociale de la noblesse par la jeune bourgeoisie des XIIe et XIIIe siècles.


Ridley Scott, Robin des bois, Universal Pictures, 2010

L'interprétation du personnage que donne Ridley Scott, qui reprend les premiers récits, ne manque pas d'intérêt [1]. Robin Hood (littéralement "voleur encagoulé"), un homme du peuple - modeste archer - est un arriviste, qui, grâce à un concours de circonstances, usurpe l'identité d'un noble baron et aide le roi Jean à bouter les Français hors d'Angleterre. Contrairement à la légende, Robin mobilise les pauvres pour sauver les riches : pour sauver la patrie en danger il n'y a plus ni riches ni pauvres car "contre les Français nous sommes tous Anglais".

C'est avec le même vocabulaire nationaliste, au nom de l'ennemi près, que les puissances européennes mobilisèrent des millions de paysans et d'ouvriers, grâce au soutien des socialistes, pour participer "la fleur au fusil" à la première boucherie interethnique du XXe siècle (environ 20 millions de morts). Cette Union sacrée, réalisée en 1914, sera renouvelée avec le même enthousiasme (50 à 60 millions de morts) en 1939 [2].

12/12/2010
Serge LEFORT
Citoyen du Monde

Lire aussi :
• Légende
- BibliObs
- Suite 101
- Wikipédia
• Film
- AlloCiné - Autres films et séries TV
- Critikat
- Excessif
- Le Figaro
- Le Monde
- Les Inrocks
- NouvelObs
- Rue89
- Suite 101
- Télérama

[1] Intérêt politique s'entend car la réalisation cinématographique n'est pas toujours à la hauteur de cette mise à nue de la légende. Les inexactitudes historiques, que des critiques ont justement relevées, font perdre aussi de la force à l'histoire contée par Ridley Scott.
[2] Jean GALTIER-BOISSiÈRE, La fleur au fusil, Éditions Baudinière, 1928 réédition Mercure de France, 1980 [Passion & Compassion 1914-1918].
Cet ouvrage parle de la première guerre mondiale et y décrit entre autres ces soldats qui, en 1914, partaient à la guerre avec insouciance vers ce qu'on leur avait présenté comme une promenade de santé, en étant persuadés que la chose serait de très courte durée et sans risques.
Il y écrit en effet : « Dans leur riante insouciance, la plupart de mes camarades n'avaient jamais réfléchi aux horreurs de la guerre. Ils ne voyaient la bataille qu'à travers des chromos patriotiques. […] Persuadés de l'écrasante supériorité de notre artillerie et de notre aviation, nous nous représentions naïvement la campagne comme une promenade militaire, une succession rapide de victoires faciles et éclatantes. »
Lire sur ce thème :
• Serge LEFORT, Le Kirghizistan construit par les médias, Monde en Question.
• Serge LEFORT, La justice sociale face au marché, Monde en Question.
• Articles Guerre 1914-1918, Monde en Question.

13 décembre 2010

Revue des revues n°3


90 ans après, que reste-t-il du Congrès de Tours ?, La Bataille socialiste
1920 : retour sur le congrès de Tours, Fondation Jean-Jaurès
En décembre 1920, le Congrès de Tours du Parti Socialiste (Section Française de l’Internationale Ouvrière) adoptait à une large majorité une résolution du Comité de la 3e Internationale, et créait ainsi la Section Française de l’Internationale Communiste (SFIC), plus tard appelée Parti Communiste. Le Comité de la 3e Internationale avait été fondé en France en mai 1919 par des révolutionnaires qui s’étaient opposés à la Guerre mondiale
La Voix des sans-papiers n°2, La Bataille socialiste

Lire aussi :
• L'actualité des revues
- Ent'revues - la Revue des revues
- A plus d'un titre - Chaque vendredi
Dossier Guide des ressources documentaires, Monde en Question.

9 décembre 2010

Amérique latine 1492-1992

Avec les navigateurs espagnols et portugais de la fin du XVème siècle commence l'occidentalisation du monde et de l'Amérique en particulier. À cet égard, l'Amérique latine est sans doute l'espace qui a vécu un des processus d'occidentalisation les plus violents et les plus irréversibles par le biais de la christianisation.

C'est pourquoi de nombreuses questions surgissent aujourd'hui autour du sens à attribuer à l'événement de longue durée lié à la date symbolique du 12 octobre 1492, jour de l'arrivée de la caravelle de Colomb au large d'une île [Haïti] qu'il croyait être les Indes [plus précisément la Chine]. Était-ce une découverte comme l'affirment certains ? D'autres, au contraire, se demandent comment on peut découvrir ce qui existait déjà : des cultures indigènes très développées qui, de fait, ont été recouvertes par l'Occident chrétien. Mais n'est-ce pas un euphémisme d'utiliser ce terme quand, en réalité, il y eut plutôt un choc d'une violence extrême et la destruction des sociétés indiennes ?
Jean-Pierre BASTIA, Amérique latine 1492-1992 - Conquête, résistance et émancipation, Labor et Fides, 1991 [BooksGoogle].

Lire aussi :
• BASTIA Jean-Pierre, Université de Strasbourg - Revistas del Colegio de México - Scientific Commons.
• COVO-MAURICE Jacqueline, Quel Cinquième centenaire ? - Les ambiguïtés d'une commémoration, Matériaux pour l'histoire de notre temps, 1992.
• DUMONT Juliette, Institut des Hautes Etudes de l'Amérique latine.
- Histoire précoloniale et moderne de l'Amérique latine, Institut des Hautes Etudes de l'Amérique latine.
- L'Amérique latine de la Conquête à nos jours, Institut des Hautes Etudes de l'Amérique latine.
Dossier documentaire & Bibliographie Colonialisme, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Haïti, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Mexique, Monde en Question.

8 décembre 2010

La France en 1500


du 6 octobre 2010 au 10 janvier 2011
L'exposition "France 1500, entre Moyen Âge et Renaissance" explore un moment de rencontres artistiques et d'effervescence créatrice sans précédent en France, et pourtant encore souvent méconnu. Il s'agit de la première manifestation d'envergure consacrée à la période charnière constituée par les règnes de Charles VIII (1483-1498) et de Louis XII (1498-1515), dominée par la personnalité d'Anne de Bretagne, épouse successivement de ces deux rois.

Époque de reprise économique, de croissance démographique, d'ambitions territoriales avec les fameuses guerres d'Italie, et d'un développement culturel placé sous le signe de l'humanisme, ce fut surtout un temps d'épanouissement comme de contrastes sur le plan artistique. Néanmoins ces mouvements restent souvent ignorés, à tel point que la plupart des ouvrages consacrés à l'art européen de la période ne mentionnent pas ou peu la France.

Exposition Paris
Galeries nationales du Grand Palais
Le "Moyen Âge", période de l'histoire occidentale qui commencerait en 395 (naissance des Empires d'Orient et d'Occident) et finirait en 1492 (fin de la Reconquista contre les musulmans et début de la Conquista des "Indes" en fait l'Amérique), fut nommé ainsi par les intellectuels de la Renaissance.

L'usage du terme "Moyen Âge" était alors polémique car il s'agissait d'annuler la chute de l'Empire romain en renouant les liens soi-disant perdus avec LA civilisation gréco-latine du fait de la "barbarie musulmane". Ce retour aux sources a un côté réactionnaire car, en tentant d'effacer les apports de la civilisation musulmane, il s'agissait de d'imposer au monde la civilisation européenne - son modèle économique, politique, social et idéologique - comme universelle [1].

La "Renaissance" est un terme polysémique qui fut appliqué rétroactivement (autour de 1840) à cette période de l'histoire occidentale. Il ne s'appliquait à l'époque qu'au mouvement artistique italien. Les intellectuels de l'époque se nommaient humanistes c'est-à-dire érudits en rhétorique latine et grecque.

Le paradoxe est que cet ancrage idéologique dans le passé s'accompagna d'un changement de représentation du monde lié au développement des techniques (imprimerie, horloge mécanique, cartographie, boussole et sextant), des échanges commerciaux et des grandes découvertes, qui permirent la colonisation économique, politique et religieuse de l'Amérique, de l'Afrique et de l'Asie.

07/12/2010
Serge LEFORT
Citoyen du Monde

Lire aussi :
• La France en 1500, 2000 ans d'Histoire - France Inter.
• Exposition France 1500, France Inter.
• LE FUR Didier, Le royaume de France en 1500, Réunion Musées Nationaux, 2010.
C'est un temps mal connu parce que longtemps délaissé par les historiens. Pourtant, c'est dans ces années 1500, sous le règne de Charles VIII puis de Louis XII, que la France, redevenue prospère et ambitieuse, put oublier la guerre et les épidémies qui l'avaient ravagée pendant plus de cent ans. Tout en affichant la volonté de structurer un sentiment national puissant, ces monarques rêvèrent d'empire, et imaginèrent conquérir l'Italie. Ce rêve n'aboutit jamais, mais leur ambition sut donner un nouveau visage à la France : elle entrait dans ce qui allait s'appeler la Renaissance.
• BOUCHERON Patrick (sous la direction de), Histoire du monde au XVe siècle, Fayard, 2009 Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Colonialisme, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Géo-Histoire globale, Monde en Question.

[1] Lire sur l'universalisme européen :
• JULLIEN François, De l'universel, de l'uniforme, du commun et du dialogue entre les cultures, Fayard, 2008 Monde en Question.
• WALLERSTEIN Immanuel, L'universalisme européen : de la colonisation au droit d'ingérence, Démopolis, 2008 Monde en Question.

6 décembre 2010

Revue des revues


La faim au Mexique : un phénomène croissant et peu d'espoirs d'amélioration sans des changements de fond, SIPAZ Bulletin Vol. XV Nº 4, Novembre 2010.

Selon les chiffres du CONEVAL, les populations les plus atteintes par des situations d'insécurité alimentaire modérée ou sévère se trouvent principalement concentrées au centre et au sud-est du Mexique. Ils reflètent par exemple qu'au moment de l'enquête, ces caractéristiques touchaient 26,3% de la population au Chiapas, 28,8% au Oaxaca et 33,8% au Guerrero. Le problème de la faim au Mexique est particulièrement sévère parmi les peuples indiens : en 2008, 33,2% des enfants indigènes de moins de 5 ans souffraient d'atrophie du fait de la malnutrition.




LAMLOUM Olfa (sous la direction de), Médias et islamisme, Ifpo

Médias et islamisme est un chantier de recherche peu exploré. Lui consacrer une livraison des Cahiers de l'Ifpo se justifie à un double titre. D'une part, parce que depuis le 11 septembre 2001 et dans le sillage de la chute du régime baasiste irakien, l'irruption des médias numériques, proches ou affiliés à l'une des composantes de l'islam politique, a marqué le champ médiatique panarabe et transnational. Désormais l'islamisme dispose de supports additionnels pour publiciser ses croyances et contester les récits belliqueux à son encontre. D'autre part, parce que l'espace médiatique arabe a connu depuis le milieu des années 1990 des changements majeurs, au point qu'il incarne aujourd'hui une arène politique qui se substitue souvent au champ politique régi par l'ordre autoritaire, et qu'il met en compétition des logiques de pouvoir et de mobilisation inédites.

Lire aussi :
• L'actualité des revues
- Ent'revues - la Revue des revues
- A plus d'un titre - Chaque vendredi
Dossier Guide des ressources documentaires, Monde en Question.

4 décembre 2010

Temps de travail, temps de vie


En janvier 2010, la secrétaire générale de la FGTB Anne Demelenne relance la réduction du temps de travail (RTT) comme un des axes d'une riposte à la crise qui soit socialement équitable : puisque le travail manque, partageons-le plus équitablement.

Cette déclaration a surpris, y compris nous-mêmes. Mais le fait était là : ça faisait longtemps que l'exigence de la RTT avait déserté les agendas revendicatifs, même si elle n'avait jamais quitté les programmes.

En 1997, un des premiers numéros de Politique était précisément consacré à la RTT. A ce moment-là, le gouvernement français de Lionel Jospin dit de la gauche plurielle - qui associait notamment les socialiste et les écologistes - préparait les "lois Aubry" de 1998 et 2000 et le passage à 35 heures de la norme légale de travail hebdomadaire. pourquoi pas en Belgique ? Mais depuis, Politique n'est plus jamais revenu sur le sujet, qui passa petit à petit à l'arrière-plan.

Que s'était-il passé ? Tout d'abord, une détérioration massive des rapports de forces sociaux. Dans les secteurs de pointe du "capitalisme fordiste", lieux par excellence du compromis social-démocrate, où les avancées étaient généralement initiées pour être ensuite étendues aux autres secteurs, la mondialisation allait sortir ses effets.

Ces entreprises vont ainsi mettre en concurrence leurs différents sites de production, ce qui fera plier les travailleurs dans les métropoles industrielles, contraints pour résister au chantage à l'emploi de revenir sur les conquêtes passées. Mais, indépendamment de ce contexte extérieur, il a fallu se rendre compte que les travailleurs eux-mêmes n'étaient pas forcément demandeurs de mesures uniformes et qu'ils souhaitaient plutôt des dispositifs leurs permettant d'agencer les temps de travail - et les temps de vie - sur toute une carrière. Avec, évidemment, comme conséquence que le fractionnement des temps passés au travail rendait plus difficile la mobilisation autour d'objectifs unificateurs.

Au terme de ce Thème, le défi que pose l'articulation des temps de travail et des temps de vie semble encore plus complexe. Car l'analyse fine des expériences tentées montre que toute RTT n'est pas forcément émancipatrice. Les dernières avancées ont toujours été conditionnées par un recours accru à la flexibilité, et celle-ci induit du stress et de la désorganisation dans la vie hors travail qui est, de plus en plus et pour la plupart d'entre nous, le lieu où notre existence prend son sens. En fait, dans une économie ouverte à la plus dure des concurrences, il n'y a aucune raison pour que les exigences de flexibilité de la production coïncident avec les exigences des "citoyens-travailleurs" qui souhaitent que leurs choix de vie soient respectés. Si la pression à la rentabilité à tout prix reste ce qu'elle est, on ne voit pas comment sortir de cette tension mortifère.

Politique n°67, Novembre-Décembre 2010

Lire aussi :
• L'actualité des revues
- Ent'revues - la Revue des revues
- A plus d'un titre - Chaque vendredi
Dossier documentaire & Bibliographie Économie sociale, Monde en Question.
Dossier Guide des ressources documentaires, Monde en Question.

3 décembre 2010

Wikileaks ou le triomphe de la médiacratie

Depuis le XIXe siècle, les médias dominants publient des feuilletons pour "fidéliser" leurs lecteurs. Au XIXe siècle, le feuilleton était une œuvre littéraire prépubliée dans les journaux (Charles Dickens, Dumas père et Balzac) puis il devint un genre littéraire à part entière (Eugène Sue, Maurice Leblanc, Gustave Le Rouge et Michel Zévaco) [1]. Au XXe siècle, les médias (presse, radio et télévision) appliquent la même technique au traitement de l'information qui est entièrement fabriquée comme un récit pour divertir... le consommateur [2].

Le feuilleton commence par une rocambolesque histoire d'espionnage

Les médias dominants nous racontent tous la même histoire rocambolesque concernant l'origine des fuites qui auraient permis à Wikileaks de détenir "251 287 câbles diplomatiques" :
Dans un échange de mails avec le hacker Adrian Lamo, le soldat Manning a décrit la facilité avec laquelle il se serait procuré ces masses de données : «J'entrais dans la salle informatique avec un CD musical à la main […] puis j'effaçais la musique et je créais un dossier compressé. J'écoutais Lady Gaga et je chantonnais sur la musique, tout en exfiltrant la plus grande fuite de l'histoire des États-Unis.»
Libération
Aucun média n'a enquêté pour vérifier la véracité de ce conte alors que le soldat Bradley Manning fut arrêté en mai 2010 par l'United States Army Criminal Investigation Command et détenu dans une prison militaire de Camp Arifjan, au Koweït.

Aucun média ne s'est préoccupé de savoir si Bradley Manning avait donné son accord à leur publication des fuites qui le condamnera à 52 ans de prison pour "transfert de données secrètes sur son ordinateur personnel et ajout de logiciel non autorisé sur un système informatique confidentiel" et "communication, transmission et envoi d'information traitant de sécurité nationale à une source non autorisée" [3]. Les médias ne s'encombrent pas du principe de précaution - éviter une conséquence indésirable - quand il nuit à leurs intérêts financiers.

Un feuilleton fondé sur le mensonge

Contrairement à ce prétendent les médias dominants et que tout le monde répète sans le vérifier, Wikileaks n'a pas mis en ligne les "251 287 câbles diplomatiques fuités des États-Unis" qu'il détiendrait.
"Dévoilé – comment l'Amérique voit le monde", titre Der Spiegel. Tout comme The New York Times, The Guardian, Le Monde et El País, l'hebdomadaire allemand publie quelques-uns des 250 000 documents de la diplomatie américaine révélés par le site Wikileaks le 28 novembre.
Presseurop
Mensonge, mensonge, mensonge car ni Wikileaks ni les médias dominants n'ont publié à ce jour la totalité des "251 287 câbles diplomatiques".
Au stade actuel de la publication des 251 287 télégrammes diplomatiques détenus par Wikileaks, leur consultation n'est pas franchement problématique. En effet, le site a décidé de publier les mémos au compte goutte et, pour l'instant, seuls 243 (pas 243 000, hein, juste 243) sont actuellement consultables.
Écrans Libération
L'intrique du feuilleton ne tient pas au contenu, qui n'apporte rien de nouveau, mais au procédé de mise en scène de sa publication.

Un feuilleton agrémenté par de pseudo-révélations

Les médias dominants n'ont publiés qu'une sélection d'une sélection, c'est-à-dire pas grand-chose. Alors que d'après Wikileaks l'Irak est le pays le plus discuté (15 365 câbles dont 6 677 en provenance d'Irak), les médias dominants publient en priorité des anecdotes sans intérêts sur les chefs d'État et focalisent ces soi-disantes révélations sur les relations entre l'Iran et Israël (qui ne savait pas que l'Iran représentait l'axe du Mal ?) et sur les relations supposées entre la Chine et la Corée du Nord (qui ne savait pas que la Corée du Nord représentait l'axe du Mal ?).

Il faut être naïf ou ignorant de la réalité des relations internationales pour croire que le discours diplomatique se réduirait à un discours politiquement correct et qu'en coulisse les diplomates ne sauraient pas s'exprimer plus crûment.

Les notes que Le Monde nous présente comme des faits réels ne sont que les opinions de diplomates, chacun tentant de bluffer l'autre. On peut publier des milliers de mémos, qui disent tous la même chose sur l'Iran et la Corée du Nord, sans qu'aucun ne soit le début de commencement d'une preuve sur le fondement de l'opinion répétée à satiété.

Un feuilleton contrôlé par cinq médias

Cette publication, sous la forme d'un feuilleton mondialisé, est une arnaque car elle est entièrement contrôlée, filtrée et conditionnée par cinq médias dominants (New York Times, Der Spiegel, The Guardian, El Pais et Le Monde). Ces médias appartiennent tous, comme par hasard, aux puissances occidentales qui furent les puissances colonisatrices du monde à partir du XVIe siècle.

Le discours de Wikileaks est un discours mensonger et démagogique :
les documents donneront aux citoyens dans le monde entier une vue sans précédents sur les activités à l'étranger du gouvernement américain.
Wikileaks
Ce discours est complaisamment relayé par les cinq médias mondiaux, qui ont formé un oligopole, car il leur sert d'alibi pour faire accepter la dictature de leur "position dominante" [4]. Ce petit détail devrait faire réfléchir tous ceux qui croient encore naïvement que Internet serait un espace de liberté.

La rhétorique orwélienne

Il faut dire et redire que seuls ces cinq médias dominants ont accès à l'ensemble des données de Wikileaks et qu'ils les distillent en accord avec les autorités américaines et selon un calendrier planifié en commun.

Il y a un précédent à cette imposture, présentée comme une avancée de la démocratie, c'est celui des archives du Vatican. La bibliothèque du Vatican possède des documents historiques de première main, notamment sur la colonisation des Amériques, qui ne sont pas accessibles même aux chercheurs. Or, le Vatican a eut l'idée géniale de créer un site intitulé "Archives Secrètes Vaticanes", qui ne contient qu'une infime sélection soigneusement contrôlée, filtrée et conditionnée des archives authentiques [5].

L'im-Monde procède de la même façon en nous présentant Julian Assange comme "un apôtre de la transparence intégrale" [6]. Le pire est dans l'argumentation qui suit :
Mais à partir du moment où cette masse de documents a été transmise, même illégalement, à WikiLeaks, et qu'elle risque donc de tomber à tout instant dans le domaine public, Le Monde a considéré qu'il relevait de sa mission de prendre connaissance de ces documents, d'en faire une analyse journalistique, et de la mettre à la disposition de ses lecteurs.
Le Monde
Ainsi, "à partir du moment où cette masse de documents [...] risque de tomber à tout instant dans le domaine public", il fallait que L'im-Monde et ses compères se l'approprient pour la contrôler, la filtrer, la conditionner et finalement la vendre.

L'im-Monde prétend que cette opération marketing est la "démocratie" :
Enfin, ce n'est pas un hasard si ces nouvelles révélations émanent des États-Unis, le pays le plus avancé technologiquement et, d'une certaine manière, la société la plus transparente, plutôt que de Chine ou de Russie.
Le Monde
Scandons donc tous en chœur avec Le Monde : "La liberté, c'est l'esclavage" et "L'ignorance, c'est la force" [7].

02/12/2010
Serge LEFORT
Citoyen du Monde

Lire aussi :
Dossier documentaire & Bibliographie Médias, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Propagande, Monde en Question.

[1] Roman-feuilleton, Wikipédia.
[2] Serge LEFORT, Du récit au récit médiatique, Monde en Question, 29/07/2009.
Lire aussi : Serge LEFORT, Storytelling, Monde en Question, 28/07/2009.
[3] Bradley Manning, Wikipédia.
Lire aussi la version anglaise plus complète.
[4] Oligopole, Wikipédia.
[5] Archives Secrètes Vaticanes, Vatican.
[6] Pourquoi "Le Monde" publie les documents WikiLeaks, Le Monde, 28/11/2010.
[7] Georges ORWELL, 1984 [1949], Gallimard, 1972.

2 décembre 2010

Politique nucléaire de deux poids deux mesures

La République populaire démocratique de Corée (RPDC) a accusé les États-Unis d'adopter une politique de deux poids deux mesures sur les questions nucléaires et la prolifération.

L'agence de presse officielle nord-coréenne KCNA a rapporté un article du journal de Singapour Straits Times qui a confirmé que les États-Unis ont aidé Israël à développer des armes nucléaires ces dernières années.

"Le fait que les États-Unis aient aidé avec zèle Israël dans le domaine nucléaire techniquement et matériellement et qu'ils aient protégé et contribué délibérément à cela prouve que les États-Unis sont les complices et assistants d'Israël dans son processus d' armement nucléaire", a rapporté la KCNA.


La contribution des États-Unis à l'accession d'Israël aux armes nucléaires est "une preuve évidente" de l'injustice de la politique double que mènent les Américains en ce qui concerne les questions nucléaires, a ajouté le média.

Cependant, les États-Unis ont catégorisé les autres pays, notamment l'Iran et la RPDC, dont les activités nucléaires ont des fins pacifiques de "criminels nucléaires".

Une telle politique de deux poids deux mesures est une rupture grave du principe d'impartialité dans le domaine nucléaire, a souligné la KCNA, ajoutant que le plan américain de construire "un monde sans armes nucléaires" n'est donc "rien d'autre qu'une diversion pour couvrir ses ambitions de dominer le monde avec le nucléaire et de tromper la population mondiale".

L'agence de presse officielle de la RPDC a conclu que les États- Unis sont à blâmer pour la menace nucléaire et le danger de la prolifération nucléaire dans le monde.

01/12/2010
Chine informations

Les ventes d'armes prospèrent malgré la crise


Récemment, les États-Unis ont annoncé une vente d'armes modernes d'une valeur de 60 milliards de dollars à l'Arabie Saoudite, une des plus grandes ventes d'armes réalisées par les États-Unis à ce jour. Que ce soit lors de la crise financière ou actuellement, en période de reprise économique solide, les ventes d'armes ont prospéré au fil des années. Selon un rapport récemment publié par l'institut de Stockholm International Peace Research, ces dernières années, le nombre de ventes d'armes à l'échelle mondiale n'a cessé d'augmenter et les États-Unis et la Russie sont les deux grands gagnants.

Les États-Unis, la Russie, la Grande-Bretagne et la France, les quatre plus grands pays exportateurs d'armes du monde

Les États-Unis, la Russie, la Grande-Bretagne et la France, ces quatre plus grands pays exportateurs d'armes du monde ont engrangé d'énormes bénéfices économiques avec les ventes d'armes.

Toujours selon le rapport, le chiffre d'affaires des exportations d'armes des États-Unis a atteint 38,1 milliards de dollars, soit le plus grand du monde entier, ce qui a créé un nouveau record. La Russie s'est classée à la 2e place avec un chiffre d'affaires de 10,4 milliards de dollars en 2009, grâces à ses armes avancées, de bonne qualité et bon marché. En tant que pays européen de vieille tradition militaire, la France est toujours un géant du marché des exportations d'armes. Selon le rapport publié le 6 octobre 2010 par le ministère de la défense du pays, le chiffre d'affaires des ventes d'armes de la France a augmenté de 13% en 2009 par rapport à celui de 2007 et de 2008, créant le nouveau record du siècle pour se classer à la 4e place des pays exportateurs d'armes les plus grands du monde, suivant les États-Unis, la Russie et la Grande-Bretagne.

Le mois dernier, peu après l'annonce étonnante de la vente d'armes d'une valeur de 60 milliards de dollars à Arabie Saoudite par les États-Unis, la Russie a déclaré publiquement qu'elle exécutera un contrat signé avec la Syrie en 2007 dont la valeur s'élève à 300 millions de dollars. Selon le contrat, la Russie va livrer à cette dernière 72 missiles « Yakhont P-800 ».

90% des grandes commandes d'armes ont été faites par des acheteurs asiatiques

Parmi les grandes commandes d'armes à l'échelle mondiale, celles faites par les acheteurs asiatiques en ont représenté 90%. L'Inde constitue ces dernières années un des acheteurs principaux de l'Asie. Elle demande des navires de guerre, des sous-marins, des avions militaires, des chars de combat et autres armes modernes à tous les vendeurs possibles et a signé sans cesse de grandes commandes d'armes, que convoitent les commerçants d'armes internationaux. Les États-Unis, l'Europe et la Russie se sont tous disputés le marché indien, en transférant même certaines technologies modernes à l'Inde pour se procurer des commandes.

En entrant dans l'année 2010, en tant que plus grand pays exportateur d'armes, les États-Unis ont déjà vendu des armes à Taiwan, à l'Inde, au Koweït, à Israël et au Mexique, etc, alors que le président russe Medvedev effectuera en décembre une visite en Inde et lui proposera une importante offre d'armes.

Selon la presse russe, lors de la visite de Medvedev en Inde, les deux parties signeront officiellement une entente sur la recherche et le développement d'avions militaires de la 5e génération, selon laquelle la Russie livrera d'ici 10 ans 250-300 avions militaires de 5e génération et 45 avions de transport militaire.

Par ailleurs, le Moyen-Orient constitue un autre grand marché d'armes où les États-Unis et la Russie sont en concurrence. Ce n'est pas simplement pour l'argent mais aussi pour des intérêts stratégiques et l'influence.

25/11/2010
Renmin Ribao

1 décembre 2010

Permis de tuer !


Hortefeux justifie l'emploi de l'arme contre un malien :
Un Malien de 38 ans est mort dans la nuit de lundi à mardi à Colombes après avoir reçu deux décharges du pistolet Taser pendant son interpellation.

"L'alternative au Taser dans le monde entier, c'est l'arme à feu, et là précisément il n'y a pas eu d'utilisation d'arme à feu. Il n'y a pas d'autre alternative au Taser", a assuré le ministre de l'Intérieur.

Nouvel Obs

Le maire PS excuse a priori la police :
Le maire PS de la ville a recommandé la prudence sur le lien avec cette arme. "Il est indispensable d’attendre les conclusions de l’enquête de l’IGS (Inspection générale des services, "police des polices") et de l’autopsie qui, seule, permettra de déterminer les causes du décès", a déclaré le maire, Philippe Sarre, dans un communiqué.

"Car rien dans les faits actuellement connus ne permet de tirer des conclusions sur la responsabilité des forces de police, ni même sur le lien avec l'utilisation du Taser", a-t-il ajouté.

"Je déplore bien évidemment ce décès", dit aussi le maire. "J’en appelle à la sagesse et à la responsabilité de chacun pour éviter toutes rumeurs infondées" et "comprends qu’à l’occasion de cet incident dramatique, la question de l’utilisation du Taser soit à nouveau posée".

Nouvel Obs
Lire aussi : Les réactions à la mort d'un Malien après deux décharges de Taser, Nouvel Obs.

Wikileaks fait du bruit... pour rien

Les médias dominants prétendent que "WikiLeaks met à nu la diplomatie américaine" :
Le contenu de 250.000 câbles diplomatiques américains dévoilés par le site WikiLeaks a été publié dimanche 28 novembre par les grands titres de la presse mondiale, révélant les dessous de la diplomatie des États-Unis.
NouvelObs, 29/11/2010
Or ces mêmes médias ne publient que des anecdotes sans intérêts sur les chefs d'État et focalisent ces soi-disantes révélations sur l'Iran alors que l'Irak est le pays le plus cité dans ces documents.
Ainsi, l'im-Monde ne rate pas une occasion pour faire sa propagande anti-iranienne :
On savait les régimes arabes inquiets à la perspective de voir l'Iran se doter de l'arme atomique. On ne les savait pas terrorisés à ce point par la République islamique et, jour et nuit, obsédés par la marche au nucléaire entreprise par cette dernière. C'est, parmi bien d'autres, l'un des points les plus passionnants que livre la lecture des documents rendus publics depuis le 28 novembre par le site WikiLeaks et cinq journaux internationaux, dont Le Monde.
Le Monde, 01/12/2010
Or, la preuve qu'il avance n'en est pas une :
Nul ne le dit mieux que le roi Abdallah d'Arabie saoudite, cité dans un télégramme de décembre 2005. Il se plaint amèrement de la situation créée par le président Bush en Irak et observe : "Alors que dans le passé les États-Unis, l'Arabie saoudite et Saddam Hussein s'entendaient sur la nécessité de contenir l'Iran, la politique américaine a donné l'Irak à l'Iran comme un cadeau sur un plateau d'argent."
Trotsky avait promis, en tant que commissaire du Peuple aux Affaires étrangères, qu'il publierait tous les documents diplomatiques après avoir signé les accords de Brest-Litovsk. Il a démissionné sans rien faire.

Contrairement à ce que tout le monde répète, WikiLeaks n'a pas mis en ligne les "251 287 câbles diplomatiques fuités des États-Unis" qu'il détiendrait. La publication se fait au compte goutte et elle est entièrement contrôlée et filtrée par cinq médias dominants : New York Times, Der Spiegel, The Guardian, El Pais et Le Monde [1].
WikiLeaks ment donc quand il affirme :
les documents donneront aux citoyens dans le monde entier une vue sans précédents sur les activités à l'étranger du gouvernement américain.
Enfin, le discours sur le thème "il y existe des individus droits et courageux au sein du gouvernement, qui croient en la transparence et en une politique étrangère plus éthique" est un discours démagogique.

01/12/2010
Serge LEFORT
Citoyen du Monde

[1] WikiLeaks : Le Monde défend le sérieux des conditions de publication, NouvelObs, 29/11/2010.
Lire aussi :
• WikiLeaks : où chercher les mémos ?, Big Browser - Blog Le Monde, 29/11/2010.
• Où consulter les mémos de WikiLeaks ?, NouvelObs, 30/11/2010.
• Wikileaks entame la publication de câbles diplomatiques US confidentiels, Wikileaks.

30 novembre 2010

Haïti occupé par l'humanitaire militaire

Des corps décharnés sur des paillasses, des êtres humains gisant par terre et mourant du choléra, des hommes, des femmes, portant sur leur dos le corps malade de leur enfant ou de leur compagnon : les images qui parviennent d'Haïti suscitent la compassion, mais plus encore l'indignation.

La catastrophe humaine que connaît aujourd'hui Haïti était une catastrophe annoncée. Elle est la deuxième en cette année, dix mois après le tremblement de terre qui a dévasté le pays et sa capitale, faisant plus de deux cent mille victimes.

Devant l'émotion internationale que cela a suscitée, les dirigeants des grandes puissantes avaient juré la main sur le cœur qu'ils aideraient à reconstruire le pays. De Clinton à Sarkozy, ils ont fait un petit tour sur l'île dévastée pour promettre de l'argent, les yeux fixés sur les caméras. Une fois passée cette émotion, on a remballé les caméras et on a laissé la population, une des plus pauvres de la planète, seule face aux conséquences du tremblement de terre.

Les milliards promis sont restés des promesses. Et les médecins et infirmières des ONG, débordés face au choléra, ont beau implorer : il n'y a pas assez de personnel soignant, il n'y a pas assez de lieux pour soigner, et il n'y a pas de moyens de transport pour permettre aux malades d'atteindre rapidement les centres de soins. Il n'y a même pas assez d'argent pour des médicaments qui ne coûtent pas trop cher. Si le choléra tue vite, c'est aussi une maladie facile à soigner, il continue pourtant à tuer.

Lutte Ouvrière
Les puissances occidentales sont responsables de ces morts en particulier les États-Unis, qui ont profité du séisme pour occuper l'île, et les humanitaires, qui accompagnent les militaires, sont complices [1].

France Culture a organisé une journée politiquement correct sur Haïti. Ainsi, la revue de presse internationale était animée par Pierre Godson non seulement parce qu'il est journaliste et éditeur de l'agence en ligne AlterPresse mais surtout parce qu'il est noir. En bon chien de garde il a consacré l'essentiel de sa revue de presse aux élections en Haïti... [2]

28/11/2010
Serge LEFORT
Citoyen du Monde

Lire aussi :
• Articles Haïti, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Haïti, Monde en Question.
• Articles Colonialisme Humanitaire, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Aide humanitaire - Colonialisme humanitaire, Monde en Question.

[1] Serge LEFORT, L'armée américaine occupe Haïti, Monde en Question.
[2] Revue de presse internationale de Godson Pierre, Revue de presse internationale.
Autres émissions :
• Une journée à Port-au-Prince, France Culture.
• La relation au monde caraïbe, Les Enjeux internationaux [voir les liens en bas de page].
• Une moitié d'île : le rapport à la République dominicaine, Les Enjeux internationaux.
• L'aide internationale : entre nécessité et dépendance, Les Enjeux internationaux.
• L'ONU en Haïti : de l'ingérence à la MINUSTAH, Les Enjeux internationaux.
• Haïti entre les États-Unis et la France, Les Enjeux internationaux.
• Haïti (1/5) : "Punta Cana – les Abricots : un rêve de paradis", Sur les docks [rediffusion].
• Haïti (2/5) : "Dajabon, une frontière pour deux", Sur les docks [rediffusion].
• Haïti (3/5) : "Les Frères de Saint-Jacques dans la tourmente", Sur les docks [rediffusion].
• Haïti (4/5) : "Welcome Gentils Yankees !", Sur les docks [rediffusion].
• Haïti (5/5) - "Haïtiens : être ou ne pas être ?", Sur les docks [rediffusion].
• 24 heures en Haïti, Les Nouveaux chemins de la connaissance [voir la bibliographie en bas de page].
• Emission spéciale Haïti, Questions d'époque.
• Thème Amérique, France Culture.

29 novembre 2010

Marx, mode d'emploi


Entretien avec Daniel Bensaïd autour de son livre Marx, mode d'emploi, Là-bas si j'y suis 1/2, 2/2
Dans les années 80, en pleine offensive néolibérale, le magazine Newsweek pouvait titrer, triomphalement : "Marx est mort." Mais les spectres ont la peau dure. Et Marx est de retour. En ces temps de crise fracassante du capitalisme et de grande débandade idéologique, on le redécouvre. Même le très libéral conseiller de l'Elysée, Alain Minc, s'est déclaré un jour "marxiste" - sans rire - en matière d'analyse économique. Mais qui fut Marx ? Qu'a-t-il vraiment dit ?
Lire aussi :
• L'actualité des podcasts
- DKPOD
- Tous les podcasts
- RSS One
• Hommage à Daniel Bensaïd, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Marxisme, Monde en Question.

27 novembre 2010

La France vue de Chine


Le Quotidien du Peuple a consacré un dossier sur les "Grèves et manifestations contre la réforme des retraites" et une analyse comparative sur les "Deux Europes dans la crise de la protection sociale".
À l'heure où la Chine rachète la dette des pays européens plombés par la crise financière de 2008, il est temps de savoir qu'elle est sa perception de la question sociale en France et en Europe car prochainement les gouvernements l'Union européenne l'imposera comme un horizon indépassable.

Lire aussi :
• Grèves et manifestations contre la réforme des retraites, Renmin Ribao.
• Deux Europes dans la crise de la protection sociale, Renmin Ribao, 15/11/2010.
• Ce que cherche à obtenir Nicolas Sarkozy en France et dans le monde, Renmin Ribao, 12/11/2010.

24 novembre 2010

Facebook et les élections présidentielles


A travers l'analyse des interactions entre hommes politiques et internautes sur Facebook après les élections présidentielles de 2007 en France, cet article vise à montrer comment les réseaux sociaux sont exploités par les deux parties. Au départ un réseau décentralisé qui lie les gens sans intervention politico-hiérarchique, Facebook est mobilisé par les hommes politiques au service de leur besoins. Quelles en sont les conséquences pour la sphère publique : s'agit-il d'un outil qui permet à l'internaute de déjouer les usages de marketing politique qu'en fait l'homme politique ?

Les réseaux sociaux et l'échange entre l'homme politique et les internautes : le cas de Facebook après les élections présidentielles en France, Argumentation et Analyse du Discours n°5, Octobre 2010.

22 novembre 2010

Propagande coloniale


La Fabrique de l'Histoire a diffusé la semaine dernière quatre épisodes consacrés à l'Histoire du monde en 1510 [1]. Cette émission "fabrique" c'est-à-dire manipule l'histoire pour nous convaincre que la colonisation aurait été positive. Elle le fut certes pour l'Europe, qui accumula ainsi le capital nécessaire à sa croissance, mais certainement pas pour les peuples non seulement d'Amérique, mais aussi d'Afrique et d'Asie.

Au cours du premier épisode (42'45" à 43'19"), une intervenante prétend que les peuples autochtones d'Amérique seraient morts d'une simple grippe [2] ! Elle passe sous silence les massacres, le travail forcé, l'esclavage qui furent le lot commun de la colonisation des Amériques, de l'Afrique et de l'Asie.

Au cours du troisième épisode, l'animateur pratique la novlangue politiquement correct. Il utilise à plusieurs reprises le verbe "sécuriser" pour dire "protéger militairement la colonisation commerciale".

22/11/2010
Serge LEFORT
Citoyen du Monde

Lire aussi :
Dossier documentaire & Bibliographie Colonialisme, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Géo-Histoire globale, Monde en Question.

[1] Histoire du monde en 1510, La Fabrique de l'Histoire 1/4 - 2/4 - 3/4 - 4/4.
[2] La même propagande fut utilisée à rebours à propos du virus de la grippe A/H1N1 qui serait venu du Mexique pour envahir l'Europe ! Lire : Revue de presse Grippe A/H1N1 2009 et Revue de presse Grippe A/H1N1 2010.

19 novembre 2010

Crise systémique globale

Alerte Crise systémique globale - Premier Trimestre 2011 : Franchissement du seuil critique de la dislocation géopolitique mondiale, GEAB N°49
Dans ce GEAB N°49, en plus de l'analyse des six principales transitions qui marquent le franchissement de ce seuil critique de la dislocation géopolitique mondiale, notre équipe présente de nombreuses recommandations pour faire face aux conséquences de cette nouvelle étape de la crise. Elles concernent notamment l'ensemble Devises/Taux d'intérêt/Or & Métaux précieux, la préservation de richesse et le remplacement de sa mesure par rapport au Dollar US, les « bulles » des classes d'actifs libellés en Dollars US, les bourses et les catégories d'entreprises particulièrement fragiles dans cette phase de la crise. LEAP/E2020 y présente aussi les « trois réflexes simples » à adopter pour mieux comprendre et anticiper le nouveau monde en gestation. Par ailleurs, dans ce numéro du GEAB, notre équipe décrit le double choc électoral franco-allemand de 2012/2013.
Lire aussi :
• L'actualité des revues
- Ent'revues - la Revue des revues
- A plus d'un titre - Chaque vendredi
Dossier Guide des ressources documentaires, Monde en Question.

17 novembre 2010

Controverse de Valladolid

La conquête coloniale des Amériques par les monarchies catholiques d'Espagne et du Portugal fut l'acte fondateur de la barbarie européenne et, par extension, de la barbarie occidentale qui s'autoproclame LA civilisation et se prétend LE modèle indépassable pour les peuples colonisés des Amériques, de l'Afrique et de l'Asie.


Bartolomé de Las Casas fut un colonialiste version humanitaire - un Bernard Kouchner du XVIe siècle [1]. Son œuvre, intéressante rétrospectivement alors qu'elle fut interdite de publication jusqu'au XIXe siècle, n'eut aucun impact sur la colonisation qui se poursuivit imperturbablement. Elle est instrumentalisée aujourd'hui pour minimiser le crime contre l'humanité perpétré par la monarchie catholique.
On n'a pas attendu le XX° siècle et la fin des empires coloniaux pour que dès le début de la conquête de l'Amérique, un évêque qui y avait participé, Bartolomé de Las Casas, dénonce les crimes des conquistadors dans ce qu'on appelait encore les Indes. C'était en 1550, dans la vieille cité castillane de Valladolid où Charles Quint avait réuni les plus grands philosophes et théologiens de l'époque pour discuter de la légitimité de l'immense empire construit par les Espagnols en Amérique, 58 ans après sa découverte par Christophe Colomb en 1492.
2000 ans d'Histoire
Au Mexique, la hiérarchie catholique vénère Bartolomé de Las Casas comme un saint ; la gauche et l'extrême gauche, aussi débiles qu'en France, l'honorent en passant sous silence que, s'il critiqua les "excès" des colons, son objectif était concilier évangélisation et colonisation (maintenir en vie les colonisés pour les évangéliser) et que ses propriétés de terres indigènes lui rapportaient 100.000 castellanos par an - une petite fortune à l'époque.

12/11/2010
Serge LEFORT
Citoyen du Monde

Lire aussi :
• Controverse de Valladolid, Académie d' Aix-Marseille - Wikipédia.
• Bartolomé de Las Casas, Wikipédia.

• Bartolomé de LAS CASAS, La controverse entre Las Casas et Sepúlveda [introduit, traduit et annoté par Nestor Capdevila et précédé de Impérialisme, empire et destruction], Vrin, 2007 [BooksGoogle - Académie de Paris - Erytheis].
La controverse entre Las Casas et Sepúlveda (1550-1551), connue sous le nom de controverse de Valladolid, est une interrogation des fondements de l'impérialisme européen qui le fait apparaître à ses propres yeux comme une entreprise civilisatrice ou génocidaire. Ce débat rigoureusement fondé sur les principes universalistes de la révélation et du droit naturel est un conflit politique pour une nouvelle détermination de l'empire rendue nécessaire par la « découverte » du Nouveau Monde et sa conquête. Sepúlveda légitime cette guerre en revendiquant pour l'Espagne, en tant que peuple chrétien et rationnel, un droit a priori sur l'Amérique et ses habitants idolâtres et barbares. Las Casas condamne toute la conquête en niant la barbarie des peuples indiens et en leur reconnaissant la souveraineté. Ce qui aux yeux de Sepúlveda est un usage légitime de la force au service de la foi et de la civilisation est pour Las Casas un sacrifice humain inavouable et occulté par la victoire du « faux » christianisme sur le « vrai ».

• CAPDEVILA Nestor, Las Casas et la tolérance, Fondation Ostad Elahi - Colloque L'invention de la tolérance, 08/09/2007.
Las Casas est un catholique orthodoxe qui combat l'infidélité en Amérique comme en Espagne. Son objectif a toujours été de supprimer l'idolâtrie des Indiens, de les convertir et de les soumettre à l'autorité impériale de Charles Quint. La condamnation de la conquête de l'Amérique (« la destruction des Indes ») l'amène ainsi à défendre les droits des peuples indiens (la souveraineté et la propriété). Il reconnaît également aux païens le droit et même le devoir de défendre leur religion. L'autre face de ses projets de colonisation et de conversion pacifiques est une rationalisation hétérodoxe de l'idolâtrie, et en particulier du sacrifice humain, dans le langage de l'orthodoxie catholique. La tolérance est chez lui cette contradiction rigoureusement argumentée par laquelle il défend ce qu'il combat et qui lui impose de fonder la soumission et la conversion des Indiens sur leur accord parfaitement libre.

• CARRIÈRE Jean-Claude, La controverse de Valladolid, Belfond, 1992 et Pocket, 1999 [Fiches de lecture - Itereva - WebLettres - Wikipédia].
• VERHAEGHE Jean-Daniel, La controverse de Valladolid, 1992 [TV5].

Dossier documentaire & Bibliographie Aide humanitaire - Colonialisme humanitaire, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Colonialisme, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Mexique, Monde en Question.

[1] Le colonialisme humanitaire, Monde en Question.

15 novembre 2010

L'industrie dans la tourmente de la finance


L'auteur nous entraîne à la découverte des processus amenant à la domination de la finance privée et de ses critères de gestion sur l'industrie. La puissance des fonds d'investissement et le fameux montage financier d'acquisition avec effet de levier (LBO) sont analysés. Un chapitre est consacré à EADS et sa filiale Airbus. Sont étudiées la dérégulation financière et sociale engagée par les autorités françaises depuis 1982, ainsi que la place de l'Union Européenne dans la politique économique des États membres.
LANGLET Denis, L'industrie dans la tourmente de la finance, L'Harmattan, 2008 [Amazon - La Sociale].

Lire aussi :
• LANGLET Denis, Contribution à l'état des lieux - «Situation des salariés en France», Blog Denis Langlet, 11/11/2010.
Ce document de 30 pages dresse un état de la situation des salariéés à partir d'une série d'indicateurs tels que les effecifs par branches d'activité, les emplois détruits, le chômage, la situation des jeunes, la précarité, l'inflence de la taille des entreprises sur le niveau des salaires, la répartition des salariés par taille d'entreprises et selon la nature du contrats de travail, l'intensification du travail... Un deuxième volet traite de la dérèglementation depuis 1982.
Dossier documentaire & Bibliographie Économie crise, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Économie sociale, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Tournant de la rigueur, Monde en Question.

12 novembre 2010

Misère de la philosophie


Raphaël Enthoven est un animateur de radio qui se prétend philosophe version people [1]. Sa dernière production, intitulée Préhistoires de la pensée, évoque les philosophes dits présocratiques.

Trois remarques :

1) Il est pour le moins incongru de classer les philosophes présocratiques dans la préhistoire alors qu'ils ont vécu entre le milieu du VIIe siècle et le IVe siècle avant notre ère. Cette classification est idéologique car elle suppose que la philosophie, la vraie, serait née avec Socrate ou plutôt avec Platon et Aristote puisqu'on ne connaît le premier qu'à travers les œuvres des deux autres, qui sont la référence obligée de la culture philosophique occidentale.

2) Les philosophes présocratiques sont peu connus, voire ignorés, parce que seulement quelques fragments de leurs œuvres nous sont parvenus. En effet, la réception de Platon [2] relégua dans l'ombre ses prédécesseurs, dont les œuvres ne furent plus guère publiées - par copie manuscrite selon la technologie en cours avant le milieu du XVe siècle [3].

3) La dénomination "philosophes présocratiques" pose problème car elle est rétroactive. C'est une construction idéologique d'une catégorie de l'historiographie philosophique occidentale [4] comparable à celle du calendrier construit à l'instigation du pape Grégoire XIII, qui, en 1582, fixa le point de départ de notre ère selon la référence catholique [5].

11/11/2010
Serge LEFORT
Citoyen du Monde

Écouter :
• Préhistoires de la pensée 1/5 : Parménide
• Préhistoires de la pensée 2/5 : Héraclite
• Préhistoires de la pensée 3/5 : Empédocle
• Préhistoires de la pensée 4/5 : Démocrite
• Préhistoires de la pensée 5/5 : Heidegger (une lecture moderne des Présocratiques)

Lire aussi :
• Présocratiques, Wikipédia.

• DUMONT Jean-Paul (sous la direction de), Les Présocratiques, La Pléiade Gallimard, 1988.
Thalès et Héraclite en Ionie, Pythagore et Parménide en Italie, Démocrite à Abdère, telles sont peut-être les figures les plus marquantes du monde intellectuel méditerranéen des VIe et Ve siècles av. J.-C., qui vit naître la philosophie. De ces temps primordiaux demeurent, comme autant d'éclats lumineux, des fragments et des témoignages indirects. Leur lecture, admirativement fascinée et patiemment attentive, nous apprend ce qu'est la pensée rationnelle et comment elle s'est peu à peu constituée en affrontant les questions éternelles : qu'est-ce que l'existence ? Qu'est-ce que le monde ? Qu'est-ce que l'homme ? Qu'est-ce que la vérité ? Les fragments des Présocratiques sont autant de pierres qui bornent la voie royale de l'initiation philosophique.

LAKS André, LOUGUET Claire, Qu'est-ce que la philosophie présocratique ?, Presses Universitaires Septentrion, 2002 [BooksGoogle].
Ce recueil d'essais, issus du colloque qui s'est tenu à Lille en Octobre 2000, essaye de répondre à la question que pose le titre à travers deux séries d'études. La première, plus générale, est consacrée à l'examen historique et critique des catégories que l'historiographie de la philosophie a employées pour parler de la naissance de la philosophie en Grèce ; la seconde, plus particulière, traite différentes figures de la pensée présocratique ainsi que les problèmes que pose la constitution d'un corpus fragmentaire.

• LAKS André, Introduction à la "philosophie présocratique", PUF, 2006 [Amazon].
Les "philosophes présocratiques" ne se concevaient pas comme tels. Socrate n'était pas pour eux une référence, au mieux un cadet, voire un contemporain. Et ce n'est que sur le tard, à la dernière génération, qu'ils commencèrent à être désignés comme "philosophes". Mais si les philosophes présocratiques ne sont philosophes et présocratiques que rétroactivement, il convient de s'interroger sur la manière dont ils sont devenus tels. Pour mettre en évidence la construction, certes, mais aussi pour s'interroger star sa possible légitimité : car il ne s'agit pas, contrairement à ce que suggère un terme aujourd'hui galvaudé, d'une simple "invention". L'importance de la question tient évidemment au fait que, quand nous parlons des philosophes présocratiques, ce sont des origines de la philosophie grecque, et par là occidentale, dont nous parlons.

Revues de philosophie :
• Portail, Cairn
• Portail, Ent'revues (sélectionner thème : philosophie)
• Portail, Érudit
• Portail, Persée
• Agone - Sciences sociales, Philosophie & Politique, Revues.org
• Astérion - Philosophie, histoire des idées, pensée politique, Revues.org
• Le Portique - Revue de philosophie et de sciences humaines, Revues.org

[1] Il est l'ancien mari de Justine Lévy (fille de Bernard-Henri Lévy) et l'ancien compagnon de Carla Bruni, avec qui il a eu un fils prénommé Aurélien. Il vit aujourd'hui avec l'actrice Chloé Lambert, avec qui il a eu un fils prénommé Sacha.
• Quand Justine Lévy parle de sa rivale, NouvelObs, 25/06/2008.
• Carla Bruni et Raphaël Enthoven perdent contre la presse people, Libération, 25/09/2008.
• L'ex de Carla Bruni Raphael Enthoven est papa [avec Chloé Lambert], Voici, 22/12/2008.
[2] Le Centre Léon Robin se consacre à la réception des présocratiques dans la latinité et le moyen-âge byzantin, Université Paris-Sorbonne (Paris IV) [Rapport d'évaluation, Février 2009].
[3] Si Johannes Gutenberg est considéré comme l'inventeur de l'imprimerie typographique en Europe, Bi Sheng ayant inventé les caractères mobiles en argile bien plus tôt (entre 1041 et 1048) en Chine, puis le Coréen Choe Yun-ui (XIe siècle) des caractères métalliques mobiles. Imprimerie, Wikipédia.
[4] LAKS André, L'émergence d'une discipline - Le cas de la philosophie présocratique in BOUTHIER Jean, PASSERON Jean-Claude, REVEL Jacques (sous la direction de), Qu'est-ce qu'une discipline ?, Éditions de l'EHESS, 2006 p.151-171.
On parle couramment des «écoles présocratiques» sans s'interroger sur les implications d'une telle expression. En fait, l'idée que les premiers philosophes grecs étaient organisés en écoles a fait l'objet, en 1887, d'un argument développé par H.Diels, le fondateur des études présocratiques modernes. Le présent article part de cet argument pour en démonter les présupposés qui reflètent en partie ceux de l'institution académique moderne, mais en partie aussi ceux de l'historiographie aristotélicienne. En même temps, il tente de montrer que l'approche non seulement déscolarisée, mais aussi désaristotélisée des débuts de la philosophie grecque, qui a été largement développée par les approches d'inspiration anthropologique et pragmatique et qui est aussi désormais assez souvent pratiquée par les historiens de la philosophie ancienne, ne suffit pas à rendre compte des processus intellectuels que suppose l'émergence d'une discipline comme la philosophie grecque, dont la nouveauté peut être considérée comme un cas particulièrement intéressant, voire paradigmatique, d'innovation disciplinaire.
[5] Lire les articles :
• Calendrier, Wikipédia.
• Calendrier grégorien, Wikipédia.
• Les textes fondateurs du calendrier grégorien, Rodolphe Audette.
• Anno Domini, Wikipédia.
• Ère commune, Wikipédia.