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22 août 2009

Fraudes électorales en Afghanistan


300 000 militaires sont mobilisés pour déjouer les plan des talibans qui tentent à tout prix de perturber la réélection du président Hamid Karzaï.
Le journal de 12h du 20 août 2009, LCI (Voir la vidéo - Télécharger la vidéo)

Articles :

    • 22/08/2009, Des observateurs font état de violences et de fraudes, Canoe
    Les observateurs de Nader Nadery ont remarqué que des assesseurs avaient manqué d'impartialité et avaient fait pression sur des électeurs pour qu'ils votent pour certains candidats, un problème très répandu selon lui. Beaucoup de mineurs ont voté alors qu'ils n'étaient pas en âge de le faire.

    Samedi, l'un des petits candidats, le parlementaire Mirwais Yasini, a également dénoncé des fraudes. Il a montré des bulletins de vote déchirés qui, selon lui, avaient été jetés par des assesseurs soutenant Hamid Karzaï.

    Les partisans de Mirwais Yasini ont découvert ces bulletins, mis au rebut, à l'extérieur de la ville de Spin Boldak, dans la province de Kandahar. Ceux qu'ils a montrés à la presse portaient le tampon de la Commission électorale indépendante, qui n'est apposé que sur les bulletins qui viennent d'être utilisés pour voter. «Des milliers d'autres ont été brûlés», a accusé le parlementaire.

    La Fondation d'Afghanistan pour des élections libres et justes [FEFA] était présente dans les 34 provinces, ce qui n'était pas le cas des observateurs internationaux.

    L'Institut national démocratique, basé à Washington, n'a couvert que 19 provinces, évitant le sud et l'est du pays, trop violents. Ses observateurs ont déploré l'absence de listes électorales, ce qui favorise les fraudes. Ils ont regretté aussi que les assesseurs aient été nommés par l'exécutif sortant, ce qui laisse redouter une certaine partialité.

    L'Union européenne, qui n'a couvert que 17 provinces, a de son côté pris «note avec préoccupation de rapports faisant état d'irrégularités et de fraude», selon un communiqué publié samedi par la présidence suédoise de l'UE.

    • 22/08/2009, Présidentielle en Afghanistan : l'Union européenne préoccupée, Libération
    La FEFA (Free and Fair Election Foundation of Afghanistan), principale organisation indépendante afghane d'observateurs électoraux, se montre nettement plus directe dans ses conclusions: selon elle, des fraudes multiples ont entaché les élections, comme «des électeurs munis de plusieurs cartes et votant au nom de femmes», des votes de non adultes, «des fraudes» dont «quelques cas de bourrage des urnes». Et, «dans certains endroits, des hommes armés ont malmené le personnel de la Commission électorale et tenu eux-mêmes les bureaux de vote».

    La FEFA, qui avait déployé 6.968 observateurs, dont 2.488 femmes, dans les quelque 6.200 bureaux de vote, relève également que certains bureaux de vote n'ont pas ouvert ou fermé aux heures officielles, voire sont restés fermés dans certaines provinces - l'Oruzgan par exemple, où seulement six sites sur 36 ont ouvert -. D’autre part, «environ 650 bureaux réservés aux femmes sont restés fermés».

    Chargée de l'organisation et l'annonce des résultats, la Commission électorale, dont plusieurs observateurs ont dénoncé la partialité en faveur d'Hamid Karzaï, est aussi largement critiquée par la FEFA. «Dans certaines régions, la Commission électorale a profité de l'illettrisme des électeurs pour détourner leurs votes au profit de certains candidats», accuse l’organisation.

    • 21/08/2009, Les camps de Karzaï et d'Abdullah revendiquent la victoire, Reuters-Yahoo! Actualités
    Un groupe afghan indépendant, le FEFA, a publié un communiqué où il se dit préoccupé par les conditions de déroulement des élections, ses observateurs disséminés dans le pays ayant fait état de fraudes et d'ingérences de la part de responsables électoraux.
    Le groupe rapporte aussi que le nombre de bureaux de vote réservés aux femmes ouverts était inférieur à ce qui était prévu. Ses observateurs ont signalé enfin des cas où des hommes votaient au nom d'une femme. Ces informations font l'objet de vérifications, précise le Fefa.

    • 21/08/2009, Go tell the world about our fake election, RAWA

Audio-Vidéo :

    • 21/08/2009, Soupçons de fraudes au lendemain du scrutin, France 24
    Les invités de ce Focus sont Claire Billet, correspondante de FRANCE 24 en Afghanistan [journaliste embedded], et Mariam Abou-Zahab, chercheur et spécialiste de l’Afghanistan au CERI, à Sciences Po.

Lire aussi : Dossier Élections 2009

21 août 2009

Les transformations silencieuses


La culture chinoise accorde une place centrale aux transitions. Pas l'Occident. On ne voit rien. Pourtant, heure par heure, jour par jour, tout change. L'enfant grandit, le corps vieillit, la montagne s'érode, le climat change, ou bien le couple, lentement, se délite. Ces modifications minimes et constantes, inaperçues mais essentielles, forment le cours du monde et la trame de l'existence. Elles progressent à bas bruit, partout présentes, invisibles toutefois, à force d'être minimes et graduelles. « Un beau jour », comme on dit, le résultat saute aux yeux, avec la soudaineté apparente et trompeuse d'un événement nouveau : cet amour est mort, la planète est en danger, je suis vieux, l'enfant est grand. Comment cela s'est-il fait ? Sur le coup, nous voilà pantois : nous voyons soudain ce qui était là, patent, en dehors pourtant de notre regard.

A partir de ce constat, aussi banal que philosophique, François Jullien a construit un livre en tous points remarquable. Il montre en effet combien « les transformations silencieuses » constituent ce que la métaphysique européenne a le plus de mal à saisir, alors que la culture chinoise leur accorde, au contraire, une attention soutenue. Depuis les Grecs, l'Occident a privilégié les délimitations : il pense par arêtes vives, par bords tranchés, par formes nettes, par idées « claires et distinctes », comme disait Descartes. Ce qui le rend inapte, en fin de compte, à concevoir les transitions, le passage graduel d'une forme à une autre.

La neige qui fond, par exemple. C'est encore de la neige, ce n'en est déjà plus. Avec ce genre de passage, Platon a bien du mal, et Aristote aussi. Car leur outillage conceptuel est, si l'on peut dire, composé de blocs : ou bien c'est de la neige, ou bien ce n'en est pas. Au coeur de leur pensée se tient en effet la question de l'identité stable, et non ce qui transite, mue ou flue.

Ces transitions incessantes sont pourtant au coeur de la réalité. La pensée chinoise, pour sa part, leur accorde une place centrale. Elle conçoit l'existence entière comme une transformation continue : vie organique et vie politique, monde naturel comme monde social ne sont que jeux de transitions ininterrompues. Sur ce versant de la réflexion, il s'agira avant tout de saisir la logique de la situation, sa dynamique interne, ses capacités propres de développement.

Dans cet horizon disparaissent, purement et simplement, certaines interrogations majeures qui ont obsédé la pensée européenne. Par exemple, la question du commencement (aucun début au vieillissement, pas plus qu'au cycle des saisons), celle du but (la transition ne vise pas le résultat comme un objectif à atteindre), ou même - plus surprenant - celle du temps. Attentive aux calendriers, aux annales, aux datations exactes, la culture chinoise n'a cependant jamais thématisé « le temps » comme notion générale et unique. Cette grande abstraction serait-elle, sur le versant occidental, la contrepartie de l'incapacité à rendre compte des transformations silencieuses ? C'est une des hypothèses de ce livre.

Comme toujours avec François Jullien, il ne s'agit nullement de proclamer la supériorité globale d'une culture sur une autre, de valoriser ou bien de déprécier soit l'Europe soit la Chine. Le geste de ce philosophe est différent : discerner des écarts entre univers mentaux, souligner des évidences dissemblables et faire bouger, par ce détour, nos conceptions ossifiées. Ainsi, nous croyons le plus souvent que l'histoire se construit par des dates clés, et la politique par des événements - révolutions, ruptures, grands ébranlements. Prendre en considération les transformations silencieuses fait voir autrement le même paysage : ce qui émerge sous forme d'un « événement » - unique, radical et brusque - ne serait-il pas le résultat d'une longue et lente accumulation de transitions infimes ?

Ce court volume incite donc, une fois de plus, à cette réflexion nouvelle que François Jullien poursuit de texte en texte. Mais c'est avec une souveraineté à la fois désinvolte et allègre qu'il y parvient désormais. Car ce livre appartient à l'espèce, somme toute assez rare, des textes à la fois limpides et pourvus d'un contenu. Certains auteurs les engendrent, à maturité, quand ils ont assez lu, assez pensé, assez peiné pour pouvoir poursuivre leur chemin d'un pas net et sûr. Heureux effet des lents processus.

Roger-Pol Droit
03/04/2009
Le Monde

Lire aussi : Dossier documentaire & Bibliographie François JULLIEN, Monde en Question.

20 août 2009

Talibans et Alliance du Nord, même combat


Au nom de la démocratie et de la paix, mes chers amis, j’aimerais vous transmettre les salutations les plus chaleureuses du peuple afghan. Avant de parler de la situation dans mon pays, je tiens à remercier, du fond de mon cœur, mes amis du Nouveau Parti démocratique, qui ont pensé à leurs sœurs afghanes et qui m’ont invitée à ce rassemblement.

Mes honorables amis, cinq ans après la chute du régime misogyne et anti-démocratique des Talibans, presque cinq ans après le début de l’attaque menée par les États-Unis contre l’Afghanistan, vous aimeriez sans doute que je vous parle du progrès et des résultats positifs en Afghanistan, mais j’ai le regret de vous informer que l’Afghanistan est encore une terre en proie à un double incendie.

Le gouvernement américain a effectivement renversé le régime des Talibans, avec son esprit médiéval et ses maîtres d’Al Quaeda. Mais, ils ont permis que l’Alliance du Nord accède à nouveau au pouvoir. Ce groupe ressemble aux Talibans sur le plan des croyances, et ils sont aussi brutaux et anti-démocratiques que les Talibans. Parfois encore pires.

En décembre 2003, à titre de représentante à la Grande Assemblée, j’ai parlé de la criminalité de l’Alliance du Nord et des dangers auxquels elle exposerait l’Afghanistan. Mais aujourd’hui, même l’ONU accepte que l’Afghanistan devienne un narco-État sous leur régime.

Il faut que je vous dise que, malheureusement, la situation désespérée du peuple afghan n’a pas changé. Lorsque le pays tout entier vit à l’ombre des armes à feu et des seigneurs de guerre, comment ses femmes peuvent-elles jouir des libertés les plus fondamentales ? Contrairement à la propagande diffusée par certains médias occidentaux, les hommes et les femmes en Afghanistan n’ont pas été « libéré-es » du tout.

J’aimerais vous décrire la réalité de mon pays en pleine crise, même s’il ne s’agit que de la pointe de l’iceberg.

Selon les Nations Unies, c’est un pays qui fait face à une crise de santé qui est considérablement pire que celle occasionnée par le tsunami. Sept cents enfants et entre 50 et 70 femmes meurent chaque jour, faute de services de soins de santé. Le taux de mortalité des mères et des enfants est encore très élevé : entre 1600 et 1900 femmes sur 100 000 meurent en couche. L’espérance de vie est inférieure à 45 ans.

Chez les femmes afghanes, le taux de suicide est terriblement élevé. Selon un sondage récent effectué par UNIFEM, 65 % des 50 000 veuves à Kabul voient le suicide comme la seule issue pour s’échapper de la misère noire dans laquelle elles se trouvent. De plus, le sondage prouve que la majorité des femmes afghanes sont victimes de violence psychologique et sexuelle.

Dans un pays qui a besoin d’énormément d’efforts de reconstruction, 40 % de la main-d’œuvre est au chômage, et une vaste majorité vit au-dessous du seuil de la pauvreté. L’Afghanistan se classe 175e sur les 177 pays de l’indice du développement humain de l’ONU.

Il est ironique que cela se passe dans un pays qui a reçu 12 milliards de dollars et qui s’est vu promettre encore 10 milliards de dollars au congrès à Londres, l’année dernière. Mais cet argent finira principalement dans les poches des seigneurs de guerre pour qu’ils puissent mieux opprimer notre pays.

Les crimes et les actes de brutalité commis par les seigneurs de guerre extrémistes persistent et, ce, sous le nez des troupes américaines et de l’ISAF. Des bandits armés de l’Alliance du Nord ont violé Fatima, âgée de 14 ans, ainsi que sa mère. Ils ont violé Rahima, 11 ans, et sa grand-mère de 60 ans. C’est un pays où Amina, 30 ans, a été tuée par lapidation, où Nadia Anjuman est devenue la cible facile de la violence de son mari parce que celui-ci avait la certitude de bénéficier de l’appui des seigneurs de guerre de l’Alliance du Nord misogyne.

Sous le régime des Talibans, le ministère du Vice et de la Vertu est devenu le symbole d’abus arbitraires, surtout aux dépens des femmes et des filles afghanes. Pourtant, aujourd’hui, le cabinet afghan a décidé encore une fois de rétablir ce ministère horrible plutôt que de se concentrer sur les besoins criants de la société afghane.

Dans une déclaration de l’année dernière, le comité américain pour la protection des journalistes (Committee to Protect Journalists) a dit : « Les journalistes afghans font face à des pressions sévères exercées par les autorités afghanes, y compris des menaces, l’intimidation, même l’incarcération et le meurtre. » Voici ce qui se passe pendant que M. Karzai et les médias de l’Ouest parlent de la liberté d’expression en Afghanistan.

Ceux qui défendent la justice sont menacés de mort. Le 7 mai, 2006, j’ai été agressée physiquement par deux députés au Parlement qui soutiennent les seigneurs de guerre et les drogues, parce que j’avais dit la vérité. J’avais parlé des crimes de l’Alliance du Nord. L’un d’entre eux a même crié : « Prostituée, prenez-la et voilez-la ! »

Plutôt que de se fier aux gens pour traduire en justice ces seigneurs de guerre criminels, le président Hamid Karzai leur donne des postes supérieurs. Par exemple, cette année, il a nommé treize anciens commandants, avec des liens à la contrebande de drogues, au crime organisé et aux milices illégales, à des de postes de hauts dirigeants au sein de la police.

En raison de la situation tragique en Afghanistan, les 4 millions de refugiés afghans inscrits en Iran et au Pakistan n’ont guère envie de retourner dans leur pays.

Mes chers amis, le gouvernement américain ne cesse de dire qu’il ne répétera pas les erreurs du passé en appuyant les extrémistes. Mais la vérité déchirante est que les États-Unis commettent exactement les mêmes erreurs. Ils appuient les extrémistes de façon généreuse, plus que jamais. Les États-Unis dépendent de l’Alliance du Nord, de ceux-là mêmes qui ont transformé l’Afghanistan en enfer entre 1992 et 1996 et qui représentent encore un danger énorme à la stabilité et à la paix dans mon pays.

Kathy Gannon, spécialiste en Afghanistan, dit avec raison que « les États-Unis ne s’intéressent pas à la paix en Afghanistan. Ceux qui ont tué des milliers de personnes, ceux qui ont appuyé l’industrie de la drogue dirigent le pays. »

Les Afghans, les gens partout au monde qui croient à la justice et des organismes internationaux en matière de droits de la personne demandent d’une seule voix que les seigneurs de guerre et les anciens pantins pro-Moscou soient traduits en justice. Mais plutôt que d’être traduits en justice, ils se voient proposer des postes supérieurs et des occasions de siéger au Parlement, avec l’appui des États-Unis et de ses alliés.

Le gouvernement américain inclut Gulbuddin Hekmatyar dans sa liste des terroristes les plus recherchés, mais 34 membres de son parti siègent au Parlement afghan. Les États-Unis travaillent avec des extrémistes pro-américains, et ils s’opposent uniquement aux extrémistes anti-américains. Voilà la raison pour laquelle les gens se moquent de la « guerre au terrorisme ».

L’élection parlementaire elle-même a fait la honte de la démocratie, même si les médias de l’Ouest l’ont appelée une grande réussite. Selon HRW, 70 % des membres du Parlement sont accusés de crimes de guerre, dont des membres de l’État fantoche russe, des trafiquants de drogues, des Talibans et des tueurs de l’Alliance du Nord.

Mes chers amis, les États-Unis ne se soucient pas de la racine du terrorisme en Afghanistan. Voilà pourquoi nous ne considérons pas les États-Unis comme les « libérateurs » de notre pays.

J’espère que vous avez compris, à l’aide des petits exemples que je viens d’énumérer, que mon pays se trouve encore entre les griffes d’extrémistes et de terroristes meurtriers. La situation en Afghanistan, surtout celle des femmes afghanes vouées au malheur, ne changera jamais pour le mieux, tant et aussi longtemps que les seigneurs de guerre ne seront pas désarmés et que la politique en Afghanistan ne sera pas délivrée des terroristes pro et anti-États-Unis.

Je pense qu’aucun pays ne peut donner la liberté à un autre pays. Seulement le peuple lui-même peut s’affranchir. Les événements actuels an Afghanistan et en Irak en sont la preuve.

Je pense que si le Canada et d’autres gouvernements tiennent vraiment à aider le peuple afghan et effectuer des changements positifs, il faudrait qu’ils agissent de façon autonome, plutôt que de devenir un outil avec lequel le gouvernement américain peut imposer ses mauvaises politiques. Il faut qu’ils s’alignent sur les besoins et les désirs du peuple afghan et qu’ils cessent d’aider les seigneurs de guerre et les éléments réactionnaires et ignorants au sein du système. C’est seulement en adoptant une telle approche que les pays pourront gagner la confiance des gens et prouver leur amitié envers le peuple afghan.

Nous sommes profondément désolé-es pour la perte des soldats canadiens en Afghanistan. Si le gouvernement canadien ne peut agir de façon indépendante plutôt que de suivre le programme du Pentagone, nous craignons que les efforts des troupes canadiennes ne servent que le gouvernement américain avant tout, et non pas le peuple afghan.

Nous voulons que le gouvernement canadien exerce une pression pour que des criminels comme Sayyaf, Rabbani, Qanooni, Mohaqiq, Fahim, Mullah Rakiti, les Khalqi et les Parchami soient délogés du pouvoir et traduits en justice. Il faut que les décideur-es canadiens sachent que les seigneurs de guerre de l’Alliance du Nord sont également responsables des circonstances désespérées du peuple afghan et du malheur qui sévit actuellement en Afghanistan.

Je suis consciente des difficultés et des défis, et du risque de mourir aux mains des forces antidémocratiques. Mais je me fie à mon peuple. Un jour, ils pourraient me tuer puisqu’ils ont des armes à feu, ils détiennent le pouvoir et ils ont l’appui du gouvernement américain, mais ils ne pourront jamais me réduire au silence ni cacher la vérité.

Merci.

Malalai JOYA, députée afghane
9 septembre 2006
Congrès du NPD fédéral, Québec
Alternatives International - Le Grand Soir - Sisyphe

Lire aussi :
• Dossier documentaire & Bibliographie Malalai JOYA, Monde en Question
• Dossier documentaire & Bibliographie Afghanistan, Monde en Question

19 août 2009

Propagande contre l'Afghanistan

Alors que, selon l'IFOP, la majorité des Français sont contre l'intervention militaire française en Afghanistan, les médias dominants restent droits dans leurs bottes et poursuivent leur propagande guerrière contre l'Afghanistan.

Le Monde est symptomatique de l'idéologie régnante :
À l'heure où nos démocraties occidentales s'alanguissent au soleil de l'été, une partie stratégique pour l'équilibre mondial se joue en Afghanistan à l'occasion du scrutin présidentiel du 20 août.
Commentaires : La "menace des talibans" seraient plus grande que le maintien d'un gouvernement corrompu par la collaboration et le trafic de drogue et dirigé par Hamid Karzaï, président embedded de la République islamique d'Afghanistan.

Libération ne fait pas non plus dans la dentelle : quitter l'Afghanistan serait «une défaite désastreuse». Les partisans de l'Algérie française, qui excusaient la torture et les exactions de l'armée contre la population, tenaient les mêmes propos colonialistes.

La Charente Libre, oublieuse de la résistance, ne veut pas comprendre qu'une partie de la population afghane voudrait autre chose qu'une occupation militaire et autre chose qu'un Karzaï-Pétain.
[...] si donc l'abstention était la grande gagnante du scrutin, ce serait une terrible défaite pour l'ONU, les Américains et l'ensemble de la coalition. Une défaite politique qui, plus que n'importe quelle bataille militaire perdue, sonnerait le début de la fin.

L'Union ose même retourner l'argument que les bombardements américains de la population civile ne sont pas de nature à convaincre les Afghans des avantages de la démocratie made in USA.
La communauté internationale a beaucoup à perdre dans cette affaire alors que sa crédibilité des faubourgs de Kaboul aux vallées les plus escarpées a faibli en raison des bavures américaines bien exploitées par les opposants locaux, les talibans et la nébuleuse d’al-qaïda.

L'Alsace, qui se garde de rappeler que les États-Unis ont financé, armé et entraîné les islamistes les plus radicaux pour vaincre l'Armée rouge en Afghanistan, pleurniche sur l'échec «de greffer la démocratie occidentale sur une civilisation que rien, dans le passé et dans sa tradition, pas même une nostalgie, n’a préparée à cet implant».

Les Afghans savent bien que la démocratie occidentale consiste à verser des millions de dollars aux chefs de guerre qui collaborent avec l'occupant et à bombarder la population qui résiste à l'occupant.

Lire aussi :
• La régularité des élections afghanes loin d'être établie, Reuters-Yahoo! Actualités
Les cartes d'électeurs pour le scrutin présidentiel et provincial de jeudi en Afghanistan se négocient en vrac aux coins des rues des villes et villages les plus reculés du pays.

• DORRONSORO Gilles et HARLING Peter, La guerre américaine en Irak et en Afghanistan : entre vision messianique et ajustements tactiques, Politique étrangère, 2005.
Un même modèle surdétermine l’action américaine en Afghanistan et en Irak : celui de la conversion démocratique. Largement manichéen, ce modèle distord les représentations que les États-Unis se font de ces deux pays, de l’ennemi qu’ils y combattent et des forces locales susceptibles de les reconstruire. L’échec de la stratégie poursuivie oblige à une gestion de court terme, à des révisions permanentes, qui finissent par s’opposer aux buts politiques initiaux.


Revue de presse mise à jour le 19/08/2009 à 22:00 GMT.

18 août 2009

Tragédie électorale en Afghanistan


Victime des bombardements

En 1973, l'Afghanistan devint une République.
En 1992, soit quatre ans avant la prise du pouvoir par les talibans, la République d'Afghanistan devient l'État islamique d'Afghanistan. Ahmed Chah Massoud était alors commandant de l'Alliance du Nord [1], chef du parti islamique Jamiat-e Islami et chef de l'Armée islamique.
En 2001, Hamid Karzaï devint le président embedded de la République islamique d'Afghanistan.
En 2004, fut adoptée la constitution de la République islamique d'Afghanistan :
• article 1 : L'Afghanistan est une République islamique.
• article 2 : La religion d'État de la République islamique d'Afghanistan est la religion sacrée de l'Islam (les croyants d'autres religions étant libres ... dans les limites fixées par les dispositions de la loi).
• article 3 : En Afghanistan, aucune loi ne peut être contraire aux croyances et aux préceptes de la religion sacrée de l'islam.
• article 35, ( chapitre 2, article 14 ) Les citoyens d'Afghanistan ont le droit de former des partis en accord avec ce qui est prévu par la loi, pourvu que le programme ou la charte du parti ne soit pas contraire aux dispositions de la religion sacrée de l'islam.
• article 45 ( chapitre 2, article 24 ) L'État mettra en oeuvre un programme scolaire unifié basé sur les préceptes de la religion sacrée de l'islam [...] et développe le programme des sujets religieux sur la base des sectes islamiques existant en Afghanistan.
• article 55 (chapitre 2, article 33) : L'État adopte les mesures nécessaires pour assurer le bien être physique et psychologique des familles, en particulier de la mère et de l'enfant, pour élever les enfants... et pour l'élimination des traditions contraires à la religion sacrée de l'islam.
• article 63 : [les candidats à la présidentielle] doivent être musulman et né de parents afghans. [une fois élus, ils doivent prêter serment "au nom d'Allah le miséricordieux, au nom de Dieu tout puissant (...) je jure d'obéir aux préceptes de la religion sacrée de l'islam, et de les sauvegarder".
• article 149 (chapitre 10, consacré aux possibilités d'amendements, article 1) : La clause d'adhésion aux fondements de la religion sacrée de l'islam et au régime de la République islamique ne peut être amendée.
Source : The Constitution of Afghanistan - Riposte Laïque

En 2009, les forces d'occupation organisent à grand frais la seconde élection présidentielle. L'élection devrait coûter 220 millions de dollars selon l'ONU alors que l'économie du pays est ruinée après 30 ans de guerre (l'Afghanistan est un des pays les plus pauvres du monde) et que le gouvernement, corrompu par la collaboration et le trafic de la drogue, ne contrôle que la capitale.

Si les élections sont une farce dans les pays occidentaux, elles sont une tragédie en Afghanistan.

Serge LEFORT
18/08/2009

Lire aussi :
• Dossier documentaire & Bibliographie Élections en Afghanistan, Monde en Question
• Dossier documentaire & Bibliographie Afghanistan, Monde en Question

[1] Mais il reste un fait qui est que de 1992 à 1996, l'Alliance du Nord fut un symbole de massacre, de viol systématique et de pillage. C'est pourquoi nous - et j'y inclus le Département d'Etat américain - nous avons si bien accueilli les talibans à leur arrivée à Kaboul. L'Alliance du Nord quitta la ville en 1996 en laissant 50 000 morts derrière elle.
14 Novembre 2001, The Independent (UK)
Revue de presse sur les crimes de l'Alliance du Nord.

Barack Obama s'accroche en Afghanistan

Elections afghanes : participation incertaine dans le Sud, entre mécontentement et menaces, AP-Yahoo! Actualités.
Une participation élevée est primordiale dans le sud de l'Afghanistan pour que les élections de jeudi soient considérées comme légitimes. Mais les habitants de cette région, déçus par le gouvernement d'Hamid Karzaï, qu'ils jugent corrompu et incompétent, sont de plus en plus nombreux à se tourner vers les talibans. Et la sécurité reste incertaine, alors que les fondamentalistes menacent d'attaquer les bureaux de vote et de s'en prendre aux électeurs qui tenteraient de se rendre aux urnes.
Commentaires : L'expression "dans le sud de l'Afghanistan" désigne les Pachtounes, l'ethnie majoritaire peuplant le sud-est de l'Afghanistan et le nord-ouest du Pakistan. Les talibans sont des Pachtounes aussi "fondamentalistes" que les autres groupes islamistes.

Le seigneur de la guerre Rachid Dostom rentre d'exil à la veille de la présidentielle afghane, AP-Yahoo! Actualités.
Le chef de guerre ouzbek, l'un des plus sanguinaires du pays et célèbre pour ses retournements d'alliance, aurait été responsable de la mort de quelque 2.000 prisonniers talibans dans les premiers temps de la guerre d'Afghanistan en 2001.
Les chefs de guerre régionaux sont les acteurs principaux d'Afghanistan dans les années de chaos et de guerre civile ayant suivi le retrait soviétique du pays en 1989. Et certains de ces commandants, comme Dostom ou feu Ahmed Shah Massoud, contrôlaient encore leurs fiefs même après la prise du pouvoir par les talibans à Kaboul. Nombre d'entre eux rejoignirent les forces étrangères lors de l'invasion de 2001 qui aboutit à la chute des talibans.
Commentaires : Ahmed Shah Massoud est aussi responsable des crimes de guerre perpétués à Kaboul par les chefs de guerre de 1992 à 1996.

Les talibans maintiennent la pression pour la présidentielle afghane, AP-Yahoo! Actualités.
Les électeurs devraient pouvoir se rendre aux urnes sans trop de problème à Kaboul, dans les environs et dans le Nord, relativement paisible, mais dans le Sud et l'Est, l'insurrection est dangereusement active.
Commentaires : Cela signifie que la majorité des Afghans ne participeront pas aux élections.

L'attentat-suicide à la voiture piégée de samedi, qui a fait sept morts et 91 blessés devant le siège de la force de l'OTAN (ISAF) à Kaboul, prouve la capacité de terreur des talibans, qui mènent des actions de plus en plus spectaculaires et coordonnés, signe pour certains spécialistes d'une formation prodiguée par Al-Qaïda.
Commentaires : Les spécialistes savent de quoi ils parlent puisque les États-Unis ont financé, armé et entraîné les islamistes les plus radicaux pour vaincre l'Armée rouge en Afghanistan.


Barack Obama défend la nécessité de la guerre en Afghanistan, Reuters-Yahoo! Actualités.
Dans un discours visant à convaincre l'opinion américaine du bien-fondé de sa stratégie militaire en Afghanistan, le président Barack Obama a expliqué que le conflit afghan était une "guerre qui mérite d'être menée".
Une majorité sans précédent d'Américains se déclarent hostiles à la guerre. "Les Américains commencent à récuser le concept de guerre juste au fur et à mesure que la situation en Afghanistan se dégrade", note Nick Mills, enseignant au département de journalisme de l'université de Boston.
Malgré l'impopularité croissante de l'engagement américain en Afghanistan, Obama a pu compter jusqu'à présent sur la patience de l'opinion mais, selon les analystes, il ne pourra se reposer sur elle indéfiniment.
Commentaires : Barack Obama sera aussi confronté au coût de la guerre, qui enrichit quelques sociétés mais appauvrit la majorité de la population et fragilise l'économie américaine.

A New Strategy for Afghanistan and Pakistan, The White House [mp4 - Texte].

17 août 2009

Le bourbier afghan


Les Afghans n'aiment pas les envahisseurs. Ils les chassent : les Anglais, les Russes, les Soviétiques. Les Américains et leurs supplétifs, notamment français, pourraient bien devenir les prochains à être vaincus par ce pays violent et âpre. Après huit ans de guerre, malgré toute la technologie occidentale, le commandant en chef américain en Afghanistan a dû reconnaître que les talibans gagnaient. La bataille d'Afghanistan partait pourtant de nobles objectifs : libérer un pays de ces combattants obscurantistes qui brûlent les écoles de filles et veulent imposer un ordre islamiste moyenâgeux. Il s'agissait aussi de vaincre ce qu'il reste d'Al-Qaeda et de Ben Laden, réfugié entre les montagnes afghanes et pakistanaises. Cette guerre a échoué. Les Américains et leurs alliés ont privilégié les objectifs militaires au mépris de la population, qui perçoit l'étranger comme un ennemi. Les troupes occidentales n'ont apporté que terreur et instabilité aux populations civiles. Politiquement, l'Occident s'appuie sur Hamid Karzaï, un président inefficace, notoirement corrompu, qui mène une douteuse campagne pour sa réélection. Les milliards d'aides déversés en Afghanistan ont enrichi ses proches, alors que ses concitoyens doivent survivre sans routes, sans écoles, sans un système de santé même basique. Obama a décidé, à juste raison, de se retirer d'Irak, alors qu'il entend accroître l'effort de guerre en Afghanistan. Mais on perçoit mal quelle part la France, son président, ses militaires ont pris dans l'élaboration de cette nouvelle stratégie à hauts risques.

Libération

L'Afghanistan est le plus vieux bourbier militaire qui connaît, depuis les années 1970, une succession de débâcle des forces d'invasion. Au temps de la lutte idéologique entre Américains et Soviétiques, les Afghans ont prouvé qu'ils ne pouvaient s'accommoder d'aucune hégémonie militaire extérieure sur leur territoire, mettant à mal la toute puissante armée soviétique, par le moyen d'une guérilla dont les acteurs, animés par la foi, étaient tout de même armés par les USA ou la CIA, alors présents sur le terrain pour contrecarrer l'expansionnisme soviétique dans la région. Les Américains connaîtront le même destin, une décennie plus tard, avant de se retirer en douce, laissant le soin aux troupes lieutenantes de Chah Massoud, de repousser les forces talibanes. Ce fut un échec sans précédent, les talibans, soutenus, moralement et militairement, par des factions pakistanaises qui ont également maille à partir avec le pouvoir du général proaméricain Musharraf, finirent par faire leur entrée triomphale à Kaboul, prenant le pouvoir, que les Américains refuseront de leur laisser longtemps, pour une question de géostratégie du pétrole de long terme, mais sous couvert d'un humanisme démocratique mû, médiatiquement, par le spectacle de la tyrannie talibane quotidienne contre les femmes, les monuments historiques et les dissidents.

La Nouvelle République

La voiture a explosé juste devant l'entrée du quartier général de la force de l'OTAN en Afghanistan, à une centaine de mètres des ambassades britanniques et américaines. Cette attaque visant une des zones les plus sécurisées du pays a été revendiquée par les talibans. Leur porte-parole l'a confirmé à l'agence Reuters : «La cible était l'ambassade des Etats-Unis, mais nous n'avons pas pu l'atteindre. Le kamikaze s'est fait exploser près du quartier général de l'Isaf (Force internationale d'assistance à la sécurité de l'OTAN) et a tué plusieurs soldats étrangers.»

Plusieurs membres de la force internationale seraient au nombre des victimes. «Il y a malheureusement des victimes, mais je ne fournirai pas de chiffres. Il y a des civils et des militaires de l'Isaf», a déploré le général canadien Eric Tremblay, un des porte-parole de l'Isaf. L'explosion a détruit une grande barrière de béton protégeant la base militaire en faisant voler en éclat les vitres des habitations du quartier. Selon un journaliste de l'AFP, les membres d'Isaf ont puissamment fortifié la base immédiatement après l'attentat. Le président afghan Hamid Karzaï a fustigé «les ennemis de l'Afghanistan qui tentent de semer la peur parmi le peuple en cette période électorale». Cette nouvelle démonstration de force des talibans intervient à cinq jours de l'élection présidentielle, un scrutin dont M. Karzaï est le grand favori. Les insurgés islamistes avaient juré de perturber les scrutins présidentiel et provinciaux, prévus jeudi 20 août, les considérant comme «une imposture orchestrée par les Américains». La multiplication des attaques, une explosion de violence sans précédent depuis la chute des talibans en 2001, fait craindre un taux d'abstention élevé et donc un scrutin peu crédible. Oubliée, la guerre en Afghanistan revient à la Une des médias internationaux avec ses vérités amères que les occupants avaient tout fait pour taire. La situation y est telle que même les dirigeants locaux, pourtant installés par la CIA, ne peuvent plus s'en cacher. C'est le cas du président Hamid Karzaï qui ne s'est pas empêché de tirer la sonnette d'alarme, et de demander secours à ses voisins «ennemis» du Pakistan pour venir à bout de l'offensive des talibans et d'Al-Qaïda, qui a gagné en ampleur ces derniers mois et qui empêche, depuis maintenant plus de sept ans, la «pacification» de ce pays comme l'avaient planifié les forces d'occupation.

Après l'Irak, le spectre de l'échec plane sur l'Afghanistan. Et tout le monde s'en plaint aujourd'hui ; même le Premier Ministre britannique Gordon Brown, qui en était arrivé à réclamer le remplacement de l'OTAN par les forces de l'ONU dans ce pays. Ce sentiment d'impuissance a commencé à s'aggraver sérieusement après l'affaire des otages sud-coréens, détenus en 2007. A cela s'ajoutait les divergences sur le rôle des Pakistanais, soupçonnés de «liens» avec les talibans…
Alors que Karzaï, comme Washington, considèrent officiellement le Pakistan comme un partenaire dans la recherche de la paix, l'armée américaine accuse Islamabad de «jouer sur les deux tableaux dans les rues de l'Afghanistan» et surtout dans les régions frontalières, où les talibans ont imposé leur loi. Très inquiets de la détérioration de la situation dans la région, les pays de la coalition occidentale s'interrogent sur la stratégie à adopter pour contrer l'offensive des talibans, lesquels, en deux ans de redéploiement ont réussi à reconquérir des provinces entières et contrôlent au moins un quart du territoire afghan.
Cette guerre est aussi une épreuve pour le nouveau président américain, qui a décidé le maintien des forces américaines dans ce pays, contrairement à ce qu'il a décidé pour l'Irak. La «cause afghane» étant jugé plus défendable et plus consensuelle aux yeux de la communauté internationale, au motif que les groupes affiliés au réseau Al-Qaïda y trouvent toujours refuge. Barack Obama a même suggéré de renforcer la présence des forces de l'OTAN, mais n'a pas précisé les formes de soutien devant être au processus politique aujourd'hui menacé d'écroulement.

La Nouvelle République

Les observateurs de la situation sécuritaire et politique en Afghanistan estiment que les élections, sur lesquelles Ahmed Karzaï tablait en vue de se faire réélire et consolider sa position au pouvoir, sont très sérieusement perturbées par ce qui est arrivé, les talibans ayant fourni la preuve militaire de leur puissance en pénétrant au cœur de la capitale et en touchant, symboliquement, les forces de l'Otan qui sont censées être là pour veiller au rétablissement de la paix dans ce pays et au retour à une vie politique et institutionnelle normale.

Les Américains, dont la stratégie dans la région semble avoir été réorientée, depuis l'arrivée de Barak Obama à la Maison-Blanche, priorisant l'action militaire contre les talibans en Afghanistan et optant pour un retrait progressif d'Irak jusqu'à l'horizon 2011, devraient voir se réveiller, dans leurs rangs, les démons des bourbiers vietnamien et irakien, avec les échecs patents qu'ils y ont connus.

Cela d'autant que les forces de l'Otan, multinationales et essentiellement occidentales, pourraient subir les contrecoups médiatiques de leurs opinions nationales respectives, générant des pressions qui pourraient faire se désolidariser, de la stratégie offensive américaine dans ce pays, quelques pays européens. C'est déjà arrivé en Irak, et si la situation s'avère non maîtrisable au fil des semaines à Kaboul et dans l'ensemble de l'Afghanistan, il est à prévoir que ce scénario serait le plus probable.

Destitués de Kaboul, les talibans semblent insaisissables et même plus puissants qu'avant, alors que les Occidentaux n'ont jamais accepté de guerre où ils pourraient chaque jour compter leurs morts.

La Nouvelle République

Lire aussi :
• Dossier documentaire & Bibliographie Afghanistan, Monde en Question

Palestine, chronique d’une présence-absence


Le Temps qu'il reste est un film en partie autobiographique, construit en quatre épisodes marquants de la vie d'une famille, ma famille, de 1948 au temps récent.

Ce film est inspiré des carnets personnels de mon père, et commence lorsque celui-ci était un combattant résistant en 1948, et aussi des lettres de ma mère aux membres de sa famille qui furent forcés de quitter le pays.

Mêlant mes souvenirs intimes d'eux et avec eux, le film dresse le portrait de la vie quotidienne de ces palestiniens qui sont restés sur leurs terres natales et ont été étiquetés "Arabes-Israéliens", vivant comme une minorité dans leur propre pays.

Lire aussi :
• Le Temps qu'il reste, AlloCiné.
• Le Temps qu'il reste, d'Elia Suleiman, en compétition à Cannes, AFPS.
• Le Temps qu'il reste, Arte.
• Le Temps qu’il reste : Kafka à Nazareth, Bakchich.
• Le Temps qu'il reste, Cinéma Utopia Toulouse.
• Le Temps qu'il reste, réalisé par Elia Suleiman, Critikat.
• Le Temps qu'il reste, un film poignant sur la Palestine, La Tribune.
• Le Temps qu'il reste : Etre drôle et facétieux sur fond de tristesse infinie, Le Monde.
• Elia Suleiman : "Il m'a fallu ajuster le film à la personne que j'étais devenue", Le Monde.
• Le Temps qu’il reste - Elia Suleiman, Les Inrocks.
• Palestine, le temps des restes, Libération.
• «J’aime filmer sur les lieux mêmes, je n’aime pas tricher», Libération.
• Le plaisant "temps qu'il reste" au Palestinien Elia Suleiman, Rue89.
• Le Temps qu'il reste - film de Elia Suleiman, Télérama.
• Dossier documentaire & Bibliographie Palestine/Israël, Monde en Question.
• Dossier documentaire & Bibliographie Résistance à la colonisation de la Palestine, Monde en Question.

16 août 2009

La fabrique du délinquant

L’occupation des locaux désaffectés de la CPAM dans le XVIIIe par la Coordination des sans-papiers 75, après leur brutale expulsion par la CGT des locaux qu’ils occupaient depuis le 1er mai 2008 à la bourse du travail de Paris, a remis à l’ordre du jour la question récurrente, et jamais réglée autrement que par des réponses policières, de la présence sur le sol français de travailleurs - ce qu’ils sont pour la plupart - privés de papiers et transformés en délinquants.

Pendant les Trente Glorieuses, alors que la France avait déjà besoin de main-d’œuvre bon marché, elle les importait et les exploitait dans les métiers les plus durs. Mais elle leur donnait automatiquement des titres de séjour et de travail. Cela limitait l’arbitraire patronal. Le travailleur immigré, d’une part disposait de la protection du droit du travail, pouvait changer d’entreprise et se défendre, d’autre part, pouvait retourner régulièrement chez lui. La transformation de ce travailleur en délinquant a pris plusieurs décennies et a nécessité plusieurs lois, dont les plus célèbres furent les lois Pasqua-Méhaignerie sur l’immigration et la sécurité - on remarquera déjà l’amalgame. Les lois se succédèrent sur cette question, durcissant toujours plus les conditions d’accès au séjour, jusqu’à les quasi interdire (hors d’un très faible contingent autorisé), et ceci alors même que la France a toujours besoin de ces travailleurs dans les secteurs de l’économie aux conditions de salaire et de travail les plus mauvaises, toujours désertés par la main-d’œuvre nationale.

Mais la nouveauté introduite par ces lois fut de transformer les travailleurs venus hors des circuits autorisés en non-citoyens corvéables à merci, puisque sans droits, pouvant être exploités sans vergogne, non payés pour leurs heures supplémentaires, soumis aux tâches les plus dangereuses (telles que concasser de l’amiante), tout juste payés de la main à la main ou sous des noms d’emprunt et sans pouvoir bénéficier des protections sociales. C’est pourquoi le patronat en a besoin dans des branches comme le bâtiment, nettoyage, sécurité, arrière-cuisines des restaurants… Autre aspect de cette situation de non droit, les travailleurs immigrés sans papiers ne peuvent retourner voir leur famille au pays, sauf à attendre une dizaine d’années une hypothétique régularisation.

Ainsi l’ouvrier immigré d’hier s’est-il transformé en un autre inassimilable et menaçant. Le plus inquiétant est que la majeure partie de la gauche ou ce qui devrait l’être s’est ralliée à cette politique d’exclusion, justifiée par la fameuse phrase de Michel Rocard : «La France ne peut pas accueillir toute la misère du monde.» Cela parut l’évidence même.

Dans Aux bords du politique, le grand philosophe qu’est Jacques Rancière analyse cette fameuse phrase comme «traçant la ligne de partage entre ce qu’on peut et ce qu’on ne peut pas accueillir. Qu’est-ce qu’on ne peut pas accueillir ? "Toute la misère du monde" ? On pourrait, sans doute, se contenter de renvoyer cette phrase dans l’enfer logique des jugements indéfinis. Simplement, on manquerait ainsi le cœur de l’affaire : la force d’exclusion attachée à cette "mauvaise partie" de la misère que désigne le "pas toute". […] Il s’agit d’établir ces propriétés inapparentes qui distinguent la partie de misère ou cette misère faisant totalité que nous ne pouvons pas accueillir. Qu’est-ce qui fait cette opération ? C’est la loi, […] une loi sur l’Autre et sur l’impossibilité que le Même l’accueille dans sa communauté.» Face à ce nouveau type d’esclavage, ce déni d’existence, les citoyens français qui se mobilisent tous les jours aux côtés des migrants ont compris qu’il faut défendre à tout prix l’égale humanité de chacun et son égal accès aux droits, pour que vive la démocratie et pour que vive, selon la belle expression de Jacques Rancière, «cette égalité qui vient toujours traverser la communauté clandestinement, parce qu’elle n’a de place légitimée dans aucune distribution des corps en communauté, qu’elle ne peut qu’y mettre, toujours ponctuellement, toujours localement, des corps hors de leur place, hors de leur propre.»

Evelyne PERRIN militante d’AC ! et de Stop précarité
Coauteure d’une enquête sur le mouvement de régularisation de sans-papiers soutenu par la CGT et d’autres syndicats en 2008, à paraître dans l’ouvrage collectif Quand le travail se précarise…
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