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20 juillet 2009

L'information n'est pas à vendre

Selon le patron du Financial Times, Lionel Barber, la quasi totalité des sites d'information feront payer leurs contenus aux internautes d'ici à un an.
Rue89

Les prophètes de la fin de la gratuité des informations sur Internet sont légions car la question qui hante les groupes financiers des médias dominants (Rupert Murdoch par exemple) est de ponctionner au maximum cette poule aux œufs d'or. Mais leur modèle économique a peu de chance de s'imposer car il est depuis longtemps dépassé dans les faits.

1) Depuis longtemps, la presse écrite payante est concurrencée par la radio et la télévision.
Les radios et des télévisions n'ont jamais fait payer la fourniture de leurs bulletins d'informations. Or, la télévision est aujourd'hui le premier média en matière d'audience.
Les télévisions, qui diffusent des informations en continue comme Euronews ou LCI-TF1, sont gratuitement incluses dans le forfait de chaînes de divertissement.
De plus, les radios et les télévisions mettent en ligne gratuitement non seulement leurs contenus audio-visuelles, mais aussi des contenus dl'information écrite.

2) Depuis 2002, la presse écrite payante est concurrencée par la presse gratuite.
Certains, comme Le Monde, ont joué le double-jeu de dénoncer la presse gratuite dans ses colonnes et de la financer en sous-main avant de lancer son propre gratuit sur Paris.
La presse gratuite s'est imposée et concurrence aussi la presse écrite sur Internet. Metro et 20 minutes, les deux titres emblématiques de la presse gratuite, prennent des parts d'audience et donc des parts de marché.

3) À la même époque, la presse écrite payante est concurrencée par les portails, comme Yahoo! Actualités, qui publient gratuitement des dépêches d'agences (AP, Reuters et AFP). Or, il est facile de se rendre compte, grâce aux flux RSS, que la presse écrite payante ne crée pas de valeur ajoutée, mais se contente de copier-coller les dépêches.
La concurrence est naturellement mondiale sur Internet. Les agences de presse étrangères, comme RIA Novosti (Russie) ou Xinhua (Chine), publient gratuitement leurs dépêches et leurs analyses en français.


La quasi totalité de la presse écrite s'est aventurée sur Internet en adoptant un modèle économique aberrant : gratuité de l'information du jour et paiement des archives. Ils ont creusé leur propre tombe car il est impossible de revenir en arrière en faisant payer l'information la plus récente.
Les revues scientifiques ont adopté le modèle économique inverse : paiement du ou des derniers numéros et gratuité des archives, accessibles via trois portails : Cairn, Persée et Revues.org.

Dans un contexte hyper-concurrentiel à l'échelle mondiale, l'information est une arme de guerre plus idéologique que économique. Il est donc impensable que certains puissent faire payer ce que d'autres donnent gratuitement. Il suffit de voir l'évolution du site chinois Le Quotidien du Peuple avant 2004 et après 2004 pour comprendre que, si les médias franco-français devenaient payants, nous lirons les médias franco-chinois gratuits.

Plusieurs jours avant que Lionel Barber jouent les prophètes de la fin de la gratuité de l'information sur Internet, le Financial Times se fit l'écho du rapport publié gratuitement par la banque d’investissement new-yorkaise Morgan Stanley sur les habitudes de consommation des adolescents en ce qui concerne les médias... écrit par Matthew Robson, un ado de 15 ans.
Les ados s’intéressent très peu aux quotidiens payants en raison du prix. Quand ils lisent sur papier, ils choisissent les titres gratuits comme Metro.
Canoe

Cette étude révèle que les adolescents sont mieux informés que les générations qui les précèdent mais refuse de payer pour avoir accès à l'information. Ils préfèrent consulter des sites gratuits comme Google et YouTube.
Matin

Lire aussi :
• Un gosse de 15 ans devient expert des médias, Le Mague
• Matthew Robson est-il le stagiaire de l'année ?, Blogs en revue

L'information n'est pas à vendre car elle est, depuis ses origines, un produit d'appel pour vendre d'autre produits. Charles-Louis Havas, propriétaire d'une agence de publicité, créa en 1832 l'agence de presse du même nom grâce au monopole, accordé par le gouvernement, de la transmission télégraphique. L'information fut et reste un support publicitaire. Les techniques ont changé, mais pas la finalité.

Serge LEFORT
20/07/2009

Pour aller plus loin :
• Dossier Presse gratuite, l'Actu des médias, 2004
• Dossiers Médias - Presse, Monde en Question, 2003-2009
• Portail des médias, Monde en Question
• Guide des ressources documentaires, Monde en Question

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