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11 février 2013

Compliance vs Phone Game

Alors que Phone Game met en scène la fiction d’une manipulation téléphonique, Compliance reconstitue un fait divers sur le même thème. Le vrai-faux se révèle meilleur que le faux-vrai pour les raisons suivantes :

Joel Schumacher a réalisé Phone Game comme un vrai thriller sans chercher à démontrer quoique ce soit. Jusqu’à la fin, il laisse la liberté au spectateur d’en tirer ses propres conclusions.
Craig Zobel a réalisé Compliance comme un faux documentaire pour rendre crédible sa version d’un fait divers. Dès le générique, il manipule le spectateur avec un suspense basé sur le voyeurisme.

Phone Game

Ce thriller est efficace de la première à l’avant-dernière scène. En effet, on peut regretter de voir le visage de la voix off car cela n’ajoute rien. Au contraire, il aurait été plus efficace de flouter son visage puisque Stuart est à-demi conscient.

L’intérêt du récit est qu’il oppose Stuart, manipulateur au service des médias (attaché de presse), à un interlocuteur anonyme, manipulateur qui fait justice par le meurtre au nom de la morale. Ainsi, Stuart est une victime non innocente et l’anonyme un justicier et donc un héros meurtrier.

La mise en scène de Joel Schumacher laisse le spectateur libre de déterminer la frontière entre le bien et le mal. Ainsi, le film se clôture sur une fin ouverte en rupture avec la norme hollywoodienne du happy end.


Joel SCHUMACHER, Phone Game, 2002, AlloCinéWikipédiaTélécharger VFTélécharger HD 720 VOSTFR.

Compliance

Ce film s’annonce – en gros caractères dans le générique – « inspiré de faits réels ». Craig Zobel nous assène cela afin que nous ne puissions pas mettre en doute la véracité du scénario. Or, un récit inspiré de faits réels n’est pas pour autant une histoire vraie.

Le dossier de presse montre bien qu’il s’agit d’une fiction :
En l’absence de tout enregistrement des conversations téléphoniques, Zobel rédige ses idées sur ce qui avait pu se dire entre les protagonistes. « Je me suis dit que ça pourrait être un bon point de départ pour une histoire. »

Un journaliste de L’Express ajoute :
« Aux États-Unis, l’affaire a eu un retentissement considérable », se souvient le réalisateur Craig Zobel, qui a dû, faute d’enregistrement des conversations téléphoniques et de contact avec les victimes, imaginer les dialogues. « Pour le « policier », je me suis beaucoup inspiré des techniques de télémarketing ou de voyance : des questions très ouvertes qui permettent la manipulation. »

En clair, il s’agit de l’interprétation imaginative d’un fait divers que Craig Zobel impose au spectateur comme une histoire vraie. Sa manipulation se s’arrête pas là. Comme il a rapidement épuisé le suspense de personne qui se cache derrière la voix off en montrant l’homme, y compris dans la banalité de sa vie quotidienne, Craig Zobel cherche à maintenir l’attention du spectateur en jouant sur le voyeurisme d’un acte sexuel.

Cette scène bâclée révèle la lâcheté de Craig Zobel qui n’a pas été jusqu’au bout de son propos. Il crée un faux suspense sur la fouille corporelle, effectuée par un homme sur une femme livrée nue, qui pourrait aller… jusqu’au viol selon certains critiques. Mais il n’ose pas filmer la scène de la fellation – imposée ou consentie, bien malin qui peut le dire. Cet acte manqué est l’aveu de sa manipulation du spectateur qu’il embarque ensuite dans un faux documentaire.

Compliance sombre peu à peu dans une vulgarité malsaine, déplaisante. Tant que le personnage est une voix sans corps, le film communique l’angoisse et l’incompréhension du personnel ; dès que ces scènes laborieuses s’ajoutent au film, la colère s’y substitue.
[…] L’invraisemblance, c’est cette fellation si difficile à justifier que, dans une lâche pirouette, le scénario évite l’obstacle par une banale ellipse. C’est une facilité qui achève de rendre haïssable la démonstration de Craig Zobel.
Critikat


Craig ZOBEL, Compliance, 2012, AlloCinéWikipédia [Dossier mis à jour par Serge LEFORT le 08/02/2013. Correction supprimée par un certain Lepsyleon, spécialiste des révocations, mais non rétablie malgré l'aveu d'une censure hative] – Dossier de presseTélécharger VOSTFRTélécharger HD 720 VOSTFR.

L’expérience de Milgram

Compliance fait explicitement référence à l’expérience de Milgram. Un journaliste de L’Express précise :
En 2010, Craig Zobel se lance dans l’écriture du scénario quand il découvre le livre Soumission à l’autorité, dans lequel le psychologue Stanley Milgram relate une expérience menée dans les années 1960 : des personnes exécutent des ordres cruels parce qu’ils sont donnés par un professeur. « L’étude a été renouvelée en 2007 : 60% obéissent. J’aimerais appartenir aux 40% restants, mais je n’en suis pas sûr. Personne ne peut l’être. »

Or, cette expérience fut mise en scène par Henri Verneuil dans I… comme Icare il y a trente-quatre ans ! Craig Zobel l’ignore peut-être, mais il a certainement voulu jouer le professeur.


Henri VERNEUIL, I… comme Icare, 1979, AlloCinéWikipédiaVoir VFTélécharger VF.

L’expérience de Milgram, reproduite à travers le monde et à différentes époques, a été largement validé. En 2009, le documentaire Le jeu de la mort, mettant en scène un faux jeu télévisé, reproduit l’expérience de Milgram.



Thomas BORNOT, Gilles AMADO, Alain-Michel BLANC , Le jeu de la mort, 2009, AlloCinéWikipédiaVoir VF.

10/02/2013
Serge LEFORT
Citoyen du Monde

Critiques Compliance :
Culturopoing
Critikat
Film de culte
L’Express

Lire aussi :
• Expérience de Milgram, Wikipédia.
Dossier documentaire Psychologie sociale, Monde en Question.

Revue de presse Cinéma 2013, Monde en Question.
Veille informationnelle Cinéma, Monde en Question.
Dossier documentaire Cinéma, Monde en Question.

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