7 août 2010

Lepénisation rampante

Lies Hebbadj, le compagnon de la femme verbalisée en avril pour conduite avec un niqab à Nantes, a été de nouveau placé en garde à vue par la police judiciaire nantaise vendredi soir, a-t-on appris samedi de source judiciaire, confirmant une information du quotidien Ouest France.

Le procureur de la République de Nantes a expliqué que M. Hebbadj avait été placé en garde à vue "à la suite des accusations de viols et de violences portées à son encontre le 5 août 2010 par l'une de ses anciennes compagnes". Les faits se seraient produits entre 2003 et 2007. Son avocate a annoncé samedi soir que la garde à vue était prolongée de 24 heures.

Le commerçant, qui vit à Rezé, près de Nantes, a été placé sous le feu des projecteurs fin avril en plein débat sur l'interdiction du voile intégral, quand l'une de ses concubines a décidé de contester une contravention pour avoir conduit en niqab. Cette dernière conteste l'amende ; le tribunal doit rendre sa décision sur ce point le 13 décembre. Le ministre de l'Intérieur, Brice Hortefeux, avait demandé que le commerçant soit déchu de sa nationalité française en évoquant des soupçons de polygamie et de fraude aux aides sociales.

Cette nouvelle garde à vue intervient une semaine après que Nicolas Sarkozy ait annoncé, dans un discours à Grenoble, une série de mesures, centrées sur la déchéance de nationalité pour les auteurs de certains faits. Dimanche, le ministre de l'intérieur, Brice Hortefeux, avait dit vouloir étendre la déchéance de nationalité aux polygames et auteurs "d'excision, de traite d'êtres humains ou d'actes de délinquance grave". Ce samedi, M. Hortefeux a annoncé qu'il ferait courant août des "propositions de mise en oeuvre juridique" pour la déchéance de nationalité, notamment pour les faits de meurtres de policiers ou de polygamie.

Ce virage à droite, reprenant plusieurs propositions du Front National, avait provoqué de vives réactions. D'après un sondage Ifop publié vendredi par le Figaro, 80 % des Français approuveraient la déchéance de nationalité pour les cas de polygamie, d'excision et de traite des êtres humains, sans distinction sensible entre sympathisants de gauche et de droite.

AFP-Le Monde


Lire aussi : Dossier documentaire & Bibliographie Voile & Burqa, Monde en Question.

6 août 2010

Hommage à "Cholo"


Héctor Herrera dit "Cholo" est un un homme qui savait mettre en scène la comédie de la vie. Et ce n'est pas par hasard qu'il excellait dans l'écriture théâtrale de sa propre vie avec sa seconde et jeune épouse, elle-même actrice. Il faisait rire parce qu'il exprimait avec finesse la vie de tous dans une région où les femmes ne sont pas des victimes comme le croient naïvement certaines féministes françaises. Même sans comprendre l'espagnol chacun peut saisir, par sa gestuelle et la tonalité de sa voix, que la "Tina Tuyub" a plus que du caractère comme la majorité des yucatecas (femmes du Yucatán). Qu'on se le dise !

04/08/2010
Serge LEFORT
Citoyen du Monde

Lire aussi :
• 04/08/2010, Diario de Yucatán - El último adiós a "Cholo" - Los funerales de "Cholo".
• 05/08/2010, Diario de Yucatán - Portada.

• Héctor Herrera Álvarez, Wikipedia.
• Entrevista con Héctor Herrera Cholo, YouTube.

• Videos:
- Monólogo de Madraso, YouTube
- Monólogo del Telefono Celular, YouTube 1/2, 2/2
- Sueño de Flamboyanes, YouTube 1/9, 2/9, 3/9, 4/9, 5/9, 6/9, 7/9, 8/9, 9/9
- Tren de bola, YouTube 1/3, 2/3, 3/3

• Película Lake Tahoe:
- Lake Tahoe, AlloCiné- SensaCine
- Tráiler de la película Lake Tahoe, YouTube
- Tema Final de Lake Tahoe, YouTube
- Héctor Herrera Cholo presentando la película: Lake Tahoe, YouTube

5 août 2010

La mauvaise conscience d'Israël


LEIBOWITZ Yeshayahou, La mauvaise conscience d'Israël - Entretiens avec Joseph Algazy, Le Monde, 1994 [Texte en ligne].

Chapitre 7 Essence et naissance de l'État d'Israël
J.A. — Quelle est, d'après vous, l'essence de l'État d'Israël ?
Y. L. — L'État d'Israël est le cadre constitutif de l'indépendance nationale et politique que le peuple juif avait perdue il y a deux mille ans.
C'est également la définition que je donne du sionisme. Mais j'ajoute aussitôt que la création de l'État d'Israël n'a pas résolu le problème du peuple juif, ni la crise d'identité dont il souffre...

— ...Ni le problème de sa sécurité ?
— Jamais le peuple juif n'avait bénéficié, dans le monde, d'autant de sécurité qu'aujourd'hui. Le seul pays au monde dans lequel les Juifs sont en danger, c'est... l'État d'Israël.

— Pourquoi l'État d'Israël n'inclurait-il pas aussi la Cisjordanie, tout Jérusalem ?
— Parce qu'alors il cesserait d'être l'État du peuple juif, pour devenir un État de Juifs et d'Arabes. Avec les Territoires, l'État d'Israël n'est pas l'État du peuple juif : il comprendrait deux millions et demi d'hommes qui ne sont pas juifs (y compris les 800 000 citoyens arabes d'Israël). En soi, je ne trouve évidemment rien de mal à ce que des non-Juifs vivent en Israël.
Ce qui est mauvais, c'est que l'État d'Israël occupe ces territoires contre le gré de ces deux millions et demi de personnes, qu'il prive de droits civiques, de droits politiques.
Si bien que l'État d'Israël aujourd'hui n'est pas l'État du peuple juif, mais l'appareil d'un pouvoir violent sur un autre peuple. Moi, au contraire, je veux que l'État d'Israël soit uniquement l'État du peuple juif. Le « Grand Israël » ne peut pas être l'État du peuple juif. Disant cela, je ne me réfère pas à un quelconque postulat moral : j'établis un fait.
Chapitre 10 Le piège de l'occupation (1967-1993)
« Placer un million et demi d'Arabes sous l'autorité juive, c'est ébranler l'essence humaine et juive de l'État [d'Israël] et détruire la structure sociale que nous avons établie ; c'est couper l'État [d'Israël]du peuple juif dans le monde comme de la continuité de l'histoire et de la tradition juives, c'est anéantir le peuple juif et pervertir l'homme israélien. »
« Eretz Israël hashlema [le "Grand Israël"] n'est qu'un monstre catastrophique. Tout autre expédient - annexion, protectorat ou fédération - ne sera que de sales trucs colonialistes. Dans ce "Grand Israël", il n'y aura ni ouvrier juif ni paysan juif. Les Arabes formeront le peuple travailleur et nous deviendrons le peuple des managers, des inspecteurs, des fonctionnaires et des gendarmes, et en particulier des barbouzes. Dans ce monstre baptisé "Grand Israël", l'organisme le plus important et le plus structurant sera le Shin Beit [les services israéliens de renseignements]. Il y a quelques années, le mot d'ordre le plus répandu en Israël était : "Les meilleurs pour l'aviation !" Dans l'avenir, on dira : "Les meilleurs pour le Shin Beit !"»
« Quand je dis "les meilleurs pour le Shin Beit", ce n'est pas de la démagogie. Les autorités auront vraiment besoin pour les services secrets des hommes les meilleurs, les plus qualifiés. Et cela influera inévitablement sur l'atmosphère spirituelle de l'État et de la société. Cela empoisonnera l'éducation, cela nuira à la liberté de pensée et de critique dans la population juive. Pour les Arabes, on installera des camps de concentration, on dressera des potences. Un tel État ne méritera pas d'exister, mieux vaudrait ne pas le laisser naître. »

— Durant l'invasion du Liban, en juin 1982, pour la première fois, je crois, aucune justification d'ordre religieux ne fut avancée. L'establishment israélien s'est fondé sur la conscience de la force, de la supériorité d'Israël.
— Justement. L'invasion du Liban a été [en français] une folie criminelle. Reste à savoir ce qui, de la folie ou du crime, était dominant. L'establishment israélien voulait notamment installer au Liban un protectorat dirigé par un Quisling, comme celui que Hitler avait mis en place en Norvège. Mais l'invasion du Liban a échoué, et Israël occupe toujours une partie du territoire libanais, dite « zone tampon », où il entretient une milice composée de mercenaires, la prétendue « armée du Liban-Sud ».
L'invasion du Liban en 1982, je le répète, c'était [en français] une folie criminelle. N'oubliez pas que l'année précédente avait été une année de calme pour le nord d'Israël. Pas un seul missile Katioucha n'était tombé sur notre territoire. Aucun terroriste ne s'était infiltré. On n'avait pas relevé d'acte de sabotage. Pas un habitant du nord d'Israël n'avait dû se réfugier dans les abris. C'est nous qui avons rompu le calme, et cassé l'accord officieux intervenu entre Israël, l'OLP et les alliés libanais des uns et des autres. C'est nous qui avons envahi le Liban pour liquider l'OLP et installer un « nouvel ordre » au pays du Cèdre.

— Admettons qu'Israël, tout en refusant de se retirer des territoires occupés, accepte d'accorder aux habitants palestiniens des droits politiques et civiques, est-ce que...
— (Haussant le ton.) Non ! Octroyer des droits politiques et civiques aux Palestiniens des territoires occupés, cela voudrait dire que 40 % de la population de l'État d'Israël seraient désormais arabes.

— Vous parliez à l'instant de catastrophe. Qu'entendez-vous par là ? La guerre ?
— D'une part, effectivement, il y a le risque d'une guerre continue avec les Arabes. Mais également, d'autre part, le risque que l'État d'Israël devienne un État fasciste. L'État d'Israël n'est pas encore fasciste, mais il en a pris le chemin. Quand je parle d'un danger fasciste, j'inclus l'installation de camps de concentration pour des Juifs.

— Pour quels Juifs ?
— Des Juifs comme moi, comme vous.

— Vous pensez vraiment qu'en Israël quelqu'un oserait faire une chose pareille ?
— Non seulement ils oseront le faire, mais ils le feront ! Si la situation actuelle empire. Ce sera indispensable pour sauvegarder ce pouvoir. Nous mènerons, je vous l'ai dit, une guerre [en français] à outrance avec l'ensemble du monde arabe, du Maroc à l'ouest jusqu'au Koweït à l'est. Dans cette situation, le reste du monde manifestera sa sympathie aux Arabes. Israël se ruinera du dedans et du dehors. La seule alternative, c'est le partage de la terre entre les deux peuples qui y vivent.

— Permettez-moi d'insister : comment Israël se transformerait-il en un État fasciste ?
— Je vous ai dit que nous en avions pris le chemin.

— Comment ? Vous parlez librement, moi aussi, et d'autres comme nous disent ce qu'ils veulent. Aucun d'entre nous n'a été arrêté.
— Je n'ai pas dit que nous étions un État fasciste, mais que nous en avions pris le chemin.

— Quand et comment se produira le tournant ?
— Nous avons déjà des camps de concentration dans lesquels sont internés plus de dix mille personnes.

— Oui, mais ces prisonniers-là sont des Arabes, des Palestiniens.
— C'est vrai. Mais notre tour viendra.

— Que doit-il se passer pour que nous, des Juifs, nous soyons aussi internés ?
— Pour maintenir sa domination sur les territoires occupés, le pouvoir sera un jour amené à réprimer l'opposition intérieure à cette politique.

— Vous voulez dire l'opposition juive ?
— Oui.
Chapitre 13 Regards sur le siècle
— L'État d'Israël n'admet ni ne nie disposer de la bombe atomique.
— Qu'est-ce que ça veut dire, n'admettre ni ne nier ? C'est
un peu comme — j'en ai déjà parlé, mais c'est essentiel - quand l'État d'Israël est le seul État occidental à autoriser légalement, au cours des interrogatoires de suspects, la pratique de la torture pour arracher des informations ou des aveux. Interdite légalement dans plusieurs pays d'Europe avant même la Révolution française, la torture reste autorisée légalement chez nous ! Israël compte aujourd'hui parmi les États les plus barbares au monde : torturer, c'est un acte de barbarie primitive. Et tout cela sous couvert d'intérêt national !

— La même logique nationale permet de présenter la possession de la bombe atomique comme une sorte de police d'assurance.
— L'arme atomique n'est pas une police d'assurance, mais un instrument de menace. Mais il est clair que ce sont des menaces en l'air : Israël ne pourra pas utiliser l'arme nucléaire. Car, s'il le faisait, il s'anéantirait lui-même.

— Ce que vous dites là, les autorités israéliennes ne le savent-elles pas ?
— N'oubliez pas Voltaire. L'histoire est un ramas de crimes, mais aussi de folies.

— Voulez-vous dire que les dirigeants de l'État d'Israël sont fous ? Criminels ?
— (D'un ton catégorique.)Oui.

— Nous ne parlons pas de tel ou tel dirigeant, mais de tout un pouvoir.
— Je le sais. Et je répète : ce pouvoir est criminel. Absolument. Quand un organisme judiciaire autorise la pratique de la torture durant les interrogatoires, je ne peux que parler de crime. D'un énorme crime.
Chapitre 14 L'imbroglio moyen-oriental
J. A. — Alors que nous nous entretenons, Israël est à nouveau confronté au terrorisme. A Jérusalem, à Tel Aviv et ailleurs, des Palestiniens ont poignardé des passants. Et ce, malgré le processus de négociations israélo-arabes et israélo-palestiniennes.
Y. L. - Cela ne m'étonne pas. A partir du moment où nous dominons les Palestiniens par la violence, ils réagissent. C'est tout. Quant aux négociations, depuis un an, elles n'ont pas progressé d'un pouce ; en fait, elles sont en panne. Tant que l'occupation se perpétuera, nous serons confrontés à des actes de violence en tout genre, et notamment à des actes terroristes. Il en fut de même en Algérie jusqu'à l'indépendance. Ce matin [le 24 novembre 1992 - J.A.], la presse rapporte que nous avons tué un garçon de douze ans dans les territoires occupés : les deux phénomènes, les passants poignardés à Tel Aviv et les gosses tués par des balles à Ramallah sont inséparables et [en français]inévitables.

— Revenons à la guerre du Golfe. On dit qu'elle a empêché Saddam Hussein d'accéder aux armes de destruction massive, ou au moins retardé cet accès.
— J'ignore - et vous aussi - si Saddam Hussein possédait de telles armes...

— ...Plusieurs délégations d'enquête de l'ONU ont conclu que l'Irak n'était pas loin d'accéder à ces armes.
— L'Irak dispose des mêmes armes que les autres. Mais l'unique pays qui, au Moyen-Orient, menace aujourd'hui d'utiliser l'arme atomique, c'est Israël.
Le professeur Yechayahou Leibovitz est décédé le 18 août 1994.

Lire aussi :
Chronique Colonisation de la Palestine 2010, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Sionisme, Monde en Question.

4 août 2010

Lettre de Jacques Bouveresse à Valérie Pécresse


Madame la ministre,

Je viens d'apprendre avec étonnement par la rumeur publique et par la presse une nouvelle que m'a confirmée la lecture du Journal officiel du 14 juillet, à savoir que je figurais dans la liste des promus de la Légion d'honneur, sous la rubrique de votre ministère, avec le grade de chevalier.

Or non seulement je n'ai jamais sollicité de quelque façon que ce soit une distinction de cette sorte, mais j'ai au contraire fait savoir clairement, la première fois que la question s'est posée, il y a bien des années, et à nouveau peu de temps après avoir été élu au Collège de France, en 1995, que je ne souhaitais en aucun cas recevoir de distinctions de ce genre. Si j'avais été informé de vos intentions, j'aurais pu aisément vous préciser que je n'ai pas changé d'attitude sur ce point et que je souhaite plus que jamais que ma volonté soit respectée.

Il ne peut, dans ces conditions, être question en aucun cas pour moi d'accepter la distinction qui m'est proposée et – vous me pardonnerez, je l'espère, de vous le dire avec franchise – certainement encore moins d'un gouvernement comme celui auquel vous appartenez, dont tout me sépare radicalement et dont la politique adoptée à l'égard de l'Éducation nationale et de la question des services publics en général me semble particulièrement inacceptable.

J'ose espérer, par conséquent, que vous voudrez bien considérer cette lettre comme l'expression de mon refus ferme et définitif d'accepter l'honneur supposé qui m'est fait en l'occurrence et prendre les mesures nécessaires pour qu'il en soit tenu compte.

En vous remerciant d'avance, je vous prie, Madame la ministre, d'agréer l'expression de mes sentiments les plus respectueux.

Jacques Bouveresse
Agone

Lire aussi :
• BOUVERESSE Jacques, La connaissance de l'écrivain - Sur la littérature, la vérité & la vie, Agone, 2008.
Dossier documentaire & Bibliographie Jacques BOUVERESSE, Monde en Question.

3 août 2010

Jérusalem interdite aux Palestiniens

30/07/2010, Revue de presse internationale, France Culture.

03/07/2010, Le nouveau plan directeur d'Israël , ISM.
Quelques jours avant sa visite prévue le 7 juillet à Washington, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu semble vouloir contrecarrer les efforts américains pour faire avancer les discussions indirectes entre Israël et l'Autorité palestinienne (AP). Cette semaine, un organisme du gouvernement israélien a approuvé « un plan directeur sans précédent » pour une expansion tous azimuts des colonies juives qui aurait pour effet de « décapiter » - pour reprendre le mot d'un responsable palestinien – l'identité arabe de Jérusalem Est.
Lire aussi :
• Nettoyage ethnique, ISM.
Chronique Colonisation de la Palestine 2010, Monde en Question.

2 août 2010

Osez l'infanticide !


Pendant vingt ans une femme a tué huit de ses enfants dès leur naissance et enterré ou dissimulé leurs corps. Niant tout "déni de grossesse", elle a reconnu avoir été consciente d'être enceinte et a expliqué aux enquêteurs qu'elle ne voulait plus d'enfants [1].

Certaines féministes garderont le silence car les violences maternelles dérangent, mais d'autres réciteront imperturbablement leur catéchisme : en tous lieux et en tous temps les femmes sont irresponsables car éternelles victimes des hommes. Elles ne s'embarrassent pas des contradictions d'un discours qui à la fois dénonce le droit de vie et de mort du pater familias et revendique ce droit pour les mères.
Ce qui nous rassemble, c'est aussi que nous n'aimons pas ce monde tel qu'il est et que nous voulons agir contre toutes les dominations et les oppressions, et donc entre autres contre le patriarcat.
Réflexions autour d'un tabou, op. cit. p.7.
L'éloge du crime féministe, vendu par Virginie Despentes dans le roman Baise-moi adapté au cinéma, est devenu politiquement correct.
La société juge l'infanticide comme le crime d'une victime, l'un des arguments principaux pour l'excuser, étant de dire que les femmes infanticides considèrent le bébé non comme un être humain mais comme un objet.
L'infanticide en série : un crime politiquement correct ?, art. cit.
Les néo-féministes pensaient qu'il suffisait de faire voter des lois [2] pour libérer les femmes et réaliser le slogan des années 1970 "Un enfant si je veux, quand je veux". Mais les faits sont têtus. Le taux d'avortements (250 000 en 1975 ; 230 000 en 1995) et des dénis de grossesse est resté constant depuis plusieurs décennies (GORRE FERRAGU, op. cit. p.6 et p.37) ; des enfants sont toujours remis en vue d'adoption, et le taux d'infanticides, même s'il a considérablement diminué entre 1880 et 1950, ne varie plus guère (GORRE FERRAGU, op. cit. p.18).

La dimension psychopathologique de l'infanticide a été longtemps négligée voire niée en raison de l'absence de contraception fiable, argument qui ne tient plus aujourd'hui.
Si ce crime permit de réguler les naissances, la contraception et l'interruption volontaire de grossesse ont changé fondamentalement la donne.
[...]
Avec la violence de l'acte, l'infanticide symbolise une rupture radicale du lien social.
«Penser l'infanticide aujourd'hui», op. cit. Introduction.

L'aspect pathologique de l'infanticide au décours immédiat de la naissance, ne fait plus de doute, même chez les mères considérées comme indemnes de trouble mental.
Cet état mental particulier où existe un risque d'infanticide semble englober tout le déroulement de la grossesse, de la conception à l'accouchement.
GORRE FERRAGU, op. cit. p.55
L'abondante littérature psycho-analytique montre l'ambivalence de la maternité (désir/refus - vie/mort) et les conflits interne femme/mère (être femme/être ou ne pas être mère) et externe mère/femme (emprise maternelle).

Geneviève Fraisse, une des figures du néo-féminisme, a écrit en conclusion d'un article sur Les femmes et le féminisme :
Une fois repéré cet espace de revendications et de propositions féministes [...], il semble qu'il faille soulever un dernier problème, en rappelant que, si les hommes se sont établis maîtres des femmes, ce n'est pas toujours sans le consentement ce celles-ci. Et ce consentement a, en retour, fourni aux femmes un réel pouvoir qui fait partie de leur asservissement. Dénoncer l'oppression des femmes sans refuser d'analyser et de critiquer leur propre pouvoir est l'enjeu premier d'une libération future.
Encyclopædia Universalis, 1985, Corpus 7 p.843.
Son message n'a guère été entendu, mais elle a elle-même changé de position suite à sa conversion politique au PCF dont elle fut députée au Parlement européen. Les travaux de Camille Lacoste-Dujardin sont critiqués parce que non conformes à la doxa féministe et ceux de Cai Hua complètement ignorés parce qu'ils remettent en cause l'épistémologie des sciences sociales [3].

Les analyses conformes restent attachées au principe cartésien de la causalité linéaire selon lequel tout phénomène a une cause. Or cette approche de la science classique ne rend pas compte des relations humaines. Ceci explique l'impasse théorique du féminisme. La cybernétique a introduit la causalité circulaire rétroactive (l'effet réagit sur la cause) et la causalité récursive (l'effet agit sur la cause).

L'analyse systémique des relations hommes-femmes, c'est-à-dire une approche qui tienne compte du fait que les êtres humains - hommes et femmes - sont des acteurs interagissant dans un système complexe et ouvert, qui est produit par eux et qui les produit en retour, cette analyse est peu pratiquée en France à cause des barrières disciplinaires et institutionnelles qui limitent l'interdisciplinarité notamment entre la psychologie et la sociologie (École de Palo Alto).

29/07/2010 revu et corrigé le 02/08/2010
Serge LEFORT
Citoyen du Monde

Articles :
• 1986, LALOU Richard, L'infanticide devant les tribunaux français (1825-1910), Communications n°44.
• 2002, BENHAÏM Michèle, La culpabilité maternelle, La lettre de l'enfance et de l'adolescence n°47.
• 2003, SALECL Renata, Le réel du crime : une mère infanticide, Savoirs et clinique n°2.
• 2003, MOREL Geneviève, Transgression et identification dans le passage à l'acte, Savoirs et clinique n°3.
• 2004, SINGLETON Michael, Infanticide, Documents de travail n°20, UCL.
• 2005, VANDER BORGHT Marie, De NEUTE Rick, L'abandon à la naissance : entre désir et non désir d'enfant, Cahiers de psychologie clinique n°24.
• 2005, TINKOVÁ Daniela, Protéger ou punir ? Les voies de la décriminalisation de l'infanticide en France et dans le domaine des Habsbourg (XVIIIe-XIXe siècles), Crime, Histoire & Sociétés.
• 2006, ROUSSEAUX Xavier, Historiographie du crime et de la justice criminelle dans l'espace français (1990-2005) - Partie I : du Moyen-Âge à la fin de l'Ancien Régime, Crime, Histoire & Sociétés.
• 2006, ROUSSEAUX Xavier, Historiographie du crime et de la justice criminelle dans l'espace français (1990-2005) - Partie II : de la Révolution au XXIe siècle, Crime, Histoire & Sociétés.
• 19/10/2007, L'infanticide en série : un crime politiquement correct ?, L'En Dehors.
• 2009, FARCY Jean-Claude, Impossibles victimes, impossibles coupables - Les femmes devant la justice (XIXe-XXe siècles), Criminocorpus.
• 07/07/2009, AUQUE Hubert, Médée, mère infanticide ?, AIEMPR.
• Médée, Imago Mundi.
• Infanticide - Recherche chronologique, Google.

Revues :
• «Enfances - Bilan d'une décennie de recherche», Annales de démographie historique n°102, Juillet 2001.
• «Les mères», La lettre de l'enfance et de l'adolescence n°59, Janvier 2005.
• «Maternités», Clio n°21, Juin 2005.
• «Le Maternel et le féminin», Dialogue n° 169, Juillet 2005.
• «Figures de femmes assassines - Représentations et idéologies», Cycnos n°2, Juin 2006.
• «Penser l'infanticide aujourd'hui», Enfances & Psy n°44, Juillet 2009.
• «Destins de naissance», Champ psychosomatique n°56 Octobre 2009.

Livres :
ANDRÉ Jacques, DREYFUS-ASSÉO Sylvie, La folie maternelle ordinaire, PUF, 2006.
ANDRÉ Jacques (sous la direction de), Folies de femmes, PUF, 2009.
• BENHAÏM Michèle, La folie des mères - J'ai tué mon enfant, Imago, 1992 et 1998 [Lien Social].
• Collectif, Réflexions autour d'un tabou - L'infanticide, BBORNOT, Toulouse, 2009 [Basse Intensité pdf - Basse Intensité mp3 - Déprav' mp3 - Acrata - Quel sexe ? - L'En Dehors].
• COUCHARD Françoise, Emprise et violence maternelles - Étude d'anthropologie psychanalytique, Dunod, 1997, 1997 et 2003 [Le Carnet PSY].
• DAVID Hélène, «Les mères qui tuent», in ANDRÉ Jacques (sous la direction de), La féminité autrement, PUF, 1999.
p. 33-53.
• DEPAULIS Alain, Le complexe de Médée - Quand une mère prive le père de ses enfants, De Boeck Université, 2003.
• DUFOURMANTELLE Anne, La sauvagerie maternelle, Calmann-Lévy, 2001 [Oedipe - Oedipe le Salon Présentation - Oedipe le Salon Critique].
• GORRE FERRAGU, Le déni de grossesse : une revue de littérature, Université de Rennes 1, 2002.
• GUYOMARD Dominique, L'effet-mère - L'entre mère et fille Du lien à la relation, PUF, 2009.
• LAMOTHE Elisabeth, SARDIN Pascale, SAUVAGE Julie [Textes réunis et présentés par], Les mères et la mort - Réalités et représentations, Presses Universitaires de Bordeaux, 2008 [BooksGoogle].
• MAÏDI Houari, La plaie et le couteau - Et si la victime était son bourreau..., Delachaux et Niestlé, 2003 [Sommaire - L'information psychiatrique - Psycho-Ressources].
• TILLIER Annick, Des criminelles au village - Femmes infanticides en Bretagne (1825-1865),Presses universitaires de Rennes, 2001 [ Conférence - Annales. Histoire, Sciences Sociales - Clio - Crime, Histoire & Sociétés - Revue d'histoire du XIXe siècle - Ruralia.
• VIGOUROUX François, L'empire des mères, PUF, 1998 et Pluriel Hachette, 2004.

Dossier documentaire & Bibliographie Féminisme, Monde en Question.

[1] Revue de presse :
• 28/07/2010, Plusieurs cas d'infanticides multiples ces dernières années, AFP-Le Figaro.
• 28/07/2010, La mère reconnaît avoir étouffé les bébés retrouvés morts, Le Monde.
• 29/07/2010, Une femme mise en examen pour huit infanticides, Reuters-Yahoo! Actualités.
• 29/07/2010, Mères infanticides, malades mais responsables, selon des experts, Reuters-Yahoo! Actualités.
• 29/07/2010, La mère des huit nourrissons avoue les avoir tués, TSR.
• 29/07/2010, Accusée d'infanticide, la mère dit avoir eu «conscience d'être enceinte à chaque fois», Libération.
• 29/07/2010, Infanticide : "J'avais conscience d‘être enceinte", Euronews.
• 29/07/2010, Affaires d'infanticide : et si on parlait du père ?, Rue89.
• 30/07/2010, Société - Pendant près de vingt ans, la mère infanticide a étouffé ses bébés à la naissance, L'Alsace.
[2] GORRE FERRAGU, op. cit. p.17 :
Le 28 décembre 1967, la loi Neuwirth autorise la pilule en France, et abroge
les sanctions pénales visant la contraception.
Le 17 janvier 1975, la loi Veil dépénalise l'avortement.
La loi du 31 décembre 1979 reconduit la loi de 1975, et lui donne un caractère définitif.
[3] Ces ouvrages seront analysés prochainement dans une série d'articles sur le thème Domination masculine/maternelle :
• CAI Hua, Une société sans père ni mari - Les Na de Chine, PUF, 2000.
• CAI Hua, L'homme pensé par l'homme - Du statut scientifique des sciences sociales, PUF, 2008.
• FRAISSE Geneviève, Du consentement, Seuil, 2007.
• LACOSTE-DUJARDIN Camille, Des mères contre les femmes - Maternité et patriarcat au Maghreb, La Découverte, 1996.
• LACOSTE-DUJARDIN Camille, La vaillance des femmes - Les relations entre femmes et hommes berbères de Kabylie, La Découverte, 2008.