Même les féministes ont succombé à la mode du porno. La critique de
cette industrie, qui envahit notre vie quotidienne, nécessite une
analyse selon les critères de l'économie politique faute de quoi on
sombre dans les ornières d'une morale bien pensante que nous assène
laborieusement cette porno-comédie, réalisée selon les normes
hollywoodiennes pour séduire le plus grand nombre.
Les deux tiers du film sont résumés dans l’affiche et dans la bande
annonce. Jon, comme tous les obsessionnels compulsifs, a une vie très
réglée. Il répète inlassablement les mêmes gestes ritualisés.
Cinématographiquement, cela devient vite lassant car les images et le
son sont montés comme un clip vidéo qui dure non quelques minutes, mais
une bonne heure.
Sa courte liaison avec Barbara donne à peine le change car, alors
qu’elle dort, il court vers son ordinateur… Leur rupture survient non
parce que, en fouillant l’historique de son navigateur, elle s’est
rendu-compte qu’il matait du porno, mais parce qu’elle lui demande tout
en échange du sexe… quand elle veut, où elle veut et comme elle veut.
Le dernier tiers du film est un revirement complet puisque Jon se
convertit brusquement au regard d’Esther qui lui enseigne que «le porno
n’est qu’une simulation et que, pour atteindre la jouissance dans la
vraie vie, il faut savoir se perdre dans l’autre et réciproquement».
En bref, ce film n’apporte rien de nouveau sinon la réaffirmation de
la morale que Julianne Moore (Esther) a souvent interprétée : celle de
la femme WASP dans
Short Cuts (1993),
Safe (1995),
Far from Heaven (2002) ou celle de Sarah Palin dans
Game Change (2011).
Films analogues
Sur le fond comme dans la forme
Don Jon s’apparente à
Borderline
(2008, Lyne CHARLEBOIS) qui, sous prétexte de traiter un trouble de la
personnalité, réalise un porno chic se terminant par une romance
pâtissière.
Le meilleur film qui traite de la névrose obsessionnelle reste
The Aviator (2004, Martin SCORSESE), biographie romancée de Howard Hugues remarquablement interprété par Leonardo DiCaprio.
Shame (2011, Steve McQUEEN) est le meilleur film qui traite,
d’une manière beaucoup plus subtile et plus convaincante, de l’addiction
au porno. Étrangère au discours moralisateur, la mise en scène laisse
au spectateur la liberté de penser ce qu’il veut.
Quant à
Monique (2002, Valérie GUIGNABODET), c’est une petite
comédie jubilatoire sur l’intrusion d’une poupée en silicone – un corps
de rêve, toujours disponible, jamais de migraines, jamais de larmes,
jamais de scènes – dans la vie d’un couple en perte de désir.
23/12/2013
Serge LEFORT
Citoyen du Monde
Don Jon, 2013, Joseph GORDON-LEVITT,
AlloCiné
Critiques EN :
Critiques FR :
S’abonner à la
Newsletter Cinéma pour télécharger les films cités.
Lire aussi :
• Dossier documentaire
Érotisme & Pornographie,
Monde en Question.
• Dossier documentaire
Sexualité,
Monde en Question.
• Revue de presse
Cinéma 2013,
Monde en Question.
• Dossier documentaire
Cinéma,
Monde en Question.
• Veille informationnelle
Cinéma,
Monde en Question.