23 janvier 2010

Gaza 2006-2009


LEVY Gideon, Gaza - Articles pour Haaretz, 2006-2009, La Fabrique, 2009 [l'Humanité - Radio Pluriel].
Un avion qui lance une roquette dans une rue noire de monde, un bébé atteint au cerveau par des éclats de missile, un avocat qui propose d'«étrangler» Gaza, un père qui identifie la moitié du corps de son fils grâce à ses chaussettes, des rues entières «mises à nu» par les bulldozers Caterpillar… semaine après semaine, jour après jour quand les événements se précipitent, Gideon Levy décrit les horreurs infligées par l'armée et l'aviation israéliennes à la population de Gaza. Et en même temps, il tend un miroir aux lecteurs de Ha'aretz : il leur montre leur «effarante indifférence», il leur explique que les dirigeants de l'opération «Plomb durci» risquent de se retrouver un jour devant un tribunal à La Haye, il leur assène que «le sang des enfants tués à Gaza est sur nos mains et non sur celles du Hamas, et nous ne pourrons jamais échapper à cette responsabilité.»

«J'aime Gaza», écrit Gideon Levy dans sa préface pour les lecteurs français. Les articles ici réunis sont à la fois un plaidoyer et un réquisitoire, et aussi une raison de se réconcilier avec le journalisme.
Écouter aussi :
Entretien avec Gideon Levy, Là-bas si j'y suis, 21/01/2010.
La guerre à Gaza, un an après.., Public Sénat, 21/01/2010.

Lire aussi :
• Gideon LEVY, Monde en Question
• Guerre de Gaza, l'Humanité - Monde en Question
Dossier documentaire & Bibliographie Palestine/Israël, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Palestine/Israël - Mur de l'Aparteid, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Palestine/Israël - Résistance Palestine, Monde en Question.

La farce tragique de l'aide humanitaire


Ouvrez la porte !
"Aide humanitaire"

Marc-Antoine PÉROUSE DE MONTCLOS, L'aide humanitaire, aide à la guerre ?, Complexe, 2001 [BiblioMonde - Cahiers d'études africaines].
Dans la question des situations de crise et d'urgence, l'aide humanitaire a pris une telle importance qu'elle est devenue, à sa manière, un acteur à part entière de la scène internationale, pour ne pas dire un "lobby". Pourtant, des enquêtes de terrain révèlent de nombreux dysfonctionnements quant à la mise en oeuvre de la distribution des secours. Dans des économies de guerre civile en effet, l'intervention humanitaire ne peut jamais être politiquement neutre. Pire encore, elle s'avère, de part sa puissance logistique, nourrir les conflits et contribuer leur prolongation; la question se pose donc de savoir dans quelle mesure les effets pervers de l'aide humanitaire l'emportent sur les bénéfices attendus pour les populations dans le besoin.

Se défendant de tirer sur l'ambulance, l'auteur, chargé de recherche à l'Institut de recherche sur le développement (IRD), entend se livrer à une critique constructive de l'aide humanitaire dans les zones de guerre. Exemples à l'appui, il montre comment elle peut se révéler un facteur structurant des conflits, les belligérants rackettant les organisations non gouvernementales (ONG) et encadrant politiquement les réfugiés dans les camps. L'aide est ainsi susceptible d'exacerber les tensions en attisant les compétitions pour l'accès à des ressources rares. Avec la fin de la guerre froide et des appuis extérieurs, les civils sont devenus des enjeux stratégiques aux yeux des combattants, l'aide internationale apportant "de l'oxygène à un conflit qui serait resté en vase clos". Pour l'auteur, quand l'aide n'est qu'un soin palliatif sans résolution des causes politiques du problème, il faut savoir partir et travailler en amont des crises, par exemple en muselant les marchands de canons. Le véritable défi à venir pour les ONG serait donc de connaître le seuil où les effets pervers l'emportent sur les effets bénéfiques, le sauvetage d'une vie aujourd'hui se traduisant par le sacrifice de dix demain.
Lire aussi :
Dossier Haïti, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Aide humanitaire - Colonialisme humanitaire, Monde en Question.

22 janvier 2010

La religion du chiffre


Les médias dominants usent et abusent des chiffres sans jamais émettre le moindre doute sur leur véracité, sans jamais expliquer comment ils ont été construit, sans jamais les mettre en perspective... Et, comme les chiffres ne parlent pas, ils les font parler.

Froid inhabituel au Mexique : 9 morts, Le Grand Journal du Mexique source AFP.
Une vague inhabituelle de froid s'est abattue sur la majeure partie du Mexique, entraînant la mort de neuf personnes depuis le début de l'année, en grande partie dans le nord du pays davantage habitué à lutter contre la canicule, a annoncé le ministre de la Santé, José Angel Cordova.

Selon lui, la moitié des victimes sont mortes d'hypothermie et les autres ont succombé à des intoxications au monoxyde de carbone, en raison de chauffages défectueux à leur domicile.

Commentaires : Le ministre de la Santé du Mexique feint de croire que les rigueurs inhabituelles du climat seraient la cause de ces morts alors que l'hypothermie et les intoxications au monoxyde de carbone sont manifestement liés à la pauvreté qui s'accroît dans la pays [1].
La Chine devient premier marché automobile mondial, devant les États-Unis, Le Monde source Chine nouvelle selon AFP et Reuters.
Quelque 13,64 millions de véhicules ont été vendus en 2009 en Chine. "La Chine a remplacé les États-Unis pour devenir pour la première fois le plus grand marché automobile du monde", peut claironner, lundi, l'agence Chine nouvelle, citant l'Association chinoise des constructeurs automobiles (CAAM).

Commentaires : Les médias dominants utilisent quotidiennement le copier-coller sans apporter de valeur ajoutée. Que signifie le chiffre repris par Le Monde ? On n'en sait rien. Les pourcentages, qui suivent, n'apportent aucune information car ils font référence à des comparaisons dans le temps court et donc non significatives [2]. L'accumulation de chiffres remplace l'explication comme si le fait de les citer faisait sens alors qu'ils ont une valeur incantatoire.
La Chine s'octroie le premier rôle dans le commerce mondial, Le Grand Journal du Mexique source La Tribune.
Elle s'octroie ainsi 10% des exportations mondiales en 2009 contre 3% dix ans auparavant.

Commentaires : Dans cet exemple les pourcentages font sens car ils établissent une comparaison sur une période longue (dix ans) d'un même phénomène (part de marché de la Chine dans le commerce mondial).
Les explications et les spéculations, qui suivent, sont en revanche bien hasardeuse car l'augmentation du pourcentage de la part de marché de la Chine est liée à des causes multiples et les projections sur l'avenir impliquent que ces causes restent identiques [3].
On remarque aussi le langage raciste du journaliste de la La Tribune : «la Chine a envahi les étagères des commerces de la planète». Quand il s'agit d'un pays occidental, les médias dominants utilisent les expressions «gagner des marchés» voire «conquérir des marchés».
Le nombre de morts provoqué par la grippe pandémique A (H1N1) a fait l'objet de titres aussi spectaculaires que mensongers : Plus de 10 000 morts de la grippe A (H1N1) dans le monde, Le Monde du 18/12/2009 [4]. Ce chiffre magique est faux car l'article précise "10 582 décès". Ce chiffre magique perd de son effet quand on lit plus loin que, selon l'OMS, "les niveaux de maladies grippales ont baissé de manière significative pour se rapprocher des niveaux saisonniers habituels". Ce chiffre magique révèle une technique de propagande quand on le corrèle aux 250 000 à 500 000 décès par an provoqués par la grippe saisonnière.

L'Institut national de veille sanitaire (InVS) annonce, dans son dernier bulletin, 246 morts de la grippe A(H1N1) en France. Les médias dominants invoquent ce chiffre avec des trémolos dans la voix en le dramatisant alors qu'il représente 0,05% des morts comptabilisés en 2008 par l'INSEE (toutes causes confondues).

Margaret Chan, directrice générale de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), a reconnu en conférence de presse avoir surestimé l'impact du virus H1N1. Mme Chan, qui n'est pas vacciné, a avoué «Nous avions prévu qu'il y aurait des problèmes pour produire des vaccins suffisamment rapidement (...), mais nous n'avions pas prévu que les gens décideraient de ne pas se faire vacciner» en constatant avec amertume que «l'époque où les responsables de la santé pouvaient donner leurs recommandations (...) et attendre que les populations s'y plient est sans doute révolue» [Information Hospitalière]. Elle ne désespère pourtant pas de «convaincre les gens d'adopter des comportements sains» [ONU], voire de les y contraindre... avec la complicité des médias qui nous bombarderons de chiffres.

Serge LEFORT
Citoyen du Monde exilé au Mexique

Lire aussi :
Dossier documentaire & Bibliographie Propagande, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Statistiques & Sondages, Monde en Question.

[1] Lire :
• Empeora la pobreza en México, Monde en Question.
• Mexique : 44% de la population vit dans la pauvreté, Xinhua - Agence de presse Chine.
• Pauvreté au Mexique, Wikipédia.
• Lutte contre la pauvreté et les inégalités au Mexique, Politiques Sociales.
[2] Sur le seul mois de décembre, ces ventes ont augmenté de 88,7 % par rapport à l'an dernier, à 1,1 million de véhicules. En novembre, la croissance des ventes automobiles avait été en rythme annuel de 98,2 %, mais de 49,7 % sur les onze premiers mois de l'année, selon la CAAM.
La Chine devient premier marché automobile mondial, devant les États-Unis, Le Monde source Chine nouvelle selon AFP et Reuters.
[3] Au cours de ces dernières années, les ports chinois, notamment Shanghai, ont vu les porte-conteneurs se presser toujours plus nombreux dans leur rade. Avec des marchandises au meilleur prix, produites à de bas coûts de travail , et soutenu par un yuan faible, la Chine a envahi les étagères des commerces de la planète.
Si elle conserve un tel rythme, cette part des exportions mondiales pourrait atteindre quelque 25 % d'ici à dix ans. D'ores et déjà, le Fonds monétaire international (FMI) prévoit 12 % pour 2014. Ses experts ont d'ailleurs calculé que si l'économie conservait un rythme de croissance annuel de son PIB de 8 % avec une structure dépendante autant des exportations, celles-ci pourraient bondir de 17% d'ici à 2020.
La Chine s'octroie le premier rôle dans le commerce mondial, Le Grand Journal du Mexique source La Tribune.
[4] Le dernier bulletin de l'OMS annonce 13 554 morts dans le monde.

21 janvier 2010

L'armée américaine occupe Haïti


Une semaine après le séisme qui a ravagé Haïti, l'armée américaine occupe l'île et les charognards des ONG récoltent des millions dont une infime partie servira aux habitants totalement démunis. Le charity business prospère à l'ombre des hélicoptères et des fusils-mitrailleurs. Ainsi triomphe le colonialisme humanitaire...

Serge LEFORT
Citoyen du Monde exilé au Mexique

Lire aussi :
CADTM
Global Voices
Le Grand Soir
Monde en Question Français - Monde en Question Español
Mondialisation
Rezo.net
Tlaxcala

Médias dominants :
Alvinet Actualité
Google Actualités
Le Grand Journal du Mexique
Yahoo! Actualités

Des médias aux ordres


À l'heure où tout le monde est contraint de reconnaître que le virus de la grippe A(H1N1) n'a pas provoqué les 30 000 morts en France prévus par certains épidémiologistes et encore moins les millions de morts dans le monde pronostiqués par l'expert consacré par Le Monde pour désinformer ses lecteurs [1], les médias dominants se défaussent comme d'habitude sur les politiques.

Depuis le début de l'épidémie, en avril 2009, les médias dominants mentent sciemment en publiant des chiffes alarmistes sans jamais ni émettre le moindre doute sur leur construction ni les mettre en perspective avec ceux de la grippe saisonnière. Ils ont choisi délibérément de crédibiliser la version des organisations sanitaires et des gouvernements.

Aujourd'hui, il est cocasse de lire les arguments dont les journalistes usent pour dégager leur responsabilité. Grippe H1N1: les journalistes se défaussent, les autorités trinquent, AFP-Google Actualités du 06/01/2010 (texte complet en annexe) :
"Je ne vois pas de quel droit j'aurais caché le taux de mortalité au Mexique ou le fait qu'aux États-Unis des femmes enceintes mouraient", souligne Hélène Cardin, journaliste sur France Inter, dans une interview à l'AFP.

Commentaires : Les médias dominants ont abondamment cité les chiffres du gouvernement mexicain alors qu'ils savaient qu'ils étaient faux. Dire "qu'aux États-Unis des femmes enceintes mouraient" relève de la démagogie car, avec ou sans grippe, des femmes enceintes meurent aux États-Unis et ailleurs dans le monde.

"Nos autorités sanitaires et politiques ont décrété une sorte d'état d'urgence médiatique autour de cette question. Dès lors, on est obligés de s'y conformer", renchérit le directeur de la rédaction d'Europe 1, Laurent Guimier.

Commentaires : Ce journaliste avoue que les médias dominants sont aux ordres des autorités sanitaires et politiques. Dont acte.

Comme son confrère Michel Cymes, Alain Ducardonnet médecin consultant pour les JT de TF1, s'est déclaré "intégralement favorable à la vaccination".

Commentaires : Les médias dominants donnent la parole aux experts qu'ils élisent pour leurs qualités d'agent de propagande.
Les médias dominants ne donnent pas la parole aux voix discordantes qui participeraient à la soi-disante théorie du complot. Cette rhétorique de la novlangue signifie en clair que toute critique est par avance discréditée.

La palme des médias aux ordres revient au quotidien qui pratique la langue des jésuites [2]. Le doute A(H1N1), Le Monde du 13/01/2010 (texte complet en annexe) :
Évitons d'abord les faux procès : nul ne peut sérieusement reprocher au gouvernement d'avoir vu trop grand pour éradiquer la pandémie annoncée due au virus de la grippe A(H1N1). Quand il a commandé, en juillet 2009, 94 millions de doses de vaccin, l'Organisation mondiale de la santé venait de décréter une alerte mondiale et des épidémiologistes prévoyaient 30 000 morts en France, cinq fois plus que pour la grippe saisonnière. Les Cassandre se sont trompées, mais le gouvernement - qui avait tiré les leçons de l'imprévoyance des pouvoirs publics lors de la canicule de 2003 - a eu raison d'appliquer le principe de précaution. Même à l'extrême.

Commentaires : En résumé, Le Monde juge que le gouvernement n'est pas coupable parce qu'il a cru naïvement les prédictions de certains épidémiologistes. Rappelons que d'autres, moins médiatisés, disaient le contraire [3]. Pire, Le Monde prétend que le "principe de précaution" devrait s'appliquer «même à l'extrême».
Il est toujours plaisant de relire des commentaires journalistiques, démentis par les faits. Revue de presse Grippe et épidémie, NouvelObs du 30/11/2009 :
(...) Aussi ne doit-on pas s'étonner que plus l'épidémie se propage, plus les centres de vaccination se remplissent. Chacun est désormais concerné dans son propre environnement et on peut noter que ceux qui dénonçaient la gesticulation médiatique, voire l'instrumentalisation du phénomène, se sont tus ! Les Français exigent maintenant une meilleure mobilisation des pouvoirs publics et craignent d'être sevrés d'un vaccin qui, il y a peu, ne les convainquait pas. Il faut à cet égard s'élever contre la désinformation qui contamine la Toile, et dire que les bénéfices du vaccin l'emportent sur les inconvénients. Dire et redire que les effets néfastes d'une pandémie seront toujours supérieurs aux effets indésirables après vaccination. Le risque n'est pas du côté de la vaccination, de la médecine. Il est du côté de l'inertie de la société et de l'indifférence. Nous n'en sommes heureusement pas là.
Jacques Béal, Le Courrier Picard.
Les médias dominants se croient encore les maîtres de l'opinion publique alors qu'ils ont perdu toute crédibilité. Ainsi, malgré une campagne médiatique sans précédent, le nombre de vaccinations contre le virus de la grippe A(H1N1) fut comparable à celui de la grippe saisonnière.

Serge LEFORT
Citoyen du Monde exilé au Mexique

Annexes :
Grippe H1N1: les journalistes se défaussent, les autorités trinquent, AFP-Google Actualités du 06/01/2010.
Journalistes et spécialistes des questions de santé de radios et de grandes chaînes de télé se défendent d'avoir cédé à l'emballement dans le traitement médiatique de la pandémie de grippe H1N1, pointant la stratégie de communication du ministère de la Santé.

"Nous avons participé, pas plus, mais pas moins que les autres à la trouille ambiante", juge aujourd'hui Hélène Cardin, journaliste sur France Inter. "Je ne vois pas de quel droit j'aurais caché le taux de mortalité au Mexique ou le fait qu'aux États-Unis des femmes enceintes mouraient", souligne-t-elle dans une interview à l'AFP.

Depuis mai, la couverture médiatique de la pandémie en France a été souvent critiquée parce que jugée démesurée.

"Nos autorités sanitaires et politiques ont décrété une sorte d'état d'urgence médiatique autour de cette question. Dès lors, on est obligés de s'y conformer", renchérit le directeur de la rédaction d'Europe 1, Laurent Guimier dont l'obsession était "de ne pas participer à un emballement". Pour preuve, la station n'a pas bousculé ses programmes ni consacré une journée spéciale à la pandémie.

Difficile toutefois de prendre du recul. "A partir du moment où vous avez un point de presse tous les jours, non seulement du ministère de la Santé mais du ministère de l'Intérieur avec Brice Hortefeux parlant de vaccination, comment aller dire à votre direction: «non je n'y vais pas» ?", convient Hélène Cardin qui parle "d'échec complet de la communication du ministère".

Pour le sociologue Michel Setbon, directeur de recherche au CNRS, la communication gouvernementale ne s'est pas emballée tout de suite. La difficulté pour les autorités était de choisir une option de départ: la pandémie va-t-elle tuer beaucoup de gens ou ne sera-t-elle qu'une grippette ?

"Le plus gros problème est de n'avoir pas été en mesure de réviser la stratégie de communication au fur et à mesure des données qui tombaient", note-t-il jugeant qu'il allait "falloir en tirer certaines leçons".

Une analyse partagée par Michel Cymes, qui présente présente chaque jour "Le magazine de la santé" avec Marina Carrère d'Encausse sur France 5.

"Au début, le traitement médiatique était très clair, factuel, informatif, on vulgarisait très bien. Tout s'est emballé quand le vaccin est arrivé et qu'on a commencé à se polariser sur des effets secondaires potentiels ou des annonces spectaculaires", explique-t-il.

Comme son confrère Michel Cymes, Alain Ducardonnet médecin consultant pour les JT de TF1, s'est déclaré "intégralement favorable à la vaccination". Il considère avoir rempli un rôle pédagogique, tout en restant nuancé.

Refaisant l'historique de la pandémie, Alain Ducardonnet compare la stratégie gouvernementale de communication à un plan militaire en temps de guerre. "Le problème est que la quasi totalité des différentes phases du plan a été appliquée alors que l'épidémie n'était globalement pas au rendez-vous", explique-t-il.

Pour lui, "la révision stratégique a été un peu tardive", d'où "la distorsion de communication avec les médecins généralistes" écartés de la vaccination dans leurs cabinets. "Du coup", soutient-il, "il y a eu une véritable scission entre, d'un côté, l'État avec toutes ses armes et, de l'autre, des troupes qui ne voyaient pas la légitimité de ce que racontait l'État".
Le doute A(H1N1), Le Monde du 13/01/2010.
Évitons d'abord les faux procès : nul ne peut sérieusement reprocher au gouvernement d'avoir vu trop grand pour éradiquer la pandémie annoncée due au virus de la grippe A(H1N1). Quand il a commandé, en juillet 2009, 94 millions de doses de vaccin, l'Organisation mondiale de la santé venait de décréter une alerte mondiale et des épidémiologistes prévoyaient 30 000 morts en France, cinq fois plus que pour la grippe saisonnière. Les Cassandre se sont trompées, mais le gouvernement - qui avait tiré les leçons de l'imprévoyance des pouvoirs publics lors de la canicule de 2003 - a eu raison d'appliquer le principe de précaution. Même à l'extrême.

Pour autant, l'échec de la campagne de vaccination est avéré : début janvier, un peu plus de 5 millions de personnes ont été vaccinées, soit un nombre similaire à celui qu'on enregistre chaque année pour la grippe saisonnière. La France doit revendre, dans des conditions qui restent à éclaircir, des millions de doses de vaccins achetées aux laboratoires. Cet échec est dû à la mauvaise organisation de la vaccination, pour la première fois offerte gratuitement à la population sans être obligatoire, et à une communication inadaptée.

La France s'est distinguée de ses voisins européens, qui n'ont pas pour autant obtenu de meilleurs résultats, en centralisant à l'excès la vaccination. Ce système "à la soviétique" aura été d'autant plus inadéquat qu'on savait, dès le départ, que le millier de centres de vaccination ne serait pas suffisant pour vacciner les trois quarts de la population si d'aventure ce scénario s'était présenté.

Tout a contribué à ne pas mettre en confiance la population. Non seulement les pouvoirs publics ont longtemps écarté du dispositif les médecins libéraux - même s'il y avait un vrai problème de rémunération -, mais ils n'ont pas fait appel au réseau des médecins du travail dans les entreprises ni aux infirmier(e)s. A l'évidence, la réintégration des médecins aujourd'hui arrive trop tard.

Devant la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, le 12 janvier, Roselyne Bachelot s'est montrée inutilement agressive. Forte du soutien de Nicolas Sarkozy, la ministre de la santé a dénoncé l'attitude désinvolte et arrogante de l'opposition. Elle ferait mieux de s'interroger sur les ratés d'une communication qui n'a pas su convaincre. Depuis l'affaire du sang contaminé, dans les années 1980, l'opinion craint qu'on lui cache la vérité et se méfie des politiques de santé publique. C'est ce doute sur la parole politique qu'il faut s'employer à lever.
Lire aussi :
• Revue de presse Grippe A/H1N1 2010, Monde en Question.
• Revue de presse Grippe A/H1N1 2009, Monde en Question.
• Dossier documentaire & Bibliographie Risque & Gestion du risque, Monde en Question.

[1] Deux exemples :
• Antoine Flahault : «La mortalité directe du H1N1 serait cent fois celle de la grippe saisonnière», Le Monde du 26/08/2009.
• Antoine Flahault : «Des millions de Français pourraient avoir été infectés par la grippe A sans le savoir», Le Monde du 29/12/2009.
[2] Subst. masc. et adj., péj. (Celui) qui est dissimulé, hypocrite, voire retors [CNRTL].
Curieusement, la Compagnie de Jésus fut fondée par Jean Colombini et le président du directoire de la SA Le Monde et directeur du journal Le Monde est Jean-Marie Colombani.
[3] Debré : "Cette grippe n'est pas dangereuse", leJDD du 25/07/2009.
Bernard Debré, professeur de médecine, député UMP de Paris et membre du comité national d'éthique, prend le contre-pied des déclarations du Premier ministre vendredi. Alors que François Fillon se faisait alarmiste sur la pandémie "inévitable" de la grippe A-H1N1, Bernard Debré estime que l'on en fait trop.
A partir du moment où l'OMS a, de façon un peu rapide, commencé à gesticuler, avec des communiqués quotidiens et des conférences de presse à répétition, les gouvernements n'avaient pas vraiment d'autre choix que de suivre. Je leur reproche d'avoir ensuite succombé à une surmédiatisation politique de cet événement.

20 janvier 2010

La guerre contre Gaza, un an après


Cette guerre montre le vrai visage d'Israël : racisme et haine, goût de la vengeance et soif de verser le sang

Cette guerre, peut-être plus que les précédentes, montre le vrai visage de la société israélienne. Le racisme et la haine, le goût de la vengeance et la soif de verser le sang. Les correspondants militaires soulignent à la télévision que les "inclinations des commandants" dans les «Forces de défense israéliennes» sont désormais de «tuer le maximum de personnes.» Et même si cela ne concernerait que les combattants du Hamas, ces «tendances» font froid au dos.

L'agression et la brutalité sans limite des militaires sont présentées comme des moyens d'éviter des pertes israéliennes : le rapport effrayant en matière de pertes humaines soit 100 morts palestiniens pour chaque israélien tué, ne soulève même pas de questions comme si nous avions décidé que leur sang a 100 moins de valeur que le nôtre, ce qui est la preuve de notre propre racisme.

Les gens de droite, les nationalistes, les chauvinistes et les militaristes sont les seuls à occuper les devants de la scène et ne les ennuyez pas avec les principes humanitaires et la compassion. C'est seulement à la périphérie du camp [de la guerre], qu'une protestation illégitimée, mise à l'écart et ignorée des médias, peut être entendue, une voix venant d'un petit groupe de Juifs et d'Arabes courageux.

Parallèlement à tout cela, s'élève une autre voix, peut-être la pire de toutes. C'est celles des «Juste-Hypocrites». Mon collègue, Ari Shavit, semble être leur éloquent porte-parole. Cette semaine, Shavit a écrit dans Haaretz du 7 janvier qu'«Israël doit doubler, tripler, quadrupler son aide médicale à Gaza" pour ajouter ensuite que : "l'offensive israélienne dans la bande de Gaza est justifiée ... Seule une initiative humanitaire immédiate et généreuse peut prouver que, même au cours de la guerre brutale qu'on nous a imposée, nous n'oublions pas qu'il y a des êtres humains de l'autre côté. "

Pour Shavit, qui a justifié cette guerre et qui a insisté pour qu'elle ne soit pas perdue, son prix est sans importance tout comme le fait qu'il n'existe pas de victoires dans de telles guerres injustes. Et il ose, dans le même souffle prêcher "l'humanité".

Shavit, souhaite-t-il de nous voir tuer et de tuer encore, et ensuite de nous voir mettre en place des hôpitaux de campagne et d'envoyer des médicaments pour soigner les blessés ? Il sait que la guerre contre une population impuissante, peut-être la plus démunie du monde, qui n'a nulle part où s'enfuir, ne peut être que cruelle et ignoble. Mais des gens comme lui veulent toujours s'en sortir de façon élégante.

Nous larguons des bombes sur des immeubles résidentiels, et ensuite nous allons soigner les blessés à Ichilov, nous lançons des obus sur une population réfugiée dans des écoles des Nations Unies, et nous allons ensuite rééduquer à Beit Lewinstein les personnes que nous avons rendues handicapées. Nous tirons sur des gens et ensuite nous pleurons sur leur sort, nous tuons et ensuite nous nous lamentons, nous déchiquetons comme des «machines automatiques à tuer» des femmes et des enfants, et nous devons préserver notre dignité ensuite.

Le problème est que cela ne fonctionne pas de cette façon. Cette hypocrisie auto-justificatrice est scandaleuse. Ceux qui font des appels enflammés pour plus de violence sans égard pour les conséquences de cette violence sont au moins honnêtes.

Vous ne pouvez pas tout avoir. La seule «pureté» de cette guerre est la "purification prônée par les terroristes" qui signifie l'ensemencement de terribles tragédies. Ce qui se passe à Gaza n'est pas une catastrophe naturelle, un tremblement de terre ou une inondation, pour lesquels il serait de notre devoir de tendre une main secourable à ceux qui en sont touchés, d'envoyer des équipes de sauvetage, comme nous aimons le faire avec amour.

Tout ce qui se passe actuellement à Gaza de pourri et de catastrophique est la faute des hommes, Notre Faute. L'aide ne peut être offerte par les mains tâchées de sang de ceux que l'on veut secourir. La compassion [pour les victimes] ne peut germer à partir de la brutalité [des bourreaux].

Pourtant, il y a des gens qui veulent gagner sur les deux tableaux. D'un côté, tuer et détruire sans discernement et de l'autre montrer un bon visage et une conscience propre : aller au devant des crimes de guerre sans aucun sens de la lourde culpabilité qu'ils impliquent. Cela demande du culot. Toute personne qui justifie cette guerre justifie en même temps tous ses crimes. Toute personne qui prêche pour cette guerre et qui croit en la justesse de ses tueries, n'a aucun droit de parler de moralité et d'humanité.

Il n'existe pas quelque chose qui peut être en même temps le crime et son contraire. Cette attitude est le reflet fidèle de la base [société israélienne], dédoublement de la personnalité qui nous marque pour toujours : commettre une erreur, mais se sentir pur à nos propres yeux. Tuez, détruisez, affamez, emprisonnez, humiliez mais de grâce soyez droits et ne parlez pas de bien [humanité].

Les Justes en période de guerre ne seront pas en mesure de se permettre ce luxe.

Toute personne qui justifie cette guerre, justifie tous ses crimes.

Toute personne qui la considère comme une guerre défensive doit porter la responsabilité morale de ses conséquences. Toute personne qui encourage maintenant les politiciens et l'armée à continuer cette guerre, doit aussi à porter sur son front après la guerre la marque de Caïn.

Tous ceux qui soutiennent la guerre, soutiennent aussi l'horreur.

Gideon LEVY
Info-Palestine - UJFP selon Ha'aretz

Écouter aussi : La guerre à Gaza, un an après..., Public Sénat.
Lire aussi :
• Gideon LEVY, Monde en Question
• Guerre de Gaza, l'Humanité - Monde en Question
Dossier documentaire & Bibliographie Palestine/Israël, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Palestine/Israël - Mur de l'Aparteid, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Palestine/Israël - Résistance Palestine, Monde en Question.

À lire et à écouter : Haïti - Gaza


Haïti
15/01/2010, Comment expliquer le séisme d'Haïti ?, Science publique - France Culture.

Commentaires : Le discours scientifique sert à masquer voire à nier que la pauvreté aggrave les catastrophes naturelles.

19/01/2010, Histoire d'Haïti, 2000 ans d'histoire - France Inter.
«C'est une terre à désirer et, une fois vue, à ne jamais quitter.» Christophe Colomb
Trois siècles après avoir été découverte par Christophe Colomb, Haïti fut, après les Etats-Unis, la deuxième colonie du monde à proclamer son indépendance. Appelée successivement Hispaniolia, puis Saint Domingue, colonisée par les Espagnols puis par les Français, elle a connu grâce à l'exploitation des esclaves une telle prospérité qu'on l'appelait « la perle des Antilles. » Si riche qu'à la fin de la guerre de sept ans, Louis XV avait préféré perdre le Canada plutôt que Saint Domingue, et que Napoléon y avait envoyé une armée pour mater la révolte des esclaves de Toussaint Louverture. Mais depuis son indépendance proclamée en 1804, Haïti est devenue un des pays les plus pauvres du monde. Un pays éprouvé depuis deux siècles par l'histoire et par les catastrophes naturelles comme celle qui vient de le frapper.

Commentaires :
• Les conséquences de cette catastrophe naturelle ne sont pas une fatalité, mais le résultat de la colonisation. Lire La pauvreté aggrave les catastrophes naturelles et La vérité sur les souffrances d'Haïti.
• Après le deuxième voyage de Christophe Colomb à Haïti à la fin de 1493, il ne s'agit plus d'exploration aventureuse, mais d'occupation armée de l'île rebaptisée Hispaniola. L'arrivée d'une armada de dis-sept navires avec douze à quinze cents hommes marque l'acte inaugural d'une colonisation européenne qui va bientôt s'abattre sur tout le continent américain. Et qui se distingue d'emblée par sa violence sans limites contre les peuples envahis qu'elle entend contraindre à produire ce qu'exige le colonisateur. Dès son premier voyage, Colomb en avait tracé le programme. Les naturels de l'île, écrivait-il, «sont donc propres à être commandés et à ce qu'on les fasse travailler, semer et mener tous autres travaux qui seraient nécessaires, à ce qu'on leur enseigne à aller vêtus et à prendre nos coutumes».
Christophe COLOMB, La découverte de l'Amérique, La Découverte, 1979 in FERRO Marc, Le livre noir du colonialisme, Pluriel Laffont, 2003.
Palestine / Israël
17/01/2010, Les réfugiés palestiniens dans les pays arabes, Place des peuples - France Culture.

Lire aussi : Palestine / Israël.

19/01/2010, Shlomo SAND, Tout arrive ! - France Culture.
Nous recevons l'historien Shlomo Sand pour parler avec lui de ses deux derniers ouvrages Comment le peuple juif fut inventé et Les mots de la terre (chez Flammarion).
Il commence par nous expliquer comment l'expérience de la guerre des six jours l'a profondément marqué et l'a amené à la politique alors qu'à 20 ans il en était déjà fatigué et se rêvait écrivain ou poète.
Lui qui vit et enseigne à Tel-Aviv, se définit comme « israélien d'origine juive », est très critique face au nationalisme juif. Et on voit ici avec lui comment il déconstruit l'historiographie juive contemporaine (mais ne nous méprenons pas, il ne fait pas l'étude historique du peuple juif).
Cette lutte post-sioniste, il la mène donc à travers ses ouvrages en se positionnant d'abord comme citoyen, c'est-à-dire quelqu'un d'inquiet, avant tout, sur l'avenir de son pays.

Lire aussi : Shlomo SAND in Résistance à la colonisation de la Palestine / Israël.

17 janvier 2010

These Vagabond Shoes

JOHANSSON Scarlett, These Vagabond Shoes, 2009.


J'ai aimé ce court-métrage et je l'ai dit sur AlloCiné d'autant certains, qui ne l'aiment pas, voudraient bien le censurer. Curieux réflexe de vouloir empêcher les autres de voir ce qu'on n'aime pas...

Cela me rappelle les critiques délirantes contre Clint Eastwood, taxé de fasciste, parce qu'il interprétait le rôle de Harry Callahan [1] par ceux qui l'encensent aujourd'hui parce qu'il a réalisé Lettres d'Iwo Jima ou Gran Torino.

J'ai aimé aussi les interprétations de Scarlett Johansson dans :
The Barber, 2001
Lost in Translation, 2002
La Jeune fille à la perle, 2002
La Séductrice, 2003
Vicky Cristina Barcelona, 2008
Serge LEFORT
Citoyen du Monde exilé au Mexique

Lire aussi :
AlloCiné
IMDb
Scarlett-Fan
Wikipédia

[1] Sélection d'articles :
• Harry Callahan, Wikipédia
• Don Siegel 1912-1991, Fin de séance
• Clint Eastwood le flic..., Clint Eastwood d'hier à aujourd'hui
• Quand Clint Eastwood passait pour un fasciste, Le Matin
• Clint Eastwood a-t-il vraiment changé ?, Le Monde diplomatique - Courrier des lecteurs