Le 18 août dix soldats français, appartenant au 8e régiment de parachutistes d'infanterie de marine (RPIMa) de Castres, sont tués par des talibans en Afghanistan. Dans un premier temps, l'armée dissimule voire nie les faits pour dégager sa responsabilité. Après le doute exprimé publiquement par certaines familles, le témoignage de soldats blessés au cours de cette embuscade et surtout le reportage de
Paris-Match, l'armée accuse les journalistes de faire jeu des talibans en révélant les faits. Les médias dominants, plus empressés de soutenir le gouvernement que de poser la question de la légitimité de cette sale guerre et de défendre la liberté de la presse, se font les porte-paroles serviles de l'état-major.
Chronologie des faits selon Force Internationale d'Assistance à la Sécurité,
FIAS.
- 6 août 2008, La France a pris hier le commandement de la région centre de l’Afghanistan.
- 7 août 2008, Des centaines de soldats français se déploient dans la province d’Uruzgan. Ceux-ci étaient à bord de 94 véhicules mais leur nombre exact et leur provenance n’ont pas été divulgués. La France a promis d’envoyer 700 soldats supplémentaires en Afghanistan d’ici 2009.
- 19 août 2008, Une embuscade tendue par près de 100 talibans a tué 10 soldats français hier et en a blessé 21 dans le district de Saroubi, à 50 km de Kaboul. Le président français, Nicolas Sarkozy, part pour l’Afghanistan pour démontrer son soutien. Il s’agit de l’incident le plus meurtrier pour l’armée française depuis celui à Beyrouth en 1983.
- 20 août 2008, Le président français, Nicolas Sarkozy, déclare devant des soldats français que « la meilleure façon d’être fidèles à vos camarades c’est de continuer le travail ». Selon son ministre de la Défense, Hervé Morin, « les talibans sont capables de mener des opérations nettement mieux organisées » et l’embuscade de lundi « était extrêmement bien préparée ». Des soldats blessés font état de victimes causées par des tirs amis et critiquent le temps de réaction et la coordination.
- 20 août 2008, Le président afghan, Hamid Karzaï, reçoit son homologue français, Nicolas Sarkozy, et déclare que « la recrudescence de la violence est à attribuer directement à notre manque, les alliés et nous tous, à prêter attention aux sanctuaires, aux centres d’entraînement et aux ressources financières des terroristes et des talibans ». Le quotidien gouvernemental Anis estime que les Américains n’attaquent pas ces sanctuaires au Pakistan afin de justifier leur présence en Afghanistan.
- 21 août 2008, Le président français, Nicolas Sarkozy, estime que la France « défend la liberté du monde en Afghanistan ».
- 22 août 2008, Le Premier ministre français, François Fillon, annonce qu’il y aura un débat sur la participation française en Afghanistan devant le Parlement français le 22 septembre. Par la suite, celui-ci décidera lors d’un vote si cette participation doit être prolongée.
- 25 août 2008, Le commandant des forces françaises pour Kaboul, le général Michel Stollsteiner, indiquant que les bataillons bénéficieront maintenant d’appuis à proximité, estime qu’il y a eu « péché par excès de confiance », ce qui a mené à l’embuscade ayant tué 10 soldats français et en ayant blessé 21. Le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, déclare que « la stratégie militaire indispensable dans un premier temps ne suffira pas, il faut l’Afghanisation ».
- 26 août 2008, Le chef d’état-major de l’armée française, le général Jean-Louis Georgelin, examine les options « pour optimiser l’efficacité du contingent français et de la FIAS », dont l’envoi des forces spéciales.
- 29 août 2008, Les ministres français des Affaires étrangères et de la Défense, Bernard Kouchner et Hervé Morin, déclarent que la France restera en Afghanistan « aussi longtemps que cela sera nécessaire ».
- 4 septembre 2008, Le chef d’état-major de l’armée française, le général Jean-Louis Georgelin, visite l’Afghanistan. Un responsable taliban impliqué dans l’embuscade qui a tué 10 soldats français le 18 août, le commandant Farouki, a déclaré hier à la revue Paris-Match que « tant que vous resterez chez nous, nous vous tuerons. Tous ». Le responsable des forces françaises de la province de Kapisa, le colonel Jacques Aragonès, accuse les talibans de mener des « opérations de propagande ».
- Le chef d’état-major de l’armée française, le général Jean-Louis Georgelin, visite l’Afghanistan. Un responsable taliban impliqué dans l’embuscade qui a tué 10 soldats français le 18 août, le commandant Farouki, a déclaré hier à la revue Paris-Match que « tant que vous resterez chez nous, nous vous tuerons. Tous ». Le responsable des forces françaises de la province de Kapisa, le colonel Jacques Aragonès, accuse les talibans de mener des « opérations de propagande ».
- 7 septembre 2008, Le porte-parole adjoint du ministère français de la Défense, le général Christian Baptiste, explique son silence sur l’embuscade du 18 août ayant causé la mort de dix soldats français par le fait que les talibans « scrutent » les réactions occidentales, soutenant qu’ils ont « une véritable stratégie de communication ».
- 13 septembre 2008, Le ministre français de la Défense, Hervé Morin, accompagné des familles des soldats français tués le 18 août, ont rencontré à Kaboul le commandant français dans la région, le général Michel Stollsteiner.
- 19 septembre 2008, Avant un débat au Parlement français sur la présence française en Afghanistan, un groupe de 18 ONG demande à être reçu par le ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, pour promouvoir un changement dans la stratégie en Afghanistan. Le collectif rappelle « qu’aucune armée n’a jamais gagné de guerre en Afghanistan », soulignant « les limites d’une solution purement militaire dans un pays en état de conflit quasi-permanent depuis 30 ans ».
- 21 septembre 2008, Le quotidien canadien, The Globe and Mail, déclare avoir mis la main sur un rapport secret de l’OTAN sur les détails de l’embuscade qui a mené à la mort de dix soldats français le 18 août dernier. Ce rapport soutient que les soldats étaient « mal préparés ».
- 21 septembre 2008, Des milliers de personnes ont manifesté samedi en Allemagne en France et en Grande-Bretagne contre la présence de militaires en Afghanistan. Un des organisateurs des manifestants à Berlin, Jens-Peter Steffen, estime « qu’il existe une autre stratégie de paix en Afghanistan qui n’implique pas l’armée, et cette stratégie doit être essayée ». Les manifestants réclamaient que leurs soldats quittent l’Afghanistan pour « donner une chance à la paix ».
- 22 septembre 2008, L’Assemblée nationale française se prononce en faveur du maintien des troupes en Afghanistan. Le Premier ministre français, François Fillon, indique que la France déploiera d’ici quelques semaines une centaine de militaires supplémentaires en Afghanistan, ainsi que « des hélicoptères Caracal et Gazelle, des drones, des moyens d’écoute (et) des mortiers ». L’annonce vise à prévenir des évènements similaires à l’embuscade ayant tué 10 soldats le 18 août.
Les Français n’avaient pas assez de munitions pour tenir face à des talibans très bien armés, ni de moyens de communication adaptés. C’est ce qu’affirme un rapport "secret" de l’OTAN que s’est procuré Eric de Lavarène, correspondant de France Info au Pakistan. Un rapport qui "n’existe" pas selon le ministère français de la Défense.
Le 22 septembre 2008, Hervé Morin avoue finalement l'existence d'un document confidentiel sur l'embuscade ayant tué dix soldats français le 18 août près de Kaboul relevant un sous-équipement côté français (
AFP - Yahoo! Actualités).
Le ministre de Défense et le chef d'état-major des armées, le général Jean-Louis Georgelin, s'étaient succédé pour répondre aux révélations du journal canadien Globe and Mail.
Le quotidien anglophone de Toronto avait relancé samedi la polémique sur les circonstances de l'embuscade, faisant état d'un rapport "secret" de l'Otan faisant état d'un manque de munitions et d'équipements de communication. Dimanche, il avait maintenu ses informations et ajouté des détails sur l'identification du document.
Un responsable de l'Otan avait révélé anonymement dimanche à l'AFP qu'un courrier électronique, rédigé par un officier de l'Isaf à l'adresse du QG de Kaboul, avait fait l'objet d'une fuite.
Finalement, M. Morin a admis lundi sur RTL l'existence d'un "compte-rendu d'un officier du JOC (Joint Operation Center, ndlr), le centre opérationnel" de l'Alliance atlantique, introduisant une nuance sémantique pour contester qu'il s'agisse d'un "rapport".
Ce "compte-rendu parcellaire a été effectué à chaud le lendemain ou dans les 48 heures après l'opération, à partir des éléments dont disposait cet officier", a-t-il argué.
Selon le Globe and Mail, les soldats français se sont trouvés à court de munitions, après 90 minutes de combat avec les talibans.
Le ministre a fermement contesté le fond du document: "C'est archi-faux, les forces françaises avaient leur dotation et même plus".
Le général Georgelin, sur Europe 1, a parlé d'un "compte-rendu à chaud", mais l'a attribué aux forces spéciales américaines associées à l'opération du 18 août.
La presse et certaines familles de soldats tués avaient déjà mis en cause l'équipement et la préparation des Français pris dans l'embuscade du 18 août.
Jean-François Buil, père du soldat Damien Buil tué lors de l'embuscade, a déclaré lundi à l'AFP se poser "énormément de questions".
"Je croyais qu'on nous avait tout dit. Ce qui m'intéresse maintenant, c'est de discuter avec les blessés qui étaient sur le terrain", a-t-il dit.
Pour M. Morin, la polémique sur cette embuscade pourrait faire le jeu des talibans face à une "opinion occidentale fragile".
Le ministre en a appelé à "l'union nationale" alors que le Parlement se prononce sur le maintien des forces armées françaises en Afghanistan, un vote qui devrait être favorable.
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