12 mars 2010

La réalité de l'État d'Israël


Après que Eli Yishaï, ministre de l'Intérieur, ait annoncé à Joe Biden, vice-président des États-Unis, que l'État d'Israël poursuivra la colonisation de la Palestine en construisant illégalement 50 000 logements à Jérusalem-Est, Ehud Barak, ministre de la Défense, a ordonné le bouclage total de la Cisjordanie [1].

Ce nouveau coup de force prouve que tous les partis israéliens, qui participent au gouvernement, sont d'accord sur la politique coloniale contre les Palestiniens. Ehud Barak, ministre de la Défense et membre du Parti travailliste, apporte son soutien total à Eli Yishaï, ministre de l'Intérieur et membre du parti religieux ultra-orthoxe Shass.

Depuis 1948, tous les gouvernements israéliens, de gauche, de droite et d'extrême droite, poursuivent la même politique sioniste de colonisation de la Palestine mandataire, frontières définies par l'occupant britannique, en violation du droit international et de toutes les résolutions de l'Organisation des Nations unies (ONU).

Le processus de paix est pire que la mascarade dénoncée par Gideon Levy [2], c'est l'odieuse propagande sioniste, complaisamment relayée par les médias dominants, pour imposer sa vision biblique de la Palestine : une terre - Eretz Israel - promise par YHWH au peuple élu et qui respecte ses commandements.

La réalité que nous devons affronter est que l'État d'Israël est un État terroriste qui défend une conception barbare de la propriété de la terre palestinienne, fondée uniquement sur la croyance religieuse et non sur le droit international.

La réalité que nous devons affronter est que l'État d'Israël a construit à Gaza un camp de concentration et qu'il en train de construire d'autres camps de concentration en Cisjordanie avec la complicité des États-Unis et de l'Europe.

12/03/2010
Serge LEFORT
Citoyen du Monde

Revue de presse :
Israël ordonne un bouclage total de la Cisjordanie pour 48 heures, Libération-Yahoo! Actualités.
Israël boucle la Cisjordanie pendant 48h, AP-Yahoo! Actualités.
Tension à Jérusalem, sous haute sécurité, la Cisjordanie bouclée, Reuters-Yahoo! Actualités.

[1] Ce n'est pas 1600 mais 50 000 logements illégaux que l'État d'Israël a planifié pour étendre la colonisation de Jérusalem-Est comme le révèle Ha'aretz - traduit par ISM.
[2] Gideon LEVY, Thank you, Eli Yishai, for exposing the peace process masquerade, Ha'aretz.

11 mars 2010

Colonisation israélienne


Joe Biden, vice-président des États-Unis, porte la kipa à Jérusalem

Ce n'est pas 1600 mais 50 000 logements illégaux que l'État d'Israël a planifié pour étendre la colonisation de Jérusalem-Est comme le révèle Ha'aretz - traduit par ISM. Cela prouve une fois de plus, comme le dit Gideon Levy, que le processus de paix est une mascarade [1].

Depuis sa création en 1948, l'État-voyou d'Israël méprise le droit international et poursuit implacablement la colonisation de la Palestine [2]. La fuite en avant du gouvernement israélien, qui fait le jeu de la minorité religieuse ultra-orthodoxe, rend caduque les illusions d'un futur État palestinien.

11/03/2010
Serge LEFORT
Citoyen du Monde

Revue de presse :
11/03/2010, Colonisation israélienne : une pilule difficile à avaler pour les États-Unis, AP-Yahoo! Actualités.
11/03/2010, Israël heurte les États-Unis, euro|topics.
11/03/2010, Le grand écart d'Israël, Géopolitique.
11/03/2010, Israël : le poids politique exorbitant des religieux, Slate.

Lire aussi :
Dossier documentaire & Bibliographie Palestine/Israël, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Palestine/Israël - Mur de l'Aparteid, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Palestine/Israël - Résistance Palestine, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Palestine/Israël - Un seul État, Monde en Question.

[1] Gideon LEVY, Thank you, Eli Yishai, for exposing the peace process masquerade, Ha'aretz.
[2] Sélection bibliographique :
• 18/02/2010, Israël méprise du droit international, Actualités du droit.
• 22/02/2010, Israël travaille au changement du droit international (1/2), Info-Palestine - The Palestine Telegraph.
• 22/02/2010, Israël travaille au changement du droit international (2/2), Info-Palestine - The Palestine Telegraph.

Le Nigeria victime des convoitises coloniales


Les médias dominants occidentaux présentent les massacres dans la région de Jos au Nigeria comme "des violences ethniques", "des violences religieuses" ou "des violences ethnico-religieuses". C'est dans les mêmes termes que l'im-Monde avait présenté le génocide des Tutsi du Rwanda [1] pour, comme dans une tribune récente sur "les démons ethniques de la Côte d'Ivoire", justifier la présence de l'armée française dans ses ex-colonies.

La liste non exhaustive des titres de la presse illustre la pratique du copier-coller des dépêches d'agence par les médias, qui répètent ad nauseam des formules incantatoires... sans rien expliquer :
07/03/2010 :
• Nouvelle flambée de violences entre chrétiens et musulmans dans le centre du Nigeria, AP-Yahoo! Actualités.
08/03/2010 :
• Nigeria : funérailles des victimes de nouvelles violences entre chrétiens et musulmans, AP-Yahoo! Actualités.
• Nigeria : au moins 500 morts dans un nouveau déchaînement de violence religieuse, Le Parisien.
• La France condamne les violences interreligieuses meurtrières au Nigeria, Le Point.
• Les violences intercommunautaires reprennent à Jos, Courrier international.
• Le Nigéria a nouveau en proie aux violences ethniques et religieuses, euronews.
• Nigeria : plusieurs centaines de morts dans des violences interreligieuses, France Info.
• Nigeria : au moins 500 morts dans des violences ethniques [Au moins 500 personnes auraient été tués dans des violences inter-religieuses dans le centre du Nigeria], Metro.
• Nigeria : funérailles de victimes de nouvelles violences entre chrétiens et musulmans, NouvelObs.
• 500 personnes ont été massacrées au Nigeria dans des violences entre chrétiens et musulmans, RFI.
09/03/2010 :
• Une poudrière ethnique et religieuse, Courrier international.
• Le centre du Nigeria, théâtre de violences ethniques, Le Monde [2].
À chaque fois qu'ils parlent de l'Amérique latine, de l'Afrique ou de l'Asie, les médias dominants usent et abusent des expressions du langage colonial : les indigènes (rouges, noirs ou jaunes) sont des sauvages qui se massacrent entre eux pour des prétextes futiles (un bout de terre).
Il est vrai que, en matière de violences inter-ethniques, la civilisation occidentale peut donner des leçons à ces barbares : environ 18 millions de morts, dont 9 millions de civils, entre 1914 et 1918 ; environ 65 millions de morts, dont 45 millions de civils, entre 1939 et 1945... pour se partager le monde.

Presque tous les médias dominants disent à la fois la même chose et pas grand chose. Ils répètent le chiffre bien rond de 500 morts alors que personne ne l'a vérifié [3].
Ils répètent l'idéologie coloniale d'une rivalité ethnique séculaire ou celle d'experts labélisés par les médias qui évoquent «un conflit entre des éleveurs nomades musulmans de l'ethnie Fulani et des cultivateurs sédentaires chrétiens de l'ethnie Berom». Il est cocasse de voir que l'ordre des mots varie d'un média à l'autre au point d'être totalement incompréhensible. Ainsi, l'expression «éleveurs musulmans nomades», utilisée par Le Figaro, n'a aucun sens.

Passons sur les propos propagandistes du style : «Au Nigéria, les musulmans génocident les chrétiens» [Chrétienté.info du 08/03/2010].
Peu d'articles rappellent le contexte politique du Nigeria depuis dix ans et encore moins font l'effort d'explorer les raisons économiques, sociales et politiques de ces affrontements.

La Croix du 09/03/2010 :
«Pour mobiliser les troupes, il est plus facile de mettre en avant la différence religieuse. Mais la réalité est autre : le nord, pauvre, convoite les terres fertiles du sud, beaucoup plus riche. Le conflit n'est pas religieux, il est économique et politique.»
France 24 du 09/03/2010 :
Ce qui me semble gênant dans la façon dont la presse locale et internationale relate les faits, c'est d'opposer des ethnies, les Haoussas et les Fulanis, majoritairement musulmans, d'un côté, et les Berom, majoritairement chrétiens de l'autre. Ces violences, auxquelles nous assistons depuis 2001, sont d'abord le fait de milices armées, non de populations ou d'ethnies qui prennent des machettes pour s'entretuer.

En 1999, le président du gouvernement local de Jos, un chrétien du People Democratic Party (PDP, parti du président nigérian), a ainsi retiré aux musulmans leur "certificat d'indigénéité". Ce certificat donne des droits : accès à des postes dans l'administration des gouvernements locaux, aux écoles publiques et aux universités, à la propriété, par exemple.

Or si, au Nigeria, cette division entre indigènes et non indigènes est acceptée dans l'ensemble, ce n'est pas le cas dans l'État du Plateau. Les Haoussas, qui ont été les premières populations de la ville de Jos, se disent autant autochtones que les populations locales du Plateau. Ainsi, les affrontements qui ont lieu depuis 2001 sont, d'après ce que j'en comprends, une remise en question de cet équilibre politique précaire entre indigènes et non indigènes.
Le Figaro du 09/03/2010 :
Cet accès de violences organisées n'est que le dernier d'une longue vendetta, dans laquelle les deux ethnies jouent tour à tour le rôle de victimes et de bourreaux. D'après les ONG et les leaders communautaires, le massacre du week-end a été perpétré en représailles du précédent, qui avait fait 300 morts à Kuru Kuruma, à quelques dizaines de kilomètres de là le 19 janvier. Les mêmes scènes s'étaient alors déroulées : attaque d'un groupe armé, femmes et enfants assassinés à la machette. Mais cette fois les assassins étaient des Beroms chrétiens, et les victimes des musulmans.

Plus de 13 500 personnes sont mortes ainsi dans des massacres alternés depuis la fin de la dictature militaire en 1999, selon Human Rights Watch. Les raisons de ces tueries sont connues. Elles ne sont pas confessionnelles, comme l'admet l'archevêque de la capitale Abuja, Mgr John Onaiyekan. «On se tue pas à cause de la religion, a déclaré hier le prélat, mais pour des revendications sociales, économiques, tribales et culturelles.» Comme souvent en Afrique, la pauvreté joue un rôle central, et la violence est d'autant plus grande que les ressources à partager sont plus maigres.

Au Nigeria, cette compétition sanglante est aggravée par un système hérité de la colonisation britannique, et renforcé par les gouvernements successifs depuis l'indépendance, celui des «indigènes». Dans chacun des états fédérés, un ou plusieurs groupes ethniques, désignés officiellement comme les habitants originels, bénéficient de privilèges refusés aux autres citoyens, postes de fonctionnaires ou places à l'université par exemple. Le côté artificiel de ce concept identitaire n'est nulle part ailleurs plus flagrant que dans l'état du Plateau, créé en 1976 pour quelques ethnies, en majorité chrétienne, dont les Beroms victimes du dernier massacre. Les éleveurs haoussa-fulani, pourtant présents, parfois, depuis le XIXe siècle, réclament en vain le label «indigènes» se heurtant au refus des Beroms, qui s'accrochent à leurs avantages.
Ces affrontements s'inscrivent non seulement dans un contexte politique fragilisé par la transition à la suite de l'hospitalisation du président Umaru Yar'Adua et par le fait que Goodluck Jonathan ne semble pas pressé de quitter la présidence par intérim [4], mais aussi dans un contexte géopolitique de tension pour le contrôle du pétrole.
Un autre facteur de conflit tient à la répartition des ressources. Les redevances du pétrole et du gaz, dont le Nigeria est tellement dépendant, proviennent pour l'essentiel du delta du Niger, une zone où prédominent les minorités et qui englobe plusieurs États : Delta, Edo, Akwa-Ibom, Cross River, Rivers et Bayelsa. Se sentant trahis et abandonnés depuis des années, ces États ont accusé le gouvernement central de détourner leurs ressources au profit du développement d'autres zones, menaçant de reprendre le contrôle de leur production.
Courrier international du 09/03/2010 [5].
Au-delà du Nigeria, c'est toute l'Afrique de l'Est qui est un terrain de chasse pour les compagnies pétrolières occidentales :
Les grandes compagnies pétrolières se sont lancées dans la course. Le groupe français Maurel & Prom fore au large de la Tanzanie, l'américain Anadarko et le norvégien Statoil au large du Mozambique, dans le bassin de Rovuma.
Le groupe britannique Tullow s'est livré à une véritable bataille contre l'italien Eni pour le contrôle des gisements ougandais du lac Albert, qu'il n'a remporté que début février. Tullow était associé jusque-là au canadien Heritage Oil, qui lui a cédé ses 50% dans deux blocs pétroliers.
AFP-Google Actualités du 09/03/2010.
La guerre commerciale entre les compagnies pétrolières, l'intervention des multinationales, des États-Unis, de l'ONU et des organisations dites humanitaires dans les affaires des États soi-disants indépendants pèsent lourd sur l'avenir de l'Afrique de l'Est et sur celui du Nigeria en particulier.

09/03/2010
Serge LEFORT
Citoyen du Monde

Lire aussi :
Veille d'information Afrique, Monde en Question.
Veille d'information Nigeria :
Google Actualités
Yahoo! Actualités
Dossier documentaire & Bibliographie Afrique, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Colonialisme, Monde en Question.

[1] GOUTEUX Jean-Paul, Le Monde, un contre-pouvoir ? - Désinformation et manipulation sur le génocide rwandais, L'esprit frappeur, 1999 [Acrimed - Le cobaye international - LMSI - No Pasaran - PressAfrique].
Le lecteur découvre comment Le Monde - mais il ne fut pas le seul - a épousé la version d'un conflit ethnique (démenti par tous les africanistes qui connaissent le sujet), accrédité la version présentée par les services de renseignement français et présenté les Tutsis comme aussi dangereux, si ce n'est plus, que les génocidaires. L'analyse de Jean-Paul Gouteux met également en évidence comment même des informations exactes peuvent être une condition de diffusion de la désinformation et comment Le Monde a confié à quelques prises de position dans les pages "Débats" le soin de dire une vérité que l'on ne parvenait à découvrir ni dans ses éditoriaux ni dans ses articles d'information.
[2] Voir comment l'im-Monde présentait les massacres de janvier :
• Au Nigeria, des violences interreligieuses éprouvent un pouvoir fédéral affaibli, Le Monde du 21/01/2010.
• 150 corps découverts dans des puits au Nigeria après des combats inter-religieux, Le Monde du 23/01/2010.
[3] Une dépêche AFP, publiée par Le Figaro, du 10/03/2010 dément le chiffre de 500 morts : Les massacres perpétrés le week-end dernier près de Jos, dans le centre du Nigeria, ont fait 109 morts, a déclaré aujourd'hui le responsable de la police de l'État du Plateau, démentant le bilan de 500 morts initialement annoncé.
[4] AFP-Google Actualités du 05/03/2010 :
Dix jours après son retour surprise au Nigeria après son hospitalisation à l'étranger, le président Umaru Yar'Adua n'a toujours pas été vu en public et les interrogations sur la direction du pays, assurée par son vice-président, sont toujours aussi vives.
Le pays est devenu "une sorte de no man's land", résume l'analyste politique Chidi Odinkalu, exprimant les interrogations relayées quotidiennement par la presse: qui gouverne ? quel est l'état de santé réel du président, en fonction depuis avril 2007 ?
Hospitalisé trois mois en Arabie saoudite pour une grave affection du coeur, M. Yar'Adua, 58 ans, est rentré par surprise au Nigeria dans la nuit du 23 au 24 février. Mais il est resté invisible, et aucun responsable politique ne l'a officiellement rencontré depuis.
Le 10 février, le vice-président Goodluck Jonathan est devenu président par interim, à la demande du Parlement qui craignait que l'absence prolongée du chef de l'État ne plonge dans le chaos le Nigeria, pays le plus peuplé d'Afrique et 8e exportateur mondial de pétrole. Mais cette situation, déjà contestée par des juristes et certains membres du gouvernement, est rendue encore plus incertaine par le retour au Nigeria de M. Yar'Adua.
Sa présence "est comme une épée de Damoclès au-dessus de la tête" de M. Jonathan et pourrait préluder à un "désastre", a estimé mercredi Lai Mohammed, le porte-parole du principal parti d'opposition Action Congress (AC).
Lire aussi :
• L'ombre de Yar'Adua plane sur le pouvoir de Goodluck Jonathan, AFP-Jeune Afrique du 05/03/2010.
• Deux clans, deux Présidents à la tête du Nigeria, Le Monde - Le Quotidien du 05/03/2010.
[5] Lire aussi :
• Quand une péninsule pétrolière change de mains, Le Monde diplomatique, Octobre 2008.
• Régions pétrolifères en Afrique, Wikipédia.

9 mars 2010

Ce que soulève la jupe


Christine BARD, Ce que soulève la jupe - Identités, transgressions, résistances, Autrement, 2010 [Du grain à moudre - L'Express - Le Temps - Radios Chrétiennes Francophones].
Une brève histoire de la jupe depuis les années 1960 par une historienne féministe. Du tailleur à la jupe punk, de la minijupe au kilt, séduire, provoquer ou se cacher, Christine Bard réfléchit à cet attribut controversé de la féminité, et à la revendication d'une nouvelle liberté pour les hommes. Alors que la jupe a longtemps été subie et vécue comme l'attribut d'une féminité imposée (puisque le pantalon était interdit aux femmes), elle a été reconquise, par les femmes, mais aussi par les hommes, homos ou hétérosexuels.

Nouvel étendard de féminité pour les uns, instrument de libération pour d'autres. Les positions de Ni Putes ni soumises, l'initiative du Printemps de la jupe et du respect, le film, La journée de la jupe, avec Isabelle Adjani, tous ces éléments révèlent des ambivalences radicales : la jupe est-elle forcément le signe de la soumission à l'ordre masculin ? Peut-elle aussi être un attribut de féminité reconquise ? Pour résister à la stigmatisation et au sexisme, pourquoi certaines filles choisissent-elles la jupe, quand d'autres préfèrent le pantalon, et d'autres encore le voile ? Et que dire de la jupe pour hommes, telle que la propose par exemple Jean-Paul Gautier ? Provocation pure et simple, ou désir d'égalité entre les sexes ? A l'évidence, la jupe et les questions vestimentaires sont au cœur des débats sur les identités de genre, pour une nouvelle génération : les enfants et petits-enfants de 68, garçons et filles, hétéro, homo ou transgenres.


Radios Chrétiennes Francophones
Dans les années 1970, les féministes jetèrent aux orties jupe et soutien-gorge symboles de la domination masculine. Pour être jeune, moderne, affranchie, libre dans son corps et l'égale de l'homme, il fallait porter le pantalon.

Dans les années 2000, les féministes défendent jupe et string, symboles de leur combat contre l'obscurantisme des hommes. La jupe est devenue un manifeste «anti-burqa».

Je suis très fière d'être en jupe devant vous ce soir. Fière car cette jupe est un manifeste qui, plus que jamais, doit être porté. Cette jupe, c'est celle que portent des milliers de jeunes filles et de femmes pour affirmer qu'elles refusent que l'on confonde l'islam avec l'aliénation et l'assujettissement des femmes.
Une jupe, ce n'est qu'un bout de tissu, mais qu'elle soit courte ou longue, son symbole peut nous aider à gagner une bataille contre l'obscurantisme. Et même contre ce qu'il faut bien appeler la haine des femmes. Alors, cette jupe, c'est justement l'anti-niqab, l'anti-burqa.
09/02/2010, Message d'Isabelle Adjani au jury des Globes de Cristal à propos de son rôle dans La journée de la jupe.
Aujourd'hui comme hier, les féministes rendent les hommes responsables de tout, y compris de leurs retournements idéologiques. Les féministes prétendent toujours parler au nom de toutes femmes sans donner la parole à celles qui dérangent comme l'Afghane Malalaï Joya.

Brice Couturier, porte-parole des "idiots utiles du racisme", a présenté en ces termes le livre de Christine BARD :
Le sait-on assez en ces temps où l'espace public est saturé de «niqab» et de «burqa» ? Le mot «jupe» vient du mot arabe «djoubba» qui désigne une sorte de robe que le prophète aurait portée, quelque chose comme la «veste du dessous».
Ironie des étymologies car aujourd'hui la jupe et le «niqab» non seulement ont oublié leur origines communes mais se croisent sans se fréquenter. Il serait facile de dépeindre le champ du féminisme français en ce début de 20ème siècle comme une bataille rangée entre les tenants du droit à porter la jupe et ceux du droit à porter le voile.
Ironie de l'histoire maintenant, la jupe a longtemps été décriée pour être un indice de soumission au désir masculin.
Aussi le renversement actuel est-il bien étonnant : le retour d'un certain sexisme dans les cours de récré comme en bas des immeubles enjoint parfois les jeunes femmes à se couvrir les jambes. Pour ne pas prêter le flanc aux moqueries ou aux affronts, mieux vaut éviter les signes de féminité qui vous désigneraient comme une «fille facile».
Du grain à moudre
L'organisation Lutte Ouvrière, qui n'a toujours pas fait le bilan de la faillite du trotskysme, soutient activement le projet de loi contre la burqa en reprenant à son compte les arguments sécuritaires du gouvernement et les arguments féministes de Ni Putes ni soumises [1].

Alors que se construit jour après jour un racisme post-colonial politiquement correct, il est urgent d'écouter d'autres voix :
Les droits des femmes, chèrement conquis par des vagues successives de féminisme, sont en danger ; et l'on voit soudain politiques, intellectuels et associations laïques brandir un drapeau féministe qui n'avait pas semblé, jusque là, figurer au centre de leurs préoccupations [2]. Même l'extrême droite découvre soudain que l'égalité entre les sexes est une des «valeurs fondamentales» de nos sociétés. Celle-ci sert alors trop souvent de prétexte pour stigmatiser des populations étrangères et défavorisées décidément incapables de «s'intégrer».

[...] pour ces nouveaux croisés, la menace ne saurait venir que de l'extérieur, de ces «autres» qui refusent à leurs femmes les libertés obtenues par les femmes occidentales.

Et encore, il ne s'agit pas de n'importe quels «autres» : on ne parle nullement de protéger les droits des nettoyeuses surexploitées, ni des aides-soignantes venues d'Europe de l'Est, d'Afrique ou d'Asie pour s'occuper de nos malades, de nos personnes âgées, à des conditions dont ne veulent plus les femmes belges ; ni même, tant qu'à parler de pressions religieuses, des femmes juives orthodoxes ou des chrétiennes chaldéennes qui peuvent continuer à se faire opprimer dans leurs familles, leur communauté, du moment qu'elles ne nous interpellent pas dans l'espace commun. Non, le danger vient de ces jeunes filles qui prétendent réussir à l'école, faire des études supérieures, travailler et partager notre espace commun – mais avec un foulard sur la tête, devenu soudain le signe de toutes les oppressions [3].

[...] certaines de ces autres femmes, venues d'ailleurs – que ce soit géographiquement ou culturellement – se revendiquent «féministes» tout en contestant une vision purement occidentale et ses prétentions à l'universalisme.

Dans nos pays développés, la vague féministe des années 1970 a été principalement portée par des femmes blanches, de classes moyennes et supérieures. Le mouvement des femmes s'est construit à partir de leur vécu, de leurs besoins et de leurs revendications. Mais voilà que depuis une dizaine d'années, l'hégémonie du mouvement féministe dominant se voit contestée par des groupes de femmes d'origine étrangère qui critiquent ce modèle d'émancipation dominant et contestent les définitions du bon combat et de la bonne stratégie féministes. Plus interpellant encore, elles dénoncent les rapports de domination à l'intérieur même du mouvement féministe et reprochent au mouvement occidental sa prétention à parler au nom de toutes les femmes – tout comme, il y a quarante ans, les féministes reprochaient aux hommes leur prétention à parler au nom de toute l'humanité.

Féminisme et multiculturalité - Entre malaise et défis, Politique n°63, Février 2010.
08/03/2010
Serge LEFORT
Citoyen du Monde

Lire aussi :
Dossier documentaire & Bibliographie Masculin-Féminin, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Vêtement, Monde en Question.

[1] La mission parlementaire sur le port du voile intégral a rendu son rapport, qui préconise le vote d'une résolution condamnant le port de la burqa ainsi qu'une loi interdisant de «dissimuler son visage» dans les services publics (administrations, hôpitaux, sorties d'écoles, transports...). Et de fait, cela ne semble pas une mesure extraordinaire que de demander à quelqu'un d'entrer dans des services publics à visage découvert. Même les banques obligent leurs clients à le faire !
Lutte Ouvrière n°2165 du 30 janvier 2010.
[2] On ne les voit guère, par exemple, dans la mobilisation de la Marche mondiale des femmes qui connaîtra sa troisième édition en mars 2010, sur le thème de la pauvreté et des violences.
[3] C'est précisément parce que ce sont les femmes de culture musulmane qui posent le plus de questions au féminisme européen (tandis que le féminisme américain est davantage interpellé par les «black feminists») que nous leur avons donné une place privilégiée dans ce dossier.

8 mars 2010

Les idiots utiles du racisme II - Caroline Fourest


En novembre 2003, Caroline Fourest a publié dans Libération un article qu'elle reproduit sur son site Prochoix. Elle résume ainsi sa diatribe :
Le mot «islamophobie» a été pensé par les islamistes pour piéger le débat et détourner l'antiracisme au profit de leur lutte contre le blasphème. Il est urgent de ne plus l'employer pour combattre à nouveau le racisme et non la critique laïque de l'islam.
Elle développe ensuite sa version de l'histoire du mot "islamophobie" :
Le mot «islamophobie» a une histoire, qu'il vaut mieux connaître avant de l'utiliser à la légère. Il a pour la première fois été utilisé en 1979, par les mollahs iraniens qui souhaitaient faire passer les femmes qui refusaient de porter le voile pour de "mauvaises musulmanes" en les accusant d'être "islamophobes".
Une fois de plus cette journaliste, chroniqueuse notamment à l'im-Monde et à France Culture, ment sciemment pour rabâcher la thèse du complot de l'islamo-gauchisme qui fait recette chez les "idiots utiles du racisme".

La preuve de cette construction médiatique paranoïaque se trouve dans un article de Dahou Ezzerhouni, publié par Algérie Focus :
Paradoxalement, c'est lors de cette période caractérisée par la colonisation que cette notion d'islamophobie est apparue dans certains écrits pour dénoncer ce sentiment raciste qui guidait les colonisateurs. Le mot serait ainsi apparu pour la première fois dans quelques ouvrages du début du XXème siècle. On peut citer entre autre La politique musulmane dans l'Afrique Occidentale Française d'Alain Quellien publié en 1910, suivi de quelques citations dans la Revue du Monde Musulman en 1912 et 1918, la Revue du Mercure de France en 1912, Haut-Sénégal-Niger de Maurice Delafosse en 1912 et dans le Journal of Theological Studies en 1924. L'année suivante, Etienne Dinet et Slimane Ben Brahim, employaient ce terme qui «conduit à l'aberration» dans leur ouvrage L'Orient vu par l'Occident.
L'auteur est prudent car il utilise le conditionnel pour dater la première apparition de ce mot. Or, une recherche dans BooksGoogle montre que "islamophobie" apparaît bien la première fois en 1910 dans l'ouvrage et la revue cités.
Quoi qu'en disent ceux pour qui l'islamophobie est un principe d'administration indigène, la France n'a rien de plus à craindre des Musulmans en Afrique...
Revue du monde musulman, page 53.
L'islamophobie — Reproches adressés à l'Islam : la guerre sainte. L'islamophobie — Il ya toujours eu, et il ya encore, un préjugé contre l'Islam répandu...
La politique musulmane dans l'Afrique Occidentale Française, page 133.
BooksGoogle
Entre 1800-1925, le mot "islamophobie" apparaît dans cinq livres ou revues, dont deux fois dans le livre de Maurice Delafosse à la page 211 et 212.
Au cours de la même période, le mot "islamophobe" apparaît dans quatre livres ou revues, dont une fois dans l'ouvrage cité de Etienne Dinet et Slimane Ben Brahim à la page 38 :
Nous n'aurons pas la naïveté de discuter sérieusement ces phrases écrites dans un accès de délire islamophobe ; le bon sens du lecteur en fera justice.
En poursuivant la recherche dans BooksGoogle, on constate que le nombre d'occurrences de ces termes a considérablement augmenté depuis 2001 [1] - depuis que les États-Unis ont déclaré la guerre au terrorisme en envahissant l'Afghanistan et l'Irak avec les prétextes fallacieux que l'on sait, mais toujours présentés comme justes par les médias dominants qui ne donnent pas la parole à l'Afghane Malalaï Joya.

Caroline Fourest travaille comme la majorité des journalistes, qui au mieux ignorent les faits dont ils parlent, et au pire les construisent afin de les faire rentrer dans le moule idéologique du moment. En l'occurrence, elle élimine tous les faits qui dérangent ses obsessions catho-laïques. Elle ne se réfère pas à l'histoire, mais se raconte et nous raconte des histoires...

Il convient de rappeler la République, celle de Jules Ferry, de Léon Blum et de Guy Mollet, a refusé d'accorder la citoyenneté aux populations conquises et a appliqué le Code de l'indigénat c'est-à-dire la loi coranique : «L'indigène musulman est français ; néanmoins il continuera à être régi par la loi musulmane». Aboli en 1946, le Code de l'indigénat perdurera en Algérie jusqu'à l'Indépendance en 1962 [2].

C'est bien la République de Jules Ferry, symbole de la laïcité à la française, qui a maintenu les populations colonisées sous le joug de la religion musulmane pour servir les intérêts de l'empire colonial français. En s'appuyant sur la religion musulmane pour éviter la rébellion contre l'occupation coloniale, la République a renforcé le pouvoir de la religion qui est devenue, ironie de l'histoire, un espace de la rébellion.

04/03/2010
Serge LEFORT
Citoyen du Monde

Lire aussi :
• Novembre 2001, GRESH Alain, Islamophobie, Le Monde diplomatique.
• Mars 2004, GRESH Alain, À propos de l'islamophobie, LMSI.
• 04/09/2009, La colonisation des imaginaires - Interview de Pascal Blanchard, Le Monde des Religions.
• 17/09/2009, GRESH Alain, Islamophobie savante, islamophobie politique, Les blogs du Diplo.
• SAÏD Edward, L'orientalisme - L'Orient créé par l'Occident, Seuil, 1980 [Irenees - Mots].
Dossier documentaire & Bibliographie Colonialisme, Monde en Question.

[1] Nombre d'occurrences :
islamophobie
1800-1925 = 5
1925-1945 = 6
1945-1965 = 7
1965-1985 = 15
1985-1995 = 32
1995-2000 = 65
2000-2005 = 547
2005-2010 = 649
islamophobe
1800-1925 = 4
1925-1945 = 2
1945-1965 = 3
1965-1985 = 6
1985-1995 = 14
1995-2000 = 33
2000-2005 = 225
2005-2010 = 380
[2] Références :
• Un code pour les indigènes, LDH-Toulon
• Le code de l'indigénat dans l'Algérie coloniale, LDH-Toulon
• Indigénat, Wikipédia
• MONTAGNE Robert, Comment organiser politiquement l'Empire français, Politique étrangère n°2, 1938.
• LE PAUTREMAT Pascal, La politique musulmane de la France au XXe siècle - De l'Hexagone aux terres d'Islam : Espoirs, réussites, échecs, Maisonneuve & Larose, 2003 [BooksGoogle].
Lire notamment le chapitre "Droit musulman et droits politiques des indigènes".