8 décembre 2008

Inde-États-Unis-Pakistan (4)

Les médias dominants se délectent de lieux communs, construits pour provoquer une peur réflexe : "talibans, islamistes, djihadistes... terrorisme". A partir de la même dépêche d'agence, qui contient des informations souvent contradictoires, ils tissent un récit cohérent, trop cohérent pour être honnête. Mais le plus souvent, ils se contentent de réaliser un un simple copier-coller du contenu accompagné d'un titre et/ou d'une image choc [1].

Un autre lieu commun est l'expression "zones tribales" ("un repaire pour des groupes de talibans et combattants du réseau islamiste Al-Qaïda") pour désigner une région que le Pakistan contrôle mal.


Environ 250 combattants ont attaqué deux dépôts de l'Otan près de Peshawar au Pakistan le 7 décembre 2008
Source : RFI


La dépêche AFP titre "Pakistan : 200 talibans attaquent un terminal d'approvisionnement de l'Otan", puis indique "Les insurgés armés, présentés comme étant des talibans" sans préciser qui présentent "les insurgés armés" "comme étant des talibans". En l'espèce, il s'agit de combattants contre l'occupation de l'Afghanistan par des troupes de l'OTAN sous commandement américain.

On apprend par la même occasion combien les troupes de l'OTAN sont dépendantes de l'armée pakistanaise pour assurer la sécurité des convois qui transitent par son territoire vers l'Afghanistan. Nul doute que cela a un coût politique qui fait l'objet des tractations en cours entre l'amiral Michael Mullen, chef d'état-major interarmées américain, et les dirigeants de l'Inde et du Pakistan [2].


Des activistes du parti nationaliste Akali Dal criant des slogans anti-pakistanais à New Delhi le 7 décembre 2008
Source : AFP


Non seulement le parti religieux Akali Dal, mais aussi le parti nationaliste BJP allié au parti d'extrême-doite Shiv Sena et le gouvernement lui-même attisent la haine contre les Pakistanais et contre les musulmans. De plus, Barack Obama a reconnu "le droit d'un pays attaqué à se défendre" [3]. Ces pressions sur les autorités pakistanaises font parti du "grand jeu" des États-Unis pour gagner la guerre en Afghanistan au risque de déstabiliser cette région [4].


[1] Exemple :
AFP - Yahoo! Actualités.
20 minutes.
Le Monde.

Il est facile de réaliser ce travail comparatif grâce à un agrégateur de flux RSS. A défaut, on peut comparer les dépêches d'agences de presse (AP, Reuters, AFP) publiées par Yahoo! Actualités et les articles publiés par les médias dominants via Alvinet Actualité.
[2] Un blog de Libération met en perspective cet événement :
75% du ravitaillement des 70.000 militaires occidentaux présents en Afghanistan passent par le Pakistan. Les containers et le matériel militaire débarquent à Karachi puis prennent la route vers le nord. Il n'existe que deux axes : au sud via la ville de Quetta vers Kandahar - une zone très dangereuse. Vers le nord, via Peshawar puis le col de Khyber (35 kilomètres de route de montagne, qu'il ne faut traverser que de jour et sous bonne garde). Avant cette dernière étape, les camions de ravitaillement, la plupart du temps affretés par des compagnies privées - s'arrête dans la base logistique Al-Faisal.

Cette attaque témoigne de la volonté des insurgés (talibans, djihadistes ou islamistes) de s'en prendre à la logistique de l'opération militaire occidentale. En terme militaire, il s'agit d'une très bonne stratégie (couper le ravitaillement) contre laquelle la coalition risque fort de se trouver désarmée puisqu'elle ne peut pas intervenir sur le territoire pakistanais.

Si la route du Pakistan devient de plus en plus dangereuse, quelles seraient les autres solutions : l'Iran est évidemment impossible. Outre la voie aérienne, horriblement couteuse, reste celle du nord, par les ex-républiques soviétiques. Donc au final, avec l'accord de la Russie - qu'il faudra alors ménager.

Afghanistan : les insurgés s'en prennent aux convois de ravitaillement au Pakistan, Secret Défense.

[3] AFP - Yahoo! Actualités.
[4] Les troupes de l'OTAN sous commandement américain font la guerre en Afghanistan sous le couvert du FIAS - Force internationale d’assistance à la sécurité, qui légitime les crimes de guerre contre la population civile en parlant de simples "bavures" ou "dégâts collatéraux".

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