19 février 2011

Morts aux frontières de l'Europe


Plus de 14 000 réfugiés sont "morts aux frontières" de l'Europe depuis 1988.
La majeure partie, plus de 11 000, sont morts avant même d'entrer sur le territoire européen, dont 4 696 en Afrique. Près de 10 000 sont morts noyés, dans la Méditerranée, lors du naufrage de leurs bateaux, mis à l'eau par leurs passeurs, en pleine mer ou à l'approche de la côte, ou fuyant les policiers qui cherchaient à les interpeller.

Lire la suite... OWNI

Lire aussi :
Dossier documentaire & Bibliographie Immigration, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Racisme, Monde en Question.

18 février 2011

Pôle emploi ou l'enfer de la collaboration

François Chérèque, secrétaire général de la CFDT et Martial Garcia, secrétaire général de la fédération Protection sociale, travail, emploi de la CFDT ont publié "La situation est grave à Pôle emploi" dans Le Monde du 16/02/2011.

Il faut en effet que la situation soit grave pour que le syndicat-collabo, qui gère cette usine à gaz, tire aujourd'hui la sonnette d'alarme :
De mois en mois, l'insatisfaction grandit des deux côtés du guichet. Chômeurs et agents s'empêtrent, malgré eux, dans une situation de frustration et de mal-être très importante, porteuse de risques considérables de conflit. Les décisions budgétaires de l'État aboutissent à l'absurdité suivante : d'un côté on a plus de chômeurs, plus de chômeurs de longue durée, donc plus de besoins d'aide ; de l'autre, moins de personnel, plus de travail d'accompagnement et une réduction des partenariats avec des opérateurs extérieurs.
Pourtant, même après la démission du médiateur, la CFDT n'avait pas remis en cause la fusion entre l'ANPE et les ASSEDIC [1]. La CFDT n'est pas seule en cause dans cette affaire puisque cinq syndicats (CGT, CFDT, CGT-FO, CFTC et CFE-CGC) siègent au conseil d'administration de Pôle emploi en compagnie de cinq représentants de l'État et cinq du patronat, de deux personnalités qualifiées désignées par le ministre chargé de l'emploi [sur quels critères ?] et d'un représentant des collectivités locales [2].
En clair, les syndicats collaborent de la main droite avec les représentants de l'État et du patronat à ce qu'ils dénoncent de la main gauche.
Le budget 2011 de Pôle emploi marque une forme de désengagement de l'État. Ce budget n'en a pas moins « été voté dans la douleur », comme l'a résumé Marie-Françoise Leflon, de la CFE-CGC. La crise n'a été évitée que grâce à l'abstention de la CFDT et de Force ouvrière. Cela a permis à l'administration et au patronat d'obtenir la majorité nécessaire des deux tiers.
Les Echos
Pôle emploi fonctionne de manière opaque. Il est par exemple impossible de trouver la liste des membres du conseil d'administration. Une chose que sait faire Pôle emploi c'est sa propre pub !


16/02/2011
Serge LEFORT
Citoyen du Monde

Lire aussi :
• Gaël GUISELIN & Aude ROSSIGNEUX, Confessions d'une taupe à Pôle Emploi, Calmann-Lévy, 2010 [20 minutes - France Culture - France Info - La Croix - L'Express - Les dessous du social - Metis Europe - RFI - TéléTOC].
Et si Pôle emploi empêchait de retrouver du travail ? Alors que la crise économique a fait exploser le compteur du chômage, rien ne va plus. Agents débordés, déprimés, manque d'information et de formation, culte de la rentabilité et privatisation des missions : la fusion ANPE-Assédic est très difficile.
Le leitmotiv ? Faire du chiffre. Temps réduit pour chaque demandeur d'emploi, radiation pour des broutilles… Globalement, Pôle emploi semble considérer tout demandeur comme un fraudeur en puissance, un suspect permanent. Plus grave, les réformes se succèdent à un rythme tel que les agents n'ont pas le temps de les assimiler. Que dire alors des demandeurs !
Conseiller de Pôle emploi, et ancien chômeur de longue durée, Gaël Guiselin a une chance : il connaît les deux côtés du guichet. Dans ce livre coup de gueule, il fait un état des lieux accablant mais donne également des ficelles pour ne pas se faire broyer par la machine administrative.
• Marion BERGERON, 183 jours dans la barbarie ordinaire - En CDD chez Pôle Emploi, Plon , 2010 [Actu Chômage - France Culture - L'Express - Les dessous du social - Les Inrocks].
Avril 2009, France, banlieue parisienne. Au coeur de la crise qui explose, une jeune femme franchit la porte de Pôle Emploi, fraîchement embauchée par ce nouvel organisme qui se charge de l'indemnisation et du conseil des chômeurs. Plongée dans les entrailles du système, les deux mains dans la boue, elle raconte l'envers du décor. La violence de la misère. L'apprentissage de l'impuissance. Le naufrage d'une administration qui détruit, sans remords, ses usagers et son personnel. Prisonnière de son guichet d'accueil, méprisée et épuisée, elle raconte ce travail qui balaie sa vie privée, emporte ses principes et brûle ses dernières illusions. Ce livre n'est pas une compilation d'anecdotes. Ce n'est pas un ultime état des lieux du marché de l'emploi et de l'Administration française. C'est le récit de six mois de travail précaire. Une réalité crue, bouillonnante de souffrance et de désespoir. Bienvenue en enfer. Bienvenue à Pôle Emploi.
• Organisation et gouvernance de l'Unédic, Unédic.
• La fusion ANPE-Unédic, Centre de documentation Économie-Finances.
• Discours devant les cadres de Pôle Emploi, Présidence de la République, 23/11/2009.
Dossier documentaire & Bibliographie Économie sociale, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Inégalités & Précarité, Monde en Question.

[1] Revue de presse :
• Rapport d'activité du médiateur de Pôle Emploi, La Documentation Française, 2009.
• Démission du médiateur de Pôle emploi, L'Expansion, 15/04/2010.
• Le rapport qui radie : démission du médiateur de Pôle Emploi, Miroir Social, 15/04/2010.
• Démission du médiateur de Pôle Emploi, Sénat, 19/08/2010.
Lire aussi : Rapport accablant sur la situation sociale à Pôle Emploi, L'Expansion, 05/01/2010.
[2] Source : Code du travail, Legifrance.

Coïncidence


À partir du 1er mars 2011, Nicolas Demorand prendra ses fonctions de directeur de la rédaction et co-président du directoire de Libération.
Libé est une marque, Edouard. Et l'important, c'est de donner envie aux gens de consommer cette marque. On va les matraquer avec Demorand. Depuis qu'il a quitté France Inter, il ne peut plus faire un pas, lever le doigt, sans créer le buzz. Il sera dans tous les talk-shows du câble, sur les parkings des hypermarchés, à l'arrière des bus, partout. Demorand est notre homme.
La vraie histoire du recrutement de Demorand, Libération
Un média-perroquet de moins en ligne n'est pas une mauvaise nouvelle. À quoi sert de lire un journal comme Libération alors qu'il pratique le copier-coller des dépêches d'agences ? Au lecteur d'en juger en comparant l'article de Libération au texte de la dépêche AFP.

Lire aussi :
• Nicolas Demorand élu directeur de la rédaction de Libération, Libération.
• Nicolas Demorand, Acrimed.
Dossier documentaire & Bibliographie Agences de presse, Monde en Question.

16 février 2011

Il n'y aura pas d'État Palestinien


Le titre de ce livre peut paraître pessimiste pour toux ceux continuent à militer pour la création d'un État palestinien alors que dans les faits ce processus est dans l'impasse depuis bientôt vingt ans. Après Edward Saïd, Ziyad Clot conclut que l'occupation durant soixante-quatre ans a créé dans les faits un État binational, mais ni le gouvernement d'Israël ni les dirigeants palestiniens en Cisjordanie (Autorité palestinienne) et à Gaza (Hamas), qui collaborent avec l'occupant, n'ont intérêt à le reconnaître pour des raisons différentes mais convergentes.
Il n'y aura pas d'État palestinien, selon l'auteur, parce qu'il n'y a plus de bases géographiques garantissant sa viabilité. Les frontières de 1967, qui privaient déjà le peuple palestinien de la Galilée, d'une grande partie de la bande de Gaza et de territoires rattachés avant cette guerre à la Cisjordanie, ne constituent déjà qu'un minimum à peine vital. Le morcellement continu des terres arabes de Cisjordanie, sous l'effet de la colonisation, de l'occupation par l'armée israélienne d'une bande de terre le long de la frontière jordanienne et d'un mur qui coupe en deux les propriétés agricoles, s'ajoute aux conditions de circulation difficiles du fait des check points.

Il n'y aura pas d'État palestinien, d'après Ziyad Clot, parce que l'actuelle autorité palestinienne n'a ni le pouvoir ni même plus l'autorité morale pour mener à bien les négociations qui pourraient aboutir à sa création. Face à un État israélien militairement surpuissant, soutenu sans faille et sans aucune objectivité par les États-Unis et maîtrisant nombre de canaux d'information internationaux, même si cette situation change rapidement, la Sulta ne fait que gérer l'urgence, au plan des symboles le plus souvent.

Il n'y aura pas d'État palestinien enfin, toujours d'après l'auteur, parce que rares sont les parties qui y ont vraiment intérêt. Jamais Israël et les États-Unis n'accepteront de donner des prérogatives de souveraineté, qui incluent notamment la politique étrangère et la constitution d'une armée, sans que cela ne soit pris par son opinion comme une épée de Damoclès. Cette autorité palestinienne permet juste à l'État hébreu de ne pas intégrer en son sein les millions de Palestiniens tout en empêchant l'émergence d'une autre puissance hostile. Les États arabes environnants, qui tant de fois ont instrumentalisé la cause palestinienne, n'ont aucun intérêt à voir émerger un tel État sur lequel aucun d'entre eux ne pourra avoir la maîtrise totale. On se demande même, à lire la longue série des renoncements de la Sulta, si cette dernière a intérêt à voir émerger cet État qui, démocratique, pourrait faire payer très cher à l'OLP et au Fatah leur corruption et leur éloignement.

Ce sombre tableau ne serait pas complet sans parler d'un acteur du quartet dont les silences sont assourdissants, à savoir l'Union européenne. Cette dernière est la principale pourvoyeuse de fonds de la Sulta mais jamais l'expression de "machin", employée par le général de Gaulle pour la caractériser, n'aura été si porteuse de vérité. Son rôle dans le processus d'Annapolis, à lire l'auteur, se résume à celui d'un ectoplasme sans mains et sans voix, voire d'une sorte d'idiot utile des États-Unis et d'Israël. L'Union européenne condamne sans conséquences la colonisation, la destruction de maisons palestiniennes au mépris des droits les plus élémentaires, ce qui valut aussi pour l'opération Plomb durci. Son indignation à dimension variable suit souvent de près celle des États-Unis ; l'attitude de la France est à peine détachée de cet
ensemble.

Esprit Critique
L'intérêt du témoignage de Ziyad Clot est résumé par Alain Gresh :
Franco-Palestinien ne parlant pas l'arabe, il est recruté par le département de négociations de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP). Il doit participer au processus de paix lancé par le président George W. Bush à Annapolis en novembre 2007, censé déboucher sur la création d'un État palestinien en 2008. Il se lance à corps perdu dans le travail pour y découvrir, étape par étape, que ces pourparlers ne font que masquer ce qui se passe sur le terrain : colonisation, judaïsation de Jérusalem, checkpoints, arrestations arbitraires, etc.
Les révoltes populaires, qui ont chassé du pouvoir Zine Ben Ali en Tunisie et Hosni Moubarak en Egypte, risquent de déborder en Palestine où la population vit dans la précarité sous la botte de l'occupant israélien et les collabos de l'Autorité palestinienne en Cisjordanie et du Hamas à Gaza [1].

12/02/2011
Serge LEFORT
Citoyen du Monde

Ziyad CLOT, Il n'y aura pas d'État Palestinien - Journal d'un négociateur en Palestine, Max Milo, 2010 [Esprit Critique n°100 p.12 à 14 - EuroPalestine - Info-Palestine - Le Monde diplomatique].
"J'ai acheté un billet d'avion El Al. Destination aéroport Ben Gourion. Tel-Aviv. Israël. Il y a 60 ans, ma mère est née à quelques dizaines de kilomètres de là. À Haïfa, en Palestine."

Ainsi débute le récit du "retour" de Ziyad Clot, petit-fils d'exilés palestiniens. À Ramallah, il accepte un poste de conseiller juridique auprès de l'Organisation de Libération de la Palestine (OLP) et devient négociateur, participant aux pourparlers qui devaient mener à la création de l'État palestinien avant la fin de l'année 2008. Mais il se résout rapidement à l'évidence : "Le processus de paix est un spectacle, une farce, qui se joue au détriment de la réconciliation palestinienne, au prix du sang versé à Gaza. Et je suis en train de devenir bien malgré moi un des acteurs de ce drame."

L'auteur nous plonge au cœur du processus de paix, dévoile les faux-semblants, les manœuvres des parties menées en coulisses et les rivalités internes et internationales qui contribuent à alimenter le fantasme de la solution des deux États. Ce témoignage édifiant, imprégné d'histoire personnelle, montre comment et pourquoi les négociations visant à créer l'État palestinien sont devenues vaines. Pour l'ex-négociateur, une solution pacifique à ce conflit ne peut plus passer que par un État unique au sein duquel Palestiniens et Israéliens devront vivre ensemble. Ce pays hybride, "Israeltine", est d'ailleurs déjà là.
Lire aussi :
• Entretien avec Ziyad Clot : Les Palestiniens n'avaient aucun intérêt à négocier avec Israël, Jeune Afrique, 10/02/2009.
• Entretien avec Ziyad Clot : "Proche Orient : peut-on rêver d'un État palestinien ?", Public Sénat, 16/09/2010.
• Les négociations israélo-palestiniennes, RFI 1/2 - 2/2, 18/09/2010.
• Entretien avec Ziyad Clot : "Point sur les négociations israélo-palestiniennes", Les matins France Culture, 22/09/2010.
• Entretien avec Ziyad Clot : "Il n'y aura pas d'État Palestinien", RFI, 25/09/2010.
• Entretien avec Ziyad Clot : "Les négociations israélo-palestiniennes sont une farce", Jeune Afrique, 27/09/2010.
• Entretien avec Ziyad Clot, ancien membre de l'équipe de négociateurs de l'OLP, France24, 27/09/2010.
• Entretien avec Ziyad Clot : "Il n'y aura pas d'État palestinien", Oumma - Palestine - Solidarité, 10/11/2010.
• Entretien avec Ziyad Clot : "Un État palestinien est-il encore possible ?", Radio Orient, 27/11/2010.
Dossier documentaire & Bibliographie Palestine/Israël - Un seul État, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Résistance à la colonisation de la Palestine, Monde en Question.

[1] Le Hamas et l'OLP répriment toute action de solidarité avec l'Egypte, WSWS, 10/02/2011.

15 février 2011

1848-2011 : les révoltes de la faim


La pénurie alimentaire se fit sentir dès le printemps. En chaque pays le prix du blé enfla : en France, l'hectolitre qui valait 17,15 francs monta à 39,75 francs et même à 43 francs à la fin de l'année... La crise des subsistances se traduisit aussitôt par des désordres populaires..." Ainsi l'historien Charles Pouthas décrivait-il la situation agricole européenne entre 1847 et 1848. Quelques semaines plus tard, toute l'Europe s'embrasait et l'ordre absolutiste mis en place au lendemain du Congrès de Vienne s'effondrait. Parti d'Italie, le vent de révolte gagnait la France puis Vienne, tout l'Empire austro-hongrois et bientôt les Etats allemands et même la Suisse. Entre février et mai 1848, la monarchie française s'écroule avec l'abdication de Louis-Philippe, Metternich quitte le pouvoir à Vienne, l'Allemagne se dote à Francfort d'un premier Parlement...

Toutes choses égales par ailleurs, ce printemps des peuples se rapproche de l'"hiver arabe" que nous vivons aujourd'hui, avec la même propagation révolutionnaire de Tunisie en Egypte, au Yémen, en Jordanie... Certes, il n'y avait en 1848 ni Internet ni Facebook, mais l'information circulait déjà très vite : la nouvelle de la chute de Louis-Philippe fait tomber Metternich tout comme celle de Ben Ali ébranle Moubarak. Mais, dans les deux cas, le rôle joué par les crises agricoles et la hausse des prix alimentaires est frappant.

L'Europe continentale était en 1848 loin de toute autosuffisance agricole. Pour nourrir les villes, il fallait importer le grain d'Amérique et de Russie, et la seule arme dont disposaient les gouvernements était celle des droits de douane, qui renchérissaient encore les prix à la consommation. La première étincelle qui embrasa l'Europe à la fin de 1847 fut bien d'origine agricole.

La situation du monde arabe en 2011 est à peu près comparable. Du Maroc au golfe Arabo-Persique, il s'agit de l'une des principales régions importatrices de la planète, qu'il s'agisse de céréales (10 millions de tonnes de blé pour l'Egypte, 5 millions pour l'Algérie et l'Iran, 3 pour le Maroc et l'Irak ; 7 millions de tonnes d'orge pour l'Arabie saoudite, etc.), de sucre, d'huiles, de volailles ou de viande bovine. La plupart de ces Etats, à l'exception du Maroc, y ont abdiqué toute forme de politique agricole et dépendent des importations pour l'approvisionnement de leurs villes. Avec un peu de pétrole, on peut certes acheter du blé, de l'huile ou du sucre. Mais, mal anticipée, la hausse des prix agricoles mondiaux du second semestre 2010 s'est traduite par des tensions au niveau des consommateurs. Il n'y eut pas vraiment d'"émeutes de la faim", mais des manifestations contre la vie chère.

Comme en 1848, le mécontentement social et politique a fait le reste. Bien sûr, la situation diffère selon qu'un pays peut ou non payer ses importations avec la manne pétrolière : les deux maillons les plus faibles - Tunisie et Egypte - n'ont pas de pétrole alors qu'à Alger, Tripoli, Ryad ou dans le Golfe, les gouvernements font tout pour maintenir aux plèbes urbaines leur pain quotidien. C'est là une manière aveugle d'acheter l'avenir, mais c'est ainsi qu'ont toujours procédé les monarques vieillissants.

En 1848, le tsar sauva l'Empire autrichien, la Prusse s'imposait en Allemagne et Louis-Napoléon perçait déjà sous la République. Souhaitons à cet "hiver arabe" de mieux se terminer, mais retenons une fois encore la leçon agricole qui frappe le monde 160 ans plus tard.

Philippe Chalmin, Université Paris-Dauphine
Le Monde Economie du 14/02/2011

Lire aussi :
Serge LEFORT, Émeutes de la faim, Monde en Question, 14/02/2011.
Revue de presse Pauvreté 2008, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Pauvreté, Monde en Question.

14 février 2011

Contestation sociale en Egypte


Des milliers de fonctionnaires égyptiens se sont mis en grève et ont manifesté lundi au Caire et dans d'autres villes du pays pour réclamer de meilleurs salaires et conditions de travail, dans la foulée du soulèvement qui a poussé au départ le président Hosni Moubarak. L'armée désormais au pouvoir a rapidement réagi, appelant les contestataires à cesser le mouvement de grogne.

Des centaines de salariés des transports publics ont défilé près du bâtiment de la radio publique, alors que ceux de l'Organisation gouvernementale de la Jeunesse et des Sports manifestaient sur la désormais célèbre place Tahrir. Sur l'autre rive du Nil, dans la capitale, des centaines de conducteurs d'ambulance se sont également rassemblés avec des revendications similaires.

La Banque centrale d'Egypte, de son côté, a décidé de fermer ses bureaux dans tout le pays en raison de la grève des employés de la Banque nationale et de plusieurs autres institutions bancaires du pays. Un mouvement de grève affecte aussi la compagnie aérienne nationale EgyptAir, qui a programmé seulement 31 vols internationaux et 12 dessertes intérieures ce lundi, contre au total 145 liaisons quotidiennes. L'agence officielle Mena a fait état de manifestations dans d'autres villes, dont Assouan (sud) et Alexandrie (nord).

Pour la deuxième journée consécutive, par ailleurs, plusieurs centaines de policiers ont manifesté lundi devant le ministère de l'Intérieur, pour réclamer de meilleurs salaires mais aussi plaider leur cause. Nombre de ces policiers affirment ne pas être responsables de la répression qui a coûté la vie à de nombreux manifestants fin janvier. "C'est dur pour nous de retourner au travail, parce que les gens nous détestent", expliquait un capitaine. La police est honnie en Egypte, pour sa brutalité et sa corruption durant les années Moubarak.

Aux commandes du pays depuis la démission du président Moubarak, l'armée a rapidement fait comprendre qu'elle ne tolérerait pas que le mouvement de grogne prenne de l'ampleur. Dans un communiqué lu à la télévision nationale, un porte-parole du Conseil suprême des forces armées en a appelé à la responsabilité de chacun pour qu'en cette "période cruciale" de l'Egypte, un climat apaisé puisse permettre la transition promise par les militaires vers un gouvernement civil élu.

La poursuite des grèves et manifestations, avertit l'armée, mettrait en péril l'économie du pays et permettrait à des "éléments irresponsables" de perpétrer des "actes illégaux". Le communiqué ne fournit pas d'autres détails.

AP-Yahoo! Actualités

Émeutes de la faim


Alors que c'est au cri de Pain, liberté et dignité ! que les Égyptiens sont descendus dans la rue, les commentaires des médias occidentaux prétendent que les Égyptiens réclameraient avant tout la démocratie - catéchisme du néocolonialisme - comme si la démocratie pouvait résoudre les problèmes sociaux. Partout dans le monde, les gouvernements dits démocratiques s'inclinent devant les exigences du marché c'est-à-dire la soif de profits des actionnaires au prix d'un accroissement de la pauvreté, de la précarité et de l'exclusion. Depuis 2008, la crise a plongé dans la pauvreté des millions de salariés et a accentué les écarts entre riches et pauvres dans les pays occidentaux.

08/02/2011
Serge LEFORT
Citoyen du Monde

Sélection bibliographique :
• Trois morts dans les émeutes de la faim en Algérie, L'Humanité, 08/01/2011.
• Haïti : les émeutes de la faim, FRANCE 24, 13/01/2011.
• Émeutes de la faim : et si ce n'était que le début ?, CapAcadie, 15/01/2011.
• Le libre-échange agricole cause davantage de famine et d'exploitation dans le monde, Horizons et débats n°2, 17/01/2011.
• Prévenir les émeutes de la faim…, L'opinion, 27/01/2011.
• Comment la spéculation financière mène des pays pauvres à la famine, Lutte de classe n°133, Février 2011.
• Egypte : les émeutes de la faim, Agence Science-Presse, 02/02/2011.
• Des «risques d'émeutes» de la faim, L'essentiel Online, 04/02/2011.
• Les émeutes de la faim guettent les pays dépendants, El Watan, 06/02/2011.
• La grande crise alimentaire de 2011, Slate, 07/02/2011.
• Risque d'émeutes de la faim, Enviro2B, 07/02/2011.
• Les émeutes de la faim : Gabegie des États du Sud, climat et spéculation des États du Nord, Mondialisation, 08/02/2011.

Lire aussi :
Revue de presse Pauvreté 2008, Monde en Question.
Dossier documentaire & Bibliographie Pauvreté, Monde en Question.

13 février 2011

L'ordre règne au Caire !


L'armée rétablit l'ordre :
• L'armée a commencé dimanche à disperser les manifestants encore rassemblés sur la place Tahrir au Caire, alors que le trafic sur le rond-point, épicentre de la révolution, reprenait lentement pour la première fois depuis plus de deux semaines, ont constaté des correspondants de Reuters.
Reuters-Yahoo! Actualités, 13/02/2011 09h11
• "La tâche principale du gouvernement est de rétablir la sécurité et l'ordre et aussi de lancer le processus économique et de s'occuper de la vie de tous les jours", a encore dit le porte-parole du gouvernement.
Reuters-Yahoo! Actualités, 13/02/2011 14h38
L'armée s'abrite derrière le gouvernement d'Hosni Moubarak :
Le gouvernement égyptien, nommé par l'ancien président Hosni Moubarak quelques jours avant son départ, restera en place jusqu'à la fin de la période de transition, a annoncé dimanche le porte-parole du gouvernement.
Reuters-Yahoo! Actualités, 13/02/2011 16h49
L'armée suspend la Constitution et dissout le Parlement :
L'armée égyptienne a officiellement lancé l'ère post-Moubarak en Egypte, dimanche 13 février, en annonçant la suspension de la Constitution et la dissolution du Parlement, dominé par les membres du Parti national démocrate (PND). Le Conseil suprême des forces armées, au pouvoir depuis la chute de l'ex-président Hosni Moubarak, précise dans un communiqué que la période transitoire pendant laquelle il restera en place durera six mois ou jusqu'aux prochaines élections législatives.
Reuters-Yahoo! Actualités, 13/02/2011 15h20
Lire aussi : Les révolutions ne garantissent pas la démocratie, Reuters-Yahoo! Actualités, 13/02/2011 09h49.

Des mesures sociales pour prévenir une "contagion" des troubles dans le monde arabe

Sur fond de révoltes en Tunisie et en Egypte, plusieurs pays arabes ont pris des mesures pour prévenir des troubles du même type, augmentant les salaires et les subventions sur les produits de base. Mais ces initiatives pourraient se révéler néfastes à terme pour leur économie, selon les experts.

"Les subventions sont nécessaires aujourd'hui pour la survie politique à court terme", souligne Said Hirsh, économiste chez Capital Economics, basé à Londres. Mais elles risquent de détériorer les finances publiques de ces pays dans les mois et années à venir, met-il en garde.

Dans la foulée de la "révolution du jasmin" en Tunisie et de la révolte en Egypte, la Jordanie, le Yémen et la Syrie ont annoncé une série de mesures pour calmer les mécontentements liés à des décennies d'injustices économiques: hausse des subventions sur les produits alimentaires et le fioul, augmentation des salaires ou encore baisse de taxes.

En Egypte et en Tunisie, des annonces similaires n'ont pas suffi à désamorcer la colère populaire, liée en grande partie à d'autres facteurs comme la corruption et un pouvoir autocratique.

Mais l'aspect économique est loin d'être négligeable dans des pays où beaucoup vivent dans la pauvreté. En Jordanie, le gouvernement a annoncé pour 550 millions de dollars (404 millions d'euros) de subventions sur les produits de première nécessité comme le carburant, le riz et le sucre. C'est "un pas dans la bonne direction", juge Leila Rousan, une employée de banque de 28 ans.

La Jordanie est confrontée à un dilemme: mener une politique d'apaisement social au détriment de sa dette publique ou bien continuer comme avant au risque de mécontenter sa population. L'économie jordanienne, qui tire une grande part de ses revenus des investissements étrangers et du tourisme, enregistre un déficit record de 2 milliards de dollars (1,5 milliard d'euros) sur l'année fiscale, une inflation en hausse et un haut niveau de chômage et de pauvreté.

Des manifestations plus modestes qu'en Egypte ont eu lieu dans le pays, et le roi Abdallah II a limogé le gouvernement pour éviter une montée de la contestation. Mais les récents événements ont montré la vulnérabilité économique de la Jordanie. L'agence de notation Moody's a dégradé une série de notes concernant le pays.

"Nous pensons que les troubles actuels vont réduire les perspectives de croissance à moyen terme de la Jordanie et dégrader ses finances publiques", déclare Luc Marchand, analyste chez Standard and Poor's.

Le Yémen, pays le plus pauvre de la péninsule arabique, a décidé d'augmenter jusqu'à 25% les salaires d'un million d'employés civils et militaires pour un coût de 415 millions de dollars (305 millions d'euros). Sanaa a également annoncé la création de 60.000 emplois pour les jeunes diplômés.

De son côté, la Syrie a annoncé un plan de 255 millions de dollars (187 millions d'euros) en faveur des pauvres, précisant que l'aide mensuelle pour le fioul domestique passerait de 20 à 32 dollars (14,70 à 23,50 euros) par mois: la première augmentation du genre depuis 2001.

En Tunisie et en Egypte, des mesures économiques ont également été prises. Les autorités égyptiennes ont par exemple approuvé une hausse de 15% pour les salaires des fonctionnaires et les pensions à compter du 1er avril, mesure dont le coût est estimé à 6,5 milliards de livres égyptiennes (811 millions d'euros) par le ministère des Finances.

Le Caire a également promis de prendre en charge la hausse des cours alimentaires mondiaux. L'inflation des prix alimentaires, qui atteint 17% sur un an en Egypte, est considérée comme un facteur clé des troubles dans le pays.

L'Egypte a vu plusieurs de ses notes dégradées par les trois agences internationales de notation. Mais pour les pauvres dans la région, la priorité est ailleurs. "La seule chose dont je me soucie c'est de nourrir mes enfants", explique Mahmoud Abou-Shilbayeh, 45 ans, éboueur à Amman.

Associated Press