15 mai 2009
Amira Hass "en territoire ennemi"
RAMALLAH, le 12 mai 2009 (WAFA) - Reporters sans frontières a appris l’interpellation de la journaliste Amira Hass, correspondante du quotidien israélien Haaretz, au check point d’Erez, à sa sortie de la bande de Gaza.
« Cette arrestation est inquiétante. Amira Hass a certes enfreint la loi israélienne en résidant dans la bande de Gaza pendant quatre mois, mais l’interdiction faite par l’Etat d’Israël à tout citoyen israélien d’entrer dans le Territoire palestinien occupés constitue une entrave au travail des journalistes de ce pays, et une atteinte à la liberté de la presse », a déclaré l’organisation.
Amira Hass a expliqué à Reporters sans frontières avoir été arrêtée par la police israélienne vers 16 heures, le mardi 12 mai, alors qu’elle sortait de la bande de Gaza, « pour être entrée illégalement en territoire ennemi », contrevenant ainsi à l’ordre militaire selon lequel les ressortissants israéliens ont interdiction d’entrer dans les Territoires palestiniens.
Interrogée pendant trois heures, la journaliste s’est contentée de décliner son identité. Les avocats ainsi que le rédacteur en chef adjoint du journal étaient présents. Elle explique avoir été relâchée à condition de ne pas tenter d’entrer à nouveau dans la bande de Gaza, et ce par quelque moyen que ce soit. La journaliste a confié avec ironie à Reporters sans frontières que « l’interdiction ne vaut maintenant que pour trente jours ».
Amira Hass était entrée, il y a quatre mois, dans la bande de Gaza par le passage de Rafah au sud du territoire palestinien. Envoyée par la direction de son journal, elle a écrit de nombreux articles sur les conséquences de l’opération militaire israélienne « Plomb Durci » (27 décembre 2008 – 18 janvier 2009) sur la population de Gaza.
Publié par WAFA - Reporters sans frontières.
Dernier article publié par Amira Hass, dans lequel la journaliste analyse comment l’occupation est indispensable aux profits de secteurs importants de l’industrie et de la société israéliennes.
Depuis 1993, les gouvernements israéliens qui se sont succédés devaient certainement savoir ce qu’ils faisaient, quand ils ne montraient aucune hâte à faire la paix avec les Palestiniens. En tant que représentants de la société israélienne, ces gouvernements avaient compris que la paix signifierait de nuire sérieusement aux intérêts nationaux.
Dommages économiques :
L’industrie de la sécurité est un secteur important de l’exportation – armes, munitions et perfectionnements techniques, testés au quotidien à Gaza et en Cisjordanie. Le processus d’Oslo – négociations qui n’ont jamais voulu signifier en finir avec l’occupation – ont permis à Israël de se débarrasser de son statut de puissance occupante (qui l’oblige à respecter ses responsabilités à l’égard du peuple qu’il occupe) et lui ont permis de traiter les territoires palestiniens comme des entités indépendantes.
Israël a pu à partir de ce moment utiliser armes et munitions contre les Palestiniens, avec une ampleur qui n’était guère possible depuis 1967.
La protection des colonies requiert également le développement constant d’ équipements de sécurité, de surveillance et de dissuasion, comme les murs, les barrages routiers, la surveillance électronique, les cameras et les robots. C’est le fer de lance de la sécurité du monde développé, et cela sert les banques, les entreprises et les quartiers du luxe, qui jouxtent les bidonvilles et les enclaves ethniques.
Cette créativité israélienne dans la sécurité est fécondée par l’état constant de friction entre la plupart des Israéliens et une population par définition hostile, puisqu’occupée. Une situation de lutte contre un petite ou une forte poussée de violence, a l’avantage de réunir toute une variété de tempéraments israéliens : Rambos, génies de l’informatique, gens doués de leurs mains, inventeurs. Dans un état de paix, leurs chances de se rencontrer auraient été largement réduites.
Dommages professionnels :
Le maintien de l’occupation et d’un état de non-paix, donne par ailleurs du travail à des centaines de milliers d’Israéliens. Quelque 70 000 personnes travaillent dans l’industrie de la sécurité. Chaque année, des dizaines de milliers de gens finissent leur service militaire avec des spécialisations particulières ou une activité gratifiante. Pour des milliers d’entre eux cela devient leur profession principale : militaires de carrière, opérateurs du Shin Beth (Ndt : service de renseignements), consultants à l’étranger, mercenaires, négociants en armes. Dés lors, la paix met en danger la carrière et l’avenir professionnel d’une couche prestigieuse d’Israéliens, une couche qui a une influence majeure sur le gouvernement.
Dommage à la qualité de vie :
Un accord de paix exigerait une répartition égale des ressources en eau à travers tout le pays (de la rivière à la mer) entre Juifs et Palestiniens, sans parler de désalinisation de l’eau de mer et de techniques d’économie d’eau. Déjà maintenant, il est difficile pour les Israéliens de s’habituer à économiser l’eau par temps de sécheresse. Il n’est pas difficile d’imaginer quel traumatisme représenterait une réduction de la consommation d’eau, dans le cadre d’une répartition égalitaire de la distribution d’eau entre Israéliens et Palestiniens.
Dommages à la protection sociale :
Comme l’ont démontré les 30 dernières années, les colonies se sont épanouies au fur et a mesure que la protection sociale diminuait. Elles ont offert aux gens ordinaires ce que leurs salaires ne leur auraient pas permis dans l’Etat d’Israël, à l’intérieur des frontières du 4 juin 1967 : des terres bon marché, de grandes maisons, des bénéfices, des subventions, des espaces grand ouverts, un panorama, un super réseau de routes, et une éducation de qualité. Même pour les juifs israéliens qui ne s’y sont pas installés, les colonies illuminent leur horizon comme une option possible pour s’élever socialement et économiquement. Cette option est plus réelle que la promesse vague de progrès pour temps de paix, une situation inconnue.
La paix réduirait aussi, à moins qu’elle ne le détruise complètement, le prétexte sécuritaire à la discrimination contre les israéliens palestiniens, pour l’attribution des terres, le développement des ressources, l’éducation, la santé, l’emploi, les droits civils (comme le mariage et la citoyenneté). Des gens habitués à des privilèges grâce à un système basé sur la discrimination ethnique, regardent l’abrogation de ce système comme une menace à leur bien-être.
Amira Hass
11 mai 2009
Haaretz
Traduit par Carole SANDREL pour CAPJPO-EuroPalestine
Lire aussi :
• Dossier Amira Hass
• Dossier Résistance à la colonisation de la Palestine
• Bibliographie Palestine/Israël
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