7 février 2009

"La barbarie d'Israël est au-delà de la cruauté"



Modérateur : Je suis David Ignatius, chroniqueur au Washington Post et je vais modérer la discussion de cet après-midi sur Gaza. Notre discussion sur Gaza fait suite à une guerre qui nous a rappelé à tous le poids de l'histoire au Moyen-Orient et nous a aussi rappelé la fragilité du processus de paix. J'espère que ce soir, nous allons mettre un peu plus de substance dans ce processus en discutant où nous allons maintenant, comment remettre ensemble les morceaux. Nous avons un panel extrêmement distingué avec nous ce soir pour discuter de ces questions. Permettez-moi de les présenter brièvement. À ma droite immédiate, le Premier ministre de Turquie, Recep Tayyip Erdoğan. À sa gauche le Président d'Israël, Shimon Peres. À sa gauche le secrétaire général des Nations Unies Ban Ki-moon et à sa gauche le secrétaire général de la Ligue Arabe, Amr Moussa. Je vais demander au secrétaire général Ban Ki-moon des Nations Unies, qui s'est concentré particulièrement sur les aspects humanitaires de la crise de Gaza d'ouvrir al séance de ce soir avec ses remarques pendant cinq minutes. À vous, M. le secrétaire général.

Ban Ki-moon : Merci, Monsieur le modérateur. Excellences, Mesdames et Messieurs; c'est un grand plaisir de participer à ces discussions très importantes sur le processus de paix au Moyen-Orient. Le mot-clé de ce Forum de Davos semble être "crise", une crise multiple, nos avons parlé de crise financière, de crise climatique, de crise alimentaire, mais pour les plus d'un million et demi de Palestiniens de Gaza,  ces crises semblent bien distantes, en comparaison avec la crise quotidienne qu'ils ont à subir, à souffrir, particulièrement après ce conflit militaire de trois semaines, qui continue encore. C'est très triste. Quand j'ai visité Gaza, j'ai vu de mes propres yeux le niveau de destruction, le niveau de difficultés tragiques que ces gens ont à subir du fait de cette crise. Je suis revenu avec une résolution renforcée, qu'en tant que secrétaire général des Nations Unies, je dois faire quelque chose de toute urgence pour aider ces gens à soulager les souffrances de ces questions humanitaires (sic). Ce matin, j'ai lancé un appel urgent se montant à 613 million de dollars pour une assistance humanitaire d'urgence, seulement de secours d'urgence. Nous parlons maintenant de reconstruction à moyen et à long terme. C'est ce dont j'aimerais discuter avec vous. Actuellement, j'ai quatre priorités. Je pense que ce n'est pas moi en tant que secrétaire général, c'est toute la communauté internationale qui doit affronter quatre questions prioritaires, pour aborder le processus de paix du Moyen-Orient de manière globale. Deux questions immédiates et prioritaires : comment rendre le cessez-le-feu durable et soutenable et qu'il soit respecté par toutes les parties concernées. Ce cessez-le-feu unilatéral est très fragile. Comme nous l'avons vu il y a deux jours, un soldat israélien a été tué et un autre au point de passage de Rafah, si bien que le moindre incident peut amener à une rupture du cessez-le-feu. Les efforts de la communauté internationale doivent se concentrer sur la prévention de toute introduction en contrebande d'armes illicites à Gaza et le gouvernement israélien doit ouvrir tous les points de passage pour permettre le passage libre et fluide de l'assistance humanitaire et autres matériaux de reconstruction. Il est très important que ce cessez-le-feu soit durable et soutenable.. Il y a des questions humanitaires urgentes, les écoles et les routes, l'électricité, l'assainissement et les égouts, tout a été détruit. Les gens ont perdu leurs proches, leurs amis et plus de 5000 personnes ont été blesses, et 1300 tués. C'est une tragédie humaine. J'ai visité le complexe des Nations Unies, qui a été bombardé lors d'une attaque des forces israéliennes. C'était très choquant, alarmant et inacceptable. Ce sont donc les deux priorités les plus urgentes que nous avons à affronter. Les deux autres questions ont à voir avec le processus à moyen et à long terme, c'est l'unité des Palestiniens. Avec cette division du peuple palestinien vivant à Gaza et en Cisjordanie, divisé entre Fatah et Hamas, ce sera très difficile pour la communauté internationale d'envisager une reconstruction en douceur, un bien-être en douceur pour le peuple palestinien. C'est très triste et je pense, j'espère que les pays arabes, tous les pays arabes – nous avons actuellement le secrétaire de la Ligue Arabe ici pour faciliter cette unité des Palestiniens d'une manière unie (sic). La quatrième priorité, qui est fondamentale, c'est le processus de paix. Le processus de paix du Moyen-Orient devrait être mis en route sur une base urgente et là nous avons eu…Je suis très encouragé par le nouveau Président des USA, le Président  Obama, qui a déjà pris des mesures décisives en nommant son Envoyé Spécial le Sénateur George Mitchell; qui est déjà en voyage dans la région. Les Israéliens et les Palestiniens ont accomplis des progrès substantiels Durant l'année dernière (sic), ils doivent construire là-dessus, je voudrais donc prier instamment les Nations Unies à continuer à participer et à apporter leur appui à cela. Maintenant, comment assurer tout ce processus de paix, comment le rendre durable ? Le Hamas doit cesser de lancer des fusées, il ne doit pas provoquer les Israéliens, et les Israéliens devraient faire preuve du maximum de modération pour entretenir ce processus de paix, ce processus vraiment fragile. Depuis que la crise a éclaté, j'ai téléphoné et rencontré les leaders de la région et de la communauté internationale, dont les trois distingués leaders qui sont à nos côtés. Cela a été très difficile, mais l'ONU ne peut agir seule. Toute la communauté internationale, en particulier tous les pays arabes et les leaders des principaux pays, en particulier les USA, devraient  prendre un rôle dirigeant et nous devons engager le processus de paix au Moyen-Orient sur une base urgente et immédiate, et je voudrais de nouveau lancer un appel urgent aux donateurs internationaux, à être généreux et positifs dans la fourniture l'assistance fin… humanitaire nécessaire. Merci beaucoup.

Modérateur : Merci, Monsieur le secrétaire général. [Applaudissements]. Permettez-moi de donner la parole au Premier ministre  Erdoğan de Turquie. M. Le Premier ministre,  votre gouvernement a joué un rôle-clé comme intermédiaire dans les négociations directes entre Israël et la Syrie, qui étaient en train d'avancer quand la guerre de Gaza a commencé. Permettez-moi de vous poser la même question qu'au secrétaire général des Nations Unies, et à la quelle je voudrais que tous nos hôtes répondent : que faut-il faire plus particulièrement pour empêcher le processus de paix du Moyen-Orient de faire marche arrière de nouveau ?

Recep Tayyip Erdoğan : (interprétation simultanée du turc) Avant tout, avant de répondre à la question sur ce qu'on a besoin de faire, il me paraît également important d'analyser la situation actuelle, parce que nous avons besoin d'une analyse adéquate afin de définir les mesures nécessaires.
 
Je ne vais pas remonter 40 ans en arrière dans l'analyse, je veux seulement revenir à juin 2008. Si nous partons de cette date, juin 2008, nous verrons qu'il avait été décidé un cessez-le-feu et il n'y avait eu aucun problème avec cette décision qui devait durer six mois ; mais lorsque le délai du cessez-le-feu prit fin, six mois après, il n'y avait eu aucune attaque avec des missiles et Israël devait lever le blocus, les choses devaient changer en Palestine. Cependant, les territoires palestiniens sont comme une prison à l'air libre, car ils sont complètement isolés du reste du monde, c'est un isolement total, un siège, et si quelqu'un essaye d'entrer une caisse de tomates en Palestine par n'importe quel passage frontalier, il est nécessaire d'avoir l'autorisation du côté israélien, d'une autre manière c'est impossible. Je le vois d'un point de vue humanitaire et je veux dire également quelques mots en tant que Premier ministre : il y a un certain temps j'ai visité Israël et ensuite je suis allé en Palestine, et en ma qualité de Premier ministre j'ai attendu en compagnie de mon épouse pendant une demi-heure dans la voiture pour pouvoir entrer dans les territoires palestiniens depuis Ramallah.
 
Jamais un diplomate israélien n'a dû attendre tant de temps à nos frontières. Je crois que nous devons tenir compte de ces aspects de la situation. J'ai aussi demandé à Monsieur Olmert s'il y avait eu des morts à cause des attaques avec des missiles. Il m'avait répondu que non, mais que les attaques étaient un fait, donc des missiles étaient utilisés sans qu'ils ne tuent personne, j'ai alors compris que l'affaire était que ces missiles n'étaient pas de très bonne qualité; d'autre part plus de 24 Palestiniens avaient été assassinés pendant le cessez-le-feu depuis juin dernier, l'électricité avait été coupée, il n'y avait pas de nourriture, les hôpitaux manquaient d'énergie électrique, la situation était difficile et la Turquie avait déjà commencé à envoyer de l'aide humanitaire à la Palestine, c'est-à-dire, il y avait déjà une situation à caractère humanitaire à partir ce moment-là. Je voudrais ajouter que je suis un dirigeant qui a toujours déclaré de manière explicite que l'antisémitisme constitue un crime contre l'humanité. L'islamophobie constitue également un crime contre l'humanité.
 
Pour moi, l'important n'est pas qu'une personne soit chrétienne, juive ou musulmane mais c'est quand elle est soumise à une situation de stress ; pour moi, le dénominateur commun est qu'il s'agit d'êtres humains, et d'après cela l'objectif humanitaire doit primer. Ceci a inspiré mes propres efforts; par exemple, nous essayons d'envoyer de l'aide humanitaire, le Croissant Rouge turc a essayé d'offrir de l'aide, mais cela nous a pris beaucoup de temps, jusqu'à deux semaines, pour obtenir que les camions traversent les passages frontaliers. Je ne sais pas si le président Peres est au courant, mais cela nous a pris beaucoup de temps, nos diplomates ont dû travailler dur pour s'assurer que l'aide arrive jusqu'aux territoires palestiniens. Plus intéressant encore, est le fait que le Premier ministre israélien a été en Turquie, Monsieur Olmert a été en Turquie quatre jours avant le début de la guerre à Gaza. Comme il a déjà été dit, la Turquie a assumé le rôle de médiateur entre Israël et la Syrie pour des échanges indirects ; il y avait déjà eu quatre rencontres, des échanges indirects, et de fait la cinquième rencontre a été réalisée en présence du Premier ministre Olmert et de moi-même, et avec nos envoyés spéciaux à Ankara ; nous sommes restés ensemble pendant cinq ou six heures pour discuter des sujets qui sont de la compétence de la Syrie et d'Israël. J'ai eu une conversation téléphonique avec le président Assad tandis qu'un de mes envoyés spécial s'entretenait avec le ministre des Affaires étrangères Moallem afin de voir s'il était possible de passer à la phase suivante, qui consisterait en des discussions directes entre Israël et la Syrie, donc c'est cela que nous étions en train d'essayer. Notre objectif tout au long du processus a été d'obtenir la paix dans la région et nous avons essayé de réunir des fonctionnaires des deux pays qui jusqu'à aujourd'hui ne se sont pas rencontrés. Nous avions si bien avancé, que nous n'avions des problèmes seulement avec quelques mots, c'est-à-dire, avec des questions de langage. On avait décidé qu'il était nécessaire de laisser passer quelques jours pour pouvoir prendre une décision finale et, pendant ce temps, j'ai parlé avec Monsieur Olmert en présence de mon ministre des Affaires étrangères et de notre envoyé spécial ; le premier ministre Olmert était aussi accompagné de ses conseillers et a dit que nous pourrions travailler ensemble à la libération du soldat israélien capturé et retenu par le Hamas, mais j'ai dit, et j'ai moi aussi posé la demande, j'ai dit que le Parti du changement et de la réforme avait gagné les élections en Palestine. Nous parlons de démocratie, nous aimerions voir que la démocratie fasse des racines ; s'il en est ainsi, nous devons alors respecter, avant tout, ces personnes choisies par le vote du peuple devant lequel elles se sont présentées, peut-être ne sont-elles pas de notre goût, mais nous devons respecter le processus. J'ai dit au Premier ministre Olmert qu'ils retenaient les ministres et les membres du Parlement palestinien ; j'ai suggéré qu'on pourrait faire un geste semblable à celui qui avait été fait en direction du président Abbas, peut-être en libérant ces personnes. Mais le Premier ministre Olmert a affirmé que ceci compliquerait beaucoup les choses pour le président Abbas. Alors j'ai répliqué qu'il serait peut-être possible de libérer quelques femmes et les enfants, que cela pourrait être un geste. M. Olmert m'a dit qu'il parlerait avec ses collègues et qu'il me donnerait une réponse le jour suivant, mais la réponse n'est pas arrivée et presque quatre jours après, le 27 décembre, nous avons vu la guerre à Gaza. Ce qui s'est passé c'est que plus de 1.200 personnes ont été assassinées, parmi elles des femmes et des enfants. Plus de 5.000 ont été blessés à cause d'un usage disproportionné de la force ; si nous voyons les faits dans une perspective humanitaire et nous réfléchissons à la puissance militaire d'Israël, qui comprend des armes de destruction massive, et que nous examinons s'il y a ou pas quelque chose de comparable à Gaza, si les Palestiniens ont ce type de puissance militaire, mais c'est évident qu'il ne l'ont pas. Le Conseil de Sécurité des Nations Unies s'était réuni et avait émis une résolution, mais Israël n'a pas reconnu cette résolution du Conseil de Sécurité des Nations Unies ; comme l'a dit le secrétaire général Ban Ki-moon, le centre des Nations Unies a été aussi bombardé pendant cette guerre. Des écoles et des mosquées ont été bombardées, mais surtout, l'humanité dans son ensemble n'a pas agi avec la rapidité nécessaire pour essayer d'aider la population. Dans le cas de la Géorgie les gens ont agi avec hâte, y compris mon pays, dans cet effort parce que nous avons beaucoup travaillé pour aider la population géorgienne dans ces moments difficiles. Ce que je veux dire c'est que nous ne devons juger personne pour sa race ou sa religion dans une situation de souffrance. Notre objectif, l'objectif de tous, est d'essayer d'aider les personnes qui traversent des difficultés. J'ai visité la Syrie, la Jordanie, l'Arabie Saoudite, l'Égypte et j'ai discuté avec beaucoup de dirigeants, j'ai conversé par téléphone avec des dirigeants européens; malheureusement, ceci a duré trois semaines et a eu une couverture médiatique dès le début. Les chaînes de télévision, par exemple la BBC, avaient prédit que cela durerait environ trois semaines et, en effet, tout le processus ou toute la guerre a duré trois semaines, ce qui a causé la destruction des infrastructures. Et les chiffres que le Secrétaire Général des Nations Unies a mentionné ne suffisent pas pour résoudre le problème : nous avons besoin de beaucoup plus, un milliard ou deux milliards de dollars ne suffiront pas pour reconstruire les structures là-bas, car ce peuple ne dispose d'aucun moyen pour réhabiliter son infrastructure et maintenant ils doivent à nouveau se sacrifier.
 
On parle beaucoup du Hamas, mais le Hamas ne constitue pas toute la population de Gaza ; il y a aussi des civils. Le Hamas est aussi une face distincte du Parti du changement et de la transformation. Le problème est que ses droits démocratiques n'ont pas été reconnus, respectés. Nous sommes maintenant au point dans lequel Israël a annoncé unilatéralement un cessez-le-feu et le jour suivant c'est le Hamas qui a annoncé à son tour un cessez-le-feu de manière unilatérale. Un côté parle d'un processus de cessez-le-feu d'une durée d'un an, l'autre côté propose un an et demi. Une autre question est, évidemment, de mettre fin à l'isolement du peuple palestinien. Sera t-il possible à Israël de le faire, c'est-à-dire, ouvriront-ils les passages frontaliers pour les gens ? Car il n'y a aucune chance qu'ils survivent où qu'ils se trouvent maintenant et dans les conditions dans lesquelles ils sont. Si nous respectons la Déclaration Universelle des Droits Humains et les conventions internationalement acceptées, la première chose est que ces passages frontaliers soient ouverts pour que les gens puissent bénéficier de leurs droits, les droits de la vie. Il y a aussi le sujet des armes qui entrent clandestinement dans la zone. Si une des extrémités du tunnel se trouve en Égypte, alors l'Égypte doit arrêter le flux illicite des armes. Mais si nous considérons la Palestine comme un État, chose qui, me semble, être aussi un sujet en lui-même, ou peut-être une affaire contestable pour certaines personnes, il s'agit du sujet de la division à l'intérieur de la Palestine et de comment régler les différences entre le Fatah et le Hamas. Si nous essayons de fermer cette blessure, nous devons alors prendre en considération toutes les parties. Ceci je l'avais aussi discuté avec Monsieur Olmert, parce que si la seule partie présente du côté palestinien est le Fatah, cette présence ne sera pas suffisante pour la projection des résultats sur tout le peuple palestinien; il est également indispensable de prendre en considération le Hamas, parce que ses membres font partie de cette société, ils ont remporté un processus électoral et, par conséquent, nous devrons les inclure dans l'équation. Si ce sont les Nations Unies qui assument la direction, hé bien qu'il en soit ainsi, et j'espère que les Nations Unies orientent tous leurs efforts en ce sens ou que les USA avec le gouvernement d'Obama puissent assumer un rôle important. J'ai l'espoir et la perspective que le président Obama soit la voix des masses silencieuses et qu'il mette tout son poids,  le poids de son gouvernement dans la quête d'une solution. Il doit le faire en dehors du cadre des accords passés par l'administration précédente précédent, y compris le dernier passé entre la Secrétaire de d'État d'alors Condoleezza Rice et Madame Livni. Nous devons ouvrir une nouvelle possibilité et prendre en considération le Hamas dans le processus. Si on demandait à la Turquie de participer de quelque manière, nous serions également disposés à le faire, mais nous devons être prudents et penser au processus comme un tout quand nous essayons de définir les parties impliquées et, nous devons parvenir définitivement à la paix au Proche-Orient comme un élément important et nécessaire pour la paix mondiale. Si le processus de paix au Proche Orient ne conduit pas à un résultat positif, il n'y aura pas de paix dans le monde. Je pense alors que ce Parti de la réforme et du changement doit être présent dans le gouvernement d'Unité Nationale qui devra être établi en Palestine, et c'est ainsi que le gouvernement d'Unité Nationale devra ensuite s'instaurer afin d'organiser des élections et, une fois que le nouveau gouvernement sera établi, indépendamment de la sympathie qu'il éveille en nous, nous devrons le reconnaître comme le gouvernement du peuple palestinien, car nous devons respecter la volonté du peuple palestinien.
 
Modérateur : Merci Monsieur le Premier Ministre Erdoğan pour votre réponse très complète et qui, je dois dire, apporte du nouveau. Je m'adresse maintenant à M. Amr Moussa, secrétaire général de la Ligue arabe, pour lui poser la même question : comment pouvons nous revenir à un processus de paix après Gaza ?  Et peut-être pourriez-vous également parler des deux points soulevés par le Secrétaire Général des Nations Unies, M. Ban Ki-Moon.
 
Donc, d'abord, comment parvenir à une unité au sein des Palestiniens ? Et deuxièmement, que peut faire la nouvelle administration américaine, alors que l'émissaire de M. Barack Obama, au Proche Orient, M. George Mitchell, commence une tournée dans la région ?
 
Amr Moussa : Merci beaucoup. Je tiens tout d'abord à remercier le secrétaire général des Nations Unies pour la position ferme qu'il a prise et pour les actions qu'il exige afin de rétablir la situation à Gaza, pour sauver Gaza après le carnage qui a été commis contre sa population. Je veux également louer le rôle joué par la Turquie, un rôle très positif, courageux et clair. Je remercie la Turquie, un membre de la famille des nations du Moyen-Orient, du rôle qu'elle veut bien jouer pour rétablir la paix et aider à traiter des fautes majeures qui ont été commises contre les Palestiniens, et pour demander que soit instaurée une paix juste et équitable afin que la paix soit durable.
Maintenant, David, vous me demandez de parler du futur et de la façon dont nous devons l'aborder. Les choses ne doivent pas être balayées sous le tapis, car ces choses appartiennent au futur proche et peut-être aussi à un avenir plus éloigné. La situation à Gaza ne s'est pas produite en réaction, l'agression contre les Gazaouis n'était pas juste une réaction aux roquettes lancées contre le sud d'Israël. Et là, j'ouvre une parenthèse pour dire que nous sommes contre tout ce qui affecterait enfants, femmes, civils qu'ils soient palestiniens ou israéliens. Je ferme la parenthèse. Cette situation à Gaza et en Palestine est une situation d'occupation militaire étrangère. Et les gens (...) et un siège, un blocus. Gaza vit une situation de blocus, un très grave blocus. La Cisjordanie est sous occupation militaire avec des barrières, des colonies, ce sont les territoires, ainsi les Palestiniens essayent de manifester leur besoin d'avoir un avenir. Vous ne pouvez pas demander aux gens à Gaza qui vivent avec la famine et la faim à cause du blocus, un blocus très sinistre, de rester calmes et leur demander : « pourquoi jetez-vous des pierres contre vos occupants ? ». C'est contre la nature humaine, vous les étranglez, vous les affamez puis vous leur demandez de rester tranquilles ? Et, comme il en a été discuté, la question de la contrebande : bien sûr, la contrebande est illégale, c'est un commerce illicite, un mouvement illicite des choses, des denrées et autres, peut-être du trafic d'armes. Vous les étranglez sans une seule issue d'opportunités et vous leur parlez de commerce illégal ? Si vous voulez empêcher cela, vous devez ouvrir  les points de passage, vous devez leur donner de la nourriture, vous devez leur donner de l'eau, leur donner des médicaments. C'est une vie misérable que les Palestiniens ont vécu et qu'ils vivent aujourd'hui à Gaza à cause du blocus qu'Israël leur a imposé depuis maintenant 3 ans. Deuxièmement, un autre fait : les Palestiniens croient à la nécessité de la démocratie. Il y a eu des politiques, des politiques internationaux, à une certaine période, qui ont demandé au Moyen-Orient : « Appliquez la démocratie, la démocratie est la solution à tout ! », et il se trouve que je suis d'accord avec ça. Les Palestiniens ont cru ces conseils et ont organisé des élections que le Hamas a gagné et une demi-heure, 25 minutes après l'annonce des résultats de l'élection, le Hamas a reçu une notification comme quoi l'aide serait suspendue puis vint le blocus, un grave blocus, et c'est à partir de là que le Hamas s'est mis sur la défensive. Mais tout comme l'a dit le Premier Ministre, M. Erdoğan, le peuple de Gaza n'est pas que le Hamas, ce n'est qu'une organisation parmi d'autres organisations, mais les gens, 1,5 millions de gens, de femmes, d'enfants, toute une population de gens, furent attaqués et ils ont payé le prix de ce jeu qui se déroule entre Israël et le Hamas et le jeu a été causé, et est encore causé aujourd'hui par l'occupation militaire.
 
Pourquoi le Hamas a été écouté dans les territoires occupés, dans les rangs palestiniens, au Moyen-Orient, au sein du monde arabe ? Parce qu'il a une logique. Ils ont dit d'accord, Président Aobu Mazen, allez négocier et si quelque chose d'utile sort de vos négociations, nous vous soutiendrons assurément. Et en fait, ils ont dit nous sommes prêts à accepter l'État palestinien dans les frontières de 1967 mais nous n'allons pas rien signer avant de savoir quelle en sera la conséquence. Ainsi, le Président Abou Mazen n'a rien ramené. Il n'a rien ramené. D'une année entière de négociations avec le gouvernement israélien actuel. C'est ce qu'il a dit. Il a été enregistré lorsqu'il a dit cela et en fait, il l'a dit, ici même, l'année dernière. Je crois que c'était le Premier Ministre Salam Fayyad. Alors voilà la situation. La question n'est pas qu'Israël a réagi à des tirs de roquettes, c'est plus profond que cela, c'est une action d'occupation, une action de blocus, puis une réaction de résistance suivie d'une réaction de destruction menée par Israël. D'accord, c'est arrivé. Devons-nous en rester là et attendre la fin du monde ? Non. Peut-être sommes-nous tous maintenant sollicités pour sauver la situation. Comme le secrétaire général vient de le dire, il y a trois ou quatre choses qui doivent être faites : un cessez-le-feu, un cessez-le-feu solide, un cessez-le-feu durable, ouvrir les passages, arrêter le trafic illégal et une médiation entre les Palestiniens. Voilà ce que nous devons faire et je veux que vous sachiez que je ne nous absous pas, du côté arabe, des erreurs que nous avons commises mais aucune erreur, aucune erreur que nous ayons commise ne peut rivaliser avec la faute grave qui a été commise par Israël en détruisant Gaza et en tuant tous ces gens en seulement vingt jours. Nous avons essayé d'impliquer les Nations Unies plutôt que d'engager plus de meurtres et plus de carnages. Malheureusement, ces dernières années avant ce mois de janvier, et c'était avant le 28 janvier, la philosophie était « non », laissez le Conseil de Sécurité en dehors de ça, donnez une chance à Israël pour qu'il fasse ce qu'il s'était fixé». Nous en avons été témoins en 2006 au Liban, et nous en avons été témoins à nouveau en janvier à New York, mais c'est une longue histoire, je ne crois pas que nous aurons le temps de la raconter maintenant, de l'expliquer intégralement. Maintenant, que devrions-nous faire ? Nous avons une nouvelle administration aux USA. Ce qu'a déclaré le Président Obama est rassurant. Le changement. Il s'est adressé au monde arabe à travers une de nos plus importantes chaîne de télévision, Al Arabiya, depuis Dubai.  Il s'est adressé à nous. Et nous l'avons écouté, nous avons entendu, nous avons compris. Il a envoyé son émissaire, le sénateur Mitchell, qui est un homme très raisonnable, nous avons parlé avec lui, il y aura de nouvelles discussions et je crois qu'il y a des perspectives pour que les USA reviennent à un rôle d'intermédiaire honnête, ce dont nous avons manqué ces dernières années. C'est un point essentiel pour l'avenir, que les USA reviennent au rôle d'intermédiaire honnête qui écoute les différents camps et disent : « Oui, vous avez raison pour cela mais vous avez tort sur ceci », et disent la même chose à l'autre camp. Nous n'avons pas vu ce discours ces dernières années. Oui, c'est le premier point positif, nous espérons avoir raison dans notre appréciation et dans nos espoirs. Le deuxième point positif est l'initiative arabe. Nous sommes prêts. Officiellement, au plus haut niveau, nous sommes tous engagés pour instaurer la paix avec Israël. Pour reconnaître Israël, pour normaliser la situation avec Israël, et pour poursuivre tous nos engagements en accord avec les résolutions du Conseil de Sécurité, avec les décisions de la Conférence de Madrid et avec tous les engagements que nous avons pris, qui ont été signés entre tout pays arabe et Israël. Nous sommes prêts à cela. Mais le fait est que nous n'avons reçu aucune réponse de la part d'Israël durant ces sept dernières années. Le Président Peres est un homme très éloquent, il déclare : « Nous acceptons », mais ce ne sont que des mots, aucune décision officielle n'a été prise par le gouvernement d'Israël en réponse au message officiel envoyé lors d'un sommet arabe qui s'est tenu en 2002. Alors que notre position est totalement officielle, nous n'avons eu aucune réponse, aucune réponse en tous cas à part des communications que nous avons lu dans des journaux ou dans des traductions. Donc nous demandons à Israël maintenant : quelle est votre position au sujet de cette initiative ? Une position officielle. Une position officielle et pas juste une déclaration. Une position officielle. De même notre position était officielle. S'il y a une adhésion de la part d'Israël, une adhésion officielle alors nous sommes sur la bonne voie. Ainsi le second point est pour nous de recevoir une réponse officielle sur l'adhésion à l'initiative arabe qui demande à nous, Arabes, de tourner la page, tourner la page du conflit, reconnaître Israël, normaliser la situation avec Israël et qu'Israël fasse partie de la famille des nations du Moyen-Orient dont elle ne fait pas partie à l'heure actuelle. Mais si Israël se retire, permet l'établissement de l'État palestinien, se retire des autres territoires, nous ne voyons pas d'obstacle pour que nous et les Israéliens vivions ensemble et agissions ensemble. Quand allons-nous recevoir ce message ? Point d'interrogation. Le troisième point...
 
Modérateur : Secrétaire général, nous avons l'occasion d'avoir une réponse de la part du Président d'Israël et c'est peut-être le bon moment de le faire car nous n'avons plus beaucoup de temps...
 
Amr Moussa : Je sais que le Président va prendre tout son temps. Alors donnez-moi encore deux minutes, s'il vous plaît.
 
Modérateur : Je ne veux pas marchander (nous devons faire un cessez-le-feu). Nous serons tout oreilles pour écouter le Président Peres... Nous vous laissons conclure.
 
Amr Moussa : Maintenant, en 2009. L'année 2008 a été pleine de promesses. Et elle s'est terminée dans un bain de sang. Pour nous, passer d'une administration à une autre, de l'année 2000 à l'année 2008, puis 2009, 2010 et 2011, c'est une manoeuvre que nous n'allons pas accepter. C'est pourquoi : aujourd'hui nous sommes en 2009, s'il existe une intention réelle, si un travail réel est fait par un médiateur honnête, si la volonté politique d'Israël s'exprime en faveur de la paix et du progrès, alors nous sommes sur la bonne voie. Si à la fin de cette année, nous arrivons au 31 décembre sans résultat, comme cela s'est passé en 2008, alors nous devrons reconsidérer notre proposition. Il y a beaucoup d'autres alternatives. Mais je crois en ce que dit la Turquie, en ce qu'a déclaré le Premier ministre, M. Erdoğan, nous ne pouvons pas et Israël ne peut pas non plus, atteindre nos objectifs par des moyens militaires. Nous avons besoin d'un accord politique mais d'un accord juste durant l'année 2009. Merci beaucoup.
 
Modérateur : Merci, M. le secrétaire général Moussa et maintenant le Président Peres d'Israël. Personne n'a travaillé aussi longuement et aussi durement que vous sur ce que nous appelons le processus de paix. Dites-nous comment vous pensez que nous puissions revenir à ce processus de paix ?
 
Shimon Peres : Bien, merci Monsieur le Président [Une femme arrange les cheveux de Peres. Rires. Ses cheveux tombent ?], j'ai écouté les distingués orateurs parler d'Israël et je n'ai pu reconnaître l'image du pays qu'ils présentent. Je veux commencer par le début. C'est très difficile pour un pays démocratique de faire face à un groupe terroriste illégal. Tout ce que nous faisons est photographié, quoi que nous fassions, mais personne ne voit ce qu'ils font. Par exemple, quand ils lancent un missile sur une ville en Israël, ce n'est pas photographié. Vous ne pouvez pas voir la mère qui tente de défendre son enfant la nuit entière, ni ses nuits d'insomnie. Avez-vous déjà vu à la télévision une nuit sans sommeil ?
 
Je vous dois le respect Monsieur le Premier ministre, mais je dois dire les choses comme elles sont réellement. Laissez-moi commencer par la démocratie. En premier lieu, qui les Palestiniens ont-ils élu, pas le Hamas mais Monsieur Abbas, celui qu'ils appellent Abou Mazen. Soixante-deux pour cent des Palestiniens votèrent pour lui pour être Président du peuple palestinien et nous négocions avec lui. Le Hamas a participé aux élections mais a une idée très spéciale de la démocratie. Ils pensent que la démocratie est l'histoire d'un jour tous les quatre ans, quand ils se présentent aux élections. Après les élections vous pouvez commencer à tirer, à tuer et à menacer. C'est fini. La démocratie n'est pas une question d'élections. C'est une civilisation et je veux entrer en conflit avec leurs mots en citant le Hamas ; je ne vais pas interrompre l'histoire mais le Hamas nous concerne ; le Hamas a publié des statuts ; laissez-moi lire 2 ou 3 lignes des statuts du Hamas : "Le jour du jugement final ne surviendra pas tant que les musulmans n'auront pas tué les juifs, quand les juifs se cacheront derrière les pierres et les arbres, il n'y a aucune solution pour une initiative de paix, des propositions, les conférences internationales sont une perte de temps". Cela est le statut officiel. Je ne sais pas de quel Hamas vous parlez.
 
Maintenant sur les proportions. Au cours des huit dernières années, bien je veux dire, je déteste le dire, mais comme vous l'avez mentionné, laissez-moi donner l'autre partie de l'histoire, ainsi Israël a perdu cent, mille cent soixante-sept vies des mains des terroristes, huit mille cinq cents ont été blessés. Et ensuite, dans les quatre dernières années, quand le Hamas a eu le contrôle de Gaza, 5500 missiles et 4000 mortiers ont été lancés sur la vie civile en Israël au hasard : il ne leur importait pas si c'était un jardin d'enfant, si c'est [inintelligible], nous n'avons pas répondu. Pour cette raison, l'idée du cessez-le-feu, Monsieur le Premier ministre, est très étrange à notre sens. Nous n'avons jamais commencé à tirer. Et nous l'avons dit et redit aux Palestiniens : "Ne tirez pas et nous ne tirerons pas ; nous ne le faisons pas, jamais nous ne sommes les premiers". Et qui a rompu... et à propos, nous n'avions pas un accord formel sur le cessez-le-feu, ils l'ont annoncé et les Palestiniens ont dit : "C'est fini". Ils l'ont rompu. Et quand le Premier ministre était chez vous quatre jours avant que les opérations ne commencent, le gouvernement d'Israël n'avait pas encore décidé d'agir contre eux.
 
Maintenant laissez-moi... Je veux que vous écoutiez, parce que vous voyez tout à votre télévision, je peux comprendre vos sentiments. Israël a abandonné complètement Gaza, aucune occupation. Nous avons retiré tous nos soldats de Gaza, tous nos civils. Les gens parlent de colonies, nous avons retiré de Gaza toutes les colonies et tous les colons, quinze mille. Personne ne nous a forcés, nous avons décidé de le faire. Nous avons dû mobiliser quarante-cinq mille policiers pour les rapatrier, pour un coût de 2.5 milliards de dollars.
 
Je veux comprendre pourquoi ils nous lancent des missiles. Pourquoi ? Il n'y avait aucun siège contre Gaza. Tous les passages étaient ouverts. Non seulement cela, mais nous avons participé à l'investissement d'argent à Gaza, pour développer une agriculture. Nous, le Centre Peres, nous avons investi vingt mille dollars, pardon vingt millions de dollars pour construire des serres, développer les fraises, l'exportation de fraises, des fraises excellentes, des fleurs.
 
Jimmy Wolfensohn, qui a été représentant du Quartet, a sorti de sa poche cinq millions de dollars pour participer à cela. Ils l'ont détruit. Pourquoi ? Ils ont bombardé tous les passages. Pourquoi ? Pourquoi ils nous ont tiré dessus, que voulaient-ils ? Nous n'occupions pas, il n'y a jamais eu un jour de famine à Gaza. A propos, c'est Israël qui fournit quotidiennement de l'eau à Gaza, c'est Israël qui fournit du combustible à Gaza, la seule chose que nous ne permettons pas d'entrer sont les missiles d'Iran. Et eux, ils construisent des tunnels pour cela. Et vous le savez, nous avons aussi des femmes et des enfants, et ils veulent dormir la nuit. Vous savez ce que cela signifie, chaque jour quasiment cent missiles qui tombent au hasard, un million de personnes qui doivent être dans des refuges. Ils sont allés au gouvernement et lui ont dit : "Que vous arrive t-il ? Nous voulons la sécurité, pourquoi permettez-vous cela ?". Et je veux que quelqu'un me dise, clairement, quels furent les motifs de l'attaque ? Quels étaient les objectifs de l'attaque ? La paix ? Nous avons fait la paix avec l'Égypte, pas avec des armes, par des accords et des négociations, et nous avons réalisé toutes les conditions de l'Égypte. Nous avons de même fait la paix avec la Jordanie, nous leur avons rendu toute la terre et toute l'eau. Nous nous sommes ouverts aux Palestiniens et leur avons dit que nous appuyons un État palestinien, j'ai commencé à Oslo, contre la majorité peut-être de notre peuple qui n'était pas d'accord. Et tout le temps, vous le savez, Monsieur le Premier ministre, pendant que vous deviez attendre, beaucoup d'autobus venaient de Cisjordanie à Jérusalem pleins de dynamite. J'étais alors le Premier ministre, je l'ai vu de mes propres yeux, le sang et les corps. Vous le savez, je n'ai pas à regarder la télévision et quand j'étais là, il y avait des milliers de personnes qui me criaient : "Traître, assassin, regarde ce qu'ils nous ont fait !". Vous devez, il y a beaucoup de détails que vous devez savoir, Israël a soixante ans, vous connaissez un autre pays qui en soixante ans a dû passer par sept guerres, deux intifadas, un boycott en cours ? Quoi, pourquoi ? Et malgré cela nous avons fait la paix avec l'Égypte. J'ai le plus grand respect pour le président Moubarak. A ce propos le président Moubarak a accusé le Hamas, pas nous. Et le président Moubarak connaît la situation tout comme vous, Monsieur le Premier ministre. Et le président Abbas connaît la situation tout comme vous, et il a accusé le Hamas, pas nous. Et ensuite les mères et les enfants sont venus et ont interrogé le gouvernement. Que va-t-il se passer ? Un million de personnes deviennent chaque nuit des réfugiés, des mères qui ne peuvent dormir, exactement que veut dire cela ? A ce sujet je n'ai jamais vu quelqu'un se manifester contre ces missiles. Cela était bien, personne ne dit un mot. Et nous ne répondions pas, chaque jour, chaque année, tout a une limite. Et à propos, j'ai beaucoup de respect pour le secrétaire général, il était un ami et j'espère qu'il l'est toujours, j'apprécie beaucoup l'initiative arabe, mais il y a un problème, je ne veux pas le cacher. Le problème n'est pas le monde arabe, le problème est l'ambition iranienne de gouverner le Proche-Orient. Ils fournissent les missiles au Hezbollah, ils fournissent les missiles au Hamas, ils sont opposés à la démarche arabe, et vous savez que nous n'avions pas d'autre option. Le leader du Hezbollah, Nasrallah, a dit : "Si nous avions su qu'Israël réagirait avec une telle force, nous n'aurions pas commencé". Merci beaucoup. Et ensuite vint Mashaal, le leader du Hamas, qui a dit : "Israël a réagi trop fort". Que croyaient-ils que nous ferions ? Je ne le comprends pas. Que feriez-vous si cela se passait à Istanbul, chaque nuit dix missiles, cent missiles ? Et nous n'avons jamais infligé de représailles, toute ma vie, comme vous l'avez dit, monsieur le Président, je l'ai apprécié, j'ai lutté pour la paix, ce que nous avons fait n'est pas... ce que nous voulions faire... Cela n'est pas notre option, notre option est la paix. Ce que nous avons fait c'est parce qu'il nous manquait une option, ils nous ont menacés avec une option. Voteriez-vous en faveur d'un tel objectif, tuer les juifs ? Bon, cela sont des mots, mais tuer les juifs et envoyer des missiles pour les tuer. Que vouliez-vous que nous fassions ? Nous avons commencé à négocier avec Monsieur Arafat, avec beaucoup de respect, ce n'était pas simple. Au début, l'OLP était une organisation terrorise. Arafat consentit à arrêter la terreur et continua les négociations. À ce propos ce qui fut obtenu pacifiquement, positivement ne le fut pas avec des missiles ni par la force ni par la puissance, mais par les négociations. Cela demande du temps, cela demande du temps. C'est un pays très compliqué. C'est un petit pays avec trois religions, avec beaucoup d'histoire. Avec différents groupes ethniques, ce n'est pas simple. Nous avons fait la paix, une fois, deux fois, maintenant nous négocions avec les Palestiniens. Il y eut une crise entre les Palestiniens, nous n'avons pas l'intention d'être ceux qui décident si les Palestiniens doivent être unis ou non. Tant que le Hamas ne s'est pas rebellé pas contre le Fatah, ce n'était pas notre affaire, nous n'avons pas dit un mot. Vous savez ? Je suis en train de parler d'Israël, regardez ce que les gens, les Palestiniens, le secrétaire général du Fatah disent sur le Hamas, il y a trois jours. Son nom est Yasser Abed Rabbo, un Palestinien, un secrétaire général de l'OLP, du comité exécutif, et je le cite, je le cite il y a trois jours : "Le Hamas a transformé Gaza, les écoles de Gaza et les mosquées, toutes les universités en centres de détention, d'interrogatoire et de torture. Des dizaines ont reçu des tirs dans les jambes, ils les ont frappés sauvagement et leur ont brisé les os. Le Hamas a volé des camions qui apportent... et distribuent seulement à ... les aliments... seulement aux partisans de son mouvement". Ils ne donnent pas d'aliments aux gens du Fatah. Ils ont tué une centaine de leaders du Fatah en plein jour. Ils les jettent depuis les terrasses. Que voulez-vous dire ? Est-ce une question de définitions ? Israël ne veut tirer sur personne, pour nous tous les enfants sont très importants comme vous pouvez le penser. J'ai fondé le Centre Peres, tout l'argent que nous avons récolté a été pour soigner des enfants. Des enfants palestiniens. Ils n'avaient pas d'assurance maladie, ils n'avaient pas d'hôpitaux, en cinq ans nous avons envoyé en Israël 5500 enfants palestiniens et leurs mères pour les soigner. À ce propos, il n'y a plus aucun hôpital en Israël qui n'ait des médecins arabes, ainsi les enfants peuvent communiquer avec les médecins dans les hôpitaux israéliens. Mais si vous mettez un enfant, si vous mettez des bombes dans le jardin d'enfants, et s'ils se cachent derrière des familles innocentes, et nous avant de bombarder, avant de tenter de bombarder quelqu'un, nous tentons d'appeler les gens par téléphone, nous leur disons : s'il vous plaît abandonnez ce lieu. Nous ne voulons pas leur faire de mal. Nous avons fait cela durant les vingt jours, 250.000 appels téléphoniques avant de tirer. Que pouvions-nous faire, quelle était notre alternative ? Et que pourrait faire tout gouvernement ? Je déplore beaucoup, Monsieur le secrétaire général, le bombardement de l'immeuble des Nations Unies, et selon nos informations, pas les vôtres, ils avaient commencé à tirer depuis ce bâtiment, et d'ailleurs vous l'Europe, vous avez bombardé le Kosovo et vous avez détruit l'ambassade chinoise, est-ce que vous vouliez cela ? Et des centaines de civils ont été tués dans les bombardements. C'est bien. Je veux, s'il vous plaît, parler clairement,
Israël n'a pas besoin d'un cessez-le-feu, parce que nous n'avons jamais commencé à tirer et ne le ferons jamais.

Et nous ne le ferons jamais. Et une minute après qu'ils auront arrêté de tirer il y aura un cessez-le-feu. Il ne nous faut rien d'autre. À tout moment, chaque jour, on ne veut pas le feu ; on n'est pas intéressé par faire du mal ou par tuer personne. Maintenant sur le processus de paix. Tout d'abord, je veux dire que c'était un grand pas de la part du Secrétaire Général de la Ligue Arabe que de présenter l'Initiative Arabe. Je pense que c'était un pas très positif dans une histoire amère faite d'incompréhension et de confrontations. Les problèmes auxquels nous faisons bien face sont les suivants : a) nous avons commencé à négocier directement avec les Palestiniens. Le président Moubarak m'a dit : « Regardez, finissez vos négociations avec les Palestiniens, ce serait selon nous le premier pas vers une paix totale ». Nous sommes en train de négocier et je pense que nous avons avancé dans un problème extrêmement compliqué. Ils mettent en avant le problème de Jérusalem. Jérusalem n'est pas un morceau de terre. Jérusalem est du feu. Il s'y trouve trois religions différentes avec différents courants dans chacune d'elle, et les gens se battent pour la moindre fenêtre, la moindre porte. C'est facile de dire « trouvez un arrangement », on en cherche le moyen. Nous avons dit aux Palestiniens que nous sommes vraiment prêts à accepter [inintelligible], ce qui veut dire que nous sommes prêts à leur rendre la plupart, presque toute la terre de la Cisjordanie. Gaza, nous l'avons complètement quittée. Pourquoi se battre à ce propos ? Aussi le cessez-le-feu, pour autant qu'il en est question, n'est pas un problème pour nous. Nous n'avons jamais commencé, nous ne devrions jamais commencer à faire feu et quand ils ont fait feu sur nous, nous avons répondu, mais après de grande réticences et des milliers de gens furent tués aussi. Ils n'ont pas été tués de manière concentrée. Et alors ? Ce n'est pas important. Je pense que ce que nous avons à faire, et à ce propos je suis pour la restauration de Gaza, nous n'avons rien, il n'y a pas eu un jour où nous n'ayons approvisionné en eau et en carburant. Personnellement, j'ai lu chaque semaine un rapport sur la situation humanitaire à Gaza. Si quelque chose manque, le gouvernement et moi-même nous intervenons pour être sûrs qu'il y aura du carburant et de la nourriture. La tragédie de Gaza, ce n'est pas Israël, c'est le Hamas, qui a décrété une dictature, très moche, et ils créent le problème des passages, ce n'est pas parce qu'on veut contrôler l'approvisionnement en nourriture et en matériel médical ou de construction. Ils font des tunnels pour y importer des missiles et ils élaborent un système souterrain de tunnels, et à ce propos les chefs s'y cachent eux-mêmes et ils ont oublié le peuple. Je pense, oui, que nous aimerions bien voir Gaza devenir florissant, Gaza est un petit endroit avec des gens intelligents. Quand j'ai commencé à parler avec Arafat nous avons pris Singapour comme exemple. La Cisjordanie et Gaza réunies sont neuf fois plus grandes que Singapour et à Singapour il y a plus de gens qu'à Gaza et qu'en Cisjordanie. Le problème de nos jours, ce n'est pas la terre mais réellement l'éducation et Gaza n'est pas notre ennemie, et les gens à Gaza ne sont pas nos ennemis, et nous voulons vivre en paix avec eux. Nous n'avons pas de haine et nous n'avons pas de plans, ce pourquoi nous avons quitté Gaza et nous sommes pour restaurer la vie à Gaza mais sans dictateurs et sans tirs non seulement contre nous mais contre les gens du Fatah…             

Modérateur : On pourrait en finir là… Plus qu'une minute.

Shimon Peres : Et nous voulons alors renouveler les négociations avec l'Autorité palestinienne autorisée. Nous avons fait du chemin. Nous voulons commencer sur le champ, nous voulons le faire avec le Quartet, nous voulons le faire tout de suite, nous ne voulons pas perdre de temps. Notre but est la paix, pas la guerre, et quand nous gagnons une guerre nous ne le considérons pas comme une victoire. Pour nous la victoire est la paix, pas la guerre. Nous avons la puissance, ne nous devrions jamais utiliser la puissance sauf s'il n'y a pas d'autre choix, et quand nous avons le choix nous voulons la paix et je pense que le Hezbollah a appris la leçon, ils arrêtent de tirer, rien ne les empêche de tirer hormis notre réaction. J'espère que le Hamas auront aussi une leçon, ils arrêteront de tirer et commenceront à discuter, c'est en parlant qu'on peut arriver à tout réaliser, pas en tirant et c'était, et c'est, et cela restera la position d'Israël. Merci Monsieur.

Modérateur : Ce débat a été fort et passionné. C'est un début qu'on pourrait poursuivre des heures ce soir mais nous avons déjà bien dépassé l'heure de fermeture. Je veux dire…

Recep Tayyip Erdoğan : Une minute.

Modérateur :  Monsieur le Premier ministre… mes excuses à Mr. Le Premier ministre Erdoğan…

Recep Tayyip Erdoğan : Une minute, une minute, une minute…

Modérateur : Et bien, je…

Recep Tayyip Erdoğan : Une minute ! Ce n'est pas possible ! Une minute ! Une minute !

Modérateur : D'accord, mais je vais devoir vous demander de vous en tenir à cette minute, s'il vous plaît.

Recep Tayyip Erdoğan : Cher Mr. Peres, vous êtes plus vieux que je ne le suis. Et vous avez une voix qui porte beaucoup. J'ai le sentiment que vous vous sentez coupable et que c'est pour cela que votre voix était si forte. Ma voix ne sera pas aussi forte parce que vous savez ce que je vais vous dire. Quand il est question de tuer, vous savez très bien comment tuer. Je sais très bien comment vous avez tué, comment vous avez atteint des enfants sur les plages. Dans votre pays, deux personnes, deux Premiers ministres ont dit quelque chose de très important pour moi. L'un d'eux a dit : « Quand je suis rentré en Palestine avec un tank j'ai été heureux ». Quand les tanks sont entrés en Palestine ils ont été heureux. C'était ce qu'avaient ressenti certains de vos Premiers ministres. Là vous nous parlez de chiffres. Je peux vous donner des noms. Peut-être que certains d'entre vous êtes curieux. Je condamne ceux qui applaudissent à la cruauté. Parce qu'applaudir ces gens qui ont assassiné des enfants est un crime contre l'humanité. On ne peut fermer les yeux sur cette réalité. Regardez, j'ai pris plein de notes [à propos de l'intervention de Peres] mais maintenant je n'ai pas la possibilité de répondre à tous ces points. Je ne vous parlerai que de deux choses sur ce problème. La première…

Modérateur : Premier ministre, on ne peut pas recommencer le débat.

Recep Tayyip Erdoğan : Je m'excuse. La première chose, la première chose…

Modérateur : Je suis désolé.

Recep Tayyip Erdoğan : Ne m'interrompez pas.

Modérateur : On doit vraiment laisser les gens aller dîner.

Recep Tayyip Erdoğan : Le 6e commandement de la Torah dit : Tu ne tueras point. Mais ils ont tué les Palestiniens. La deuxième chose, attendez, est très intéressante. Gilad Atzmon : « La barbarie d'Israël est au-delà de la cruauté ». Il est juif. Et puis il y a le professeur de relations internationales de l'Université d'Oxford Avi Shlaim, qui a servi dans l'armée israélienne. Il a dit la chose suivante dans un journal anglais, le Guardian : « Israël est un État voyou ».  

Modérateur : Premier ministre, Premier ministre. Je veux demander à notre animateur. Merci.

Recep Tayyip Erdoğan : Je veux aussi le remercier car pour moi c'est terminé. Pour moi, pour moi, Davos c'est fini. Je ne retournerai pas à Davos, que vous le sachiez, c'en est fini. Vous ne me laissez pas parler. Il a parlé 25 minutes, et je n'ai pu parler que 12 minutes. Ça ne peut pas se passer comme ça. [Il se lève et s'en va, le Secrétaire de la Ligue Arabe lui sert la main]

Modérateur : Permettez que je laisse notre animateur s'occuper de cela. Premier ministre, faites ce que…

Animateur : Mesdames et Messieurs, merci, merci beaucoup, si vous, si vous voulez bien rester un moment, une minute, s'il vous plaît. Je pense qu'en dépit de toutes ces émotions et bien sûr quand il est question de la vie d'enfants etc., nous devons tous être sous le coup de l'émotion. Mais malgré tout je pense que nous avons aussi entendu quelques raisons et quelques arguments qui nous encouragent à croire qu'il y a un terrain d'entente. Et je pense que le rôle des USA comme médiateur honnête – ce qui a été souligné – en est une qui est très importante et je suis heureux que madame Charrette était là et va certainement transmettre à son retour ce message au président Obama. Permettez-moi maintenant de conclure cette session sur une note dans un esprit de conciliation. Le Forum Économique Mondial a parmi ses communautés des leaders religieux et nous avons parmi nous ici vingt leaders religieux de haut niveau qui représentent l'ensemble des croyances et des religions abrahamiques. Permettez-moi simplement de lire ce qu'ils ont rédigé comme message à votre attention et à celle de ceux qui négocient. Je lis : « La communauté des leaders religieux associés au Forum Économique Mondial, engagés pour la justice, la dignité et le respect mutuel pour tous, exprime sa profonde détresse à l'égard de la peine éprouvée par des innocents qui souffrent, où qu'ils soient, et en particulier dans la terre qui est sainte pour les religions abrahamiques, pour nous, et qui a récemment été le lieu d'importantes pertes humaines et de destructions. Alors que ce conflit est un conflit territorial, trop souvent, la religion a été exploitée et a été considérée comme faisant partie du problème. Par conséquent, la communauté des leaders religieux croit passionnément que les cultes religieux doivent faire partie de la solution. En fait, aucune solution ne sera possible sans un engagement de ceux-ci. Par conséquent, la communauté des leaders religieux lance un appel aux dirigeants politiques pour qu'ils engagent comme partenaires, comme vrais partenaires, les représentants religieux des trois fois abrahamiques, et notamment le Conseil des leaders religieux de la Terre Sainte, pour chercher un règlement qui aboutira à deux États indépendants vivant en paix, libérés de la violence, de l'incitation à la haine, et de la terreur. La Communauté donne son soutien à toutes les initiatives pour apporter la paix au Moyen-Orient, la plus récente étant la nomination par le président Obama du sénateur George Mitchell comme envoyé spécial, et pour le succès de laquelle nous prions ». Prions tous pour le succès parce que notre destin et celui de nos enfants dépendra de la bonne volonté de ces politiciens à travailler ensemble. Veuillez aussi vous joindre à moi en exprimant vos encouragements à toutes les personnes de bonne foi qui veulent négocier, pour nous assurer que bientôt un rêve pourra être réalisé, un rêve pour une paix durable pour longtemps. Merci.

Éditorial  de Tlaxcala : Tu ne tueras point


Cette vidéo est impressionnante. Tout d'abord son contexte – le Forum Économique Mondial de Davos – ne paraissait pas a priori propice à une dispute publique entre les participants à ce panel. Les politiciens professionnels n'ont pas coutume de dire ce qu'ils pensent face aux caméras, réservant les cous de poignard dans le dos aux négociations secrètes, tout en arborant des sourires et en se serrant la main aux yeux du monde. Certes le thème du débat – la guerre contre Gaza – était abordé alors que les cadavres de 1300 Palestiniens étaient encore tièdes, mais sans l'inattendu incident final provoqué par le Premier ministre turc, il aurait sans doute été rapidement oublié, tout comme les tonnes de déclarations quotidiennes marquées du sceau du politiquement correct. Mais l'impensable est arrivé et les images de Recep Tayyip Erdoğan maudissant Israël et l'accusant d'être un État voyou resteront dans l'histoire. C'est peut-être la première fois que la vérité s'est frayée un chemin dans une séquence mise en scène par les hautes sphères du pouvoir et que les peuples du monde ont pu assister à cela avec admiration. Nous aimons croire qu'après cela, plus rien ne sera pareil. De fait, les choses ont changé pour Israël depuis le début du mois de janvier 2009 : son attaque génocidaire contre Gaza a déclenché des requêtes judiciaires et une indignation généralisée dans toute la planète. Cela indique un tournant, qui pourrait aboutir rapidement à une protestation et à un châtiment pour le mépris absolu manifesté par Israël à l'égard des droits humains, du droit international et du respect e la vie des non-juifs.

De plus, cette vidéo est surréaliste, grâce à la prestation de Shimon Peres, une interprétation absurde du rôle du Menteur, digne de Groucho Marx si tout cela n'était pas si tragique. À ses côtés à la tribune, un Ban Ki-Moon qui, dans son impuissance, se voit réduit à faire la seule chose qu'il puisse faire, c'est-à-dire rien, tandis qu'un solide Amr Moussa maintient un niveau de rhétorique avec dignité, à défaut de disposer d'armes réelles pour menacer la puissance nucléaire qu'est Israël. Mais ce qui restera dans toutes les mémoires, ce sera la réplique déterminée et passionnée d'Erdoğan, qui a fait oublier une partie de ses péchés politiques, au moins dans le cœur du peuple palestinien. Après tout, nous savons tous, depuis les études du théoricien marxiste Mikhaïl Bakhtine sur Rabelais que les gens aiment assister à l'humiliation de ceux qui humilient et Israël a humilié depuis si longtemps – et avec une telle impunité -  le peuple Palestinien qu'Erdoğan pourrait passer à la postérité non pas comme le politicien standard qu'il est mais comme l'homme qui a crié la vérité à la face de ce vieil assassin fanfaron de  Shimon Peres.

Un autre aspect mérite d'être mentionné : c'est l'union apparente entre le "monde politique et diplomatique" et celui des gens normaux, artistes, militants et citoyens. Le discours d'Erdoğan procède du monde dans lequel nous vivons, où les gens pensent, discutent et tirent leurs conclusions sur ce qui est bien et ce qui est mal sur la base de quelques fondamentaux : tuer, c'est mal, opprimer c'est mal, et aucune argutie politique ou diplomatique ne peut occulter les faits et nous convaincre de la justesse d'une affirmation contraire aux preuves, lorsque celle-ci se heurte manifestement à ce que nous voyons, entendons et ressentons. Erdoğan a reçu un accueil de héros à son retour en Turquie, car il a exprimé une intolérance nationale et, osons le dire, internationale vis-à-vis des mensonges, de la violence et de la suprématie. Il ne s'agit pas ici de démagogie, mais de la voix du peuple, de la voix de la lutte, de la voix des masses.

Et comme nous le savons, les masses n'ont pas toujours raisons mais ce sont très rarement les leaders qui l'ont.

Le comité éditorial de Tlaxcala

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