11 février 2009

Tuer les Palestiniens pour gagner les élections

Avigdor Lieberman grand vainqueur de l'élection israélienne, AP-Yahoo! Actualités.
D'après les derniers résultats du scrutin de mardi, son parti Israel Beitenou (Israël notre maison) obtiendrait 15 sièges à la Knesset, le Parlement israélien, contre 11 dans la précédente assemblée, et devance les travaillistes. C'est désormais la troisième force politique du pays, derrière Kadima, le parti de Tzipi Livni, et le Likoud conservateur de Benyamin Nétanyahou, au coude à coude avec respectivement 28 et 27 sièges.

Dans ce paysage politique éclaté, Lieberman occupe à présent une place centrale. "C'est Lieberman qui va choisir celui qui formera la future coalition", constate Menachem Hofnung, professeur de sciences politiques à l'Université hébraïque de Jérusalem. "Lieberman s'est imposé comme le faiseur de rois. C'est le vainqueur de ces élections et celui qu'il soutiendra sera le Premier ministre".


"Chaque conflit entraîne un glissement à droite", AFPS.
Chaque conflit entraîne un glissement à droite. La victoire du Likoud en 1977 est le résultat, même décalé, de la guerre du Kippour. Après la première guerre du Liban, en 1982, malgré l’inflation de 400%, tout ce que la gauche a réussi à faire, c’est un match nul avec la droite et un partage du pouvoir entre Shimon Peres et Yitzhak Shamir dans le cadre d’un gouvernement d’union nationale. Tout le monde parle le même langage pendant la guerre ; tout le monde fait preuve de la même ardeur patriotique qui fait disparaître les différences entre la gauche et la droite.


Déclaration du Conseil d’administration du MRAP, Oumma.
Si les facteurs électoraux ont sans aucun doute joué un rôle déterminant dans le déclenchement de l’offensive israélienne contre la bande de Gaza, en retour la campagne électorale qui prend fin en Israël a été très largement conditionnée par cette guerre.

Si dans leur très grande majorité, les partis ont soutenu la guerre -opérant en la circonstance une sorte d’union sacrée- le mépris pour les pertes civiles palestiniennes a caractérisé nombre de déclarations. Et les violences volontaires faites aux civils, les crimes de guerre et le nombre intolérable de victimes auront trouvé leur justification dans la volonté israélienne d’humilier les Arabes, de leur « donner une bonne leçon pour qu’ils ne recommencent pas ».

Sauf à considérer que l’appui des gouvernements occidentaux ou arabes dits modérés est plus important que la réprobation générale des opinions publiques, la brutalité inouïe de l’intervention a participé à une dégradation sans précédent de l’image d’Israël dont les citoyens ne pourront que faire les frais.

Et même si la responsabilité collective des Israéliens est une notion mal fondée et dangereuse parce qu’elle essentialise un peuple ou une communauté dans sa totalité, le soutien apporté par la très grande majorité des citoyens israéliens jusque dans les actions les plus meurtrières de leur armée ne peut qu’interpeller les consciences. Cela confirme cependant un phénomène qui s’est maintes fois reproduit historiquement : la colonisation finit toujours par pervertir l’Etat colonial et ses citoyens.

Face à cette situation, le MRAP regrette qu’aucun des leaders des grands partis n’ait émis la moindre réserve sur ce qui est considéré en Israël même par les authentiques militants de la paix comme un effondrement des barrières morales d’Israël.

Si après la dernière intervention au Liban, nombre de responsables israéliens avaient pris conscience que « la guerre classique était devenue obsolète » , l’offensive contre Gaza a démontré que ces mêmes responsables restent toujours incapables d’imaginer d’autres sorties de crise comme alternative aux interventions militaires.

La campagne électorale a aussi montré la difficulté de la classe politique israélienne de préparer pour ses citoyens un avenir plus paisible et plus confiant.

Au contraire, le déferlement d’un racisme anti-arabe virulent a pollué gravement une campagne électorale qui a vu nombre de candidats surfer sur cette vague raciste et xénophobe. Ainsi les propos d’ Avigdor Lieberman chef du parti russophone -incontournable de toute coalition gouvernementale- sont à cet égard significatifs en particulier lorsqu’il déplore que le gouvernement n’ait pas recouru lors de la récente opération israélienne à Gaza « à la méthode utilisée par les Américains en 1945 pour mettre fin à la guerre au Japon », - référence à l’utilisation de l’arme atomique.

Signes d’une société qui doute d’elle-même et qui a peur d’affronter les choix décisifs toujours rejetés à plus tard, les solutions en trompe l’œil reprenant des idées du passé ne manquent pas d’inquiéter. D’une part la proposition faite le 11 décembre 2008 durant la campagne pré-électorale par Tzipi Livni leader du parti Kadima d’expulser les Arabes israéliens vers l’Etat palestinien dès sa création « afin d’assurer le caractère juif de l’Etat d’Israël » , d’autre part celle présentée par Benyamin Netanyahou lors de l’ouverture officielle de la campagne de ne pas évacuer les colonies et de rattacher les quelques miettes de la Cisjordanie restantes à la Jordanie et la bande de Gaza à l’Egypte ; cette proposition balayant d’un revers de main toutes les revendications du peuple palestinien, tous les accords conclus depuis plus de vingt ans et toutes les résolutions internationales.

Ces propos de campagne sont représentatifs de l’échec d’une société qui ne se sent plus assurée de son avenir et qui au bout de soixante ans de vie commune sur le même territoire n’a toujours pas réussi à accepter comme citoyens à part entière ces Israéliens d’origine palestinienne qui sont restés sur leur terre natale après 1948.

Pour le MRAP, symptomatique de la peur et de la défiance envers ces citoyens reste la tentative parlementaire d’exclure des prochaines élections les deux partis politiques les plus représentatifs de ces 20% de ces Palestiniens d’Israël qui avec leurs sept élus sont actuellement présents au Parlement.

Cette discrimination intolérable, heureusement cassée par la Cour suprême, n’en ternit pas moins l’image d’un Israël démocratique. Quoi qu’il en soit, la tentative de faire disparaître la représentation électorale palestinienne revêt une charge symbolique dont les effets négatifs continueront à se faire sentir.

Pour le MRAP, seule la volonté d’engager des négociation avec l’ensemble des représentants élus du peuple palestinien sans exclusive pourra rétablir un climat propice à des avancées sur le chemin de la paix tout comme seule la création d’un Etat palestinien, dans les frontières de 67 et avec Jérusalem –Est comme capitale, pourra le mieux garantir la sécurité d’Israël et de ses citoyens. Toute tentative autre d’imposer des solutions ne peut aller qu’au devant d’un échec programmé et de la perpétuation du malheur.


A propos d’élections..., EuroPalestine.
Les journalistes occidentaux ont fait leurs choux gras depuis des semaines—pour ne pas dire des mois— des élections israéliennes, pourtant fort convenues et sans la moindre perspective de changement en ce qui concerne le problème central, celui d’une paix juste au Proche-Orient. Mais ils sont moins loquaces concernant la tenue d’élections en Palestine, alors que la selon la constitution palestinienne, celles-ci devraient se dérouler en ce moment.
[...]
Un sondage publié jeudi dernier par une organisation palestinienne indépendante montre que si des élections avaient lieu maintenant dans les territoires palestiniens, le Hamas en sortirait vainqueur, et que Ismail Haniyeh est actuellement le dirigeant qui recueille un maximum de confiance aussi bien en Cisjordanie qu’à Gaza, rapporte Jamil Hamad, basé à Béthléem.


• Élections législatives palestiniennes de 2006, Wikipédia.
• Guide des elections legislatives palestiniennes-sur-Web, Maison de l’Orient et de la Méditerranée.
• Elections en Palestine occupée, CCIPPP.
• Abbas envisage de convoquer des élections début 2009, le Hamas s'y oppose, ISM.
• En cas d'échec, de nouvelles élections en Palestine, NouvelObs.

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