Dès sa sortie (en 1993-95, sous forme de 9 comics chez Fantagraphics Books), Palestine a révélé le talent de Joe Sacco et réaffirmé en même temps la capacité de la bande dessinée à traiter avec efficacité des thèmes « d'actualité ». Par sa démarche innovante, Palestine a été considérée comme l'œuvre fondatrice d'un nouveau genre : le « journalisme en bande dessinée ».Lire aussi :
Palestine est le récit du voyage entrepris par Joe Sacco pendant l'hiver 1991-92 dans les Territoires palestiniens occupés par Israël, durant la première Intifada (1987-1993). L'auteur s'est plusieurs fois exprimé sur les motivations de ce voyage : ses doutes sur la politique des Etats-Unis vis-à-vis d'Israël après la guerre et l'invasion du Liban en 1980 et les massacres dans les champs de réfugiés palestiniens de Sabra et Chatila ; l'irritation qu'il éprouvait face à la couverture du conflit entre Arabes et Israéliens par les médias américains, qui présentaient systématiquement Israël comme la victime innocente encerclée par des hordes d'Arabes « déments » ; la certitude – enfin – d'être mal informé, au sens où il manquait de tout élément pour comprendre « qui étaient les Palestiniens et quel était le sens de leur combat ».
Né de la réaction à cet état de fait, du besoin de « faire quelque chose », Palestine n'est donc pas un livre « objectif », au sens où il laisse exprimer chaque camp, et il a été pour cela souvent critiqué. Sacco a pourtant toujours précisé de façon très claire et revendiqué son approche du sujet (« Mon idée n'était pas de faire un livre objectif mais un livre honnête »). Sous ce point de vue, le terme « journalisme » référé à Palestine et, de façon plus générale à autres œuvres de Sacco, montre toute son approximation. Il n'empêche que la démarche de Sacco est rigoureusement journalistique : travail de terrain, collecte et redécoupage des sources, mise en perspective. En l'hybridant, dans sa bande dessinée, avec un registre autobiographique (et se mettant en scène, souvent avec beaucoup d'ironie, en tant que personnage central du récit), Sacco établit de fait une distinction nette entre faits et opinions qui évacue d'emblée tout soupçon de déformation et manipulation. Dans sa partialité clairement affichée, Palestine continue à interroger le lecteur sur comment – quinze ans près – les média traitent le conflit israélo-palestinien, très souvent avec autant de partialité tout en oubliant de tracer la ligne qui sépare les faits et des opinions. Mais, surtout, Palestine le plonge dans le quotidien du peuple palestinien, son existence sans espoir marquée par les tracasseries imposées, surtout dans la bande de Gaza, par un « pouvoir illégitime ».
Car s'il faut constater que si la situation dans les Territoires occupés a changé depuis, beaucoup de ce qui est reporté par Sacco reste malheureusement d'actualité : les Territoires sont toujours – quinze ans après – sous le strict contrôle d'Israël, la condition du peuple palestinien est encore celle décrite par Joe dans les pages de son livre. La lecture de Palestine reste aujourd'hui essentielle pour mieux comprendre, en plus des causes et des enjeux de ce conflit, la souffrance d'un peuple renfermé dans la plus grande prison existante sur Terre.
Cette nouvelle édition recueille les deux volumes (Palestine : une nation occupée et Palestine : dans la bande de Gaza) auparavant édités par Vertige Graphic dans une nouvelle présentation et une nouvelle traduction. Le récit est précédé par une préface de Edward Said et par un long texte, richement illustré, où Joe Sacco décrit sa méthode de travail et raconte la genèse de l'œuvre.
SACCO Joe, Gaza 1956 - En marge de l'Histoire, Futuropolis, 2010 [du9 - Evene - France 2 - Le Monde - Les Inrocks - Planete non violence - Politis].
6 ans de travail, plus de 400 pages, pour mettre au jour un massacre perpétré par l'armée israélienne sur la population de Gaza, en 1956, et que l'Histoire a tout fait pour oublier. Hautement considéré par ses pairs auteurs, les médias et ses lecteurs du monde entier, Sacco poursuit son engagement sincère, courageux, âpre, rigoureux et nécessaire. Son oeuvre est une charge explosive qui a fait voler en éclats les limites de la bande dessinée. C'est lors d'un reportage pour le magazine Harper's en 2001, que Joe Sacco se remémore une brève citation, une note de bas de page, lue dans un rapport de l'ONU. Elle parlait d'un massacre de près de 275 civils, perpétré par l'armée israélienne à Khan Younis et d'une dizaine d'autres à Rafah, ville voisine, en 1956. Difficile à croire, alors entre novembre 2002 et mai 2003, le dessinateur reporter se rend à trois reprises sur le terrain, afin d'établir la véracité de cette tragédie et embarque le lecteur à la recherche de traces du massacre.• 22/02/2010, Entretien avec Joe Sacco, Les Inrocks.
• 28/01/2010, Joe Sacco, ou la Palestine à Angoulême, l'Humanité.
• 27/01/2010, Interview de Joe Sacco, BD-Theque.
• 17/01/2010, Interview de Joe Sacco, Info-Palestine.
• Janvier 2010, Interview de Joe Sacco, Evene - Info-Palestine.
• Joe Sacco, Monde en Question.
• Chronique Colonisation de la Palestine 2010, Monde en Question.
• Dossier documentaire & Bibliographie Résistance à la colonisation de la Palestine, Monde en Question.
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