25 mars 2011

Libye - Revue de presse internationale (3)


Libye : Nicolas Sarkozy, vers la trahison des intérêts de la France et de l'Europe, NewropMag, 21/03/2011.
Dès Mai 2008, dans un article intitulé Nicolas Sarkozy : vers la trahison des intérêts de la France et de l'Europe, Franck Biancheri, président de Newropeans, anticipait le comportement de Nicolas Sarkozy, dont on voit aujourd'hui l'expression parfaite avec cette opération militaire en Libye où il fait jouer à la France le rôle de simple masque d'une opération conçue et dirigée par Washington, trahissant ainsi les intérêts stratégiques de la France et de l'Europe. Tandis que le président français continue à être la dernière marionnette européenne créée dans les usines Bush/Cheney des années 2000, servant uniquement les intérêts de ses maîtres américanistes, des groupes pétroliers et de défense, contribuant à une évidente tentative de faire échouer les révolutions arabes en réintroduisant l'Occident et ses interventions militaires au milieu de ce qui est avant tout un processus populaire spontané, l'Allemagne, en s'abstenant au Conseil de Sécurité de l'ONU, a au contraire indiqué le chemin de la diplomatie à venir de l'Euroland, qui doit au plus vite entreprendre de débattre de l'avenir du monde avec les BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine) au lieu d'être le docile roquet de Washington.

S'il y avait la moindre vérité dans les préoccupations "humanitaires" et "démocratiques" du discours légitimant l'intervention occidentale en Libye, nous verrions la même exigence s'imposer pour le Yemen, Bahrein, Oman ... où des civils sont également tués par les forces des dictateurs au pouvoir semblables à Kadhafi.
Deux poids deux mesures, Renmin Ribao, 23/03/2011.
Les pays occidentaux appliquent depuis longtemps deux poids deux mesures. La raison fondamentale est ceci : la vertu et moralité prêchée par l'Occident comme sa conception de la valeur est valable dans le cadre des intérêts de l'État. Quand la valeur d'une conception abstraite est en contradiction avec des intérêts pratiques de l'État, la valeur abstraite n'est plus universelle et doit obéir aux intérêts de l'État. D'où deux poids deux mesures.

Cette fois-ci, dans les troubles en Afrique du nord et au Moyen-Orient, le critère de l'Occident serait plutôt "multiple" que "double". La situation locale est trop compliquée et la répartition des intérêts de l'Occident est aussi trop compliquée. Qui est à protéger, qui doit faire l'objet d'une attaque, qui peut devenir un allié et qui doit être diabolisé. Tous ces problèmes doivent être étudiés, en tenant compte des intérêts de pays occidentaux. On ne doit pas oublier que pendant la période de la guerre entre l'Iran et l'Irak, l'image de Saddam Hussein dans les médias occidentaux était presque celle d'un héros résistant au fondamentalisme. On ne devra pas oublier non plus qu'il y a trois ans, Kadhafi était encore hôte de marque du Président français.

L' intervention militaire ou politique de l'Occident au Moyen-Orient est souvent liée au pétrole et à la position stratégique. L'Irak a subi des attaques, à cause du pétrole. La Libye a été attaquée, aussi à cause du pétrole. Frappée par la crise financière, l'Occident cherche-t-il à lancer des obus pour garder la monnaie ou contrôler des ressources stratégiques mondiales avec le recours des forces militaires pour passer du passif à l'actif ? La réponse demande une observation continue.

Pourquoi la France s'est-elle portée au devant de la scène cette fois-ci ? Du fait de son passé historique dans ses colonies d'Afrique du nord ? Ou parce qu'elle s'était exprimée trop tôt, et qu'elle a découvert qu'elle avait tort au début, il fallait s'en tenir à sa position initiale pour l'abandonner après, quand ce serait possible, Ou bien pour les besoins des élections présidentielles ? La réponse a besoin de temps.

Les États-Unis reculent cette fois-ci au deuxième rang. On dit que c'est le résultat d'un compromis entre le réalisme du secrétaire à la défense et l'idéalisme du secrétaire d'État. Récemment, un militaire américain de haut rang a dit que le but de l'attaque militaire contre la Libye "n'est pas de changer de dirigeant". Cela laisser à réfléchir. Peut-être que les États-Unis veulent se réserver plus de choix politiques.
L'engagement en Libye trouble l'opinion américaine, L'Express, 24/03/2011.
Le temps passe, et les images quotidiennes de forces rebelles désordonnées, novices et sans commandement, sensées en finir avec Khadafi avec le seul appui aérien américain, suscitent l'anxiété de l'opinion car elles impliquent soit la victoire de Kadhafi et ses possibles représailles terroristes, soit l'engagement plus profond des États-Unis en Libye. Après l'Irak, et l'Afghanistan.

Robert Gates, secrétaire à la Défense confie lui-même, en guerrier réticent proche de la retraite, sa crainte que le "désordre au Proche-Orient n'exacerbe les différents ethnique, tribaux et sectaires".
Dmitri KOSSYREV, Robert Gates remet la Libye entre les mains du peuple libyen, RIA Novosti, 24/03/2011.
Le ministre américain de la Défense Robert Gates, en visite à Moscou, a annoncé dans une déclaration sensationnelle à l'issue de son entretien avec son homologue russe Anatoli Serdioukov que : "les opérations militaires actuelles en Libye seront considérablement réduites d'ici quelques jours", que "l'avenir de la Libye est entre les mains du peuple libyen, et que c'est à lui de décider." Le fait que cette déclaration ait été faite dans la capitale russe est certes une coïncidence. Mais même si ce n'est qu'une coïncidence, c'est un fait réjouissant. On se souvient immédiatement que Moscou n'a pas bloqué la résolution n°1973 du Conseil de sécurité des Nations Unies avant tout parce que les voisins arabes de la Libye en ont été les initiateurs. Mais la Russie ne l'a pas pour autant soutenue car beaucoup de choses restaient floues, à savoir notamment comment cette résolution serait utilisée, avant tout pas les États-Unis. Et voici le résultat. Les "exécutants" de la résolution abandonnent avec une rapidité surprenante leur entreprise qui a commencé à aller de travers.

Quelle est l'opinion de la société américaine au sujet des événements autour de la Libye ? Mais c'est qu'il est préférable de donner la parole aux collègues du Washington Post sans commentaires.

"Après une seule journée d'opérations, le chef d'état-major interarmées de l'armée américaine l'amiral Mickael Mullen épuisé apparaît dans toutes les émissions, à l'exception d'Animal Planet, pour dire que l'opération qu'il n'approuvait manifestement pas pourrait se terminer ainsi : le colonel Kadhafi, dont le président américain a dit qu'il devait partir, pourrait rester au pouvoir… La Libye doit être et demeurer une mission humanitaire et il serait préférable que cette tâche soit assumée par une administration [américaine] unie qui… pourrait avancer des arguments pour ne pas s'engager dans cette affaire ou, au contraire, s'y impliquer. Au lieu de cela, l'administration avance à la fois les arguments contradictoires, pour et contre."
C'était le célèbre chroniqueur Richard Cohen.

En voici d'autres : "les objectifs américains de guerre sont indissociables de… la destruction de ce régime. Ainsi notre but est de créer un vide politique qui, on l'espère…, sera rempli de bonnes choses. Mais si les rebelles n'arrivaient pas à vaincre Kadhafi, serions-nous prêts à compenser leur insuffisance militaire par nos fournitures ? Et si la décapitation du régime du colonel libyen avait le même effet que l'élimination de Saddam Hussein, c'est-à-dire un chaos sanglant, quelles seraient nos obligations en cas de vendettas tribales que nous aurions probablement nous-mêmes provoquées ?"
C'était George Will, un autre chroniqueur tout aussi réputé.
Libye : le rôle de la Ligue arabe critiqué, Xinhua, 24/03/2011.
Face à une coalition multinationale tentant d'imposer une zone d'exclusion aérienne au-dessus de la Libye par des tirs de missiles et des bombardements, le rôle de la Ligue arabe commence à susciter des critiques de plus en plus vives.

Nombre d'analystes estiment que la Ligue arabe a commis une erreur en consentant à une intervention militaire étrangère en Libye, une campagne sur laquelle pèsent les intérêts pétroliers des pays participants et qui risque d'affecter la stabilité dans la région.

L'aval de l'organisation arabe était nécessaire pour le déclenchement de l'intervention, pour qu'elle ne soit pas perçue comme une opération de l'Occident contre le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi, ni comme une nouvelle guerre d'Irak, estime un spécialiste local.

Juste après le déclenchement de l'opération "Aube de l'Odyssée", le secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa, a déclaré que les attaques allaient au-delà de la résolution du Conseil de sécurité sur l'établissement d'une zone d'exclusion aérienne au-dessus de la Libye.

Des sources de médias arabes ont affirmé que M. Moussa tentait de faire marche arrière, après avoir appris qu'il y avait des victimes civiles ainsi qu'une réaction négative forte à l'égard de l'intervention militaire occidentale dans un conflit intérieur.

"Nous assistons au même scénario qu'en Irak : les forces occidentales utilisent le mandat de la Ligue arabe pour imposer une zone d'exclusion aérienne et commencent immédiatement à bombarder l'ensemble des infrastructures", a noté un diplomate africain, qui a requis l'anonymat, arguant qu'il n'était pas autorisé à s'exprimer sur ce sujet.

"L'objectif principal de ces pays vise le pétrole et la richesse de la Libye. Leurs actions vont créer des conflits entre les deux factions libyennes tout en les affaiblissant et les rendant très dépendantes de l'Occident", a-t-il ajouté.

La Ligue arabe tente de revenir en arrière sur sa position, mais l'erreur politique concernant la Libye est déjà commise, a affirmé Eli Foodai, de l'Institut Truman à Jérusalem.

La Ligue arabe n'a pas évalué attentivement l'environnement stratégique à long terme de la région lorsqu'elle a accepté l'intervention occidentale, ont indiqué des observateurs arabes.

Abu Yousef, un chercheur à Ramallah, estime que l'Occident tente de provoquer un changement de régime plutôt qu'un processus démocratique.

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