Il y a un mois, des millions de personnes sont descendues dans les rues pour manifester leur colère contre les actions militaires israéliennes à Gaza, et de tous les continents un même cri s’est élevé, exigeant l’arrêt de cette tuerie.
De la gauche à la droite, la réaction en Israël a été : «C’est une guerre existentielle, et qu’importe ce qu’en disent les non juifs ! Après tout, tous sont antisémites de toute façon.» Et ce qui a encouragé cet hermétisme israélien fut le soutien - ou pour le moins le silence délibéré - des États-Unis, de l’Europe et des États arabes, d’abord et avant tout, de l’Egypte.
Quand on met un pays en position au-dessus des lois et au-dessus de tout ce qui fait un comportement civilisé, quand on accepte de sa part un comportement barbare, il n’est pas étonnant que ce pays outrepasse toutes les règles, et morde même ceux qui lui veulent du bien. C’est ce qu’ont appris la semaine passée, et d’une brutale façon, les États-Unis et l’Egypte.
Le chef des Renseignements égyptiens, le général Omar Suleiman, avait œuvré dur pour aller à la création d’un gouvernement d’union palestinienne et, à ce titre, il était parvenu non seulement à faire cesser les tirs de roquettes sur le sud d’Israël, mais aussi à sauver le gouvernement Fatah en Cisjordanie. De plus, Suleiman avait sacrifié de longues nuits pour arriver à un accord sur un échange de prisonniers qui aboutisse à la libération du soldat israélien Gilad Shalit. Et pourtant, les responsables du gouvernement israélien, d’Olmert à Livni, ne se sont préoccupés que de la formation d’un gouvernement israélien et ont ignoré le travail de Suleiman, le sort de Gilad Shalit, et même celui de Mahmoud Abbas.
Et même à leur allié le plus important dans la région, la Turquie, les dirigeants israéliens ont réussi à causer des problèmes ! C’est comme s’ils voulaient dire, «Qu’avons-nous à faire de nos ennemis, qu’avons-nous à faire de nos amis, nous ferons comme nous le souhaitons et si vous nous cherchez, rappelez-vous Gaza et ce que nous sommes capables de faire quand nous décidons d’outrepasser toutes les règles !». Il ne faut se tromper : il s’agit là d’une politique insensée qui va attirer la catastrophe sur Israël, et dans un avenir pas si lointain. Quand un pays part sur l’hypothèse que le monde est de toute façon contre lui et qu’il ne peut compter que sur sa force militaire, quand il n’y a aucune opposition israélienne pour crier «Arrêtez immédiatement, vous nous mettez en guerre contre le monde entier, vous nous isolez dans l’opinion publique internationale comme dans la communauté des nations, et vous fermez la porte à toute possibilité d’existence pacifique dans la région.», alors le compte à rebours a commencé.
Une véritable folie, la folie du pouvoir s’est emparée de la société israélienne tout entière, et non seulement du duo Lieberman/Netanyahu sur lequel il est trop facile de projeter nos craintes. Si les gens l’ignorent, nous devons leur suggérer de lire sur le sort des Empires qui se sont crus capables de gouverner le monde entier, d’instaurer un règne de mille ans, d’implanter des colonies sur trois continents. Qui se souvient de l’Empire français en Afrique, à part les descendants de ses victimes ? Qui se souvient de l’Empire britannique dans l’Asie du sud ? De l’Indochine française ?
Se moquer de la Turquie, dénigrer le chef des Renseignements égyptiens, mettre en colère l’émissaire américain pour une cargaison de pâtes alimentaires (oui, même ça) pour Gaza, sont les signes d’une perte structurelle des sens à laquelle les trois grands partis d’Israël collaborent (si le Parti travailliste peut encore être appelé grand parti), outre l’élite israélienne tout entière et une grande majorité des électeurs.
Le consensus national général israélien qui règne en dépit d’une position mondiale presque unanime est un problème terrifiant, et le millier de dirigeants qui ont exprimé leur émotion et leur horreur devant les crimes israéliens dans Gaza ne cesse de parler d’un «autre Israël», comme il existait lors de la guerre du Liban en 1982 et la première Intifada [1987].
Mais s’il y a effectivement d’autres Israéliens, il n’y a malheureusement pas d’autre Israël au-delà de cet État de criminels de guerre, et de la société qui leur a apporté son soutien.
Michel Warschawski
16 mars 2009
Publié par Info-Palestine selon Centre d’information alternative.
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