En février de cette année [2008], la revue nord américaine Forbes a publié un long article qui qualifiait la Chine de «pays le plus important de la planète», non seulement à cause de son énorme population, mais du développement accéléré de son économie, en citant comme exemple de sa puissance, le fait qu’une entreprise d’État, Petrochina, s’était convertie en la plus grande entreprise du monde, et que selon toute probabilité la Chine dépasserait, à la fin de 2008, l'Allemagne en devenant le plus grand pays exportateur du monde. Il aurait pu ajouter que les réserves de devises chinoises sont les plus grandes du monde (1.550.000 millions de dollars) et que de ses universités sortent chaque année plus de quatre millions de diplômés. De même la Chine compte la plus grande banque du monde (ICBC), la plus grande entreprise de téléphonie mondiale (China Mobile), le plus grand nombre d’internautes et de téléphones de la planète, elle est le principal fabriquant mondial de téléviseurs plats et d’ordinateurs, et elle a le plus élevé taux de croissance annuel du PIB. Si en 2007, l’économie nord-américaine dépasse 21,36% du PIB mondial et l’économie de la Chine 10,83% (toujours en parité de pouvoir d’achat), on calcule que dans cinq ans les États-unis produiront 19,22% du PIB mondial et la Chine 14,69%. Tandis que les États-unis déclinent, la Chine continue de croître.
Forbes a conclu sons article en affirmant que le XXIe siècle va être celui de la Chine. Cette conviction, qui fait son chemin dans la pensée politique nord-américaine, est très présente dans les objectifs stratégiques de Washington et s'accompagne de plaintes constantes de la part des États-Unis contre la puissance asiatique. Ainsi, le déficit commercial avec la Chine est utilisé pour justifier les problèmes croissants de l’économie nord-américaine et l’augmentation du chômage aux États-unis (bien que la Chine s’acquitte scrupuleusement de ses obligations envers l’OMC) ; l’augmentation du prix du pétrole est justifié par la croissance des importations chinoises, malgré l’évidence de l’auto-approvisionnement chinois. De plus, la Chine a cessé d’être exclusivement un pays exportateur de produits bon marché pour se convertir aussi en exportateur de biens de haute technologie.
Cette nouvelle réalité économique commence à avoir des répercussions politiques et elle induit des changements dans les relations internationales et dans la force militaire relative des grandes puissances planétaires. Ainsi le mois de juin dernier, le Stockholm International Peace Research Institute, SIPRI, a publié son rapport 2007 où il déclaré que le budget militaire chinois est le troisième en importance du monde. Le IISS (The International Institute For Strategic Studies, de Londres), avance des opinions similaires. De ce fait, en 2007, toujours selon le rapport du SIPRI, pendant que les États-unis consacrent 547.000 millions de dollars à leur budget militaire, suivi de la Grande Bretagne avec 59.700 millions, la Chine apparaît déjà derrière ces deux pays, en destinant à sa défense 58.300 millions. La conclusion la plus importante de ce rapport était l’émergence de la Chine était justement la nouvelle d’une Chine en troisième position des dépenses militaires mondiales. Il ne faut pas oublier que ces deux instituts forment la partie du conglomérat idéologique occidental que dirige Washington, et que sous couvert d’un langage académique, ils appuient la vision nord américaine du renforcement militaire chinois.
En 2000, les États-unis ont commencé à publier un rapport annuel sur la force militaire de la Chine (Annual Report to Congress, du secrétariat de la Défense, sur le Military Power of the People’s Republic of China), qui dans ses dernières éditions, s’emploie à souligner fortement l’augmentation du potentiel militaire et stratégique chinois, la modernisation et le développement de sa technologie spatiale. Robert Gates, secrétaire de la Défense nord-américaine, a souligné dans la présentation du rapport 2007 les risques de renforcement de Pékin, en donnant corps à la “menace supposée militaire chinoise”, idée qui court toutes ces dernières années dans les rapports du Département de la Défense, dans les think tank conservateurs et dans beaucoup de publications académiques.
En effet, la Chine a augmenté son budget de la Défense et sa force militaire s’est renforcée, mais la “menace supposée militaire chinoise” est un mensonge total. Il est certain que les changements dans l’équilibre militaire en Asie, avec la consolidation de l’Organisation de Coopération de Shanghai et les sommets des pays d’Asie centrale et du sud-est asiatique avec la Chine, les accords de coopération avec Moscou et les efforts de la diplomatie chinoise jusqu’en Afrique, qui se sont concrétisés par un sommet sino-africain à Pékin, constituent des motifs d’alarme pour Washington, mais Pékin n’est absolument pas intéressé par l’idée de commencer un affrontement stratégique avec les États-unis et préfère suivre une politique internationale prudente qui vise à son renforcement économiques, ce qui nécessite des relations pacifiques et pas de tensions internationales et de guerres, bien que la Chine n’en néglige pas pour autant les impératifs défensifs du pays : rien à voir par conséquent, avec l’urgence d’une “menace militaire chinoise”, dont les inventeurs ont objectifs politiques évidents en vue de la contention du géant asiatique.
Washington ne craint pas de critiquer la politique extérieure chinoise avec des mensonges grossiers en expliquant que, pour réussir à être approvisionné en ressources énergétiques, Pékin a des relations «avec les pays qui violent les droits de l’homme», qui «soutiennent le terrorisme international» et qui «impulsent la prolifération nucléaire». Avec une bonne dose d’hypocrisie, en passant sous silence la complicité évidente nord-américaine avec des dictatures féroces, comme l’Arabie saoudite, plus encore l’occupation militaire d’un pays riche en pétrole comme l’Irak, son appui aux organisations terroristes qui favorisent ses intérêts (comme les groupes des muyahidin iraniens), et sa complicité ou son acceptation tacite avec l’augmentation des arsenaux atomiques d’Israël ou du Pakistan, Washington se permet des références critiques aux accords énergétiques des Chinois avec l’Iran et de sa recherche de conventions avec les nations africaines. Malgré sa prudence, Pékin en est arrivé arrivé à dénoncer publiquement la “grossière ingérence [américaine] dans les affaires internes chinoises”. Hong Yuan, le responsable de l’agence qui contrôle la prolifération des armements dans l’Institut d’Études Nord-américaines de l’Académie chinoise de Sciences, a souligné que les États-Unis s’en prenaient avec véhémence aux “nouvelles armes chinoises”, sans tenir en compte de la différence du potentiel militaire entre les deux pays, et le fait que la supposée «menace de la Chine» que décrit le rapport du Département de la Défense a omis de souligner que la Chine poursuivait la politique de ne pas être la première à utiliser les armes nucléaires.
À son tour, le gouvernement chinois a rappelé que, entre 2001 et 2007, les États-Unis avaient augmenté presque de soixante pour cent leurs dépenses militaires, et que celles-ci étaient passé de trente-six pour cent du total des frais militaires de la planète à presque moitié du total mondial. Pékin mettait le doigt sur la plaie après avoir remarqué que les États-Unis dépensent dans leur armement et leurs armées autant que presque le reste des deux cents pays du monde réunis. Il faut remarquer que la dépense militaire chinoise représente, à peu près, neuf pour cent du budget militaire américain, et que 1,4 pour cent du PIB chinois est consacré à la défense, en face d’une moyenne de 3 pour cent des pays principaux capitalistes [Dépenses militaires, Wikipédia - SIPRI].
En novembre 2007, le secrétaire nord-américain de Défense, Robert Gates, a voyagé à Pékin pour aborder avec le gouvernement chinois la situation en Asie, les conflits internationaux et la relation bilatérale centrée sur les questions militaires. Sa mission n’a pas contribué faire baisser le ton des accusations nord-américaines. Au contraire, en mars 2008, Gates déclarait que le budget militaire chinois était plus élevé que ce que Pékin reconnaissait, sans autres précisions. Le journal The Washington Post, en arrivant à la rescousse de son gouvernement, répandait en même temps l’idée de ce que l’investissement chinois dans sa défense était “deux ou trois fois plus grand que ce qui était déclaré”, bien qu’il s’abstînt d’offrir des preuves et de tirer des conclusions pertinentes, puisque même si la dépense militaire chinoise eut été le triple de celle déclarée par Pékin, et elle représenterait encore à peine trente pour cent du budget militaire nord-américain. C’est ainsi, qu’en utilisant comme preuve leurs propres chiffres et arguments, et en leur octroyant le rôle de juge et parti, les États-Unis proclamaient, de nouveau, le danger de la “menace chinoise”. La présentation d’un nouveau Rapport du Pentagone, en mars 2008, avec des idées similaires aux antérieures, suggérait à de plus que Pékin réalisait une politique d’intrusion dans les réseaux informatiques du gouvernement nord-américain et des occidentaux, et on a laissé filtrer dans la presse internationale des nouvelles qui spéculaient même sur l’idée que Pékin pourrait avoir engagé des pirates informatiques pour saboter les systèmes des pays occidentaux, accusation qui a amené le gouvernement chinois à présenter une protestation formelle à Washington, en insistant sur le fait que la Chine, comme cela peut être vérifié dans les relations internationales, ne représente une menace pour aucun pays. Le Ministre chinois des Affaires extérieures a fait publier un communiqué où il exhortait les États-unis à respecter l’idée de «Une seule Chine», de cesser la vente d’armes à Taiwan et d’abandonner sa politique erronée face au séparatisme taïwanais. Il n’y avait pas encore eu la dernière opération conçue à Washington pour nuire au prestige et aux relations de la Chine avec le reste du monde : la campagne internationale sur le Tibet, en mettant à profit la répercussion des Jeux Olympiques de Pékin.
Dans le même mois de mars dernier, à l’occasion de la réunion du parlement chinois, l’Assemblée populaire Nationale, le président Hu Jintao (qui dirige également la Commission centrale Militaire et qui portai, significativement pour l’occasion, un habit militaire Mao) s’est réuni avec la délégation de l’armée pour insister sur la nécessaire modernisation militaire de son pays pour «garantir le progrès du socialisme chinois» et pour «contribuer au maintien de la paix mondiale». Conscient des accusations nord-américaines, les références que Hu Jintao a faites à l’utilisation progressive d’une technologie plus moderne pour répondre aux menaces possibles contre son pays, étaient la conséquence de l’analyse chinoise des dernières guerres menées par les États-Unis, depuis la première guerre du golfe contre l’Irak, jusqu’à l’invasion de l’Afghanistan et de l’Irak, en passant pour l’agression contre la Yougoslavie, où l’ambassade chinoise elle-même a été détruite par les missiles nord-américain, conséquence d’une «erreur» supposée.
En avril, à partir de sources des services secrets nord-américains a filtré dans les médias une alarmante nouvelle, où, à partir d’une image obtenue par le satellite par la compagnie nord-américaine DigitalGlobe et reproduite sur des publications spécialisées en questions militaires, on spéculait sur l’agrandissement d’une base supposée de porte-avions et sur la construction de hangars et de quais pour des sous-marins nucléaires chinois dans l’île de Hainan, au sud de la Chine. La photographie, où à peine le profil de quelques quais était aperçu, était censée apporter la preuve du renforcement militaire chinois et l’émergence d’une nouvelle menace dans la mer de Chine méridionale. Ce n’était pas un hasard, si le mois précédent, les États-Unis et le Japon avaient organisé à Washington une réunion pour examiner le renforcement de leur déploiement militaire dans la zone … pour boucler les issues de la Chine dans l’Océan Indien depuis de la Mer de Chine Méridionale. Il faut rappeler que cette mer, qui baigne presque moitié des côtes chinoises, est fermée en grande partie par l’arc que forment Taiwan, les Philippines (les deux territoires facilitent le déploiement militaire nord-américain y compris avec des bases), la grande île de Bornéo et la péninsule de Malacca, où les États-unis sont en train de renforcer leur base dans Singapour. Par le Nord, la base nord-américaine de l’île japonaise de Okinawa et l’archipel japonais lui-même érigent une barrière pour le développement de la marine chinoise et le passage de ses sous-marins. Un des accords de la rencontre entre les États-unis et le Japon a porté sur l’établissement permanent dans l’archipel nippon du porte-avion nord-américain Washington et le renforcement des patrouilles de la VIIe flotte des États-Unis agissant dans la zone. Il est évident que Pékin observe avec préoccupation ces mouvements.
En mai, le directeur de la CIA, Michael Hayden, faisait remarquer à Washington que la Chine (un “pays communiste et une puissance nucléaire” selon ses mots) était un rival sérieux économique et politique des États-Unis et alertait sur le développement de sa puissance militaire, bien qu’il considérât que cela n’impliquait pas nécessairement un affrontement à court terme. Peu de jours après que Hayden ait prononcé ces paroles, le responsable du Commandement Stratégique nord-américain, le général Jeffrey Horne, dans la réunion de un des groupes d’étude du Congrès, accusait la Chine de développer «des technologies spatiales dans des buts agressifs». Horne a alerté sur la capacité chinoise d’abattre des satellites et de développer des systèmes militaires d’alerte pour “rendre aveugle” et “ensorceler” l’ennemi et il a suggéré la nécessité que les États-Unis “protègent ses unités spatiales”. Il était évident que les mots de Horne (avec en toile de fond de la preuve fournie par la Chine, en janvier 2007, qui avait alors abattu un satellite avec un missile balistique) n’étaient pas seulement la réflexion d’un général, outrepassant un peu son rôle militaire, mais un avis du gouvernement nord-américain à la Chine et une espèce de pression sur les alliés nord-américains en Asie orientale et en Europe, devant la nouvelle force chinoise. La délibérée et systématique pression nord-américaine s’est accompagnée, à la fin de mai, de la présentation publique du rapport du département d’État sur la démocratie et les droits humains, dans lequel Washington critiquait avec dureté la politique gouvernementale chinoise, décision qui a entraîné la réplique du Ministère des Affaires Etrangères Chinoise en recommandant aux États-unis qu’ils se préoccupent de la violation des droits humains sur leur propre territoire et qu’ils cessent de les utiliser comme prétexte à propagande pour intervenir dans les affaires internes d’autres pays.
Au milieu du dernier mois de juin, le vice-président lui-même, Richard Cheney, proclamait dans une séance de la Chambre nord-américaine de Commerce que la Chine extrayait du pétrole à soixante milles de la Floride, grâce à un accord avec Cuba. Avec son orgueil habituel, Cheney s’est permis de mépriser au Parti communiste Chinois et ses mots furent interprétés comme un sérieux avis sur la croissante agressivité chinoise, qui opérait déjà à proximité des côtes nord-américaines. Malheureusement pour Cheney, et devant l’évidence du caractère erroné de ses informations, étant donné qu’aucune compagnie chinoise n’est en train de perforé des puits pétrolifères dans cette zone des Caraïbes, le vice président s’est vu obligé de rectifier quelques jours après. Mais ses paroles furent révélatrices de l’attitude du gouvernement nord-américain face à la Chine. L’ancien secrétaire nord-américain à la Défense, Donald Rumsfeld, était partisan d’une politique agressive contre la Chine, qui a été suivi, pour l’essentiel, par son remplaçant, mais Pékin ne veut pas répéter les erreurs de l’URSS et n’a pas l’intention de se laisser entraîner dans une nouvelle course aux armements mais veut concentrer ses ressources dans son développement économique.
A l’ “hypothétique menace militaire chinoise” mise en circulation par Washington Pékin a répondu en parlant de la défense de la paix et de la collaboration internationale, et de son appui aux principes de sécurité et de confiance mutuelle. De fait, depuis les années de Deng Xiaoping, la Chine a impulsé une politique extérieure de coexistence pacifique, basée sur cinq principes : premièrement, le respect mutuel de la souveraineté et l’intégrité territoriale ; secundo, l’adoption d’une politique de non agression ; tertio, la non ingérence dans les affaires internes des autres pays ; quarto, l’égalité dans les relations ; et cinquo, le mutuel avantage. Le président Hu Jintao applique ces principes, qui, avec le renforcement du pouvoir économique global de Pékin, a porté la conception stratégique chinoise à formuler la thèse de «l’émergence pacifique» de la Chine. Si historiquement la naissance de nouvelles puissances planétaires est toujours allée avec la conquête, la guerre et du colonialisme, Hu Jintao nourrit la thèse de ce que la Chine a besoin d’un climat pacifique de concorde internationale pour assurer son développement économique, parce que, dans les relations avec les États-Unis, elle opte pour une politique qui a promu la confiance entre les deux pays, sur des bases égalitaires, dans une tentative de compréhension des intérêts stratégiques d’une autre partie. Au XVIIe Congrès du Parti communiste Chinois, Hu Jintao a répondu aux accusations sur la supposée «menace chinoise», en optant pour une politique de développement pacifique, en défendant le multilatéralisme, et en repoussant la tentation de chercher les seuls intérêts chinois.
Face aux accusations nord-américaines, il est certain que la Chine prend en compte les intérêts stratégiques étasuniens, dans la conviction qu’il s’agit là de l’unique chemin susceptible de consolider les relations pacifiques internationales (bien qu’elle n’ait cessé de répondre avec fermeté aux tentatives extérieures pour stimuler des processus d’indépendance au Taiwan, au Tibet et Xingjiang : ce sont les lignes rouges que Pékin ne permettra pas qui que ce soit de franchir). Elle continue de faire délibérément profil bas dans la politique internationale (malgré une plus grande présence diplomatique chinoise dans tous les forums) pour assurer la paix. C’est une évidence que face aux guerres nord-américaines de conquête et son expansion militaire constante dans le monde (de nouvelles bases pour son armée en Europe, en Asie et à l’Afrique, un agrandissement de l’OTAN, une augmentation du budget de Défense, etc.), mêmes les stratèges les plus durs de la «supposée menace militaire chinoise» ne peuvent alléguer un seul cas d’acte agressif (et encore moins militaire) de Pékin envers d’autres pays, puisqu’ils se voient obligé de recourir à la “question du Taiwan” qui, évidemment a une claire dimension interne chinoise a pour spéculer sur les propos de Pékin.
À la fin juin, lors de la réunion récente de Condoleezza Rice et de son homologue chinois, le ministre des Affaires Etrangères Yang Jiechi, Rice a déclaré publiquement l’opposition nord-américaine à l’“indépendance du Taiwan”, mais les États-Unis ne renoncent pas à utiliser cette carte à leur convenance dans leurs relations avec Pékin. Tandis que, une fois de plus, Yang Jiechi démontrait l’effort chinois pour améliorer sa communication avec les États-Unis, en contribuant ainsi au développement de relations pacifiques internationales, Rice ne s’est pas privée de rappeler les différences qui subsistent entre Washington et Pékin. Cependant, la réalité têtue complique, bien qu’elle ne l’empêche pas, l’effort de propagande nord-américain. La CIA elle-même, qui élabore une partie des programmes de harcèlement vers la Chine (au Tibet, Xingjiang, en Afrique et dans d’autres lieux) s’est vu obligée d’admettre le budget de défense de Pékin pour 2008 (d’environ 65.000 millions de dollars, selon l’agence), est à peine la dixième partie du budget militaire nord-américain. Il n’y a pas il doute malgré tout que la grande lutte pour la supériorité entre les États-Unis et la Chine explique les différentes opérations de propagande (conçues par les services secrets nord-américains). Les accusations, portées contre la Chine pour sa responsabilité supposée dans la crise du Darfour au Soudan, occultent le fait Pékin a conseillé au gouvernement soudanais la pleine collaboration avec l’Union Africaine et avec l’ONU pour la résolution de la crise et qu’elle a nommé même un représentant spécial pour le Darfour avec une fonction semblable à la médiation que Tony Blair réalise sur la question palestinienne. Sans oublier que la présence croissante chinoise en Afrique trébuche sur des incidents confus et des provocations : en janvier 2007, neuf travailleurs chinois d’une entreprise pétrolière sont morts au Nigeria, et en avril de la même année, un groupe obscur querillero de Somali a attaqué les installations de la société pétrolière chinoise Zhongyuan Petroleum Exploration à Abole, Ogaden éthiopien, en causant soixante et quatre morts [Abole oil field raid]. Ce sont quelques exemples, mais il est évident que ces incidents et d’autres semblables d’origine confuse, cherchent à rendre difficile la présence chinoise en Afrique et la consolidation de sa présence internationale.
Washington a eu une réaction alarmiste contre l’essai d'un satellite météorologique réalisé par la Chine au début de 2007, sans se préoccuper du fait que les États-unis ont depuis plus de vingt ans fait la preuve, avec des armes similaires, qu’ils avançaient de fait dans la militarisation de l’espace, et en se refusant à considérer la proposition chinoise et russe de négocier un traité pour limiter la recherche en matière d’armement spatial et pour empêcher le déploiement de ces systèmes dans le cosmos. A la critique de l’essai chinois, lié au refus de négocier l’interdiction, Washington était en train d’exiger, de fait, de la Chine et de la Russie leur assentiment au monopole spatial nord-américain, ce qui évidemment était inacceptable pour Pékin et Moscou. Cette politique du fait accompli, poursuivi par Washington, cherche l’avantage stratégique sans se préoccuper des intérêts du reste des puissances mondiales. En février 2008, on a pu le constater à l'occasion de la destruction d’un satellite espion nord-américain par un missile lancé depuis un croiseur étasunien, dans l’océan pacifique à proximité de Hawaii. Pour réaliser le lancement, conçu comme un essai pour l’installation du système antimissile nord-américain, Washington a utilisé l’excuse de ce que son satellite espion courrait le risque de choir à terre. C’est-à-dire, qu’il exige que Pékin et Moscou s’abstiennent de faire la même chose que Washington considère légitime de développer.
Pour cela, les États-Unis poursuivent leurs plans pour déployer un système antimissile centré sur leur propre territoire, avec des bases en Europe centrale (la Pologne et Tchéquie) et en Asie orientale (le Japon et la Corée), et avec des installations pour le lancement de missiles stratégiques. Ce plan peut détruire l’architecture stratégique de contrôle des arsenaux atomiques et impulser une nouvelle course aux armements, qu’aussi bien Moscou que Pékin ne veut pas entamer. Dans le même temps, les États-unis se refusent à ratifier le Traité de prohibition des essais nucléaires et rejettent l’adoption de la résolution de ne pas être le premier pays à utiliser les armes nucléaires, à la différence de ce qu’ont proclamé la Chine et la Russie. Au contraire, ils se réservent le droit du «recours préventif» de l’utilisation de la bombe atomique. Face à cette réalité, lors du sommet entre la Chine et la Russie organisé en mai à Pékin, Hu Jintao et Dmitri Medvédev ont signé un communiqué en avertissant que «la création du système global de défense antimissile nord américain altérera l’équilibre stratégique et la stabilité dans le monde», alors qu’eux établissaient les relations internationales sur le respect des «buts et des principes de la Charte des Nations Unies» sur la coexistence pacifique. Le renforcement des noeuds entre Moscou et Pékin et leur exigence de respect de la souveraineté et de l’intégrité de tous les pays était une critique implicite faite aux États-Unis, sans les citer, étant donné qu’ils sont le seul pays, dans dernières années, qui a envahi et occupé d’autres pays. Parmi les questions sur lesquelles Hu Jintao et Medvédev Hu ont manifesté l’accord de leur gouvernement, il y avait aussi le rejet de ce que les droits de l’homme soient invoqués comme prétexte pour intervenir dans les affaires internes d’autres pays, leur appui au maintien de la politique de non prolifération nucléaire au monde, à l’utilisation pacifique de l’espace, et son opposition à ce que des systèmes d’armes se déploient dans le cosmos. Il était évident que ces positions sont contradictoires avec la thèse de la «menace militaire chinoise».
En dernière instance, la périlleuse métamorphose du monde cache la tentative nord-américaine d’arrêter sa décadence constante mais lente et de limiter l’avancement chinois. Par cela, ils perçoivent avec hostilité l’appui ouvert de Pékin à Cuba, ses relations avec le Venezuela et d’autres pays de l’Amérique latine, et le développement d’échanges avec l’Afrique, où la Chine s’est engagée à donner des aides de la valeur de dix milliards de dollars. A cela il faut ajouter, les difficultés nord-américaines avec l’Inde, où le gouvernement de Manmohan Singh n’a pas pu approuver l’accord de coopération nucléaire avec les États-Unis grâce à l’opposition communiste indienne (qui considère le dit accord comme contraire aux intérêts nationaux et à une politique extérieure indépendante), font douter de la viabilité du plan nord-américain d’être appuyé en Inde pour limiter la puissance chinoise.
La Chine bouge. Après les avancée sur la “question dite nucléaire dans la péninsule coréenne”, où ils participent aux négociations la Chine, les États-Unis, la Russie, le Japon et les deux Corée, le gouvernement de Pékin a recommencé à avancer un pion. La proposition chinoise à Séoul d’ouvrir des conversations avec la Corée du Sud pour consolider la paix dans la région, a été accompagnée par le porte-parole chinois des Affaires Extérieurs de la considération de ce que la présence militaire nord-américaine dans la zone est «obsolète». Pékin poursuit l’amélioration des relations de la Chine avec le Japon (qui est son principal partenaire commercial) depuis la visite de Weng Jiabao a Tokyo en avril 2007.
Malgré tout, la Chine comprend qu’elle continue d’avoir un développement insuffisant de son industrie militaire et que ses ressources ne peuvent pas être comparées à celles des Nord-Américains et des Russes. Son Aviation et sa Marine ont peu d’ importance en regard d’un pays de la taille de la Chine, mais elle compte sur des sous-marins nucléaires et sur une force appréciable de missiles balistiques intercontinentaux, bien qu’en nombre beaucoup plus réduit que les arsenaux russes et nord-américains. Pékin dispose d’environ quatre cents ogives nucléaires, alors que les États-Unis possèdent environ cinq mille quatre cents, qui se réduiront à quatre mille cinq cents à la fin de 2012 (bien que celles qui sont retirées ne seront pas détruites mais seront stockées !). Au contraire du passé, quand elle considérait la collision inévitable, aujourd’hui la pensée stratégique chinoise ne table pas sur la possibilité d’affrontements militaires avec d’autres pays, sans que par autant Pékin perde de vue que le harcèlement en Iran, et la guerre secrète qui y a déjà commencé, peut altérer la situation mondiale.
La Chine représente un double défi pour les États-unis : par sa condition de pays émergent appelé à devenir, si Washington ne peut pas l’empêcher, l’économie la plus puissante de la planète, et par son pari, qui se maintient en vigueur, pour un “socialisme avec des caractéristiques chinoises”. Si la réforme initiée par Deng Xiaoping présente des risques évidents et des contradictions selon la théorie traditionnelle du socialisme que nous ne pouvons pas traiter ici on ne peut nier que son succès a porté le développement et la consolidation du pays et l’émergence de la Chine comme nouvelle grande puissance, dans un monde dangereux qui observe en retenant son souffre sa propre métamorphose.
Higinio Polo
20/10/2008
Traduit par Danielle BLEITRACH pour Changement de société.
Traduction modifiée par Serge LEFORT pour Monde en Question.
Publié par Rebelión.
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