- Faîtes-vous la prière ?
- Pratiquez-vous le jeûne du ramadan ?
- Avez-vous fait le pèlerinage à la Mecque ?
- Aimez-vous la France ?
Autant de questions qu’un fonctionnaire, agissant au nom de la République, et à l’initiative des plus hautes autorités de l’Etat, a osé poser aux salariés de ROISSY, trahissant ainsi l’absence de griefs à leur encontre sinon qu’ils sont tous ou qu’ils seraient de confession musulmane.
Non ! Il ne s’agit pas d’un scénario imaginé par les Indigènes pour salir la République ! C’est l’interrogatoire concocté dans le cadre de l’oppression croissante que subissent les musulmans de France en ce début du 21ème siècle. C’est, pour la première fois en temps de paix depuis le régime de VICHY et la période coloniale, qu’au sein même de l’Hexagone, est commis un acte délibéré de discrimination raciale assumé par l’Etat sans autre dissimulation que d’invoquer des raisons de sécurité qui ne trompent personne.
Nous pouvons désormais affirmer que les « loups » sont dans la demeure : pas ceux que l’on avait accusé injustement, ces jeunes musulmans de banlieue, lors de la sinistre affaire du RER D, mais ces « loups » qui envahissent l’espace public, les institutions politiques, médiatiques et intellectuelles.
En France, l’heure est grave, le mal est profond. Il a suffit qu’un petit candidat d’extrême droite publie un brûlot islamophobe pour que la république avoue... allons lâchons-nous... pour qu’elle nous dégueule sa vérité au visage ! Non pas son masque d’égalité et de fraternité universelle mais le racisme profond qui la mine : les musulmans sont un danger pour l’ordre de France et sa sécurité. Cela avait déjà été suggéré plus ou moins directement dans les actes ou les paroles de tel ou tel personnage de la classe politique, de droite comme de gauche. La spirale islamophobe, qui s’est déchaînée ces dernières années, vient d’atteindre un nouveau palier. Peut-être pas le dernier, sans doute pas le plus haut. Désormais, il n’y a plus de tabou. L’Etat français a pris la responsabilité de briser les quelques digues qui contenaient le déclenchement de la détestation raciale.
Des dizaines d’employés musulmans des aéroports de Roissy (agents de sécurité, bagagistes, personnels d’entretien ou de nettoyage, à la traction sur les pistes ou dans les hangars des sociétés de messagerie, serveurs...) se sont vu retirer leur badge de travail, délivré par la préfecture et qui leur permettait d’accéder aux zones réputées sensibles en termes de sécurité. Ils sont désormais interdits de travail, des procédures de licenciement sont en cours. Leur éviction a été accompagnée de propos, d’humiliations et de chantages, dont le caractère raciste est sans équivoque. Les arguments spécieux des autorités préfectorales et policières selon lesquels ces salariés auraient été liés à « des mouvances fondamentalistes à visée potentiellement terroriste » s’écroulent d’eux-mêmes.
A priori suspects parce que musulmans, ils ont subi d’infâmes interrogatoires dont le seul objet était de mesurer leur respect des préceptes de la foi islamique. Les questions qui leur ont été posées n’ont de rapport avec les impératifs sécuritaires invoqués officiellement que si l’on admet que le seul fait d’être musulman est criminogène. Pour l’Etat, tout musulman est désormais « potentiellement terroriste » ! Un intellectuel médiatique n’avait-il pas déclaré que trois millions de musulmans en France, c’est trois millions de terroristes ?
Un musulman est présumé coupable. Ce n’est plus à l’administration de démontrer sa culpabilité mais au musulman de prouver son innocence comme l’a reconnu Jean-François Cordet, le préfet de Seine-Saint-Denis, qui a considéré que ces personnes n’avaient pas apporté la preuve d’un « comportement insusceptible de porter atteinte à la sûreté aéroportuaire ».
Et que dire du « principe de précaution » invoqué par le ministre de l’Intérieur, candidat à la magistrature suprême, sinon qu’il s’apparente ici à une mesure sanitaire contre un corps étranger qui menacerait la France, une mesure de purification ethnique du personnel, au sens littéral du terme. Ce ne sont pas, en effet, leur supposée activisme politique qui motive le recours à une telle terminologie contre les salariés de Roissy mais bien leurs croyances religieuses, réelles ou supposées, qui justifient, aux yeux de l’Etat, que la présence éventuelle d’un employé musulman tenté par l’action directe soit traitée par l’élimination de tous les employés musulmans comme on abat tout le troupeau pour éviter la contamination des autres cheptels.
Il ne s’agit pas là d’un simple dérapage, d’un acte isolé commis par un fonctionnaire malveillant ; il s’agit d’une action massive, délibérément raciste, voulue et mise en oeuvre par l’Etat, sur la base de ces fameuses « notes blanches » plus dignes de la police politique d’un Etat totalitaire que d’une République démocratique.
La présomption de culpabilité, l’arbitraire administratif, les sanctions d’exception sans obligation de fournir la moindre justification et appliquées à des individus pour l’unique raison qu’ils sont de confession musulmane, les mesures de type « sanitaire », ne sont pas sans rappeler le temps terrible des colonies et du Code de l’indigénat. Et tout cela avec l’approbation du ministre de l’Intérieur : « Je ne peux pas accepter que des gens qui ont une pratique radicale travaillent sur une plate-forme aéroportuaire. Je préfère qu’on ait le risque d’un contentieux parce qu’on a été trop sévère, plutôt qu’on se retrouve avec un drame parce qu’on n’a pas été assez sévère » (Nicolas Sarkozy). Paroles gravissimes qui font écho au couvre-feu instauré en 1961, par le préfet Papon, à l’encontre des seuls musulmans de Paris et qui a conduit au massacre du 17 octobre.
Aujourd’hui, comment pourrions-nous ne pas avoir peur ? Comment pourrions-nous ne pas craindre que cette histoire, cachée prudemment sous le tapis, ne se répète alors qu’à nouveau on fait le tri entre les personnes en fonction de leurs origines ou de leurs convictions religieuses, alors que les multiples expressions du racisme et de l’islamophobie polluent la sphère publique dans le silence général, alors que l’appareil judiciaire manifeste à nouveau ses défaillances et assure l’impunité aux actes racistes ? Ecartés à Roissy pour des raisons de sûreté, d’autres musulmans ne feront-ils pas l’objet de nouvelles mesures d’exclusion dans le cadre d’une politique « sanitaire » et en application de ce même principe de précaution ? Jusqu’où ira la dérive qui consiste à assimiler les musulmans à un nouvel ennemi intérieur, la cinquième colonne d’une race fourbe, guerrière et impitoyable ?
L’affaire de Roissy constitue un précédent extrêmement dangereux ; elle ne concerne pas les seuls salariés interdits de travailler ni même les seules communautés musulmanes de France. Il s’agit, bien au-delà, de l’avenir de l’ensemble de cette société et de la nature de son régime politique qui sont en cause.
Dès lors, la question qui se pose à toutes et tous est simple : voulons-nous d’un régime d’apartheid ? Voulons-nous vivre, les uns et les autres, dans la peur et la haine réciproques ? C’est parce que nous avons répondu « Non ! » à ces interrogations que nous avons créé le Mouvement des indigènes de la république.
AUJOURD’HUI :
Nous avons décidé de saisir les institutions onusiennes et européennes et nous en appelons également aux organisations internationales de défense des droits humains et à l’autorité morale de Nelson Mandela afin qu’elles mettent les autorités françaises en demeure de respecter leurs propres textes constitutionnels et législatifs et les conventions internationales qu’elles ont ratifiées relatives au combat contre le racisme sous toutes ses formes et au respect des droits humains.
NOUS EXIGEONS :
Mouvement des indigènes de la république
14 novembre 2006
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