5 octobre 2008

Un basculement stratégique de l'économie

L'Argent Dette de Paul Grignon

Source : Vimeo
Celui qui croit qu'une croissance exponentielle peut continuer indéfiniment dans un monde fini est soit un fou, soit un économiste. Kenneth E. Boulding


Les Etats vont intervenir, RFI
Il n’y aura pas de plan à l’américaine pour résoudre la crise financière en Europe. Le sommet des quatre pays européens membres du G8 a cependant l’intention d’intervenir pour stopper la crise. Angela Merkel, la chancelière allemande, Gordon Brown, le Premier ministre britannique, Silvio Berlusconi, le président du Conseil italien et Nicolas Sarkozy, chef de l’Etat français et président en exercice de l’Union européenne se sont mis d’accord, malgré des approches différentes de l’économie, sur un certain nombre de thèmes pour enrayer la crise.

Commentaires : En clair, les principaux états de l'Europe s'empresse de rassurer les banques : «les profits seront toujours privatisés et les pertes toujours mutualisées» - un système dans lequel le capital est toujours gagnant, et les travailleurs toujours perdants.


Europe désunie à l’Elysée, Libération
L’épisode du «fonds de secours européen» doté de 300 milliards d’euros, qui «s’est évaporé avant même d’avoir été proposé», selon l’expression d’un diplomate européen, a montré que Berlin et Paris n’étaient pas sur la même longueur d’onde : «Il faut faire attention aux effets d’annonce que l’on ne peut pas honorer car cela ajoutera la panique à la panique.» D’où la sortie préventive de Berlin qui a voulu tuer dans l’œuf toute idée d’un plan Paulson à la sauce européenne. Outre-Rhin, on se méfie comme de la peste de tout ce qui pourrait contraindre un jour les Allemands à payer pour les banques des autres. «Si vous mettez au centre d’une pièce un sac d’or, tout le monde va trouver une raison pour piocher dedans», ironise un diplomate.

Commentaires : Tout est dit : c'est la course au pactole des plans de “sauvetage” des banques en faillite... pour soi-disant sauver l'économie.


Le plan Paulson creusera la dette américaine à 70% du PIB, NouvelObs
La dette américaine devrait ainsi passer de 9.646 milliards de dollars au 31 août, à plus de 10.000 milliards en 2009.
L'analyste David Song, de DailyFX, avait, pour sa part, jugé que le plan "pourrait aider à restaurer la confiance dans les marchés financiers, mais à un prix très élevé pour le gouvernement, qui va augmenter sa dette à 11.315 milliards de dollars".

Commentaires : Les chiffres de la dette américaine sont sous-estimés.
«La ministre française de l'Economie, Christine Lagarde, s'était déclarée "très contente" de l'adoption de ce plan de sauvetage», car ce sont aussi travailleurs des pays créditeurs (le Japon et la Chine, mais aussi la France) qui paieront la facture.


La Chine prête à coopérer avec les Etats-Unis pour stabiliser le marché financier international, Chine Informations
Un porte-parole de la Banque populaire de Chine, banque centrale chinoise, a déclaré samedi à Beijing que la Chine était prête à renforcer la coordination et la coopération avec les Etats-Unis afin de surmonter les récentes difficultés et stabiliser le marché financier international.

Commentaires : On nous disait le contraire il n'y a pas très longtemps (RFI). Marc Fiorentino pronostiquait, à la même époque (janvier 2008), qu'il fallait «s’attendre à une récession en Chine, qui ne tiendra sans doute pas jusqu’aux Jeux olympiques» (20 Minutes).

Il est plus que probable que «cette crise sonne le début d’un bouleversement mondial annoncé, l’actuelle troisième puissance économique mondiale (la Chine) et créancière de la première (les Etats-Unis) se positionnant pour prendre le leadership économique du monde de demain» (Rue89).


Géo-économie mondiale : Un basculement stratégique, René Naba
Sur fond d’un paysage sinistré de l’économie occidentale, marqué par de faillites retentissantes de grands établissements de renom tant aux Etats-Unis qu’en Europe, un basculement stratégique s’est opéré en 2008 au niveau de la «géo-économie» mondiale avec la recomposition de la carte bancaire américaine, l’entrée spectaculaire des fonds souverains arabes ou asiatiques dans le capital de grandes sociétés américaines ou européennes et l’affirmation de plus en plus marquée des grands pays du Sud, les pétromonarchies du Golfe et le groupe Bric (Brésil, Inde, Chine et Afrique du Sud) comme acteurs majeurs de la scène mondiale.

Le nouvel ordre international tant célébré depuis l'effondrement du bloc communiste, c'est à dire depuis l'effondrement du monde bipolaire au début des années 1990, reposait sur le «consensus de Washington», une notion inventée en 1989 par l'économiste John Williamson visant à substituer aux régulations keynésiennes en vigueur depuis le krach boursier de 1929, les six nouveaux paramètres de la Mondialisation, à savoir: rigueur monétaire, rigueur budgétaire, libre-échange, privatisations, déréglementation et relance par l'investissement privé. De gré ou de force, sous l’égide du Fonds Monétaire International (FMI), des politiques d'«ajustements structurels» ont été imposées à bon nombre de pays en développement en vue de leur adaptation aux nouvelles règles du jeu, ainsi qu’à l’Union Européenne, via le «Consensus de Bruxelles».

Le sauvetage des établissements de crédit, au mépris des règles de l’orthodoxie libérale, justifiée certes par l’état de l’économie américaine, constitue une trahison de la doctrine Bush, à proprement parler un reniement qui retentit comme un camouflet. Mais la plus grande crise économique de l’époque contemporaine a confirmé, par là même, l’hypocrisie du dogme de la libre entreprise, qui se révèle être, en fin de compte, un principe sélectif et élitiste de l’interventionnisme de l’état visant exclusivement à «privatiser les gains et à socialiser les pertes», c'est-à-dire à faire supporter les pertes des spéculateurs capitalistes par la collectivité nationale des contribuables.

Quoiqu’il en soit, le constat est irréfutable: l’injection massive des capitaux de renflouage en provenance des états concurrents et non amis des économies occidentales (Chine, Inde et Japon pour l’Asie ainsi que la Russie et le Moyen-orient) aura marqué «peut être le début de la fin de l’empire américain» [...] et, à défaut d’une «guerre décisive», [...] les avatars militaires des Etats-Unis en Afghanistan et en Irak et la faillite du néo-capitalisme de l’ère post-soviétique signent, en toute hypothèse, la fin de cinq siècles de domination absolue de l’Occident sur le reste de la planète.


TERNISIEN Thierry, Une réaction en chaîne non maîtrisée, Blog LeMonde 31/01/2007 - Mediapart 05/10/2008
En pleine crise (financière, de la finance, du capitalisme ?), il est intéressant de relire la description saisissante faite en 1995 par Jean-François Billeter, dans son livre, Chine, trois fois muette. L’idée directrice est qu’à l’époque de la Renaissance s’est déclenchée une réaction en chaîne non maîtrisée. Cette réaction en chaîne a d’abord été locale, elle s’est ensuite étendue à l’Europe, puis au monde. Elle a eu des effets positifs puis de plus en plus problématiques, puis de plus en plus désastreux. Elle se poursuit sous nos yeux.

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